La place de la Bible
dans l'Église de Jésus-Christ
des saints des derniers jours


Victor L. Ludlow


Article tiré de l'Encyclopédie du mormonisme
(Macmillan Publishing Company, 1992)
Traduction : Marcel Kahne
Source : www.idumea.org
avec autorisation


 
La Bible est à la base de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, constitue l’un de ses ouvrages canoniques et est acceptée comme étant la parole de Dieu. C’est un passage du Nouveau Testament dans l’épître de Jacques qui incita, en 1820, le jeune Joseph Smith à interroger Dieu au sujet des religions de son temps, sur quoi il reçut sa Première Vision dans laquelle il vit Dieu le Père et Jésus-Christ (Ja. 1:5 ; JS–H 1:11-12, 17-18). Trois ans plus tard, ce furent des passages de l’Ancien Testament et du Nouveau Testament qui furent la base scripturaire de la deuxième grande expérience spirituelle de Joseph quand l’ange Moroni lui apparut et l’instruisit en s’appuyant sur Malachie, Ésaïe, Joël, Daniel et d’autres Écritures (JS–H 1:36-41 ; JD 24:241 ; Messenger and Advocate 1, avr. 1835, p. 109). Après avoir terminé la traduction du Livre de Mormon et organisé l’Église rétablie de Jésus-Christ en 1830, le prophète Joseph Smith étudia à fond la Bible comme le Seigneur le lui avait commandé et fit la Traduction de Joseph Smith de la Bible (TJS).
 
Dès l’enfance, les saints des derniers jours sont exposés aux enseignements de la Bible. Certains passages sont soulignés dans l’enseignement des enfants. La plupart des enfants de la Primaire – et en particulier ceux qui font partie de familles qui tiennent la soirée familiale et appliquent un programme de lecture des Écritures – se familiarisent avec les événements racontés dans la Genèse, notamment les histoires d’Adam et Ève, Noé, Abraham, Jacob et Joseph. Les épisodes ultérieurs des prophètes, des juges, et des rois (tels que Moïse, Samson, Samuel, David, Salomon, Jonas et Daniel), aussi bien que ceux des personnalités du Nouveau Testament (par exemple, Pierre, Paul et Étienne), sont également des favoris. Les histoires de Débora, de Ruth, d’Esther et de Marie comptent parmi les préférées des filles. Ce sont cependant la vie et les enseignements de Jésus-Christ qui sont les plus étudiés et les plus appréciés.
 
Lorsque les saints des derniers jours se livrent à une étude répétée de la Bible, il s’en dégage des enseignements évangéliques plus riches. Outre qu’ils reçoivent l’enseignement dispensé par l’École du Dimanche, les adolescents qui suivent les cours du séminaire passent deux ans de leurs quatre années à étudier la Bible. Il en va de même des cours de religion de niveau supérieur dans les universités du Département d’Éducation de l’Église et dans les cours des instituts de religion dans d’autres universités. Les missionnaires mormons se réfèrent souvent à des passages de la Bible dans l’enseignement qu’ils donnent aux amis de l’Église. Une des preuves les plus convaincantes de l’importance de l’étude de la Bible pour les saints des derniers jours ressort du programme de l’École du Dimanche pour les adultes. Dans les cours de Doctrine de l’Évangile, deux années sur chaque cycle de quatre ans sont consacrées à la lecture, à l’étude et aux discussions sur la Bible. Une autre grande preuve de l’importance que les saints accordent à la Bible réside dans les efforts et les dépenses quoi ont été consentis pour assurer la publication de l’édition anglaise de l’Église de la Bible en 1979. Les Autorités générales de l’Église citent fréquemment la Bible dans leurs écrits et leurs discours de conférence générale et lors des conférences de pieu. La Bible constitue donc un fondement d’Évangile important pour tous les membres de l’Église, depuis les nouveaux baptisés jusqu’aux officiers présidents.
 
ENSEIGNEMENTS ET PRATIQUES BIBLIQUES PRINCIPAUX. Parmi les enseignements de la Bible, il y en a sur lesquels on insiste particulièrement. Par exemple, les saints des derniers jours n’ont aucun mal à se reconnaître dans la pratique du Dieu de l’Ancien Testament de parler par l’intermédiaire des prophètes de l’époque (Am. 3:7), une façon de faire que l’on peut constater dans l’Église d’aujourd’hui. Ils se sentent aussi proches de la maison d’Israël grâce à leur bénédiction patriarcale individuelle, qui précise habituellement une ascendance généalogique remontant à l’une des tribus d’Israël. La notion de peuple de l’alliance, telle qu’enseignée dans la Genèse, l’Exode et le Deutéronome, cadre bien avec la croyance des saints qu’ils sont un peuple de l’alliance aujourd’hui. Beaucoup de lois et de commandements, en particulier un code de santé, caractérisent l’Israël antique et son équivalent spirituel moderne dans l’Église (Lé. 11 ; D&A 89). Les errances de l’Israël antique et les difficultés à coloniser la Terre Promise ont aussi leur pendant dans le début de l’histoire des saints à tel point que Brigham Young a été qualifié de Moïse moderne (par exemple, Arrington, 1985).
 
Les enseignements du Nouveau Testament sur lesquels les saints des derniers jours mettent l’accent sont les enseignements du Sauveur et des apôtres sur les principes de base de l’Évangile, particulièrement la foi et le repentir, et les ordonnances de l’alliance, en particulier le baptême et le don du Saint-Esprit. L’organisation, les offices dans la prêtrise et l’œuvre missionnaire de l’Église du Nouveau Testament ont leurs contre-parties dans les croyances, les pratiques et l’organisation de l’Église actuelle.
 
IMPORTANCE DES TEXTES BIBLIQUES DANS LE LIVRE DE MORMON. Parmi des écrits de l’Ancien Testament, ceux de Moïse, d’Ésaïe et de Malachie retiennent particulièrement l’attention des saints des derniers jours à cause de leur place importante dans le Livre de Mormon. Les enseignements de Moïse tels qu’ils se trouvent dans le Pentateuque (avec l’expansion de Genèse 1-6 qui se trouve dans la Perle de grand prix) constituent la matière qui permet de comprendre la dispensation mosaïque de la maison d’Israël. Les annales du Livre de Mormon, qui commencent avec Léhi et avec le peuple de Zarahemla, proviennent essentiellement de ce cadre israélite. Il y est question d’Adam et Ève et des événements du jardin d’Éden (par exemple, 2 Né. 2:15-25) et du déluge du temps de Noé (par exemple, Al. 10:22), de gens amenés par Dieu en Amérique à l’époque de la tour de Babel (Ét. 1:3-5, 33), d’événements de la vie des patriarches (par exemple, 2 Né. 3:4-16), et de l’appel, des œuvres et des paroles de Moïse (par exemple, 1 Né. 17:23-31 ; 2 Né. 3:16-17). Le cinquième chapitre de 1 Néphi mentionne les documents bibliques que la famille de Léhi a emportés de Jérusalem et, avec 1 Néphi 17, met l’accent sur les événements bibliques principaux, en particulier l’exode israélite d’Égypte, bien que sans les détails fournis par le Pentateuque. L’exemple et les enseignements des prophètes, des juges et des rois de l’Ancien Testament se trouvaient aussi dans les documents bibliques de la communauté de Léhi. Puisque ce groupe se conforme à la loi de Moïse (2 Né. 25:24), les pratiques religieuses de l’Ancien Testament se poursuivent dans le Livre de Mormon.
 
On trouve un bon tiers des écrits d’Ésaïe dans le Livre de Mormon, ce qui fait qu’Ésaïe est le livre biblique qui y est le plus souvent cité. Vingt-deux des soixante-six chapitres d’Ésaïe sont cités en tout ou en partie dans le Livre de Mormon (en tout 433 sur les 1.292 versets d’Ésaïe). Les prophètes et les auteurs du Livre de Mormon choisissaient les chapitres qui mettaient l’accent sur les relations de Dieu dans le cadre de l’alliance et de ses promesses à Israël, sur le rôle et l’appel du Messie et sur les prophéties au sujet des derniers jours. Ces thèmes sont également répandus dans la théologie contemporaine des saints (A de F 3, 4, 9, 10).
 
Les enseignements de Malachie dans le Livre de Mormon sont importants parce que Jésus ressuscité les cite et par conséquent les souligne (cf. 3 Né. 24-25 ; Mal. 3-4 ; D&A 2:1-3). Les paroles de Malachie concernant un messager envoyé pour préparer la voie à l’avènement du Christ, le paiement de la dîme et des offrandes et la mission d’Élie dans les derniers jours constituent ainsi un autre noyau important des enseignements de l’Ancien Testament au sein de la société des saints des derniers jours.
 
Comme la colonie principale du Livre de Mormon a quitté Jérusalem approximativement six cents ans avant le début de la période du Nouveau Testament, les auteurs du Livre de Mormon n’avaient pas accès aux écrits du Nouveau Testament. Ils avaient toutefois accès à deux sources importantes de doctrine qui étaient en parallèle avec une partie du Nouveau Testament : le Christ ressuscité et la révélation divine. Le Christ ressuscité a prononcé devant ses auditeurs en Amérique un sermon essentiellement le même que celui qu’il avait prononcé près du lac de Galilée. Il a également apporté des ajouts et des éclaircissements importants qui traitent de lui-même en tant que Rédempteur et Seigneur, de l’accomplissement de la loi de Moïse et des derniers jours (3 Né. 11-18). En outre, il a amplifié les enseignements donnés dans Jean 10, particulièrement le verset 16, au sujet de son rôle de Bon Berger des tribus dispersées d’Israël (3 Né. 15:12-24). Les enseignements importants de Mormon au sujet du baptême et au sujet de la foi, de l’espérance et de la charité constituent des parallèles avec les enseignements du Nouveau Testament, particulièrement avec ceux de Paul dans 1 Corinthiens 13.
 
LA BIBLE EST-ELLE COMPLÈTE ? Les saints des derniers jours vénèrent la Bible comme étant la parole de Dieu révélée à l’humanité. Cependant, Joseph Smith a reconnu que les traductions ne rendent pas complètement et exactement les mots de l’original ni les intentions des prophètes antiques et des autres auteurs bibliques. Ainsi, dans la lettre à Wentworth, il écrit : « Nous croyons que la Bible est la parole de Dieu dans la mesure où elle est traduite correctement » (8e A de F). Joseph Smith a observé que « nous pouvons déterminer notre latitude et notre longitude dans l’hébreu originel avec une bien plus grande précision que dans la version anglaise. Il y a une importante distinction à faire entre ce que les prophètes voulaient réellement dire et la traduction actuelle » (EPJS, p. 334). Bien qu’acceptant explicitement ce que la Bible dit maintenant, les saints des derniers jours se rendent compte qu’il y a bien plus à dire que ce qui se trouve dans le document biblique existant.

En plus des difficultés qu’engendre la traduction de langues anciennes vers des langues modernes, d’autres Écritures déclarent également que certaines parties du texte biblique original ont été perdues ou corrompues (par exemple 1 Né. 13:28-29 ; D&A 6:26-27 ; 93:6-18). Joseph Smith a fait ce commentaire sur le caractère incomplet de la Bible : « Il était clair que beaucoup de points importants concernant le salut des hommes avaient été enlevés de la Bible ou perdus avant qu’elle ne fût compilée » (EPJS, p. 6). Il dit plus tard : « L’homme a reçu depuis le commencement beaucoup d’instructions que nous ne possédons pas maintenant… Nous avons ce que nous avons, et la Bible contient ce qu’elle contient » (EPJS, p. 46). Il a dit en outre : « Je crois la Bible telle qu’elle est sortie de la plume des auteurs originels. Des traducteurs ignorants, des copistes négligents ou des prêtres conspirateurs et corrompus ont commis beaucoup d’erreurs » (EPJS, p. 264-265). Ainsi, des contre-sens, des lacunes et d’autres erreurs affaiblissent la Bible ; mais l’esprit de ses messages en révèle malgré tout assez de la parole de Dieu pour réaliser les desseins qu’il s’est fixés. Joseph Smith résume les choses comme suit : « Grâce à la bonté de notre Père, une partie de sa parole qu’il a communiquée à ses saints d’autrefois est tombée entre nos mains [et] nous est présentée avec la promesse d’une récompense si nous y obéissons et d’un châtiment si nous y désobéissons » (EPJS, p. 46). Les saints des derniers jours ont continué à faire confiance à l’exactitude générale des textes bibliques tout en sachant que le texte peut ne pas toujours être correct. Ainsi, ils étudient et vénèrent la Bible, particulièrement dans le contexte d’autres Écritures et de la révélation moderne, qui ont beaucoup à dire à son sujet et sur la façon dont elle doit être interprétée, et pendant qu’ils étudient, ils méditent et prient pour recevoir l’inspiration de Dieu et comprendre les messages de la Bible tels qu’ils doivent être appliqués à leur vie (cf. Mro. 10:3-5).
 
LA PREMIÈRE PRÉSIDENCE RECOMMANDE LA LECTURE DE LA BIBLE. Chacun des présidents de l’Église a encouragé les saints des derniers jours à lire les Écritures et à appliquer leurs enseignements à leur vie, comme les Écritures nous le recommandent aussi (cf. 2 Ti. 3:16 ; 1 Né. 19:23). Exemple de cette importance accordée à la Bible, en 1983, année déclarée « année de la Bible » aux États-Unis, les membres de la Première Présidence de l’Église ont publié une déclaration énergique à l’appui de la lecture et de l’application de la Bible : « Nous recommandons à tous les hommes de partout la lecture, la méditation et l’application quotidiennes des vérités divines de la sainte Bible. » Elle a aussi proclamé l’attitude de l’Église vis-à-vis de la Bible en disant que « l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours accepte la sainte Bible comme essentielle à la foi et à la doctrine » et que l’Église tient à ce qu’on lise la Bible et qu’on en devienne spécialiste comme le prouve la publication d’une édition augmentée de la King James Version. « De plus, ajoutait-elle, la sainte Bible est chaque année le manuel des classes des adultes, des jeunes et des enfants dans toute l’Église. »
 
Dans la même déclaration, la Première Présidence met en évidence le rôle et la valeur de la Bible dans la vie des gens. Elle fait la réflexion que quand « on la lit avec respect et dans l’esprit de la prière, la sainte Bible devient un volume inestimable, convertissant l’âme à la justice. Sa vertu principale est sa déclaration que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, par qui le salut éternel peut être donné à tous. » Elle ajoute la promesse que « quand nous lisons l’Écriture, nous profitons de ce qu’il y a de mieux dans la littérature de ce monde » et elle encourage tout le monde à « aller à la source de la vérité en sondant les Écritures, en les lisant chez nous et en enseignant à nos enfants ce que le Seigneur a dit par l’intermédiaire des passages inspirés et inspirants de la sainte Bible » (« Déclaration de la Première Présidence », p. 3).
 
L’usage que font les saints des derniers jours de la Bible diffère de la norme judéo-chrétienne parce qu’elle n’est pas la source unique d’autorité pour eux. Les saints interprètent et comprennent la Bible par quatre moyens importants : (1) les autres Écritures de l’Église qui enrichissent la compréhension des enseignements bibliques et lui apportent un contexte ; (2) les déclarations des prophètes et des apôtres modernes sur la signification de certains passages bibliques ; (3) la traduction de la Bible par Joseph Smith et (4) la révélation personnelle par le don du Saint-Esprit, qui améliore la compréhension des Écritures. Les saints des derniers jours ne sont donc pas laissés sans information sur la signification de beaucoup de passages difficiles qui divisent le monde chrétien tout entier depuis deux millénaires.
 
La vision que les saints ont de la Bible est bien résumée dans la déclaration de Heber J. Grant, septième président de l’Église, qui a dit : « Ma vie durant, je n’ai cessé de trouver de nouvelles preuves de ce que la Bible est le Livre des livres et que le Livre de Mormon est le plus grand témoin de la véracité de la Bible qui ait jamais été publié » (IE 39, nov. 1936, p. 660).
 

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