La foi, la grâce et les œuvres
 

 

Marc-Olivier R.

 

 


 

     La question du salut et des rôles respectifs de la foi, de la grâce et des oeuvres est un débat aussi ancien que les débuts de la Réforme du XVIe siècle, voire plus ancien. Depuis cinq siècles, les Églises chrétiennes sont partagées sur cette question cruciale : qu'est-ce qui apporte le salut à l'homme ? La foi ou les œuvres ? Quel est le rôle de la grâce de Jésus-Christ dans le salut ?


      Il semble que les Églises protestantes, issues de la Réforme, attribuent le salut à la grâce seule de Jésus-Christ, selon le bon vouloir de Dieu et sous la condition que l'homme ait foi au Fils de Dieu ; à l'opposé, l'Église Catholique, si elle admet la nécessité de la grâce pour le salut de l'homme, affirme en revanche que la famille humaine doit produire de bonnes œuvres, en plus de la foi, si elle veut espérer être sauvée par cette grâce. Ainsi, les théologiens de tous bords s'affrontent et le sujet fait couler beaucoup d'encre.

 

      L'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours a été organisée le 6 avril 1830. Quelques mois avant, le Livre de Mormon était imprimé et commençait à être distribué. Ce livre d’Écritures Saintes, contient, comme la Bible, la parole de Dieu. Il n’est par conséquent pas étonnant que des chapitres entiers soient consacrés tant au sacrifice expiatoire du Christ qu'à la foi, aux oeuvres et, de façon générale, au salut. Dans l’abondance du Livre de Mormon sur de tels sujets, un verset, un tout petit verset résume à lui seul, en quelques mots, la position de la jeune Église sur un sujet aussi délicat : 

 

Car nous travaillons diligemment à écrire, pour persuader nos enfants, et aussi nos frères, de croire au Christ et d'être réconciliés avec Dieu ; car nous savons que c'est par la grâce que nous sommes sauvés, après tout ce que nous pouvons faire. (2 Néphi 25:23 ; gras ajouté par nos soins)

 


Qui est l'homme pour Dieu ?

 

     Une telle position laisse de côté l'idée selon laquelle Dieu juge et désigne de manière arbitraire ceux qui sont dignes de recevoir sa gloire. Le salut n'est plus une simple question de bon vouloir du Seigneur seulement. L'homme a des choix à faire, et il est responsabilisé tant devant les cieux que devant les hommes. Ainsi, si les Saints des Derniers Jours devaient prendre parti entre les théologiens catholiques et les théologiens protestants, ce ne serait pas du côté des Réformés que la balance pencherait. Dieu ne sauve pas arbitrairement, pas plus qu'il écarte sans raison valable qui que ce soit de la gloire qu'il a en réserve pour ses enfants.

 

     Pour mieux comprendre la position des Saints des Derniers Jours, il faut connaître leur conception de la raison d'être de l'homme sur la terre. Les êtres humains sont littéralement les enfants de Dieu - c'est-à-dire que notre Père Céleste est le père de l'esprit qui habite notre corps. L’esprit de l’homme a été créé bien avant son corps. La vie de l’esprit avant la naissance du corps est appelée la préexistence. Toute l’humanité était en compagnie de Dieu lorsqu'il créa la terre. Nous tous étions de ces fils et filles de Dieu qui poussaient des cris de joie quand Dieu fondait la terre (voir Job 38:4,7). Notre Père céleste a réuni tous ses enfants et leur a présenté un plan qui leur permettrait de progresser et de lui ressembler davantage. Ce plan prévoyait que nous soyons placés dans la condition mortelle, avec un corps de chair, libres de choisir entre le bien et le mal. Les choix que nous ferions pendant notre séjour terrestre détermineraient notre état de bonheur après la résurrection.

 

     Dieu, dans sa prescience, savait que la famille humaine ferait souvent de mauvais choix. Jésus fut choisi comme Rédempteur afin que, si nous croyions en lui et nous repentions, nous recevions, par sa grâce, le pardon de nos péchés, la paix de Dieu dans notre vie, et la possibilité de retourner auprès de notre Père céleste après la résurrection. La résurrection (c'est-à-dire la réunification de notre corps avec notre esprit) serait gratuite pour toute la famille humaine (1 Corinthiens 15:20-22). Mais si notre résurrection est gratuite (car nous ne sommes pas responsables de notre mort physique), notre état de bonheur après la résurrection dépendrait de nos choix.


     Ainsi, nos oeuvres détermineront le degré de gloire et de bonheur que nous recevrons dans la vie à venir. Cependant, ce bonheur éternel, quel qu'en soit le degré, n'est à notre disposition
que grâce au sacrifice expiatoire du Christ. J'aurai l'occasion d'y revenir.

 

     J'ai pris de nombreux raccourcis pour expliquer le plan de Dieu pour la famille humaine. Précisons que nous avions, à un certain degré, conscience des souffrances et des tentations que la vie nous offrirait, et que c'est précisément pour faire des choix, de bonnes oeuvres et progresser que nous sommes ici-bas.

 

     À la lumière de ces explications, il est impossible pour les saints des derniers jours d'accepter l’idée que Dieu sauve ou jette en enfer arbitrairement, selon son bon vouloir, et qu'une partie de la famille humaine aille en enfer simplement parce qu'elle n'a pas eu l'occasion de connaître le Christ, de l'accepter et de recevoir le pardon de ses péchés. Dieu ne met pas d'un côté les quelques centaines de millions de chrétiens qui sont sauvés parce qu'ils ont accepté le Christ, quelle que soit la façon dont ils ont dirigé leur vie, et de l'autre les milliards de damnés parce qu'ils n'ont jamais eu l’occasion de l’accepter, quand bien même leur façon de vivre eut été excellente.

 


Paroles de Paul : le salut par la foi ?

 

     Pourtant, lorsqu'on lit la Bible et qu'on se penche tout particulièrement sur les épîtres pauliennes, on lit des passages qui, sans une lecture attentive, pourraient donner l'impression que les oeuvres que nous produisons dans cette vie n'ont strictement aucun rapport avec notre salut. Passons en revue quelques-uns de ces passages :

 

Or, si c'est par grâce, ce n'est plus par les oeuvres; autrement la grâce n'est plus une grâce. Et si c'est par les oeuvres, ce n'est plus une grâce; autrement, l'oeuvre n'est plus une oeuvre. (Romains 11:6)

 

Car nul ne sera justifié devant lui par les oeuvres de la loi, puisque c'est par la loi que vient la connaissance du péché. (Romains 3:20)

 

Néanmoins, sachant que ce n'est pas par les oeuvres de la loi que l'homme est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ, nous aussi nous avons cru en Jésus-Christ, afin d'être justifié par la foi en Christ et non par les oeuvres de la loi, parce que nulle chair ne sera justifiée par les oeuvres de la loi. (Galates 2:16)

 

Et que nul ne soit justifié devant Dieu par la loi, cela est évident, puisqu'il est dit : Le juste vivra par la foi. (Galates 3:11)

 

Et que quiconque croit est justifié par lui de toutes les choses dont vous ne pouviez être justifiés par la loi de Moïse. (Actes 13:38)

 

Car nous pensons que l'homme est justifié par la foi, sans les oeuvres de la loi. (Romains 3:28)

 

     Cette liste n’est pas exhaustive mais est, à mon avis, assez représentative des références sur lesquelles s’appuient les Protestants ou les Évangéliques pour affirmer que seule la foi peut sauver, par la grâce de Jésus-Christ.

 

     Ce serait cependant une erreur que de s'arrêter à ces passages seuls. Pour comprendre réellement ce que voulait dire Paul en matière de salut, nous devons non seulement confronter ces versets à d'autres paroles de Paul, mais aussi à d'autres versets de la Bible. Nous dégagerons alors une harmonie à partir de laquelle nous pourrons comprendre la réelle signification de ces passages. Au préalable, lisons ce que dit Pierre à propos de Paul et de ses écrits :

 

Croyez que la patience de notre Seigneur est votre salut, comme notre bien-aimé frère Paul vous l'a aussi écrit, selon la sagesse qui lui a été donnée. C'est ce qu'il fait dans toutes les lettres, où il parle de ces choses, dans lesquelles il y a des points difficiles à comprendre, dont les personnes ignorantes et mal affermies tordent le sens, comme celui des autres Écritures, pour leur propre ruine. (2 Pierre 3 :15-16)

 

     Examinons à présent d'autres versets bibliques qui traitent de la foi, des oeuvres, et de la grâce.

 


Contradictions ?

 

     Commençons par Paul, que nous venons de citer. Après chaque verset, je propose un commentaire ou une question.

 

Ce ne sont pas, en effet, ceux qui écoutent la loi qui sont justes devant Dieu, mais ce sont ceux qui la mettent en pratique qui seront justifiés. (...) C'est ce qui paraîtra au jour où selon mon Évangile, Dieu jugera par Jésus-Christ les actions secrètes des hommes. (Romains 2:13, 16)

 

     Ces versets semblent contredire totalement ce qui a précédemment été établi : ceux qui pratiquent les oeuvres de la loi seront justifiés. Christ sera juge des hommes, et il exercera ce jugement au regard de leurs « actions secrètes », donc de leurs oeuvres.

 

Cette parole est certaine, et je veux que tu affirmes ces choses, afin que ceux qui ont cru en Dieu s'appliquent à pratiquer de bonnes oeuvres. Voilà ce qui est bon et utile aux hommes. (Philémon 3:8)

 

     Si les bonnes oeuvres découlent automatiquement de la conversion, quelle nécessité y a-t-il à encourager de telles pratiques, puisqu'elles devraient aller de soi ?

 

Car il nous faut tous comparaître devant le tribunal de Christ, afin que chacun reçoive selon le bien ou le mal qu'il aura fait, étant dans son corps. (2 Corinthiens 5:10)

 

     Chaque homme sera jugé selon ses oeuvres.

 

Mais par ton endurcissement et par ton coeur impénitent, tu t'amasses un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu, qui rendra a chacun selon ses oeuvres : réservant la vie éternelle à ceux qui, par la persévérance à bien faire, cherchent l'honneur, la gloire et l'immortalité ; mais l'irritation et la colère ceux qui, par esprit de dispute, sont rebelles à la vérité et obéissent à l'injustice. (...) Gloire, honneur et paix pour quiconque fait le bien, pour le Juif premièrement, puis pour le Grec !  (Romains 2:5-8, 10)

 

     Remarquez ici que Dieu donne la vie éternelle à ceux qui persévèrent « à bien faire » ; son jugement est juste, et non arbitraire. On réaffirme ici que Dieu « rendra à chacun selon ses oeuvres.»

 

Celui qui plante et celui qui arrose sont égaux, et chacun recevra sa propre récompense selon son propre travail. (1 Corinthiens 3:8)

 

     À nouveau, ce sont les oeuvres qui déterminent la récompense que Dieu donnera.

 

Ne nous lassons pas de faire le bien ; car nous moissonnerons au temps convenable, si nous ne nous relâchons pas. Ainsi donc, pendant que nous en avons l'occasion, pratiquons le bien envers tous, et surtout envers les frères en la foi. (Galates 6:9-10)

 

     On fait ici un lien direct entre les oeuvres et les récompenses de Dieu. Notez à présent ce verset très intéressant :

 

Ce n'est pas que j'aie déjà remporté le prix, ou que j'aie déjà atteint la perfection ; mais je cours pour tâcher de le saisir, puisque moi aussi j'ai été saisi par Jésus-Christ. Frère, je ne pense pas l'avoir saisi ; mais je fais une chose : oubliant ce qui est en arrière et me portant vers ce qui est en avant, je cours vers le but, pour remporter le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ. (Philippiens 3:12-14)

 

     Si Paul se considérait déjà sauvé par la foi, pourquoi donc exprimait-il le besoin de courir « vers le but » ? Ainsi, après avoir été « saisi par Jésus-Christ », il faut encore produire des bonnes oeuvres afin de « remporter le prix de la vocation céleste de Dieu ». Étudions une dernière mention des œuvres par Paul, après quoi nous étudierons d’autres versets du Nouveau Testament :

 

Ne savez-vous pas que ceux qui courent dans le stade courent tous, mais qu'un seul remporte le prix ? Courez de manière à le remporter. Tous ceux qui combattent s'imposent toute espèce d'abstinences, et ils le font pour obtenir une couronne corruptible ; mais nous, faisons-le pour une couronne incorruptible. Moi donc, je cours, non pas comme à l'aventure ; je frappe, non pas comme battant de l'air. Mais je traite durement mon corps et je le tiens assujetti, de peur d'être moi-même rejeté, après avoir prêché aux autres. (1 Corinthiens 9:24-27)

 

     Deux choses à relever : Paul reconnaît explicitement que s'il ne se garde pas de produire des mauvaises oeuvres, il peut être « rejeté » par Dieu. D'autre part, on note à nouveau l'idée qu'après la conversion il faut produire de bonnes oeuvres pour obtenir la « couronne incorruptible », à savoir la vie éternelle. Comment donc certains affirment-ils être sauvés simplement parce qu'ils sont convertis à Christ, alors que Paul ne prétendait rien de tel ?

 

     Nous pourrions mentionner de nombreux autres versets tirés des épîtres de Paul, mais nous nous limiterons pour le moment à ce qui précède. Citons à présent les autres livres du Nouveau Testament :

 

Ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur ! n'entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Plusieurs me diront en ce jour-là : Seigneur, Seigneur, n'avons-nous pas prophétisé par ton nom ? N'avons-nous pas chassé des démons par ton nom ? Et n'avons-nous pas fait beaucoup de miracles par ton nom ? Alors je leur dirai ouvertement : Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi, vous qui commettez l'iniquité.


C'est pourquoi, quiconque entend ces paroles que je dis et les met en pratique, sera semblable à un homme prudent qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont jetés contre cette maison : elle n'est point tombée, parce qu'elle était fondée sur le roc. Mais quiconque entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et ont battu cette maison : elle est tombée et sa ruine a été grande. (Matthieu 7:21-27)

 

Car le Fils de l'homme doit venir dans la gloire de son Père, avec ses anges ; et alors il rendra à chacun selon ses oeuvres. (Matthieu 16:27)

 

Pourquoi m'appelez-vous Seigneur, Seigneur ! et ne faites-vous pas ce que je dis ? (Luc 6:46)

 

Et il dit aux Juifs qui avaient cru en lui: Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples. (Jean 8:31)

 

Et si vous invoquez comme Père celui qui juge selon l'oeuvre de chacun, sans acception de personnes, conduisez-vous avec crainte pendant le temps de votre pèlerinage. (1 Pierre 1:17-18)

 

Car c'est le moment où le jugement va commencer par la maison de Dieu. Or, si c'est par nous qu'il commence, quelle sera la fin de ceux qui n'obéissent pas à l'Evangile de Dieu ? Et si le juste se sauve avec peine, que deviendront l'impie et le pécheur ? (1 Pierre 4:17-18)

 

Et je vis les morts, les grands et les petits, qui se tenaient devant le trône. Des livres furent ouverts. Et un autre livre fut ouvert, celui qui est le livre de vie. Et les morts furent jugés selon leurs oeuvres, d'après ce qui était écrit dans ces livres. (Apocalypse 20:12)

 


Foi et oeuvres : complémentarité

 

     En résumé, d'un côté Paul affirme que l'homme n'est pas justifié par ses oeuvres mais par la foi seule, de l'autre toujours Paul, et d'autres auteurs bibliques, qui affirment que la foi seule ne suffit pas, que des efforts substantiels doivent être produits pour recevoir la plus grande gloire que Dieu réserve à l'homme, et que nous seront jugés en fonction de nos oeuvres. Il y a de quoi se poser des questions devant ce qui semble une contradiction flagrante. La Bible est-elle à ce point inconstante ? L'épître de Jacques d'une part, le Livre de Mormon d'autre part vont nous aider à harmoniser ces passages.

 

      Jacques :

 

Mes frères, que sert-il à quelqu'un de dire qu'il a la foi, s'il n'a pas les œuvres ? La foi peut-elle le sauver ?


Si un frère ou une soeur sont nus et manquent de nourriture de chaque jour, et que l'un d'entre vous leur dise : Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez ! et que vous ne leur donniez pas ce qui est nécessaire au corps, à quoi cela sert-il ?


Il en est ainsi de la foi : si elle n'a pas les oeuvres, elle est morte en elle-même.


Mais quelqu'un dira : Toi, tu as la foi ; et moi, j'ai les oeuvres. Montre-moi ta foi sans les oeuvres, et moi je te montrerai la foi par mes oeuvres.
Tu crois qu'il y a un seul Dieu, tu fais bien ; les démons le croient aussi, et ils tremblent.


Veux-tu savoir, ô homme vain, que la foi sans les oeuvres est inutile ?
Abraham, notre père, ne fut-il pas justifié par les oeuvres, lorsqu'il offrit son fils Isaac sur l'autel ?


Tu vois que la foi agissait avec ses oeuvres, et que par les oeuvres la foi fut rendue parfaite.


Ainsi s'accomplit ce que dit l'Écriture : Abraham crut à Dieu, et cela lui fut imputé à justice ; et il fut appelé ami de Dieu.


Vous voyez que l'homme est justifié par les oeuvres, et non par la foi seulement.


Rahab la prostituée ne fut-elle pas également justifiée par les oeuvres, lorsqu'elle reçut les messagers et qu'elle les fit partir par un autre chemin ?


Comme le corps sans âme est mort, de même la foi sans les oeuvres est morte. (Jacques 2:14-26 ; gras ajouté par nos soins)

 

     Quels versets puissants ! Quelle affirmation splendide et d’une grande clarté ! Qu'est-ce que la foi sans les oeuvres ? Rien. La foi se définit alors comme une croyance accompagnée d'oeuvres. En quelque sorte, la foi sans les oeuvres n'est pas vraiment la foi. Se demander si c'est la foi ou les oeuvres qui permettent de sauver l'homme est un faux débat : ce sont les deux qui le sanctifient et le rendent acceptable devant Dieu.

 

     Sommes-nous sauvés parce que nous avons accepté le Christ dans notre coeur ? Nous le sommes, à condition que nos oeuvres accompagnent notre foi et viennent la confirmer. Il n'y a pas de salut par la foi seule, pas plus qu'il n'y a de salut par les oeuvres seules. Elles sont complémentaires, et même interdépendantes, car la vraie foi produit de bonnes oeuvres, et les deux ensemble sont le critère du salut.

 

     Que signifie donc l’affirmation de Paul que l'homme est justifié par la foi, et non par les œuvres ? Lorsque Paul parle des oeuvres, il parle spécifiquement des oeuvres de la loi, en d'autres termes l'obéissance pratique à la loi. Pourquoi l'obéissance à la loi n'a-t-elle pas, et à elle seule, le pouvoir de sauver ? Parce que la loi, c'est-à-dire la loi de Moïse, était une image, une préparation pour Israël à la venue du Christ. C'était en vue de préparer le peuple que la loi était donnée, avec ses très nombreux symboles représentant la mission du Messie et la nouvelle loi qui allait être révélée : celle de la foi.


Paul ne dit pas que l'on ne doit plus obéir à la loi parce qu'elle ne sauve pas ; il affirme que la loi n'a pas le pouvoir
intrinsèque de sauver. En d'autres termes, c'est grâce à Jésus-Christ que nous sommes sauvés, par son sacrifice expiatoire offert pour l'humanité ; la foi et les œuvres nous permettent de bénéficier de cette grâce. Aucune loi n'a en elle-même le pouvoir de sauver ; la loi, lorsqu’elle est suivie, ne fait que « qualifier » pour le salut qui s'obtient par la grâce.

 

      Citons à présent un auteur du Livre de Mormon, le prophète Abinadi :

 

Et de plus, je vous dis que le salut ne vient pas par la loi seule ; et s'il n'y avait pas l'expiation, que Dieu lui-même fera pour les péchés et les iniquités de son peuple, il devrait périr, malgré la loi de Moïse.


Et maintenant, je vous dis qu'il était nécessaire qu'une loi fût donnée aux enfants d'Israël, oui, une loi très stricte ; car ils étaient un peuple au cou roide, prompt à commettre l'iniquité et lent à se souvenir du Seigneur, son Dieu ;


c'est pourquoi il y eut une loi qui leur fut donnée, oui, une loi d'observances et d'ordonnances, une loi qu'ils devaient observer strictement de jour en jour, pour garder en eux le souvenir de Dieu et de leur devoir envers lui.


Mais voici, je vous dis que toutes ces choses-là étaient des figures de choses à venir.


Et maintenant, comprenaient-ils la loi ? Je vous le dis : non, ils ne comprenaient pas tous la loi ; et cela à cause de l'endurcissement de leur cœur; car ils ne comprenaient pas qu'aucun homme ne pouvait être sauvé, si ce n'était par la rédemption de Dieu.


Car voici, Moïse ne leur a-t-il pas prophétisé que le Messie viendrait, et que Dieu rachèterait son peuple ? Oui, et même tous les prophètes qui ont jamais prophétisé depuis le commencement du monde, n'ont-ils pas parlé plus ou moins de ces choses ? (Mosiah 13:28-33 ; gras ajouté par nos soins)

 

     Le propos de Paul et d’Abinadi n’est pas que nous devons cesser de faire de bonnes oeuvres ou que celles-ci n'ont pas d'influence sur le salut, mais que nos oeuvres et notre obéissance à Dieu n'ont de valeur qu'en raison du sacrifice expiatoire du Christ, et qu'elles n'ont pas le pouvoir intrinsèque de sauver. En relisant dans cette perspective les propos de Paul cités plus haut, nous voyons qu'il n'y a aucune contradiction entre l'affirmation selon laquelle les oeuvres ne sauvent pas (elles n'en ont intrinsèquement pas le pouvoir) et celle qui dit que nul ne peut être sauvé sans les oeuvres (puisqu'elles qualifient pour le salut et sont le produit de la foi). Ce que Paul, Jacques et Abinadi dénoncent, c'est l’idolâtrie de la loi donnée par Dieu, alors que toute notre attention, notre foi et notre adoration doivent être rendues à Dieu et à son Fils, Jésus-Christ.

 

     Citons de nouveau Paul :

 

Car - chose impossible à la loi, parce que la chair la rendait sans force, - Dieu a condamné le péché dans la chair, en envoyant, à cause du péché, son propre Fils dans une chair semblable à celle du péché, et cela afin que la justice de la loi fût accomplie en nous, qui marchons non selon la chair, mais selon l'esprit. (Romains 8:3-4 ; gras ajouté par nos soins)

 

Joseph Fielding Smith explique le contexte des discours de Paul sur le salut par la foi et de Jacques sur le salut par les œuvres :

 

Il y a dans le monde chrétien diverses opinions concernant ce qui est nécessaire pour réaliser le salut des hommes. Il y en a qui ont accepté très littéralement, mais sans en comprendre la signification, cette parole de Paul aux Éphésiens : « Car c'est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu. Ce n'est point par les oeuvres afin que personne ne se glorifie. » (Éphésiens 2:8, 9)

 

Ceux qui acceptent cette idée aussi littéralement qu'elle est rapportée, sans se référer au contexte, oublient ou rejettent l'épître de Jacques qui, pour eux, enseigne apparemment une doctrine très différente (...).


Je voudrais faire ressortir pourquoi il n'y a absolument aucun conflit entre les enseignements de ces deux apôtres d'autrefois ; que Paul enseignait la doctrine qu'enseignait Jacques, et que Jacques était parfaitement d'accord avec la doctrine qu'enseignait Paul : le fait étant qu'ils abordaient le sujet sous des angles différents.


Paul avait affaire à des gens qui croyaient qu'un homme ne pouvait être sauvé que s'il obéissait à la loi de Moïse - qu'il se trouvait plus ou moins sous la nécessité de se sauver lui-même - et qui niaient le plein pouvoir de l'expiation de Jésus-Christ.


D'autre part, Jacques défendait la nécessité des oeuvres, s'opposant à l'idée qui régnait chez d'autres, qui professaient avoir foi au Christ, que s'ils avaient la foi, c'était tout ce qu'il fallait. Ils abordaient donc ce sujet à partir de points de vue différents et chacun d'eux enseignait la vérité. (Smith, Joseph Fielding, 1977, Doctrine du Salut, volume 2, écrits compilés par Bruce R. McConkie, p. 285-286)

 


Conclusion

 

     Résumons la position de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours sur l’obtention du salut : l'homme reçoit une plénitude de gloire et devient co-héritier du Christ s'il fait preuve de foi au Christ et produit de bonnes oeuvres tout au long de sa vie. Ceux qui n'ont pas eu l'occasion de recevoir l'Évangile de leur vivant l'entendront après la mort, pendant qu'ils attendent leur résurrection. C’est ce qu’a enseigné Pierre (voir 1 Pierre 3:18-19, 4:6). Un jugement juste et miséricordieux attend chaque homme et chaque femme qui a vécu ici-bas. Dieu n’est pas un Dieu injuste qui jette en enfer ceux qui n'ont pas reçu la connaissance de son Évangile alors qu’ils l'auraient peut-être accepté s'ils en avaient eu l'occasion.

 

     Finalement, on se demande si la croyance des protestants et celle des saints des derniers jours sont vraiment différentes sur ce point-là. Les premiers affirment que les bonnes oeuvres sont la suite logique de la foi, ce que leur accorde les seconds. La différence, c’est la place que prennent les oeuvres dans le salut de Dieu : pour les saints des derniers jours, Dieu juge en fonction de la foi et des oeuvres, alors que pour les Réformés et les Églises qui en découlent, le Seigneur ne tient pas compte des oeuvres dans son jugement. Mais les uns et les autres, comme la chrétienté en général, affirment que la foi sans les oeuvres est morte, et que l'un ne va pas sans l'autre. En tant que saint des derniers jours, j’exprime ma reconnaissance pour le sacrifice expiatoire du Christ qui, par sa mort et sa résurrection, nous donne la grâce qui sauve.

 

car nous savons que c'est par la grâce que nous sommes sauvés, après tout ce que nous pouvons faire. (2 Néphi 25:23)

 

 

 

Note : Sauf indication contraire, les citations bibliques sont tirées de la traduction de Louis Segond, version 1910

 

 

Première parution : 11 août 2003
Mise à jour : 9 mai 2004

 

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