L'apostasie dans l'Église primitive
Joseph Fielding Smith (1876-1972)
La première apostasie commença du temps d'Adam
Lorsque le Seigneur forma la terre et son ciel, il les déclara très
bons. Il les sanctifia et, lorsque l'homme fut mis sur la terre, ce
caractère bon et saint continua (voir Gen. 1 ; 2 ; Moïse 2 ; 3). Nous
lisons ce qui suit dans les paroles de Léhi à son fils Jacob : « Et
maintenant voici, si Adam n'avait pas transgressé, il ne serait pas
tombé, mais il serait resté dans le jardin d'Éden, et toutes les choses
qui ont été créées auraient dû rester dans l'état même où elles se
trouvaient après leur création ; et elles auraient dû demeurer toujours
et ne pas avoir de fin. » (2 Néphi 2:22)
Il fut
interdit à Adam dans le jardin de manger du fruit de l'arbre de la
connaissance du bien et du mal, car s'il le faisait, il mourrait. Par
sa transgression, la mort s'abattit sur lui, et la terre, qui était
très bonne, fut maudite, de sorte qu'elle produisit des ronces et des
épines, qu'elle ne produisait pas auparavant, et c'est ainsi que la
terre et toute la création qui se trouve à sa surface participèrent à
la chute. Par le pouvoir de Satan beaucoup d'enfants d'Adam et d'Ève se
rebellèrent, car « ils aimèrent Satan plus que Dieu et les hommes
commencèrent dès lors à être charnels, sensuels et diaboliques. »
(Moïse 5:13)
Beaucoup de périodes d'apostasie dans l'histoire de la terre
L'Évangile, que le Seigneur avait donné à Adam, fut changé, les
ordonnances furent rompues et le gouvernement parfait qui lui avait été
révélé cessa d'exister. Bientôt, on se prosterna devant les idoles et
on adora des dieux imaginaires. Des hommes violents et impies
s'emparèrent du pouvoir et s'établirent comme souverains ; on constitua
des gouvernements d'hommes dans lesquels le Souverain divin était
oublié.
Alors
vint le déluge, et la terre fut purifiée. Une fois de plus les
alliances et les commandements étaient révélés à Noé pour le
gouvernement de l'homme, mais avant sa mort, la corruption avait de
nouveau balayé la terre. Le Seigneur se trouva dans la nécessité de
faire sortir Abraham de son pays de naissance et de faire avec lui et
avec sa postérité après lui des alliances qui dureraient éternellement,
et ses descendants, les enfants de Jacob, devinrent le peuple élu
d'Israël.
Avec
le temps, lorsqu'Israël eut été installé dans ses héritages à Canaan,
ces alliances furent rompues et, à cause de la rébellion des dix
tribus, qui prirent alors le nom de royaume d'Israël, ce royaume prit
fin, ses habitants furent emmenés captifs en Assyrie et ils ne
revinrent jamais de ce pays. Les deux tribus restantes furent de même
châtiées 130 ans plus tard et emmenées à Babylone. Lorsqu'elles eurent
suffisamment souffert et se furent repenties, elles eurent la
bénédiction de pouvoir retourner dans leur pays où elles
reconstruisirent le temple et pendant peu de temps servirent le
Seigneur.
Puis
on s'écarta de nouveau du Seigneur et lorsque vint le moment où le Fils
de Dieu devait apparaître, ils le rejetèrent et le crucifièrent, mais
il rétablit son Église avec un petit nombre qui était disposé à le
suivre et il les envoya dans le monde entier proclamer son Évangile.
Encore une fois, après la mort de ses apôtres, l'apostasie s'installa
et encore une fois les principes et ordonnances salvateurs de
l'Évangile furent changés à la convenance et aux idées des gens. La
doctrine fut corrompue, l'autorité perdue et une fausse religion prit
la place de l'Évangile de Jésus-Christ, tout comme cela avait été le
cas dans les anciennes dispensations, et les gens furent abandonnés aux
ténèbres spirituelles.
L'apostasie après le midi des temps
Tout
homme intelligent peut savoir qu'après le temps des anciens apôtres, il
y eut une apostasie vis-à-vis de la doctrine et des pratiques de
l'Église primitive. L'histoire montre que la prêtrise qui avait été
organisée par notre Sauveur fut corrompue et que l'on créa des offices
qui étaient inconnus du temps des apôtres et qui sont étrangers à la
véritable Église de Jésus-Christ.
Les
offices créés par le Sauveur furent abandonnés sur la fausse
supposition qu'on n'en avait plus besoin. Les apôtres et les prophètes,
officiers dont Paul disait qu'ils devaient rester dans l'Église «
jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus à l'unité de la foi et de la
connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme fait, à la mesure de la
stature parfaite du Christ » (Éph. 4:11-14), furent abandonnés.
Les
apôtres et les prophètes cessèrent d'exister et par conséquent il n'y
eut plus de révélation ou de contact avec les cieux et on proclama que
le canon des Écritures était complet. Les vérités pures et faciles à
comprendre de l'Évangile se mêlèrent aux philosophies païennes de
l'époque, et les ordonnances de l'Évangile cessèrent de ressembler à
celles qu'enseignaient et pratiquaient les apôtres de notre Seigneur.
Les preuves en sont très visibles pour quiconque étudie l'histoire des
premiers siècles de l'ère chrétienne.
La
révolution protestante ne corrigea pas ces erreurs, car ceux qui se
détachèrent de l'Église mère continuèrent à propager ces maux, et c'est
pourquoi les mêmes doctrines et pratiques corrompues furent perpétuées
dans ces organisations protestantes. La vérité relative à la nature de
Dieu et aux relations véritables existant entre le Père et le Fils
disparut et après l'époque de Constantin, la doctrine incompréhensible
de la Trinité lui fut substituée. Cette confusion concernant notre Père
éternel et son Fils Jésus-Christ a persisté dans toute la chrétienté
jusqu'à ce jour.
Caractère universel de l'apostasie
Tous
ceux qui détiennent la prêtrise doivent bien comprendre le
développement des fausses doctrines et le changement graduel qui se
produisit après la mort des apôtres, qui transforma l'Église de
Jésus-Christ en un système aussi éloigné de l'Église primitive que les
pôles le sont l'un de l'autre. Il ne resta rien des ordonnances et très
peu de la doctrine qui avaient été données du temps du Sauveur et du
vivant des apôtres.
On
pourrait écrire de nombreux livres pour montrer les déviations par
rapport aux enseignements et au ministère originaux de l'Église. En
fait, des historiens impartiaux ont montré tout au long des siècles
comment ces changements se sont passés. De plus, certains historiens
qui étaient membres de l'Église catholique ont, peut-être à leur insu,
rendu témoignage de ces grands changements.
Si
nous avions accès à tous les documents ayant trait aux changements
ecclésiastiques des deux ou trois premiers siècles de l'ère chrétienne,
on ferait quelques découvertes très étonnantes. Les informations dont
nous disposons révèlent des situations déplorables dans le
développement des fausses doctrines, les changements d'ordonnances,
l'ordre de la prêtrise et le gouvernement de l'Église, qui montrent
bien à tous ceux qui les examinent sérieusement que, comme prédit par
les apôtres d'autrefois, il s'était produit une apostasie par rapport à
la vraie Église de Jésus-Christ.
Pierre et Paul prédirent la grande apostasie
L'apostasie ne se produisit pas tout d'un coup. Ce fut une évolution
graduelle qui commença alors que certains des apôtres vivaient encore.
Paul, à Milet, tandis qu'il prenait congé des anciens d'Éphèse, dit : «
Je sais qu'il s'introduira parmi vous, après mon départ, des loups
cruels qui n'épargneront pas le troupeau, et qu'il s'élèvera du milieu
de vous des hommes qui enseigneront des choses pernicieuses, pour
entraîner les disciples après eux. » (Actes 20:29-30)
Il
avertit les membres de l'Église de Thessalonique de ne pas se laisser
séduire concernant l'inauguration du second avènement de Jésus-Christ.
« Car il faut que l'apostasie soit arrivée auparavant, et qu'on ait vu
paraître l'homme du péché, le fils de la perdition, l'adversaire qui
s'élève au-dessus de tout ce qu'on appelle Dieu ou de tout ce qu'on
adore, jusqu'à s'asseoir dans le temple de Dieu, se proclamant lui-même
Dieu. » (2 Thess. 2:3)
Pierre
écrivit, lui aussi, disant : « Il y a eu parmi le peuple de faux
prophètes, et il y aura de même parmi vous de faux docteurs, qui
introduiront des sectes pernicieuses, et qui, reniant le maître qui les
a rachetés, attireront sur eux une ruine soudaine. Plusieurs les
suivront dans leurs dissolutions, et la voie de la vérité sera
calomniée à cause d'eux. » (2 Pierre 2:1-2)
Le paganisme vainquit peu à peu la vérité évangélique
Il est
très clair pour tous ceux qui veulent le voir, que des changements
furent apportés à la doctrine de l'Église dans les premiers siècles qui
suivirent la mort des apôtres.
Alors
peu à peu l'évêque de Rome prit la préséance sur les autres évêques et
officiers de l'Église, ce qui conduisit à la déclaration que Pierre
avait choisi cet évêque pour successeur en dépit du fait que Jean, et
peut-être d'autres apôtres, vivaient toujours. Le Nouveau Testament
montre que l'on voulait au commencement que le conseil des apôtres se
perpétuât, car Paul fut appelé à l'apostolat et d'autres, tels que
Barnabas et Jacques, frère du Seigneur, furent désignés comme tels
(voir Éph. 4:11-16 ; Actes 1:15-26 ; Rom. 16:7 ; 1 Cor. 12:28-29 ; 1
Tim. 2:7 ; Gal. 1:19) ; mais ce conseil disparut peu à peu.
Tandis
que l'Église grandissait et se répandait, particulièrement après la
mort des apôtres, de fausses doctrines s'y insinuèrent. La philosophie
païenne se mêla à la vérité et les principes et les cérémonies simples
et faciles de l'Évangile, si clairs que les gens ignorants et
ordinaires pouvaient les comprendre, furent à ce point changés et mêlés
d'erreurs, de mystères et d'une ostentation si étrangère à la doctrine
du Christ que les gens étaient éperdus et dans la confusion. De faux
instructeurs apparurent et de nouveau la prêtrise fut retirée d'entre
les hommes pour être rendue à une époque meilleure et plus favorable.
Jean vit la prêtrise reprise au ciel
Jean
l'apôtre, tandis qu'il était dans l'île de Patmos, vit venir le moment
où l'Église fut obligée de fuir dans le désert. Dans cette vision,
l'Église est représentée par la silhouette d'une femme, « revêtue du
soleil, la lune à ses pieds, et une couronne de douze étoiles sur la
tête ». « Un autre signe apparut dans le ciel... un grand dragon rouge
» qui attira à lui le tiers des étoiles du ciel et les précipita sur la
terre. Lorsqu'il eut été chassé sur la terre, le dragon, rempli d'une
grande colère, persécuta la femme et l'enfant mâle qui était né d'elle.
À
cause de la persécution, la femme reçut des ailes « pour s'envoler au
désert, vers son lieu, où elle est nourrie un temps, des temps et la
moitié d'un temps, loin de la face du serpent ». L'enfant mâle,
représentant la prêtrise, qui fut choisi pour « faire paître toutes les
nations avec une verge de fer » fut « enlevé vers Dieu et vers son
trône », pour y rester tout au long des jours sombres de la rébellion
spirituelle et de la domination satanique, ou jusqu'à ce que la terre
pût être préparée pour son retour pour recevoir un pouvoir juste et
légitime (voir Apoc. 12).
Ce
retour de l'Église et de la prêtrise dut être retardé jusqu'à une
époque de liberté religieuse et pour venir dans un pays consacré à la
liberté religieuse.
Il n'y avait que le Rétablissement qui pouvait guérir l'apostasie
Joseph
Smith était parfaitement logique dans la voie qu'il suivit. Le fait
qu'on ne pouvait trouver en 1820 sur la terre une organisation qui
ressemblât en quelque sens que ce soit à l'Église primitive et qui
prétendît avoir reçu l'autorité est quasiment incontestable. Si
l'Église devait être rétablie avec ses clefs et sa prêtrise, il fallait
que les cieux s'ouvrissent et que des messagers venus de la présence du
Seigneur se rendissent sur la terre. L'homme n'a pas l'autorité de
faire l'Église pour le Seigneur, et le Seigneur n'est pas tenu
d'accepter les organisations faites par l'homme avec leurs règles. Ses
voies ne sont pas les voies de l'homme, et lorsque les hommes
s'efforcent de s'organiser d'une manière religieuse, leur autorité ne
peut aller que là où s'étend le pouvoir de l'homme et par conséquent
toutes ces organisations doivent échouer dans leur effort pour donner
aux hommes les bénédictions du salut.
Il y a une part de vérité dans toutes les Églises
Toutes
les Églises enseignent une certaine vérité, qu'elles professent croire
en Confucius, en Bouddha, aux dieux grecs ou romains ou à n'importe
quoi d'autre ; sinon leurs Églises ne dureraient pas un mois. Le fait
qu'elles enseignent une certaine vérité ne fait pas d'elles l'Église de
Dieu. Il n'y a qu'une seule Église de Dieu.
Source : Joseph Fielding Smith, Doctrine du salut, volume 3, chapitre 14