Brève histoire de l’Église


1 –

  

Événements fondateurs

 

(1820-1831)

 

 

       Après la mort des apôtres de Jésus, la prêtrise et beaucoup de vérités de l'Évangile furent enlevées de la terre, ce qui marqua le début d'une longue période de ténèbres spirituelles, appelée la grande apostasie. Amos, le prophète, avait prédit cette perte et déclaré que le moment viendrait où il y aurait « une famine dans le pays, non pas la disette du pain et la soif de l'eau, mais la faim et la soif d'entendre les paroles de l'Éternel » (Amos 8:11). Pendant les longs siècles d'apostasie, beaucoup d'hommes et de femmes honnêtes recherchèrent la plénitude de la vérité évangélique mais ne purent la trouver. Les ecclésiastiques des nombreuses confessions religieuses prêchaient des messages divergents et invitaient les hommes et les femmes à se joindre à eux. Bien que la plupart d'entre eux eussent des intentions honnêtes, aucun n'avait la plénitude de la vérité ou de l'autorité de Dieu.

      Toutefois, le Seigneur, dans sa miséricorde, avait promis que son Évangile et sa prêtrise seraient rendus un jour à la terre pour ne plus jamais lui être enlevés. À l'aube du 19e siècle, sa promesse était sur le point de s'accomplir, et la longue nuit de l'apostasie allait bientôt prendre fin.

Personnalité de Joseph Smith

      Au début des années 1800, la famille de Joseph et Lucy Mack Smith habitait à Lebanon (New Hampshire, États-Unis). C'étaient des personnes de condition humble et inconnues qui gagnaient maigrement leur vie en travaillant dur. Joseph, fils, leur cinquième enfant, avait sept ans quand il survécut à une épidémie de typhus qui provoqua plus de trois mille décès en Nouvelle-Angleterre. Pendant sa convalescence, une infection grave se déclara dans la moelle de l'os de sa jambe gauche, et la souffrance, presque insupportable, dura pendant plus de trois semaines.

      Le chirurgien local décida d'amputer la jambe, mais sur l'insistance de la mère de Joseph, on fit appeler un autre médecin. Nathan Smith, médecin au Dartmouth College voisin, dit qu'il allait essayer de sauver la jambe en utilisant une technique relativement nouvelle et extrêmement douloureuse, consistant à enlever une partie de l'os. Le médecin apporta des cordes pour lier le garçon, mais celui-ci s'y opposa, disant qu'il supporterait l'opération sans cela. Il refusa aussi de prendre de l'eau-de-vie, seule forme d'anesthésique disponible et demanda seulement que son père le tienne dans ses bras pendant l'opération.

      Il la supporta avec beaucoup de courage, et le docteur Smith, l'un des médecins les plus qualifiés du pays, put lui sauver la jambe. Joseph souffrit longtemps avant que sa jambe ne guérisse et qu'il ne puisse marcher sans douleur. Après son opération, la famille alla s'installer à Norwich (Vermont), où elle connut trois années successives de mauvaises récoltes, avant de s'installer à Palmyra (New York).

La Première Vision

      Joseph Smith passa sa jeunesse à aider sa famille à défricher, à déplacer des pierres et à effectuer une foule d'autres travaux. Lucy, sa mère, rapporta que le jeune Joseph était un garçon qui réfléchissait beaucoup et pensait souvent au bien-être de son âme immortelle. Il se souciait particulièrement de savoir laquelle des Églises qui faisaient du prosélytisme dans la région de Palmyra était la bonne. Dans sa
brève autobiographie, il raconte les circonstances qui le menèrent, un matin du printemps 1820, à sa première vision, une manifestation céleste dans laquelle Dieu le Père et son Fils Jésus-Christ lui apparurent et lui parlèrent.

      Joseph Smith avait été loin de s'imaginer que ce jour-là il y aurait de nouveau un prophète sur la terre. Lui, garçon inconnu vivant dans l'est de l'État de New York, avait été choisi par Dieu pour accomplir l'œuvre merveilleuse et le prodige de rétablir l'Évangile et l'Église de Jésus-Christ sur la terre. Il avait vu deux personnages divins et pouvait dès lors témoigner de manière tout à fait unique de la véritable nature de Dieu le Père et de son Fils Jésus-Christ. Ce matin-là était véritablement l'aube d'un jour plus lumineux. La lumière avait envahi un bosquet, et Dieu le Père et Jésus-Christ avaient appelé un garçon de quatorze ans à être leur porte-parole.

 

Visites de l'ange Moroni

 

      Le soir du 21 septembre 1823, trois ans après avoir eu la Première Vision, Joseph Smith pria le Seigneur de lui pardonner les sottises de sa jeunesse et lui demanda de le guider. Le Seigneur répondit en lui envoyant un messager céleste pour l'instruire. Joseph écrit :

 

      « Il m'appela par mon nom et me dit qu'il était un messager envoyé d'auprès de Dieu vers moi et que son nom était Moroni ; que Dieu avait une oeuvre à me faire accomplir, et que mon nom serait connu en bien et en mal parmi toutes les nations, familles et langues, ou qu'on en dirait du bien et du mal parmi tous les peuples.

 

      « Il dit qu'il existait un livre caché, écrit sur des plaques d'or, donnant l'histoire des anciens habitants de ce continent et la source dont ils étaient issus. Il dit aussi que la plénitude de l'Évangile éternel y était contenue, telle qu'elle avait été donnée par le Sauveur à ces anciens habitants » (Joseph Smith, Histoire, 33-34).

 

      Moroni avait été le dernier prophète à écrire dans ces anciennes annales et, sur les directives du Seigneur, il les avait enterrées dans la colline Cumorah. Il avait également enterré l’urim et le thummim que les prophètes d'autrefois utilisaient et dont Joseph allait se servir pour traduire les annales.

 

      L'ange commanda à Joseph de se rendre à la colline toute proche et lui dit beaucoup de choses importantes concernant l’œuvre du Seigneur dans les derniers jours. II dit à Joseph que quand il recevrait les plaques, il ne devrait les montrer à personne sauf si le Seigneur le lui commandait. Moroni apparut deux fois de plus à Joseph cette nuit-là et encore une fois le lendemain. Chaque fois il répéta son important message et fournit des informations supplémentaires.

 

      Dans la journée qui suivit les visites de l'ange, Joseph se rendit à la colline Cumorah comme cela lui avait été commandé. Il dit à ce propos :

 

      « Sur le côté ouest de cette colline, non loin du sommet, sous une pierre de grande dimension, se trouvaient les plaques dans une boîte de pierre. Cette pierre était épaisse et arrondie au milieu de la face supérieure et plus mince vers les bords, de sorte que la partie du milieu en était visible au-dessus du sol, tandis que les bords tout autour étaient recouverts de terre.

 

      « Ayant enlevé la terre, je me procurai un levier que je glissai sur le rebord de la pierre et, d'un petit effort, je la soulevai. Je regardai à l'intérieur et j'y vis, en effet, les plaques, l’urim et le thummim, et le pectoral comme le messager l'avait déclaré » (op. cit., 51-52).

 

      L'ange Moroni apparut et dit à Joseph de le rencontrer à la colline l’année suivante à la même date et de poursuivre ses rencontres annuelles jusqu'à ce que vienne le moment où le jeune homme recevrait les plaques. Lors de chaque visite, Moroni lui donnait d'autres instructions sur ce que le Seigneur allait faire et sur la façon dont son royaume devait être dirigé (op. cit., 27-54).

 

Traduction du Livre de Mormon

 

      Le 22 septembre 1827, après quatre ans de préparation, Moroni remit au prophète Joseph les plaques d'or et lui dit d'en commencer la traduction. Emma Hale, que Joseph avait épousée cette année-là, l'accompagna à cette occasion et l'attendait au pied de la colline Cumorah lorsque son mari revint avec les plaques. Elle devint une aide importante pour le prophète et fut, pendant une brève période, l'une des personnes qui notèrent la traduction du Livre de Mormon.

 

      Suite aux tentatives acharnées et répétées d'émeutiers locaux pour voler les plaques d'or, Joseph et Emma furent obligés de quitter leur maison de Manchester (New York). Ils se réfugièrent chez Isaac Hale, père d'Emma, à Harmony (Pennsylvanie) à environ deux cents kilomètres au sud-est de Manchester. Joseph y commença la traduction des plaques.

 

      Son ami, Martin Harris, fermier aisé, se joignit bientôt à lui et devint son secrétaire. Martin demanda à Joseph de pouvoir emporter chez lui 116 pages de texte traduit pour les montrer aux membres de sa famille afin de leur prouver la validité de l’œuvre qu'ils accomplissaient. Joseph demanda la permission au Seigneur, mais le Seigneur répondit non. Martin supplia Joseph de demander de nouveau, ce que Joseph fit à contrecœur à deux autres reprises, et il reçut finalement la permission demandée. Martin fit alliance de ne montrer le manuscrit qu'à certaines personnes, mais il ne tint pas sa promesse, et les pages du manuscrit furent volées. Cette perte rendit Joseph inconsolable, parce qu'il pensait que tous ses efforts pour servir le Seigneur étaient perdus. Il s'écria : « Que vais-je faire ? J'ai péché. C'est moi qui ai tenté la colère de Dieu. J'aurais dû me contenter de la première réponse que j'ai reçue du Seigneur » (Lucy Mack Smith, History of Joseph Smith, 1958, p. 128).

 

      Joseph se repentit sincèrement, et peu de temps après lui avoir retiré les plaques et l’urim et le thummim, le Seigneur lui pardonna et Joseph recommença à traduire. Le Seigneur lui dit de ne pas retraduire le texte perdu, qui contenait une histoire profane. Au lieu de cela, il devait traduire d'autres plaques préparées par le prophète Néphi, plaques qui couvraient la même période mais contenaient de plus grandes prophéties du Christ et d'autres écrits sacrés. Le Seigneur avait prévu la perte des 116 pages et inspiré à Néphi de préparer cette deuxième histoire (voir 1 Néphi 9 ; D&A 10:38-45 ; voir aussi D&A, sections 3 et 10 que Joseph reçut au cours de cette période).

 

      À ce moment-là, Joseph eut la bénédiction de recevoir l'aide d'Oliver Cowdery, jeune instituteur que le Seigneur avait conduit chez le prophète. Oliver se mit à écrire le 7 avril 1829. À propos de cette période capitale, il dit : « Ce furent là des jours inoubliables ! Être assis, écoutant le son d'une voix dirigée par l'inspiration des cieux, éveilla, dans ma poitrine, la gratitude la plus profonde ! » (JSH, 71, note).

 

      Oliver déclara en outre : « Ce livre est vrai... Je l'ai écrit moi-même tel qu'il est sorti des lèvres du prophète. Il contient l'Évangile éternel et constitue l'accomplissement des révélations de Jean où il est dit qu'il vit un ange venir avec l'Évangile éternel pour le prêcher à toute nation, à toute tribu, à toute langue, et à tout peuple. Il contient les principes du salut. Et si vous suivez sa lumière et obéissez à ses préceptes, vous serez sauvés dans le royaume éternel de Dieu » (Reuben Miller Journals, 1848-49, 21 octobre 1848, Archives de l'Église).

 

      Au cours de leur travail, Joseph et Oliver s'aperçurent que leur dévouement à la traduction des annales les avait laissés démunis de nourriture et d'argent ; il leur manquait même le matériel nécessaire pour écrire. Informé de leur situation difficile, Joseph Knight, père, ancien employeur et ami du prophète, décida de les aider. Il décrit comme suit la nature de cette aide très opportune :

 

      « J'apportai un tonneau de maquereaux et du papier ligné pour écrire... J'achetai neuf ou dix boisseaux de blé et cinq ou six boisseaux de pommes de terre ». Il rendit ensuite visite aux deux hommes à Harmony et raconte : « Joseph et Oliver étaient partis chercher du travail pour pouvoir acheter des provisions mais n'en trouvèrent pas. Ils rentrèrent chez eux et me trouvèrent là avec les provisions, et ils en furent heureux, car ils en étaient démunis... Alors ils se mirent au travail, ayant suffisamment de provisions pour tenir jusqu'à la fin de la traduction » (Dean Jessee, éditeur, « Joseph Knight's Recollection of Early Mormon History », BYU Studies, automne 1976, p. 36).

 

      Il ne faut pas s'étonner que le prophète Joseph ait dit à propos de ce juste : « Il sera dit de lui, par les fils de Sion, tant qu'il en restera encore un, que cet homme fut un homme fidèle en Israël ; c'est pourquoi son nom ne sera jamais oublié » (History of the Church, 5:124-25).

 

      Comme les persécutions allaient croissant, Joseph et Oliver quittèrent Harmony et terminèrent la traduction à la ferme de Peter Whitmer à Fayette (New York) au cours du mois de juin 1829. Le fait que l’œuvre ait pu être menée à bien dans des circonstances aussi éprouvantes est un véritable miracle moderne. Joseph Smith, un homme qui avait été très peu à l'école, dicta la traduction en un peu plus de deux mois de travail réel et y apporta très peu de corrections. Le livre est aujourd'hui essentiellement tel qu'il l'a traduit et a été la source du témoignage de millions de personnes de par le monde. Joseph Smith a été un instrument puissant dans les mains du Seigneur dans la parution des paroles des prophètes d'autrefois pour le bien des saints dans les derniers jours.

 

Témoins du Livre de Mormon

 

      Pendant que Joseph Smith était à Fayette, le Seigneur révéla qu'Oliver Cowdery, David Whitmer et Martin Harris devaient être les trois témoins spéciaux qui seraient autorisés à voir les plaques d'or (voir 2 Néphi 27:12 ; Éther 5:2-4 ; D&A 17). Avec Joseph, ils pourraient témoigner de l'origine et de la véracité de ces annales anciennes.

 

      David Whitmer explique : « Nous nous en allâmes dans les bois proches, nous assîmes sur un tronc et parlâmes un certain temps. Nous nous mîmes ensuite à genoux et priâmes. Joseph pria. Nous nous levâmes alors et nous assîmes sur le tronc, et nous parlions lorsque tout à coup une lumière descendit d'au-dessus de nous et nous enveloppa sur une assez grande distance ; et l'ange se tint devant nous ». L'ange était Moroni. David raconta : « Il était habillé de blanc, et il parla et m'appela par mon nom et dit : ‘ Bienheureux celui qui garde ses commandements ’. Une table fut placée devant nous et les annales furent mises dessus : les annales des Néphites, à partir desquelles le Livre de Mormon avait été traduit, les plaques d'airain, la boule ou directeur, l'épée de Laban et les autres plaques » (The Saints' Herald, 1er mars 1882, p. 68). Tandis que les hommes contemplaient ces objets, ils entendirent une voix qui disait : « Ces plaques ont été révélées par la puissance de Dieu et elles ont été traduites par la puissance de Dieu. La traduction que vous en avez vue est correcte, et je vous commande de témoigner de ce que vous voyez et entendez en ce moment » (History of the Church, 1:55).

 

      Peu après cet événement, Joseph Smith montra les plaques à huit autres témoins, qui les manipulèrent alors qu’ils se trouvaient dans un endroit retiré proche de la maison familiale des Smith à Manchester (New York). Le témoignage des deux groupes de témoins figure au début du Livre de Mormon.

 

Prédication au moyen du Livre de Mormon

 

      Une fois la traduction terminée, le prophète prit des dispositions avec Egbert B. Grandin, de Palmyra, pour imprimer le Livre de Mormon. Martin Harris contracta une hypothèque en faveur de M. Grandin pour garantir le paiement des 3000 dollars requis pour imprimer 5000 exemplaires du livre.

 

      Les premiers exemplaires du Livre de Mormon furent mis à la disposition du public à la librairie B. Grandin le 26 mars 1830. Un des tout premiers missionnaires à utiliser le nouvel ouvrage fut Samuel Smith. En avril 1830, il entra à l'auberge de Tomlinson, dans la commune de Mendon (New York). Il y vendit un exemplaire du livre à un jeune homme du nom de Phinehas Young, frère de Brigham Young.

 

      En juin, il revint sur ses pas et déposa cette fois un exemplaire du Livre de Mormon chez John P. Greene, à Bloomfield (New York). John avait épousé Rhoda Young, sœur de Brigham Young. John Young, père de Brigham, fut la personne suivante à entrer en contact avec le livre ; il l'emporta chez lui et le lut d'un bout à l'autre. Il dit que « c'était l'ouvrage le plus remarquable et le plus exempt d'erreurs de tout ce qu'il eût jamais vu, y compris la Bible » (« History of Brigham Young », Millennial Star, 6 juin 1863, p. 361).

 

      Bien qu'informé du contenu du livre depuis le printemps 1830, tant par les membres de sa famille que par les missionnaires, Brigham Young eut besoin de temps pour l'étudier à fond. Il dit : « J'étudiai soigneusement la question pendant deux ans avant de prendre la décision d'accepter ce livre. Je savais qu'il était vrai, autant que je savais que je pouvais voir de mes deux yeux, ou sentir par le toucher des doigts ou percevoir par n’importe quel sens. Si cela n'avait pas été le cas, je ne l'aurais pas encore adopté aujourd'hui... Il me fallait suffisamment de temps pour me prouver tout à moi-même » (Brigham Young, dans Journal of Discourses, 3:91)

 

      Brigham Young se fit baptiser le 14 avril 1832. Il dit qu'après son baptême et sa confirmation, il ressentit, selon les paroles du Sauveur, qu'un esprit humble, pur comme un enfant, témoignait que ses péchés lui étaient pardonnés (« History of Brigham Young », Millennial Star, 11 juillet 1863, p. 438). Il allait devenir plus tard apôtre et finalement deuxième président de l'Église.

 

Rétablissement des Prêtrises d'Aaron et de Melchisédek

 

      Lorsque l'ange Moroni avait rencontré Joseph Smith pour la première fois en septembre 1823 sur la colline Cumorah, il lui avait donné des instructions importantes concernant le rétablissement de l'autorité de la prêtrise sur la terre, et avait dit entre autres choses : « Lorsque les plaques d'or auront été interprétées, le Seigneur donnera la Sainte Prêtrise à certains, et ils commenceront à proclamer l'Evangile et à baptiser d'eau, et après cela ils auront le pouvoir de donner le Saint-Esprit par l'imposition des mains (« Letter from Oliver Cowdery to W. W. Phelps », Latter-day Saints' Messenger and Advocate, octobre 1835, p. 199).

 

      Au printemps 1829, Joseph prit part à l'accomplissement partiel des paroles de l'ange. Tandis qu'il traduisait le Livre de Mormon en compagnie d'Oliver Cowdery, ils trouvèrent des passages mentionnant le baptême pour la rémission des péchés. Le 15 mai, ils invoquèrent le Seigneur pour obtenir davantage de connaissance à ce sujet. Tandis qu'ils s'adressaient à lui sur la rive du fleuve Susquehanna, les deux hommes reçurent la visite d'un messager céleste. Celui-ci dit être Jean-Baptiste, qui avait vécu à l'époque du Nouveau Testament. Après avoir posé les mains sur la tête de Joseph et d'Oliver, il dit : « A vous mes compagnons de service, au nom du Messie, je confère la Prêtrise d'Aaron qui détient les clefs du ministère d'anges, de l'Évangile de repentance et du baptême par immersion pour la rémission des péchés » (D&A 13:1).

 

      Après cette ordination, Joseph et Oliver se baptisèrent mutuellement, comme le leur avait commandé Jean-baptiste et s'ordonnèrent mutuellement à la Prêtrise d'Aaron. Jean leur dit que cette Prêtrise d'Aaron n'avait pas le pouvoir d'imposer les mains pour le don du Saint-Esprit, mais que ce pouvoir leur serait conféré plus tard. Il dit aussi qu'il agissait sous la direction de Pierre, Jacques et Jean, lesquels détenaient les clefs de la Prêtrise de Melchisédek, prêtrise qui, dit-il, leur serait conférée en temps voulu (voir JSH, vv. 68-72).

 

      Le prophète fait ce commentaire : « Sitôt que nous fûmes sortis de l'eau, après notre baptême, nous reçûmes de grandes et glorieuses bénédictions de notre Père céleste. À peine avais-je baptisé Oliver Cowdery que le Saint-Esprit descendit sur lui, et il se leva et se mit à prophétiser beaucoup de choses qui devaient se passer bientôt. Et, de même, aussitôt que j'eus été baptisé par lui, je reçus également l'esprit de prophétie et, m'étant levé, je prophétisai sur la naissance de cette Église, ainsi que beaucoup d'autres choses relatives à l'Église, et à cette génération des enfants des hommes. Nous étions remplis du Saint-Esprit et nous réjouissions du Dieu de notre salut » (JSH, 73).

 

      Plus tard, Pierre, Jacques et Jean apparurent à Joseph et à Oliver et leur conférèrent la Prêtrise de Melchisédek. Ils leur conférèrent aussi les clefs du royaume de Dieu (voir D&A 27:12-13 ; 128:20). La Prêtrise de Melchisédek est la plus haute autorité donnée aux hommes sur la terre.

 

      Investi de cette autorité, Joseph Smith put organiser l'Église de Jésus-Christ dans la dispensation actuelle et commencer à créer les divers collèges de la prêtrise qui existent aujourd'hui dans l'Église.

 

Organisation de l'Église

 

      Le Seigneur révéla à Joseph Smith que le 6 avril 1830 était le jour où l'Église de Jésus-Christ de la dispensation actuelle devait être organisée (voir D&A 20:1). Des avis furent envoyés aux croyants et aux amis, et 56 hommes et femmes se rassemblèrent dans la maison de rondins de Peter Whitmer, père, à Fayette (New York). Le prophète choisit six hommes pour aider à l'organisation « conformément aux lois de notre pays par la volonté et les commandements de Dieu » (D&A 20:1).

 

      Le prophète écrit : « Après avoir ouvert la réunion par une prière solennelle à notre Père céleste, nous nous mîmes en devoir, conformément aux commandements qui nous avaient été précédemment donnés, d'interroger nos frères pour savoir s'ils nous acceptaient comme instructeurs des choses du royaume de Dieu et s'ils étaient d'accord pour que nous procédions à l'organisation de l'Église, conformément au dit commandement que nous avions reçu. Ils consentirent à ces diverses propositions par vote unanime » (History of the Church, 1:78).

 

      Avec le consentement des personnes présentes, Joseph ordonna Oliver ancien de l'Église, et Oliver ordonna le prophète ancien, comme le Seigneur le leur avait commandé. La Sainte-Cène fut bénie et distribuée aux membres présents. Ceux qui avaient été baptisés furent confirmés et reçurent le don du Saint-Esprit. Le prophète dit : « Le Saint-Esprit se déversa sur nous avec une très grande force : certains prophétisaient, tandis que nous louions tous le Seigneur et nous réjouissions extrêmement » (History of the Church, 1:78). Au cours de cette réunion, Joseph reçut une révélation dans laquelle le Seigneur commandait à l'Église de prêter attention aux paroles du prophète comme si elles venaient du Seigneur lui-même (voir D&A 21:4-6).

 

      Les traits caractéristiques de cette réunion de 1830 se retrouvent encore aujourd'hui dans l'Église : exercice de la loi du consentement commun, chants, prières, distribution de la Sainte-Cène, témoignages personnels, don du Saint-Esprit conféré par l'imposition des mains, ordinations, révélation personnelle et révélation par l'intermédiaire des officiers de la prêtrise.

 

      Lucy Mack Smith, mère du prophète, rapporte une scène pleine de tendresse qui se produisit le jour où Joseph Smith, père, père du prophète, fut baptisé : « Quand M. Smith sortit de l'eau, Joseph monta sur la berge et, prenant la main de son père, s'exclama, avec des larmes de joie : « Mon Dieu soit loué ! Qu'il m'ait été donné de voir mon propre père baptisé dans la vraie Église de Jésus-Christ ! » (Lucy Mack Smith, History of Joseph Smith, p. 168). Joseph Knight, père, dit à ce propos : « Le prophète était grandement rempli par l'Esprit... Sa joie semblait complète. Je crois qu'il voyait la grande œuvre qu'il avait commencée et était désireux de l'exécuter » (Dean Jessee, éditeur, « Joseph Knight's Recollection of Early Mormon History », p. 37).

 

      Il y avait un puissant lien d'affection entre le père et le fils. Plus tard, dans un éloge de son père, le prophète dit : « J'aime mon père et sa mémoire ; et la mémoire de ses nombreux actes reste vivace dans mon esprit, et beaucoup des paroles pleines de gentillesse qu'il m'a adressées en tant que père sont écrites sur les tablettes de mon cœur » (History of the Church, 5:126).

 

      L'amour qui existait entre le prophète et son père, Joseph Smith, père, le manifestait aussi envers son propre père, Asael Smith. En août 1830, Joseph Smith, père, se rendit avec des exemplaires du Livre de Mormon au comté de St. Lawrence (New York) pour les donner à son père et à sa mère ainsi qu'à ses frères et à ses sœurs. Asael Smith lut le livre presque d'un bout à l'autre avant de mourir en octobre 1830 et déclara que son petit-fils, Joseph Smith, fils, « était le prophète même dont il savait depuis longtemps qu'il viendrait dans sa famille » (History of the Church, 2:443). Trois autres fils d'Asael, Silas, John et Asael, fils, devinrent plus tard membres de l'Église. Le prophète eut la bénédiction de voir toute sa famille proche immergée dans les eaux du baptême, ainsi que beaucoup de membres de la famille de son père.

 

      Sidney Rigdon, qui devint plus tard membre de la Première Présidence, dit à propos des humbles débuts de l'Église et de la grande vision de l'avenir que les organisateurs avaient déjà alors : « Je rencontrai l'Église du Christ tout entière dans une vieille petite maison de rondins d'environ 1,80 mètre carré près de Waterloo (New York), et nous commençâmes à parler du royaume de Dieu comme si nous avions le monde à nos pieds ; nous parlions avec beaucoup d'assurance... bien que nous ne fussions pas nombreux... Nous eûmes la vision de l'Église de Dieu mille fois plus grande... le monde étant alors totalement ignorant du témoignage du prophète et dépourvu de la connaissance de ce que Dieu était sur le point de faire » (« Conference Minutes », Times and Seasons, 1er mai 1844, pp. 522-23). 

 

      Les événements qui se produisirent le 6 avril 1830 dans l'ouest de l'État de New York ont changé la vie de millions de personnes. Après avoir commencé avec une poignée de convertis dans une maisonnette de rondins, l'Évangile s'est répandu dans le monde entier. L’Église est à présent installée dans beaucoup de pays, souvent dans une situation aussi humble que celle dans laquelle se trouvait l'organisation originale à Fayette. Les saints de par le monde mettent leur joie et trouvent de la consolation dans la promesse du Sauveur : « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom... voici, je serai là au milieu d'eux » (D&A 6:32).

 

Persécutions à Colesville

 

      Le mois même où l'Église fut organisée, Joseph Smith, le prophète, partit en mission pour instruire des amis : la famille de Joseph Knight, père, qui résidait à Colesville (New York). Le 28 juin, beaucoup de membres et d'amis de la famille Knight étaient prêts à contracter l'alliance du baptême.

 

      Une forte opposition se manifesta à la prédication de l'Évangile à Colesville, et des émeutiers essayèrent d'empêcher les baptêmes en détruisant le barrage que les frères avaient construit pour retenir l'eau. Le barrage fut cependant réparé rapidement. Joseph Knight, fils, décrit comme suit les mesures auxquelles les ennemis de la foi eurent recours : « Pendant que nous revenions des baptêmes, beaucoup de nos voisins s'approchèrent de nous pour nous montrer du doigt et demander si nous étions occupés à laver les moutons... Cette nuit-là, nos chariots furent retournés et l'on empila du bois dessus ; d'autres furent jetés dans l'eau, on entassa des piquets contre nos portes, les harnais furent jetés dans le ruisseau et il y eut beaucoup de déprédations » (Joseph Knight Autobiographical Sketch, 1862, Archives de l'Église).

 

      Au même moment, des opposants tentèrent de faire obstruction au prophète en le faisant arrêter et juger pour trouble de l'ordre public. Mais Joseph Knight, père, engagea des avocats qui ne tardèrent pas à le faire acquitter.

 

      Les saints de Colesville firent corps et devinrent une branche forte et unie de l'Église.

 

Mission auprès des Indiens

 

      En septembre et en octobre 1830, quatre jeunes gens furent appelés par révélation à porter l'Évangile et le message du Livre de Mormon aux Indiens américains, qui étaient descendants des peuples du Livre de Mormon. Ces missionnaires étaient Oliver Cowdery, Peter Whitmer fils, Parley P. Pratt et Ziba Peterson (voir D&A 28:8 ; 30:5-6 ; 32). Ils firent des centaines de kilomètres dans des conditions très éprouvantes et purent prêcher aux Indiens Catteraugus près de Buffalo (New York), aux Wyandots d'Ohio et finalement aux Delawares qui se trouvaient à l'ouest de l'État du Missouri. Mais ce fut auprès des colons de Kirtland (Ohio) et du voisinage qu'ils eurent le plus de succès puisqu'ils y convertirent 127 personnes. Après le départ des missionnaires, le nombre des saints d'Ohio s'éleva bientôt à plusieurs centaines grâce au prosélytisme fait par les membres qu'ils avaient laissés derrière eux.

 

Appel à se rassembler en Ohio

 

      Sidney Rigdon, ancien pasteur et récemment converti de la région de Kirtland, et Edward Partridge, un ami non membre de l'Église, étaient vivement désireux de rencontrer le prophète et d'en apprendre davantage sur les enseignements de l'Église. En décembre 1830, ils firent plus de 400 kilomètres jusqu'à Fayette (New York) pour rendre visite à Joseph Smith. Ils lui demandèrent de consulter le Seigneur pour connaître sa volonté à leur égard et à l'égard des saints de Kirtland. Le Seigneur leur répondit en révélant que les saints de New York devaient se rassembler en Ohio (voir D&A 37:3). À la troisième et dernière conférence de l'Église à New York, qui se tint le 2 janvier 1831, à la ferme Whitmer, le Seigneur répéta sa directive aux membres de l’Église :

 

      « Et pour que vous échappiez au pouvoir de l'ennemi, et soyez rassemblés en moi, comme un peuple juste, sans tache et innocent, pour cette raison, je vous ai donné le commandement d'aller en Ohio ; et je vous y donnerai ma loi ; et vous y serez dotés du pouvoir d'en haut » (D&A 38:31-32). C'était le premier appel invitant les saints de la dispensation actuelle à se rassembler.

 

      Un petit nombre de membres de l’Église préférèrent ne pas vendre leurs biens et ne pas faire le long voyage de New York jusqu'en Ohio, mais la majorité des saints entendirent la voix du berger demandant de rassembler Israël. Newel Knight fut parmi ces disciples typiques qui suivirent les dirigeants de la prêtrise et répondirent à l'appel.

 

      « Rentré chez moi de la conférence, pour obéir au commandement qui avait été donné, je commençai, avec la branche de Colesville, à faire des préparatifs pour aller en Ohio... Comme on pouvait s'y attendre, nous fûmes obligés de sacrifier nos biens. Je passai la plus grande partie de mon temps à rendre visite aux frères, à les aider à arranger leurs affaires pour que nous puissions voyager ensemble en un seul groupe » (Newel Knight, cité dans Larry Porter, « A Study of the Origins of The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints in the States of New York and Pennsylvania, 1816-1831 », thèse de doctorat, université Brigham Young, 1971, p. 296).  

 

      Joseph Knight, père, fut aussi parmi les personnes disposées à faire des sacrifices en vendant leurs biens pour rejoindre le prophète en Ohio. L'annonce toute simple qu'il fit paraître dans le Broome Republican en dit long sur son engagement vis-à-vis de l'Évangile : « La ferme actuellement occupée par Joseph Knight, située dans la localité de Colesville, près de Colesville Bridge, bordée d'une part par le fleuve Susquehanna et comprenant environ cinquante-six hectares huit ares. Ladite ferme comporte deux résidences, une bonne grange et un beau verger. Les conditions de vente seront intéressantes » (Broome Republican, 5 mai 1831 ; cité dans Larry Porter, op. cit., pp. 298-99). Dès la mi-avril 1831, 68 saints de Colesville étaient en route pour l'Ohio.

 

      Quatre-vingt saints de la branche de Fayette et cinquante de celle de Manchester, qui partirent de chez eux au début de mai 1831, furent tout aussi obéissants au commandement du Seigneur. Lucy Mack Smith, mère du prophète, fut invitée à prendre la tête de l'exode des saints de Fayette. Quand ils arrivèrent à Buffalo (New York), ils constatèrent que le port du lac Erié était bloqué par un champ de glace, et le vapeur qui transportait les saints de Fayette ne pouvait quitter le port. Dans cette situation difficile, elle invita les saints à faire preuve de foi. « Mes frères et sœurs, si vous voulez tous exprimer vos désirs au Ciel pour que la glace se disloque et que nous soyons libérés, aussi sûr que le Seigneur vit, cela se fera ». À ce moment-là, on entendit un bruit « semblable à un coup de tonnerre ». La glace se divisa et un passage étroit se forma à travers lequel le navire put passer. Ils étaient à peine sortis que le chenal se refermait, mais ils étaient en eau libre et pouvaient continuer leur voyage. Après cette délivrance miraculeuse, les saints furent invités à s'assembler pour une réunion de prière pour remercier Dieu de sa miséricorde à leur égard (Lucy Mack Smith, History of Joseph Smith, p. 204).

 

      Dès la mi-mai, toutes les branches de l'Église de New York avaient pu traverser le lac Erié et atteindre Fairport Harbor (Ohio) où ils furent accueillis par les autres saints et emmenés vers diverses destinations dans les communes de Kirtland et de Thompson. Le grand rassemblement de l'Israël moderne avait commencé. Les saints étaient maintenant dans une situation où ils pouvaient être instruits en nombre par les serviteurs choisis par le Seigneur, pour apprendre ses lois et édifier de saints temples.

 

 

Source : Our Heritage : A Brief History of The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, 1996, chapitres 1 et 2