Que peuvent faire les parents pour leur pays ?


Gordon B. Hinckley



L’observance de quatre choses simples par les parents changerait complètement les valeurs morales de nos sociétés en une génération ou deux. Il s’agit simplement des choses suivantes : que les parents et les enfants enseignent et apprennent ensemble à être bons, travaillent ensemble, lisent de bons livres ensemble et prient ensemble.

Aux parents de jeunes enfants, je donne ce conseil :

1. Enseigner aux enfants à être bons

Enseignez-leur à être polis. Nous avons été témoins d’une situation qui dépasse l’entendement avec le démembrement de la Yougoslavie en groupes haineux qui se massacraient. Il semblait ne pas y avoir de miséricorde ; les innocents étaient abattus sans considération. Pourquoi tout cela ? Je crois que cela vient du fait que depuis des générations dans les foyers de cette région, la haine a été communiquée, la haine des gens d’origine ethnique différente. La terrible situation de cette région est le fruit amer de graines de haine semées dans le cœur des enfants par les générations précédentes.

Pourquoi faudrait-il qu’il y ait des conflits entre les différents groupes existant dans quelque pays que ce soit ? Qu’on enseigne dans les foyers que nous sommes tous enfants de Dieu, notre Père éternel, et que, tout comme la paternité existe, il peut et doit y avoir de la fraternité. Qu’on enseigne le respect de la femme et de l’homme. Que chaque mari manifeste dans ses paroles respect, gentillesse et appréciation pour sa femme. Que chaque femme recherche les vertus de son mari et en fasse l’éloge. David O. McKay disait souvent qu’un homme ne peut rien faire de mieux pour ses enfants que de leur montrer qu’il aime leur mère.

Est-ce démodé ? Bien sûr. C’est aussi vieux que la vérité. Les querelles familiales ne sont qu’une expression de la ruse du diable.

Que les parents enseignent à leurs enfants le caractère sacré de la sexualité, que le don de créer la vie est sacré, que les impulsions ardentes que nous ressentons peuvent et doivent être maîtrisées et contenues si nous voulons connaître le bonheur, la paix et la bonté. Que l’on inculque à chaque jeune homme l’importante vérité que chaque jeune fille est une fille de notre Père éternel et qu’en offensant une jeune fille, non seulement il montre sa faiblesse mais il offense Dieu. Qu’il comprenne que le fait d’engendrer un enfant entraîne une responsabilité qui durera toute sa vie.

Que l’on enseigne la vérité, par le précepte et par l’exemple – qu’il est mal de voler et de tricher, que le mensonge charge d’opprobre celui qui s’y livre. Pour remettre la courtoisie à l’honneur, nous devons commencer à la maison avec les parents, pendant que les enfants sont tout petits. On n’y parviendra pas autrement.

2. Travailler ensemble

Je ne sais pas combien il y a de générations ou de siècles que quelqu’un a dit pour la première fois : « L’oisiveté est la mère de tous les vices. » Les enfants doivent travailler avec leurs parents, faire la vaisselle avec eux, laver les sols avec eux, tondre le gazon, tailler les arbres et les buissons, peindre et réparer, nettoyer et faire cent autres choses qui leur permettront d’apprendre que le travail est le prix de la propreté, du progrès et de la prospérité. Il y a trop de jeunes qui sont élevés dans l’idée que la manière de se procurer quelque chose est de le voler.

Les graffiti ne tarderaient pas à disparaître si ceux qui les font devaient les éliminer. Je me souviens encore d’une expérience de ma première année de lycée. Assis sur un banc, je mangeais mon déjeuner avec d’autres garçons. J’ai pelé une banane et j’ai jeté la peau par terre. Juste à ce moment, le principal est passé par là. Il m’a demandé de la ramasser. En fait il l’a demandé d’un ton très ferme. Je me suis levé et j’ai ramassé la peau de banane. Je l’ai mise à la poubelle. Il y avait d’autres détritus autour de la poubelle. Le principal m’a dit que je pouvais les ramasser pendant que je ramassais les miens. Je n’ai plus jamais jeté de peau de banane par terre.

3. Lire de bons livres ensemble

Pour moi la télévision est peut-être le meilleur instrument jamais créé pour instruire et éduquer – les gens en grands nombres. Mais je m ’élève contre les ordures, la corruption, la violence et la grossièreté que les écrans de télévision déversent dans nos foyers. C’est un triste commentaire sur nos sociétés. Le fait que dans beaucoup de foyers le téléviseur soit allumé six ou sept heures par jour est extrêmement révélateur. Je plains les gens pour qui la télévision est une drogue. Je crois que c’en est une. C’est une dépendance aussi pernicieuse que beaucoup d’autres. Je plains les parents qui ne font pas la lecture à leurs enfants. Je plains les enfants qui n’apprennent pas quelles merveilles on peut trouver dans les bons livres, ni quelle expérience stimulante c’est d’accéder à l’esprit d’un grand penseur qui s’exprime, dans une langue travaillée et raffinée, sur des sujets importants.

J’ai lu un jour que Thomas Jefferson, président des États-Unis, avait pour lecture dans son enfance les tournures de phrases magnifiques de la version du roi Jacques de la Bible. En étudiant constamment les Écritures, nous avons la merveilleuse possibilité non seulement de fréquenter des gens extraordinaires, de fréquenter le Seigneur lui-même, mais également de lire et de savourer la langue majestueuse des prophètes d’autrefois, traduite en mots et en expressions d’une grande beauté, d’une grande puissance et d’une grande émotion.

Si nous pouvions suivre le slogan « Éteignez la télé et ouvrez un bon livre », nous ferions quelque chose de très important pour fortifier la génération montante. Ne vous méprenez pas sur mes propos : il y a beaucoup de choses de valeur qui passent à la télévision, mais nous devons être sélectifs et ne pas être des esclaves abrutis qu’on force à regarder les ordures produites par de nombreux auteurs et producteurs.

Récemment, un homme m’a fait parvenir un livre. Il est docteur en philosophie et enseigne dans une grande université. Il me disait que la lecture de ce livre l’avait beaucoup marqué. Je l’ai lu. C’est l’histoire d’un jeune Parisien qui a perdu la vue dans un accident à l’âge de huit ans. Le livre raconte comment, quand il a été plongé dans l’obscurité, une lumière nouvelle est apparue dans sa vie. Il a seize ou dix-sept ans quand les Allemands envahissent la France et que les soldats allemands défilent dans Paris. Le jeune aveugle, étudiant brillant, organise un groupe de résistance. Ses camarades et lui dirigent un réseau chargé d’obtenir de l’information et de la publier grâce à un petit journal qu’ils impriment sur une machine à dupliquer. Ils arrivent à tirer à plus de 250 000 exemplaires par numéro. C’est alors que le jeune homme est trahi par un membre du groupe, arrêté et envoyé à Buchenwald. Là, il vit dans la crasse et le désespoir avec d’autres victimes. Il est privé de la vue, mais il y a une lumière en lui qui lui permet de surmonter la situation. Il survit et devient un chef parmi ceux qui sont dans ce camp sordide. Le petit journal qu’il a lancé est devenu un grand journal. J’ai lu ce livre et j’ai été édifié et renforcé par l’histoire de ce jeune homme remarquable. Si vous ne trouvez pas de héros pour vos enfants à la télévision, aidez-les à en trouver dans de bons livres.

4. Enfin, prier ensemble

Est-ce si difficile de prier ? Serait-il si difficile d’encourager les pères et les mères à se mettre à genoux avec leurs jeunes enfants et à s’adresser à la Divinité pour exprimer leur reconnaissance pour les bénédictions, prier pour les gens dans la détresse ainsi que pour eux-mêmes, puis le demander au nom du Sauveur et du Rédempteur du monde ? Quelle puissance a la prière ! Je puis en témoigner, et vous aussi. Quelle grande perte subit la famille qui ne tire pas profit de cette habitude précieuse et simple !

Ce sont là des sujets essentiels pour les parents et les enfants. Enseignons et apprenons ensemble à être bons, à travailler ensemble, à lire de bons livres ensemble et à prier ensemble. Ce sont des choses que l’on peut faire malgré les pressions frénétiques de la vie. Elles peuvent être faites avec des enfants et en particulier quand les enfants sont petits.

Puisse chacun de nous, quelle que soit la faiblesse de nos efforts, exercer une influence bénéfique en instaurant l’esprit de la bonté dans notre foyer et en le réinstaurant dans notre pays.

(Source : L'Étoile, juin 1996, p. 6-9)