Traduction
de la Bible par Joseph Smith
Doctrine
et Alliances
Contexte
des sections 45, 76, 77, 86, 91
Elizabeth
Maki
En
traduisant le Livre de Mormon à la fin des années 1820,
Joseph Smith n’a pas uniquement appris l’histoire des
Lamanites et des Néphites.
Le
texte du Livre de Mormon indiquait aussi plus d'une fois que «
beaucoup de parties claires et précieuses » de la Bible
avaient été perdues [1]. Pendant l’été
1830, juste quelques mois après la publication du Livre de
Mormon, Joseph Smith commença une nouvelle traduction de la
Bible destinée à rétablir certaines de ces
parties claires et précieuses. Cet effort défiait
l’opinion dominante de 1’époque qui était
que la Bible contenait la parole parfaite de Dieu telle qu’elle
figure dans le texte sacré de la version du roi Jacques.
La
traduction de Joseph n’a pas été effectuée
dans le sens traditionnel du terme. Il n’a pas consulté
les textes hébreux et grecs ni utilisé des glossaires
pour créer une nouvelle version en anglais. Au contraire, il
s’est appuyé sur une version du roi Jacques de la Bible
et a fait des ajouts et des changements à mesure que le
Saint-Esprit les lui dictait.
Bien
que Joseph ait fait beaucoup de corrections grammaticales mineures et
modernisé un peu la langue, il se souciait moins de ces
améliorations techniques que du rétablissement, par la
révélation, de vérités importantes
absentes de la Bible contemporaine. L’historien Mark Lyman
Staker la décrivit comme une traduction « d’idées
plutôt que de langue ». [2]
Joseph
Smith travailla diligemment à sa traduction de l’été
1830 à juillet 1833. Il considérait ce projet comme une
mission divine, « une branche de mon appel » [3],
disait-il . Pourtant, bien que des parties fussent imprimées
dans les publications de l’Église avant sa mort, la
traduction de la Bible par Joseph Smith ne fut pas publiée de
son vivant.
Néanmoins,
l’énergie que le prophète déploya pour
cette œuvre ressort des pages des Doctrine et Alliances ; le
processus de traduction fut le catalyseur direct de beaucoup de
révélations contenues dans ce livre, qui comprend plus
d’une douzaine de sections dont l’origine est directement
liée au processus de traduction ou qui contiennent des
instructions s'y rapportant adressées à Joseph et à
d’autres personnes. [4]
Le
processus de traduction
C'est
en octobre 1829, alors que le Livre de Mormon était sous les
presses de son imprimerie, qu'Oliver Cowdery acheta à E. B.
Grandin la Bible du roi Jacques que Joseph Smith utilisa pour la
traduction.
Une
révélation reçue par Joseph en juin 1830 à
Colesville (New York), qu’il décrivit comme « les
visions de Moïse » [5] a peut-être servi de
catalyseur de l’œuvre de traduction de Joseph. Cette
révélation est aujourd'hui le chapitre 1 du livre de
Moïse dans la Perle de grand prix. Les premiers manuscrits de la
traduction de la Bible, commençant par Genèse 1
(maintenant Moïse 2), furent écrits à Harmony
(Pennsylvanie), environ un mois plus tard, de la plume d'Oliver
Cowdery et de John Whitmer. Peu de temps après, dans une
révélation adressée à la femme de Joseph,
Emma Hale Smith, le Seigneur donna l'instruction qu’Emma
devienne la secrétaire de Joseph [6] pour la traduction, ce
qu’elle avait apparemment déjà fait pendant une
courte période (voir D&A 25:6) [7]. Au cours des mois qui
suivirent, la traduction du livre de la Genèse avança.
En
décembre de cette année-là, après son
baptême dans l’Ohio, Sidney Rigdon se rendit à
Fayette (New York), pour rencontrer le dirigeant de sa nouvelle foi.
Joseph Smith reçut une révélation commandant que
Sidney Rigdon soit son secrétaire : « Je te donne le
commandement d’écrire pour lui ; et les Écritures
seront données telles qu’elles sont en mon sein, pour le
salut de mes élus. » (voir D&A 35:20) [8]
Sidney
Rigdon commença à servir de secrétaire. Peu de
temps après que Joseph et lui eurent écrit l’histoire
d’Hénoc, Joseph reçut l’instruction de
cesser de traduire pendant un temps et de partir avec l’Église
en Ohio (voir D&A 37:1). Il le fit, et peu de temps après
son installation à Kirtland, la traduction redevint l’une
de ses priorités. Début février 1831, Joseph
reçut une révélation lui donnant l’instruction
de construire une maison dans laquelle il pourrait « vivre et
traduire » (voir D&A 41:7) [9]. Quelques jours plus tard,
une autre révélation assura à Joseph que quand
il le demanderait, les Écritures seraient données (voir
D&A 42:56). [10]
Section
45
Les
premiers travaux de traduction se concentrèrent sur le texte
de la Genèse, mais une révélation du 7 mars 1831
modifia bientôt le cours des choses. Dans la révélation,
intégrée au canon des Écritures dans Doctrine et
Alliances 45, le Seigneur commanda à Joseph de mettre de côté
l’Ancien Testament pour le moment afin de se concentrer sur la
traduction du Nouveau Testament.
«
Je vous donne maintenant de le traduire, afin que vous soyez préparés
pour les choses à venir, car en vérité je vous
dis que de grandes choses vous attendent. » (voir D&A
45:61-62) [11]
En
conséquence, le lendemain, Joseph et Sidney commencèrent
à travailler à la traduction du Nouveau Testament. Ils
continuèrent jusqu’à leur départ pour le
Missouri l’été qui suivit, puis reprirent la
traduction à l’automne, après que Joseph et Emma
eurent déménagé à environ cinquante
kilomètres au sud de Kirtland, à Hiram (Ohio), pour
vivre dans la maison de John Johnson. Le déménagement
était en partie motivé par le désir de Joseph de
trouver un endroit « où travailler au calme à la
traduction de la Bible ». Joseph Smith raconta plus tard que la
majeure partie de son temps après son arrivée chez les
Johnson fut consacrée à se préparer à
poursuivre son travail de traduction [12].
Il
se mit aussi à présider l’Église et à
prêcher dans les régions alentour, puis, en janvier
1832, il reçut une révélation lui commandant à
nouveau de se concentrer sur l’œuvre de traduction «
jusqu’à ce qu’elle soit terminée »
(voir D&A 73:4) [13]. Sidney Rigdon et Joseph étaient donc
en train de traduire quand, le 16 février, ils reçurent
une révélation marquante dans la maison des Johnson ;
en traduisant le livre de Jean, les questions des deux hommes
menèrent à une vision des royaumes de gloire qui fut
une source d'importants nouveaux enseignements pour la jeune Église.
Aujourd’hui, cette vision se trouve dans Doctrine et Alliances
76.
Sections
77 et 86
De
même, une explication des passages de l’Apocalypse,
maintenant Doctrine et Alliances 77, émergea directement de la
traduction de la Bible. Sous la forme d’une série de
questions et de réponses, elle fut considérée
comme un texte inspiré et fut inclus dans un premier livre de
révélations.
Joseph
et Emma quittèrent la ferme des Johnson et retournèrent
à Kirtland en septembre 1832. Durant les mois qui suivirent,
Joseph continua à travailler diligemment à la
traduction, avec, cette fois, l’aide de Frederick G. Williams.
En décembre, Joseph reçut une autre révélation
découlant de la traduction, expliquant cette fois la parabole
du bon grain et de l’ivraie qui se trouve dans Matthieu 13. La
révélation, maintenant Doctrine et Alliances 86,
désigne les détenteurs de la prêtrise dans les
derniers jours comme des sauveurs pour le peuple d’Israël
(voir D&A 86:11) [14].
En
juillet 1832, Joseph écrivit à W.W. Phelps : «
nous avons terminé la traduction du Nouveau Testament ».
Il
écrivit aussi : « De grandes choses merveilleuses et
glorieuses sont révélées », ajoutant
qu’ils faisaient de rapides progrès dans la traduction
de l'Ancien Testament et qu’avec la force de Dieu nous pouvons
faire toutes choses selon sa volonté. [15]
L’œuvre
de traduction de l’Ancien Testament continua et, en janvier
1833, Joseph écrivit : « J'ai passé l’hiver
à traduire les Écritures, à l’école
des prophètes, et dans des conférences. J’ai eu
beaucoup de grands moments pour me ressourcer » [16]. En mars
1833, le Seigneur commanda à Joseph de « présider
les affaires de l’Église » quand la traduction
serait terminée (voir D&A 90:13). Alors il s’empressa
de continuer son travail.
Section
91
Bientôt,
Joseph Smith arriva à une section de sa Bible qui contenait un
recueil de quatorze livres appelés les Apocryphes. Bien que la
plupart des Bibles à l’époque de Joseph Smith
aient contenu ces livres, un sentiment général
grandissant tendait à remettre en question leur statut
d'Écritures [17]. Compte tenu du débat, Joseph voulut
savoir s’il devait chercher à traduire ces livres, il
posa donc la question au Seigneur. La révélation qui en
résulte, maintenant Doctrine et Alliances 91, enseigna à
Joseph :« [bien qu'ils] contiennent beaucoup de choses qui sont
vraies et [qu’ils] soient en majeure partie traduits
correctement, ils contiennent beaucoup de choses qui ne sont pas
vraies, qui sont des interpolations de la main des hommes » La
révélation ajoutait : « En vérité,
je vous dis qu’il n’est pas nécessaire que les
Apocryphes soient traduits. » (voir D&A 91:1-3) [18]
Joseph
sauta donc cette section et continua à travailler sur la
traduction de l’Ancien Testament pendant plusieurs mois jusqu’à
ce qu’une lettre de la Première Présidence
(Joseph Smith, Sidney Rigdon et Frederick G. Williams), datée
du 2 juillet 1833, à Kirtland adressée aux saints en
Sion, annonçât qu’ils avaient, ce jour, terminé
la traduction des Écritures. » Les Frères
ajoutaient: « Pour cela, nous exprimons notre gratitude envers
notre Père céleste. » [19]
Patrimoine
de la traduction
Après
la mort de Joseph, sa veuve, Emma, conserva les manuscrits de la
traduction, qui ont été publiés par l’Église
réorganisée de Jésus-Christ des Saints des
Derniers Jours en 1867. Pour l’Église actuelle, la
traduction de Joseph Smith constitue des parties de la Perle de grand
prix (le livre de Moïse et Matthieu 24) et alimente de
nombreuses notes de bas de page dans l’édition de la
Bible du roi Jacques de l’Église.
Mais
la traduction a aussi eu une influence considérable sur
l’Église puisqu’elle a façonné le
contenu des Doctrine et Alliances. Plus de la moitié des
Doctrine et Alliances se compose de révélations reçues
pendant les trois ans durant lesquels Joseph Smith travailla à
la traduction de la Bible [20]. Beaucoup découlent directement
de questions que Joseph s’est senti poussé à
poser à mesure que sa compréhension de l’Évangile
grandissait pendant qu’il travaillait à rétablir
des parties claires et précieuses de la Bible.
Pour
en savoir plus sur les sections mentionnées dans cet article,
consultez les volumes de la série Documents dans The Joseph
Smith Papers.
NOTES
[1]
Voir 1 Néphi 13, 14 ; Mormon 8:33.
[2]
Mark Lyman Staker , Hearken, O Ye People: The Historical Setting of
Joseph Smith’s Ohio Revelations, (Salt Lake City : Greg Kofford
Books, 2009), p. 313. Pour en savoir plus sur la nature des
changements faits par Joseph Smith, voir Scott H. Faulring, Kent P.
Jackson, et Robert J. Matthews, éd., Joseph Smith's New
Translation of the Bible: Original Manuscripts (Provo, Utah : Centre
d’études religieuses, Université Brigham Young,
2004).
[3]
Histoire, 1838-1856, volume A-1, Joseph Smith Papers.
[4]
Voir les sections 35, 37, 41, 42, 45, 73, 76, 77, 86, 93, 91, 94, et
124.
[5]
Visions de Moïse, juin 1830, JSP.
[6]
Révélation, juillet 1830-C, JSP.
[7]
« Emma and the Joseph Smith Translation », dans Insights,
vol. 16, numéro 4, août 1996, Institut Maxwell ,
Université Brigham Young, Provo (Utah).
[8]
Révélation, 7 décembre 1830, JSP.
[9]
Révélation, 4 février 1831, JSP.
[10]
Révélation, 9 février 1831, JSP.
[11]
Révélation, 7 mars 1831, JSP.
[12]
Mark Lyman Staker , Hearken, O Ye People: The Historical Setting of
Joseph Smith’s Ohio Revelations, (Salt Lake City : Greg Kofford
Books, 2009), p. 310.
[13]
Révélation, 10 janvier 1832, JSP.
[14]
Révélation, 6 décembre 1832, JSP.
[15]
Joseph Smith à William W. Phelps, 31 juillet 1832, JSP.
[16]
Histoire, 1838-1856, volume A-1, JSP.
[17]
Steven C. Harper, Making Sense of the Doctrine and Covenants, (Salt
Lake City : Deseret Book, 2008), p. 340.
[18]
Révélation, 9 mars 1833, JSP.
[19]
Lettre aux frères en Sion, 2 juillet 1833, JSP.
[20]
Robert J. Matthews, « Joseph Smith Translation of the Bible
(JST) », Encyclopedia of Mormonism, vol. 1, Daniel H. Ludlow,
éd., (New York : Macmillan Publishing Company, 1992), p. 767.