La version du roi Jacques (King James Version) de la Bible



D. Kelly Ogden




Dans les divers pays où elle est installée, l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours utilise une traduction de la Bible dans la langue locale. Dans les régions d’expression anglaise, elle utilise la King James Version (ou Authorized Version) (KJV), principalement parce que c’était le texte anglais de base utilisé par le prophète Joseph Smith et parce que les dirigeants suivants de l’Église ont approuvé son utilisation. L’Église ne prétend pas que la KJV est parfaite, mais elle est actuellement la version anglaise préférée et elle a été utilisée dans l’édition de 1979 et dans les impressions ultérieures de l’édition de l’Église de la Bible.
 
Les livres de la Bible ont été écrits à l’origine en hébreu, en araméen ou en grec. Il n’existe aujourd’hui aucun manuscrit biblique original, mais ils ont été copiés et traduits en beaucoup de langues dans l’Antiquité. Beaucoup de papyrus et de parchemins anciens sont parvenus jusqu’à nous. De nombreuses traductions modernes ont été faites à partir de ces documents.
 
De 1604 à 1611, cinquante-quatre savants ont travaillé pour créer la KJV. Ce n’était pas la première traduction en anglais. En 1382, John Wycliffe avait traduit la Bible à partir de la Vulgate latine ; une édition révisée avait été publiée en 1388. De 1523 à 1530, William Tyndale traduisit le Pentateuque de l’hébreu et le Nouveau Testament du grec. Plus tard encore dans les années 1500, d’autres traductions apparurent, notamment la Bible protestante de Genève en 1560 et la Bishop’s Bible en 1568. La première eut du succès auprès des laïcs et la dernière auprès des évêques protestants. La Bible catholique de Reims-Douai fut achevée en 1609 (l’Ancien Testament en 1582, le Nouveau Testament en 1609) sur la base de la Vulgate latine.
 
Dans le but d’aplanir les différends entre Anglicans et Puritains, le roi James chargea un groupe de savants de créer une version de la Bible dont l’utilisation serait autorisée dans les Églises anglaises. Ils utilisèrent les meilleurs textes dont ils disposaient, principalement « le texte reçu du Nouveau Testament dans les éditions multilingues (« polyglottes »), présentant les Ancien et Nouveau Testaments en hébreu et en grec respectivement, et d’autres langues. La lignée longue et respectée des Bibles anglaises fut aussi diligemment comparée et utilisée.
 
Le résultat, c’est-à-dire la King James Version, fut publié en 1611. Diverses éditions de la KJV parurent tout au long des années 1600, ce qui donna lieu à de nombreuses erreurs d’impression. Les éditions de Cambridge (1762) et d’Oxford (1769) présentaient un texte révisé, une orthographe mise à jour, une ponctuation corrigée, des italiques accrus et des notes marginales changées.
 
Beaucoup d’autres versions anglaises ont paru, particulièrement à la lumière de la découverte d’autres manuscrits anciens en commençant par la première découverte, en 1844, par Constantin von Tischendorf au monastère de sainte Catherine dans la péninsule du Sinaï. Ces traductions ont généralement essayé de rendre les textes antiques dans le langage contemporain tout en reflétant, autant que possible, la forme des manuscrits les plus anciens disponibles.
 
Les saints des derniers jours n’ont pas fait un usage intensif de ces autres traductions. Beaucoup estiment que la vulgarisation tend à diluer la nature sacrée de la Bible. Ils trouvent également que les variantes textuelles antiques sont relativement insignifiantes, ne changeant habituellement pas les messages importants de la Bible, dont la plupart sont, de toutes façons, corroborés ailleurs dans les Écritures modernes.
 
Bien que la KJV ait été sa Bible anglaise, Joseph Smith ne la considérait pas comme une traduction parfaite ou officielle ; c’est pourquoi il étudia l’hébreu et entreprit la tâche de faire une révision inspirée des Écritures. Il a fait la réflexion qu’il préférait certains aspects de la traduction de Martin Luther (HC 6:307, 364) et plusieurs autres dirigeants de l’Église au XIXe siècle ont souligné le besoin d’une plus grande exactitude et de plus de vérité dans les traductions de la Bible.
 
Les dirigeants de l’Église au XXe siècle ont donné diverses raisons au maintien de l’utilisation de la KJV : c’était la traduction courante utilisée dans le monde d’expression anglaise à l’époque du Rétablissement ; c’est sa terminologie que l’on retrouve dans tous les ouvrages canoniques ; un grand nombre de passages du Livre de Mormon, qui sont parallèles à ceux de la Bible, ont été traduits dans le style anglais de la KJV ; la traduction de la Bible par Joseph Smith (TJS) était basée sur la KJV, 90 % des versets n’ayant subi aucun changement. Tous les prophètes modernes ont utilisé la KJV, et son emploi dans toutes les publications de l’Église a permis de standardiser les annotations et les index.
 
Beaucoup considèrent la KJV comme un chef d’œuvre de la littérature anglaise. Elle a été appelée « le monument le plus noble de la prose anglaise » et elle est certainement la plus influente ; ses traducteurs « ont montré une grande sensibilité » et le résultat était « destiné à une influence et à un accueil extraordinaires » (Speiser, p. lxxiii-iv). H. L. Mencken l’a louée comme étant « probablement le plus bel écrit de toute la littérature du monde » (Paine, p. viii).
 
La KJV est une traduction relativement conservatrice. C’est généralement un point fort, bien qu’elle rende parfois les choses de manière obscure. De plus, sa langue est maintenant en partie archaïque et grammaticalement incorrecte par rapport à l’usage actuel et elle n’est pas logique dans l’orthographe des noms dans l’Ancien et le Nouveau Testament (par exemple, Isaiah/Esaias et Elijah/Elias). Des mots identiques dans les Évangiles synoptiques sont parfois traduits différemment et certaines fautes d’impression n’ont jamais été corrigées (par exemple, dans Mt. 23:24, « strain at a gnat » aurait dû être rendu par « strain out a gnat »).
 
Néanmoins, après avoir étudié plusieurs traductions anglaises modernes, le président J. Reuben Clark, fils, conseiller dans la Première Présidence, a dit en 1956 que La KJV était « la meilleure version à ce jour » (Clark, p. 33). Par exemple, il estimait que les traducteurs de la KJV avaient clairement dépeint Jésus comme étant le Messie promis et comme Fils de Dieu et acceptait le don de prophétie, la réalité des miracles et le caractère unique de l’amour du Christ, alors que les traductions modernes tendaient à favoriser les explications naturalistes à l’action divine, préféraient le mot « signe » à « miracle » et utilisaient « amour » au lieu de « charité » et « nommer » au lieu de « ordonner ». Ses idées ont influencé la plupart des saints des derniers jours. Bien entendu, toutes les traductions alternatives ne souffrent pas des problèmes relevés par le président Clark.
 

Bibliographie


Barlow, Philip L. mormons and the Bible, p. 132-62. New York, 1990.

Bruce, F. F. History of the Bible in English, 3e éd. New York, 1978.

Clark, J. Reuben, Jr. Why the King James Version. Salt Lake City, 1956.

Daiches, David. The King James Version of the English Bible. Chicago, 1941.

Metzger, Bruce M. The Text of the New Testament. New York, 1968.

Paine, G. The Learned Men, p. viii. New York, 1959.

Speiser, E. Genesis, p. lxiii-iv. Garden City, N.Y., 1964.


Source : Encyclopédie du mormonisme (Macmillan Publishing Company, 1992),  Traduction Marcel Kahne, ource www.idumea.org avec autorisation