Réunions publiques à Boulogne-sur-mer


(1850)

 

    


      Note : Pour préparer le lecteur à ce qui suit, il convient de préciser qu'au milieu du 19e siècle les pasteurs des diverses confessions protestantes véhiculaient des rumeurs à propos de Joseph Smith. Nous nous empressons d'ajouter que nous n'en tenons pas rigueur à nos frères protestants. Cependant, nous avons choisi de diffuser ce document pour sa valeur historique. Il est également utile de préciser que la disparité doctrinale entre les diverses dénominations protestantes du milieu du 19ème siècle, telle qu'elle apparaît dans ce récit, n'est plus à propos. Nous diffusons cependant ce texte pour l'intérêt qu'il représente du point de vue de la doctrine de l'Église rétablie.

 
 

Il fallait trouver à louer une salle dans le centre de la ville et annoncer une série de conférences sur les principes de l’Évangile. John Taylor envoya plusieurs lettres au directeur de l’Interpreter, un hebdomadaire, expliquant l’objet de leur mission et exposant brièvement ce qu’était le rétablissement de l’Évangile, ainsi que les principes de la nouvelle foi. Ces lettres furent publiées en français et en anglais.

 

Les conférences ne réunirent pas de grands auditoires. Il y vint plusieurs pasteurs protestants de la ville. Ils suivirent les conférences, pour montrer bruyamment leur désapprobation. À la première conférence, un certain Robertson, ministre anglais Indépendant, se leva et demanda de poser quelques questions. Craignant qu’une controverse publique ne causât du désordre et n’amenât le maire à retirer l’autorisation de tenir les réunions, John Taylor répondit au révérend qu’il répondrait à toutes ses questions, soit chez lui, soit chez le révérend ; mais qu’il ne pouvait pas entrer dans une discussion à la réunion, de peur que la salle ne devienne houleuse.

 

M. Robertson rétorqua que c’était pour éclairer le public et ses amis présents à la réunion qu’il demandait à exprimer quelques réflexions. John Taylor lui dit qu’il pourrait amener ses amis à la réunion.

 

Insistant toujours, M. Robertson suivit le conférencier dans la rue, et accompagné d’un ministre baptiste, se mit à crier « Joe Smith », qui, à l’entendre, n’était qu’un imposteur, etc. « De qui parlez-vous ? » demanda John Taylor. « J’ai connu M. Joseph Smith ; c’était un homme digne, qui n’aurait jamais traité un étranger comme vous le faites pour moi ». Les deux personnages le suivirent ; mais il ne s’occupa plus d’eux.

 

Quelques jours après, il reçut la demande d’une séance contradictoire de la part des révérends C. W. Cleeve, James Robertson et Philipp Cater (ministre anglais). John Taylor envoya leur demande au maire avec une lettre sollicitant l’avis du maire sur la question. Le maire ne vit pas d’objection à la réunion projetée. On fit donc des préparatifs pour qu’elle eut lieu.

 

Les points mis en discussion devaient être les suivants :

 

1. Feu Joseph Smith, sa carrière publique et ses prétentions à fonder une religion.

2. Le Livre de Mormon a-t-il été révélé par Dieu ?

3. Les ministres de la confession mormone ont-ils été choisis directement par Dieu ?

      4. M. Taylor aura toute liberté de soutenir son point de vue et de discuter celui de ses contradicteurs.

 

La discussion eut lieu le 11 juillet et dura trois soirées, de 19 heures à 22 heures, chaque interlocuteur ayant le droit de parler alternativement pendant trente minutes. Les deux premières soirées et une heure de la troisième furent occupées à discuter les trois premiers points, de sorte que John Taylor n’eut qu’une heure pour commenter les doctrines de ses contradicteurs.

 

      Au cours de la discussion au sujet de Joseph Smith, les contradicteurs répétèrent les accusations du Dr. Bennett, du Rev. Henry Casell, et d’autres, imputant à Joseph Smith des actes immoraux et des crimes. John Taylor ne pouvait réfuter ces accusations que par son témoignage personnel et ceux de Curtis Bolton et John Pack, qui avaient connu Joseph Smith. Le témoignage de John Taylor fut exprimé avec force. Bouillonnant d’indignation devant les calomnies lancées contre son ami, il dit :

 

     « J’affirme que j’ai connu Joseph Smith pendant des années. J’ai voyagé avec lui ; j’ai travaillé avec lui en public et en privé ; j’ai siégé avec lui dans plusieurs conseils ; je l’ai entendu maintes fois exposer sa doctrine et ses préceptes ; et je connais les conseils personnels et privés qu’il donnait à ses amis. Je me suis trouvé souvent chez lui, au milieu de sa famille. J’ai assisté aux procès qui ont été menés contre lui devant les tribunaux et qui se sont terminés par des acquittements. J’affirme qu’il a été lavé de toutes les calomnies, de tous les mensonges, lancés contre lui par des gens méchants et méprisables.

 

      « J’ai vécu près de lui et j’étais près de lui lorsqu’il a été assassiné dans la prison de Carthage par une ignoble populace, aux visages défigurés par de la peinture, conduite par un ministre méthodiste du nom de Williams. J’étais là ; j’ai été blessé à ses côtés ; j’ai reçu quatre balles de revolver.

 

      « Je connais donc bien Joseph Smith. Je témoigne, devant Dieu, les anges, et les hommes, que c’était un homme bon, honorable et vertueux ; que sa doctrine, appuyée sur l’Écriture, est saine et droite ; que sa vie privée et publique fut irréprochable ; et qu’il a vécu et est mort en homme de Dieu et en honnête homme. Voilà mon témoignage. Si on le met en doute, je suis prêt à soutenir ce que je viens de dire devant les tribunaux ».

 

      Curtis Bolton tenta d'apporter son témoignage sur Joseph Smith :

 

      « Je dirai que je ne suis pas surpris que ces gentlemen cherchent à m'empêcher de parler. La vérité et le témoignage ne sont pas ce qu'ils recherchent.

 

      « Cependant, puisqu'on me permet de parler, je témoigne que j'ai connu personnellement Joseph Smith, j'ai vécu avec lui et avec sa famille. J'étais avec lui le matin, le midi et le soir, tôt dans la journée, aussi bien que tard. Je l'ai vu dans presque toutes les situations d'épreuve, avec des amis comme avec des ennemis. Et pendant tout le temps que je suis resté avec sa famille, je n'ai jamais vu le moindre acte, ni entendu la moindre parole qui ne soit conforme à un homme de Dieu, à un prophète de Dieu, juste, droit, pur et rempli de prière.

 

      « Et en ce qui concerne ces choses, je me considère aussi bon juge que qui que ce soit dans cette salle ou dans cette ville. J'ai reçu une éducation aussi bonne que qui que ce soit dans cette salle ou dans cette ville, et j'ai été bien élevé. Et si quelqu'un met en doute mes paroles, qu'il me le dise, et je lui fournirai les références les plus satisfaisantes, que ce soit en France, en Angleterre ou en Amérique. En ce qui concerne la personnalité de Joseph Smith, si l'on doute de ma parole, je suis prêt à en faire le serment ».


      John Taylor reprit : « Nos contradicteurs ont parlé de témoignages dans les cours de justice. Dans les cours de justice, trois témoignages concordants portés contre un criminel suffisent à établir sa culpabilité ».

 

      Le président : « C’est faux ».

 

      Un avocat présent dans l’auditoire : « C’est vrai ».

 

      John Taylor : « Je dis, M. le Président, qu’il en est ainsi. Si trois personnes respectables affirment dans une cour de justice qu’ils ont été témoins d’un meurtre, et si leur témoignage ne peut être prouvé faux, leur témoignage est considéré comme concluant ».

 

      À l’objection des contradicteurs qu’il n’apportait pas de documents et que son témoignage était celui d’un homme qui n’était pas désintéressé dans l’affaire, puisque c’était celui d’un ami intime, John Taylor répondit :

 

      « M. Cleeve prétend que je devrais produire des documents. Mais est-il besoin de documents pour répondre à ses accusations absurdes et sans fondements ? Saint Paul a-t-il produit des documents lorsqu’il a prêché à Athènes, à Rome, ou à Antioche ? Il a dit qu’il avait eu une vision. On pouvait le croire ou ne pas le croire. Des juifs hostiles le prirent à partie, lui et les apôtres, et témoignèrent contre lui. Il n’avait aucun moyen de prouver la fausseté de leurs allégations. Il n’avait pas de documents.

 

      « Les juifs alléguaient qu’il avait été condamné, emprisonné et passé par les verges. Pourrait-il le nier ? Assurément non. Ils affirmaient que Jésus, dont il prêchait la doctrine, avait été crucifié à titre de blasphémateur et d’imposteur, par les juifs, ses propres concitoyens. Pourrait-il prétendre que ce n’était pas une décision légale ?

 

      « Il me semble que mes contradicteurs ne connaissent pas la Bible. Autrement, ils seraient renseignés sur ces points. Ils devraient voir que leur attitude est celle des Pharisiens et des grands prêtres juifs ».

 

      John Taylor continua :

 

      « Je vais parler de la situation où se trouvent mes contradicteurs. Les membres de leurs Églises croient en la Bible. Supposons qu’on les transplante en Chine ou dans l’Inde. Quelles preuves pourraient-ils donner à leur auditoire ? Ils leur présenteraient l’Écriture et diraient qu’elle est vraie.

      « Nous n’en savons rien », diraient les gens.

      « Nous vous affirmons qu’elle est l’expression de la vérité ».

      « C’est très joli. Mais nous voulons des preuves... Vous dites que Jésus est venu racheter les péchés du monde… Très bien, mais les Juifs nous disent que c’était un imposteur et un méchant homme ».

      « Nous croyons que c’était un homme de bien, et le Fils de Dieu ».

      « L’avez-vous jamais vu ? »

      « Non ».

      « Alors, comment pouvez-vous parler de lui comme vous le faites ? »

      « Nous croyons qu’il est venu pour le bien de l’humanité ».

      « Qui a écrit ce livre que vous dites sacré ? »

      « Ses apôtres ».

      « Oh ! c’étaient ses amis intimes ! »

      « Oui ».

      « Les avez-vous jamais vus ? »

      « Non ».

      « Eh bien, nous ne pouvons pas vous faire confiance. Mais nous lisons votre livre ».

Ayant lu le livre, ils dirent :

« Nous lisons qu’il y a certains signes qui se manifesteront pour ceux qui croient : les malades seront guéris, les démons seront exorcisés, les croyants parleront en d’autres langues ; ils auront le don de prophétie, etc. Ces signes, les avez-vous ? »

« Non ».

« Mais vous dites que vous êtes croyants, et votre Bible dit que ces signes se manifesteront pour les croyants ».

« Oh, c’était dans le passé. Ils ne sont plus nécessaires ».

« Mais un de vos apôtres dit : Pratiquez la charité et désirez les dons spirituels ».

« Ils ne sont plus nécessaires ».

« C’est étrange. Votre apôtre Saint Paul dit : L’œil ne peut pas dire à l’oreille, je n’ai pas besoin de toi. Mais ne recevrons-nous pas ces dons, si nous croyons en Jésus, si nous nous repentons et sommes baptisés ? »

« Non ».

« Vous avez avec vous un ami, qui lui aussi est ministre chrétien. S’il vous plaît, monsieur, croyez-vous en ce livre ? »

« Oui ».

« Croyez-vous à la même doctrine ? »

« Non ».

« Mais vous tirez votre doctrine du même livre ? »

« Oui ».

« Le livre vous donne-t-il un enseignement différent ? »

« Nous croyons d’une manière différente ».

« Vous avez ici un autre ami. Est-il aussi ministre ? »

« Oui ».

« Laquelle des deux doctrines a-t-il adoptée ? »

« Ni l’une, ni l’autre ».

« Mais vous croyez tous trois en la Bible ? »

« Oui ».

« Croyez-vous qu’elle est vraie ou fausse ? »

« Nous croyons qu’elle est vraie ».

« Un livre vrai enseigne-t-il trois différentes voies de salut ? »

« Nous vous disons quelles sont nos opinions ».

« Oh, nous croyions que vous étiez venus nous enseigner la vérité. S’il s’agit d’opinions, nous en avons déjà beaucoup, et nous pouvons nous passer de vos services ».

 

Ils refusèrent de répondre à ces arguments, mais continuèrent à diffamer Joseph Smith. Dédaignant de répondre à ces répétitions ressassant les mêmes calomnies, il poursuivit :

 

« Que dire de la justification de leur ministère devant Dieu ? J’ai démontré qu’ils n’ont pas d’autorité pour prêcher, et ils n’ont pas répondu à cela. Ils n’ont fait que répéter à satiété la vieille antienne à propos de la prétendue indignité de Joseph Smith.

 

« Messieurs, vous n’avez rien à dire lorsqu’on vous qualifie de faux enseignants de la religion. Nous avons donc le droit de vous considérer comme tels jusqu’à ce que vous prouviez le contraire. M. Robertson, il est vrai, admet honnêtement qu’il n’a pas d’autorité. Alors on ne peut pas parler de Dieu quand il s’agit de lui ou de son ministère. Il ne peut faire autrement qu’admettre qu’il administre au nom de celui qui ne l’a jamais désigné.

 

« Nous le prenons au mot, et l’inscrivons comme un enseignant que Dieu n’a pas choisi. En France et en Angleterre, on punit comme imposteurs ceux qui commettent des faux. Mais ceux qui administrent faussement au nom de Jésus ne passent pas en jugement. Le moment viendra où quelqu’un dira : Nous avons prêché en ton nom, et il répondra : Allez-vous en, je ne vous connais pas ! »

 

(Confusion)

 

« Nous mettons M. Cater sur la sellette avec M. Robertson. M. Cleeve ne veut pas s’abaisser à discuter la question ! Veut-il nous dire pourquoi il a accepté de prendre part à cette controverse et l’a fait savoir publiquement, et pourquoi maintenant il fait le dégoûté ? Est-ce honnête ? Pourquoi n’a-t-il pas exprimé son dégoût avant d’entendre nos arguments ?

 

« J’imagine qu’un criminel pourrait exprimer son dégoût de voir le bourreau lui passer, très poliment, la corde au cou. Mais la corde est là, M. Cleeve, et y restera, jusqu’à ce que ce soit vous qui l’enleviez. Il faudra des instruments plus puissants que le dégoût ou le mépris pour l’enlever. Et nous continuerons à dire que vous n’avez pas d’autorité, que vous êtes un faux enseignant, et que Dieu ne vous a pas choisi, jusqu’à ce que vous nous donniez des raisons de croire le contraire ».

 

(Les contradicteurs se montrent confus)

 

John Taylor esquissa alors brièvement la doctrine du Christ telle qu’on la trouve dans le Nouveau Testament, l’organisation de l’Église, et les dons et les pouvoirs accordés aux saints des anciens temps. « Tout cela, ajouta-t-il, est perpétué par l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours ».

 

« Examinons, dit-il, comment la doctrine de Jésus s’accorde avec celle de ces messieurs. Souvenons-nous que Saint Jean a dit :

 

« Celui qui transgresse et ne demeure pas dans la doctrine de Christ n’a pas de Dieu, mais celui qui demeure dans la doctrine de Christ a le Père et le Fils à la fois » (2 Jean 9).

 

« Ont-ils des apôtres ? Non. Ils tournent cette idée en ridicule. Ont-ils des prophètes ? Non. Ils nous disent qu’il n’y a plus de prophétie. Ont-ils des évangélistes, des pasteurs, des enseignants, des inspirés ? Non.

 

« Ils ne croient pas à l’inspiration, et nous disent que la cause de l’inspiration a cessé. Parlent-ils en d’autres langues ? Non. Vous les avez entendus tourner cela en moquerie.

 

« Ont-ils parmi eux des prophètes qui font entendre des prophéties ? Non. Ils disent que c’est une imposture. Quand ils ont des malades, font-ils ce que dit Saint Jacques : « Envoyez chercher les Anciens de l’Église afin qu’ils prient pour eux, et les oignent d’huile au nom du Seigneur » ?

 

« Non. Ils appellent cela du fanatisme.

 

« Est-ce qu’ils baptisent au nom du Seigneur pour la rémission des péchés ? Non.

 

« Est-ce qu’ils imposent les mains pour le don du Saint-Esprit ? Non.

 

« Qu’ont-ils qui ressemble même de loin à l’Évangile ? Leur doctrine n’en est même pas une pauvre contrefaçon.

 

« Qu’ils n’oublient pas les paroles de Saint Jean : « Celui qui ne demeure pas dans la doctrine de Christ n’a pas de Dieu ».

 

« Je ne veux pas les appeler des imposteurs. Laissons cela et examinons leur doctrine en détail.

 

« Je commencerai par M. Cleeve. Il s’appelle ministre méthodiste. Je connais assez bien leur doctrine. Leurs ministres ne sont pas tous ordonnés comme M. Cleeve. Ils ont des instructeurs, des prédicateurs locaux, des exhortateurs, des prédicateurs itinérants, pris au hasard selon les besoins.

 

« Je vais comparer les doctrine de M. Cleeve et de M. Cater. Pour M. Cleeve, le baptême se fait par aspersion ; pour M. Cater, par immersion. Ni l’un ni l’autre ne croit au baptême pour la rémission des péchés, comme le faisait Pierre.

 

      « Les méthodistes ont arrangé les choses d’une façon beaucoup plus commode. Selon la doctrine de l’Église épiscopale méthodiste, en Amérique, il y a trois modes différents de baptême : en aspergeant d’eau, en faisant couler l’eau et en plongeant dans l’eau. C’est la doctrine de l’Église épiscopale méthodiste d’Amérique. Ainsi, après avoir enseigné à un néophyte ce qu’ils appellent le plan de salut, ils ne savent pas, eux les enseignants, comment il faut baptiser. Ils s’en rapportent pour cela au néophyte lui-même. M. Cleeve, entre autres… »

 

      M. Cleeve : « Je ne suis pas méthodiste, monsieur ».

 

      John Taylor : « Je vous croyais méthodiste wesleyien ».

 

      M. Cleeve : « Je n’ai rien à faire avec les méthodistes wesleyiens, ni directement, ni indirectement » (John Taylor, dans un poscriptum à une lettre au directeur de l’Interpreter, de Boulogne, dans laquelle il résumait le débat contradictoire, écrivit : M. Cleeve a nié publiquement être ministre wesleyien, ou avoir aucune relation avec les wesleyiens. Alors, que signifie l’inscription sur son église – Église wesleyienne. Et que signifie la pancarte à l’intérieur – Filiale wesleyienne de Boulogne ?)

 

      John Taylor : « Alors, je me trompe. Je vais me tourner vers M. Cater. Je crois qu’il est ministre baptiste ».

 

      M. Cater : « Je ne suis pas membre de l’Association baptiste » (après cette discussion, John Taylor, se trouvant à Bath, en Angleterre, apprit que M. Cater avait officié dix ans à l’église de York Street, à Bath, comme ministre baptiste. De M. Cox, ministre baptiste à Bath, auquel il fit parler par une tierce personne, il eut l’information que M. Cater était ministre baptiste et prêchait en cette qualité à Boulogne).

 

      John Taylor : « J’avais l’information que jusqu’ici vous étiez ministre baptiste, monsieur. Puis-je vous demander ce que vous êtes ? »

 

      (Rires prolongés. Pas de réponse)

 

      À ce moment-là, M. Long se leva parmi l’auditoire et s’écria : « Je n’ai pas honte de ma profession, monsieur. Je suis ministre de l’Église anglicane ».

 

      (Encore rires prolongés)

 

      John Taylor : « C’est certainement une étrange position qu’ont prise ces messieurs. Ils ont peur d’avouer la profession qu’ils exercent. Je reprends mon propos. J’ai affaire à trois ministres différents, qui doivent appartenir à une confession, puisqu’ils s’appellent révérends.

 

      « Or, leur doctrine est-elle d’accord avec l’Écriture ? Ont-ils l’organisation, les ordonnances, les dons, la prophétie, les révélations, les visions, les langues, les apôtres, les prophètes ? Non. Cela, ils ne peuvent pas le nier, car ils ont tous fait fi de ces choses.

 

      « Cependant, toutes ces choses existaient dans le christianisme primitif. Leur fonction, leur doctrine, leur ministère, leur enseignement, leurs ordonnances, tout cela ne repose sur rien. Ils n’ont ni bénédictions, ni pouvoirs, ni unité, ni certitude, ni révélation. Ils se débattent dans un labyrinthe de confusion, de division, de lutte, d’incertitude et d’erreur.

 

      « Ils ne connaissent pas Dieu, ni la puissance de Dieu ».

 

      (Exclamations)

 

      « Il n’y a pas un seul des principes de ces messieurs qui soit exact. Ils ne prennent même pas en considération la doctrine du baptême pour la rémission des péchés. Cependant, lorsque Philippe baptisa l’eunuque éthiopien, il l’immergea dans l’eau, croyons-nous.

 

      « Jean baptisait à Anon, parce qu’il y avait là beaucoup d’eau. Saint Paul reçut l’ordre de partir laver ses péchés. Et Jésus dit qu’à moins d’être né de l’eau et de l’esprit, on ne peut pas entrer dans le royaume de Dieu ».

 

      Le président (à John Taylor) : « Désirez-vous continuer ? Ces messieurs du groupe adverse demandent qu’on en reste là ».

 

      John Taylor : « Telle n’était pas mon intention. Je me proposais d’aller plus loin dans l’examen de leurs principes, comme nous en étions convenus ».

 

      Le président : « Ils préfèrent ne rien dire de plus ».

 

      John Taylor : « Si ces messieurs ont l’intention de ne rien répondre, il est inutile que je continue ».

 

      La discussion s’arrêta donc. Les présidents de la séance, M. Luddy, le D. Townley et M. Groves, conclurent le débat en tentant de tirer d’affaire les ministres alors que John Taylor ne pouvait plus répondre. Les arguments qu’il leur aurait opposés furent exposés dans le compte rendu de la discussion, qui fut publié.

             

 

Sources :

 

John Taylor, Three Night's Public Discussion between the Reverends C. W. Cleeve, James Robertson and Philip Cater, and John Taylor of the Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, at Boulogne-sur-Mer, France, Liverpool, 1850.

B. H. Roberts, Life of John Taylor, Salt Lake City, George Q. Cannon & Sons, 1892, p. 209-210.

L’Étoile, novembre 1950.

L’Étoile, novembre 1978, Nouvelles de l’Église, Histoire locale, p. 8-12. 

L’Étoile, décembre 1978, Nouvelles de l’Église, Histoire locale, p. 2-3.

Christian Euvrard, Louis Auguste Bertrand (1808-1875), Journaliste socialiste et Pionnier mormon, Paris, 2005, ISBN 2-9523565-0-5.