L'existence prémortelle
Oscar
W. McConkie
1967
Trois
des grands problèmes au milieu desquels les hommes réfléchis
se sont débattus à toutes les époques sont :
1.
D'où vient l'homme ?
2.
Pourquoi est-il ici ?
3.
Où va-t-il après la mort ?
La
sagesse accumulée de tous les philosophes n'a pas donné
de réponse satisfaisante à ces questions. Les réponses
se sont révélées dépasser la sagesse de
l'homme. L'humanité est agitée et dans l'insécurité
parce que ces renseignements lui manquent.
Dans
sa bonté, Dieu a révélé à ses
prophètes une grande partie des réponses à ces
problèmes fondamentaux. Nous croyons qu'il révélera
encore des vérités importantes dans ce domaine. Le
plan de salut est le mode d'existence conçu par Dieu le Père par lequel toute sa postérité pourra jouir de tout ce
que possède le Père. Il comprend toutes les lois,
toutes les ordonnances et toutes les expériences nécessaires
pour obtenir l'exaltation près du Père. Pour nous, ces
lois et ces ordonnances constituent l'Évangile de
Jésus-Christ.
Pour
avoir la réponse aux questions fondamentales : où ?
pourquoi ? vers où ? il faut comprendre les rapports entre
Dieu et l'homme et le plan que Dieu a prévu pour l'humanité.
Nous attirons ici l'attention sur les
stades dans lesquels l'homme a existé, et continuera à
exister, comme entité consciente dans le plan de salut de
Dieu.
La
naissance de l'homme n'est pas son commencement. Il y a beaucoup de
passages d'Écriture qui parlent de la place de l'homme dans le plan
des choses avant sa naissance dans la vie terrestre. Nous parlerons
ici de quelques-uns des exposés les plus clairs des prophètes
et des apôtres à ce propos. Pressentant la nature
véritable de l'homme, le grand poète anglais William
Wordsworth proclamait en 1806 :
«
Notre naissance n'est que sommeil et oubli.
«
L'âme qui se lève avec nous, l'Etoile de notre vie,
«
A résidé ailleurs,
«
Et vient de loin ;
«
Ce n'est point dans l'oubli total
«
Ni dans la nudité complète,
«
Mais en traînant des nuées de gloire que nous venons
«
De Dieu, qui est notre foyer.
«
Le ciel nous entoure dans notre tendre enfance. »
(Wordsworth, William, « Ode on the Intimations of Immortality »)
Les
grands maîtres de la pensée sont parvenus à cette
conclusion générale par le raisonnement. Les extraits
suivants du « Phédon » de Platon exposent le
raisonnement de ce maître penseur : « Si ta doctrine
favorite, Socrate, que la connaissance c'est simplement le souvenir,
cela implique aussi nécessairement un temps préalable
pendant lequel nous avons appris ce dont nous nous souvenons
maintenant. Mais ce serait impossible si notre âme ne se
trouvait pas en un certain lieu avant d'exister sous forme humaine ;
ceci est donc un autre argument de l'immortalité de l'âme.
Et si nous avons acquis cette connaissance avant de naître et
sommes nés la possédant, alors nous avions aussi de la
connaissance avant de naître. » (Le « Phédon » de Platon, cité dans The Literature of
England, Woods, Watt, Anderson, 5e éd., p. 160)
Les auteurs inspirés des
Écritures Saintes ont enseigné ce concept ; des poètes
en ont donné des aperçus ; la raison l'a proposé.
Alors pourquoi les hommes de religion et la science profane n'ont-ils
pas accepté cette connaissance supplémentaire de
l'homme ?
La
réponse en est que pour comprendre la doctrine de la
préexistence, il faut accepter deux vérités :
1.
Que Dieu est une entité personnelle distincte, exaltée
et rendue parfaite, à l'image de qui l'homme est créé
;
2.
Que la matière est éternelle, a toujours existé
et « n'a été créée ni faite, ni ne
peut l'être ». (D&A 93:29)
À
notre époque, c'est à Joseph Smith, fils, oracle vivant
de Dieu, que revint la tâche d'attirer l'attention sur ce que
les Écritures disaient et voulaient dire dans ce domaine important et
de donner une lumière indépendante à ce sujet.
Avec son aide on peut comprendre ces deux vérités
nécessaires.
1.
Décrivons la personnalité de Dieu et
nos rapports avec lui : (a) il a
un corps tangible ; (b) il est le Père bien-aimé des
esprits de tous les hommes ; (c) tous les hommes, Jésus y
compris, sont nés, étant ses enfants, dans l'existence prémortelle ; (d) les personnes exaltées vivront en
famille et auront des enfants spirituels, devenant ainsi des parents
éternels.
2.
Les éléments sont éternels. Quand les
prophètes parlaient de la création, ils n'entendaient
pas par là tirer quelque chose de rien. Ils entendaient par là
former quelque chose à partir de quelque chose d'autre. C'est
ainsi que lorsque Dieu créa la terre, il « organisa et
forma les cieux et la terre » (Abraham 4:1). C'est-à-dire qu'en
utilisant une matière diffuse et sans forme, il l'organisa ou
la créa pour qu'elle devînt ce que nous avons maintenant.
Pour
comprendre l'existence pré-terrestre, on doit également
comprendre que l'esprit est une matière matérielle. « La
matière immatérielle, cela n'existe pas. Tout esprit est matière, mais
il est plus raffiné ou plus pur et ne peut être discerné que par des
yeux plus purs ; nous ne pouvons le voir, mais lorsque notre corps sera purifié, nous verrons que tout cela est matière » (D&A 131:7-8).
L'intelligence, ou la
lumière et la vérité, est souvent utilisée
comme synonyme de l'élément spirituel.
Une
fois qu'on a ces données, on peut comprendre clairement que le
Seigneur parlait de notre existence prémortelle lorsqu'il disait : «
Car moi, le Seigneur Dieu, je creai spirituellement toutes les choses
dont j'ai parlé avant qu'elles fussent naturellement sur la
face de la terre » (Moïse 3:5 ; Abraham 5:4-5). Comme il venait de parler de créer
« les cieux et la terre » (Moïse 2:1-27), cela nous apprend que tout
avait été créé sous une certaine forme
avant sa création naturelle ou actuelle.
Abraham
et Jude appellent cette situation préexistante notre premier
état, c'est-à-dire, la première fois que nous
avons vécu comme entité consciente (voir Abraham 3:22-28 ; Jude 6). Toute forme de
vie a été créée spirituellement avant de
naître ici-bas.
De
par sa forme ou son apparence, l'esprit est semblable à la
forme ou apparence temporelle de la forme de vie concernée : «
…à l'image de ce qui est temporel... l'esprit de
l'homme à l'image de sa personne, de même que l'esprit
de la bête et de toute autre créature que Dieu a faite
» (D&A 77:2).
Lorsque
nous sommes tous nés ou avons été créés
dans le monde des esprits, nous avons vécu avec notre Père
et il nous a enseigné à distinguer le bien du mal.
Certains utilisèrent leur droit de choisir dans leurs actions
et leurs pensées et devinrent « nobles et grands » (Abraham 3:22-28).
Certains devaient être « dirigeants ».
Abraham
appelle ces enfants spirituels « les intelligences qui furent
organisées avant que le monde fût » (Abraham 3:22-28).
Dans
son célèbre sermon de l'Aréopage, l'apôtre
Paul enseigna que « de lui nous sommes la race » et que
Dieu « a déterminé les temps fixés
d'avance, et les bornes de leur demeure » (Actes 17:26, 29, version du Roi Jacques). Ceci fait penser
qu'à une époque « fixée d'avance »,
l'humanité s'est préparée à divers degrés
à la naissance.
Le
chef des apôtres, Pierre, propose l'idée que ce qui nous
caractérise dans la naissance est le résultat de ce que
nous avons fait dans un état préexistant, disant que
certains sont « élus selon la prescience de Dieu »
(1 Pierre 1:2). Un exemple biblique remarquable d'une personne choisie avant sa
naissance est celui de Jérémie. Le Seigneur parla à
Jérémie de son appel au ministère en lui disant
: « Avant que je t'eusse formé dans le ventre de ta
mère, je te connaissais ; et avant que tu fusses sorti de son
sein, je t'avais consacré, je t'avais établi prophète
des nations » (Jérémie 1:4-5). À Abraham le Seigneur dit simplement :
« Tu fus choisi avant ta naissance » (Abraham 3:23).
Alma
enseignait que toutes les personnes qui étaient ordonnées
à la prêtrise de Melchisédek furent pré-ordonnées
dans le conseil éternel de l'existence prémortelle à
recevoir pareil appel (voir Alma 13:3-9).
Nous
n'avons que peu de détails sur nos activités dans l'existence prémortelle. Cependant, une vingtaine de citations
scripturales révèlent ceci :
1.
Les enfants spirituels de Dieu se réunirent en un grand
conseil ou conseils dans les cieux (voir Moïse 4:1-4 ; Abraham 3:25-28 ; D&A 29:30-40 ; Luc 10:18
; Jude 6 ; 2 Pierre 2:4 ; 2 Néphi 2:17-18 ; 9:8-9)
2.
Le plan de salut y fut présenté (voir Job. 38:1-7 ; Ésaïe 49:1-5)
3.
Le Christ était le plus grand de tous les enfants spirituels
de notre Père (voir D&A 93:21-23 ; Abraham 3:31)
4.
En fin de compte, les esprits n'étaient pas égaux (voir Abraham 3)
5.
Il y eut un grand conflit parmi les esprits que, dans son Apocalypse,
Jean traite de « guerre dans les cieux », dans lequel le
tiers des armées du ciel fut chassé (voir Apocalypse 12:4-9 ; 13:8 ; Luc 10:18 ; Moïse 4:1-4 ; Abraham 3:24-28
; D&A 29:36-38 ; Ésaïe 14:12-20)
6.
Tous prirent position, soit pour le Christ soit pour Lucifer (voir Matthieu 12:30 ; Marc 9:40 ; Luc 9:50)
Dans l'existence prémortelle
nous étions des esprits. Nous voyions notre Père et
demeurions en sa présence. Nous voyions la différence
entre lui et nous. C'était un esprit revêtu d'un corps
glorieux. Il était devenu une âme selon la définition
de l'âme que lui-même avait donnée, c'est-à-dire
qu'une âme est l'esprit et le corps inséparablement unis. Nous voulions être semblables à lui.
Dans
les conseils des cieux on nous présenta le plan qui nous
permettrait de devenir semblables à notre Père. Ce
plan comportait deux éléments essentiels :
Premièrement,
nous apprîmes qu'une terre serait préparée où
nous pourrions vivre pendant un certain temps. Nous y recevrions un
corps de chair, d'os et de sang. Lorsque nous obtiendrions ce corps
nous serions sujets à toutes les vicissitudes de la vie
terrestre. C'est-à-dire que nous entrerions en contact avec la
souffrance et la douleur, le péché et le chagrin. Nous
connaîtrions aussi la joie et le plaisir.
Deuxièmement,
la mortalité devait être un lieu d'épreuve en vue
de l'exaltation, pour voir qui parmi les enfants de Dieu était
digne de devenir un dieu lui-même. Le Seigneur dit des esprits
justes de l'existence préterrestre : « Nous ferons
une terre sur laquelle ceux-ci pourront habiter ; nous les mettrons
ainsi à l'épreuve, pour voir s'ils feront tout ce que
le Seigneur, leur Dieu, leur commandera. » (Abraham 3:24-25)
Non
seulement nous avons accepté les défis lancés
par ce plan mais nous avons poussé des cris de joie (voir Job 38:7) devant
la merveilleuse possibilité qui nous était donnée
de progresser.
« Notre épreuve mortelle devait être une
période brève, rien qu'une courte étendue liant l'éternité passée à
l'éternité future. Et cependant ce devait être une période d'une
importance capitale. Ou bien elle donnerait à ceux qui la recevraient
la bénédiction de la vie éternelle, qui est le plus grand don de Dieu,
et les qualifierait ainsi pour la divinité en tant que fils et filles
de notre Père éternel, ou bien, s'ils se rebellaient et refusaient de
se conformer aux lois et aux ordonnances qui étaient prévues pour leur
salut, cela les priverait du grand don et ils se verraient affectés,
après la résurrection, à une sphère inférieure, selon leurs oeuvres. » (Joseph Fielding Smith, Church News, 12 juin 1949, p. 21 ; Doctrine du salut, vol. 1, p. 73)
(Source : Oscar W. McConkie, Le royaume de Dieu)