La
liberté religieuse
Introduction
à la liberté de religion
Pour beaucoup de
gens dans le monde, peu de choses sont plus précieuses que la
liberté. La liberté – le pouvoir de vivre
comme on le veut – est l’une des grandes sources de
la dignité humaine. Le bon usage de la liberté est
aussi l’une des grandes responsabilités des êtres
humains. Nous avons encore bien du mal à savoir comment
définir nos libertés, comment les comprendre et comment
les préserver tout en les tempérant. Au centre de ces
considérations se trouve l’une des libertés les
plus fondamentales : la liberté religieuse.
Qu’est-ce que la
liberté de religion ?
Contrairement à
ce que l’on pourrait supposer, la liberté de religion
n’est pas simplement la liberté d’adorer Dieu ou
de croire comme on le veut, bien que ce soient là des aspects
essentiels de ce principe. Elle n’est pas non plus la
prérogative des personnes intéressées par la
religion. La liberté de religion est en réalité
d’une portée plus profonde, plus large et plus
importante que ne le considèrent la plupart des gens.
Au niveau le plus
fondamental, la liberté de religion est le droit qu’ont
les hommes de penser, d’agir en accord avec ce qu’ils
croient profondément et de l’exprimer, selon ce que leur
dicte leur conscience morale. En fait, la liberté de religion
a toujours été appréhendée conjointement
avec la « liberté de conscience », la
liberté d’acquérir et de conserver des
convictions morales et d’agir en accord avec celles-ci. Ainsi
la liberté de religion comprend la liberté de croyance
et de culte religieux, mais elle a également une portée
bien plus large car elle comporte la liberté d’agir :
de parler librement en public, de vivre en accord avec ses principes
moraux et de défendre sa propre vision morale de la société.
Sa portée, ainsi que la relation qu’elle entretient avec
la liberté de conscience, aident à expliquer pourquoi
la liberté de religion est importante pour tous, pas seulement
pour les croyants.
Les États-Unis
d’Amérique ont une tradition longue et exceptionnelle de
liberté religieuse, une vertu qui a été inscrite
dans les documents originaux de la nation et exaltée par ses
fondateurs. Consacrée comme liberté prééminente
dans la Déclaration américaine des Droits de l’Homme,
la liberté de religion est la première des libertés
essentielles, et est souvent appelée la « première
liberté ». Elle est ainsi désignée
parce qu’elle permet et protège d’autres libertés
humaines, comme la liberté d’expression. En effet, la
culture de liberté et de démocratie paisible des
États-Unis est en grande partie née de leur respect
ferme de la liberté religieuse. Comme les États-Unis,
beaucoup d’autres nations en sont aussi venues à
reconnaître cette liberté des plus essentielles, et ont
fait d’elle un principe central de leur gouvernement. Les
Nations Unies, dans leur Déclaration Universelle des Droits de
l’Homme (1948), et dans beaucoup d’autres conventions
depuis lors, ont décrit la liberté de religion comme
« un droit humain fondamental ».
Liberté de
religion et société
Ce droit
fondamental est indispensable dans les diverses sociétés
du monde moderne, où les droits et les intérêts
de différents partis entrent souvent en conflit. Étant
donné que le potentiel d’animosité est le plus
grand là où les différences sont les plus
profondes ou bien là où la majorité domine, la
liberté de religion est cruciale parce qu’elle permet à
des personnes de convictions différentes à l’égard
des aspects les plus profonds de la vérité, de vivre
ensemble en paix. Le respect attentif de cette liberté protège
tous les groupes et tous les individus, y compris les plus
vulnérables, qu’ils soient religieux ou non. Quand elle
est respectée, la liberté de religion aide à
prévenir la violence et à éviter les conflits.
Les nations de par
le monde qui ont soutenu la liberté de religion en ont vu les
effets positifs sur la société. Bien que des cas
d’extrémisme religieux aient entaché l’image
publique de la religion, les chercheurs reconnaissent que la religion
est source d’avantages importants, tels que l’harmonie et
la stabilité, pour les sociétés qui la
soutiennent. Leurs études montrent invariablement que les
personnes religieuses font davantage preuve d’esprit civique,
sont plus généreuses et plus amicales que leurs
homologues non religieux. Des données empiriques semblent
également indiquer que les sociétés où la
liberté de religion prévaut jouissent de nombreux
autres avantages, notamment un niveau plus élevé des
autres libertés, non présents dans les sociétés
où la religion est réprimée ou désavantagée.
Ces avantages sont des raisons supplémentaires de laisser la
religion libre de s’épanouir dans la société
(voir Robert D. Putnam and David E. Campbell, American
Grace: How Religion Divides and Unites Us, Simon and Schuster, 2010 ;
Brian J. Grim and Roger Finke, The Price of Freedom Denied: Religious
Persecution and Conflict in the Twenty-First Century, Cambridge
University Press, 2010).
Respecter la
liberté de religion ne veut pas dire mettre de côté
les autres libertés et intérêts sociaux ou
subvertir la loi ; la liberté de religion coexiste avec
d’autres intérêts légitimes dans la
société. Le gouvernement a la responsabilité
cruciale d’assurer la sécurité publique et
d’arbitrer les conflits opposant certains droits entre eux. Aux
États-Unis est entretenue une saine indépendance entre
l’Église et l’État ; toutefois, on ne
devrait pas empêcher la religion d’exercer une influence
morale sur les affaires publiques de la nation. La liberté de
religion n’exclut pas les autres intérêts mais, en
tant que « première liberté »,
elle devrait jouir du respect qui lui est dû.
Les mormons et la liberté
de religion
Les membres de
l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours ont de bonnes raisons d’honorer la liberté de
religion. Ayant parfois connu la persécution religieuse au
cours de leur histoire, les mormons apprécient
particulièrement d’être libres de s’exprimer
et de vivre selon leurs convictions et leur foi. En fait, la liberté
de religion a toujours eu une grande importance pour les Mormons
depuis le début. Joseph Smith, fondateur de l’Église,
était un partisan fort et généreux de ce
principe, et il reconnaissait qu’il était crucial que
tous les partis s’accordent à le défendre. Il a
déclaré : « J’ose affirmer devant
les cieux que je suis tout aussi prêt à mourir pour la
défense des droits d’un presbytérien, d’un
baptiste ou d’un brave homme de toute autre dénomination ;
car le même principe qui foulerait les droits des saints des
derniers jours foulerait les droits des catholiques ou de toute autre
religion. »
Dans une colonie
mormone du dix-neuvième siècle, Smith a là aussi
souligné l’importance de la liberté de religion
en établissant une charte municipale qui garantissait la
liberté de religion pour les habitants de toutes confessions.
La liberté de conscience et la liberté de religion ont
été inscrites dans les Articles de foi de l’Église,
qui stipulent : « Nous affirmons avoir le droit
d’adorer le Dieu Tout-Puissant selon les inspirations de notre
conscience, et reconnaissons le même droit à tous les
hommes : qu’ils adorent comme ils veulent, où ils
veulent ou ce qu’ils veulent » (voir LDS
Newsroom, Selected Beliefs and Statements on Religious Freedom of The
Church of Jesus Christ of Latter-day Saints). Les Mormons sont
fermement engagés vis-à-vis de la liberté de
religion et de sa protection.
Les remises en cause
croissantes de la liberté de religion
La situation de la
liberté de religion et de la liberté de conscience
n’est pas aussi terrible aux États-Unis que dans
d’autres parties du monde. Aujourd’hui, les Américains
de foi et de conscience ne sont d’une manière générale
pas confrontés à la violence physique et à la
coercition comme c’est parfois le cas dans d’autres pays.
Toutefois, la liberté de religion et la liberté de
conscience aux États-Unis n’en sont pas moins en danger.
Des changements sociaux et légaux restreignent ces libertés
par des détours nouveaux et très problématiques.
Leur valeur est rappelée aux Américains qui les ont
depuis longtemps considérées comme acquises.
Les remises en
cause de la liberté religieuse émergent de nombreuses
sources. Le nouveau plaidoyer en faveur des droits des homosexuels
menace de réduire la liberté de religion de différentes
manières. Des changements en matière de soins de santé
menacent les droits de ceux qui ont certaines convictions morales à
l’égard de la vie humaine. Ces évolutions et
d’autres engendrent des conflits et commencent à peser
sur les organisations religieuses et les gens de conscience. Elles
menacent, par exemple, de restreindre la façon dont les
organisations religieuses peuvent gérer leurs ressources
humaines et leurs biens. Elles exercent une contrainte sur les
universités, les écoles et les services sociaux
affiliés à des religions. Elles amènent le blâme
sur des individus qui agissent en accord avec leurs principes :
des personnels de santé, d’autres professionnels, des
parents. Dans ces situations et beaucoup d’autres, nous voyons
à quel point la liberté de religion et la liberté
de conscience subissent une érosion subtile mais constante.
Autre cause de préoccupation, les dispositions légales
prises pour préserver ces libertés sont souvent
superficielles, et ne les protègent que dans le sens le plus
restreint. Dans beaucoup d’aspects de la vie publique, la
liberté de religion et la liberté de conscience sont
entraînées dans des conflits qui pourraient les
anéantir.
Les exigences de la
liberté de religion
Compte tenu de la
profondeur de ces conflits et de la controverse qu’ils
suscitent parfois, il est essentiel que toutes les parties fassent
preuve de civilité lorsqu’elles examinent ces sujets
très importants. Ce n’est que juste, car les attributs
de la dignité humaine qui font partie de la liberté de
religion garantissent aussi le droit de chacun au respect et à
l’expression de son point de vue. Chaque groupe, y compris les
individus et les organisations religieuses, a la responsabilité
d’exprimer raisonnablement son point de vue, de manière
à favoriser une discussion claire. En tant que concitoyens,
nous devrions toujours parler avec courtoisie et faire preuve de
patience, de compréhension et d’empathie envers ceux qui
ne sont pas d’accord avec nous. Nous favorisons la bonne
volonté en en faisant preuve nous-mêmes. (Pour
en savoir davantage sur l’engagement de l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours vis-à-vis
de la civilité dans les conversations, voir LDS Newsroom, The
Mormon Ethic of Civility)
La liberté
de religion, ou « liberté de conscience »,
est depuis longtemps le fondement de la démocratie. Enterrée
depuis longtemps et considérée comme acquise, c’est
aujourd’hui une préoccupation élevée. Les
Américains, y compris les saints des derniers jours, ont
besoin de renouer avec cette liberté et de se réengager
vis-à-vis d’elle. Une société libre
engagée vis-à-vis de la liberté de religion et
de la liberté de conscience est une société dont
tous les membres sont attentifs à protéger leurs
libertés réciproques. Préserver cette liberté
humaine des plus fondamentales et l’harmonie qu’elle
apporte est un impératif pour nous tous.
1.
Ce que signifie la liberté religieuse
Ce que les Américains
savent de la liberté religieuse
La plupart des
Américains savent que la liberté religieuse est une des
libertés les plus fondamentales garanties par la Constitution
américaine. Souvent appelée la « première
liberté », la liberté religieuse est au
premier plan dans les textes fondateurs américains, et elle
est la source de nombreuses autres libertés.
C’est un
droit humain fondamental, qui est maintenant protégé
dans les lois de beaucoup de pays dans le monde entier et dans des
conventions internationales telles que la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme (1948). En règle
générale, les Américains reconnaissent et
honorent la liberté religieuse comme étant une des
libertés inaliénables qui leur sont reconnues.
Pourtant, malgré
la conscience qu’ont les Américains de la liberté
religieuse et leur perception générale du fait qu’il
s’agit d’une chose de très grande valeur, des
études montrent que beaucoup d’Américains ne sont
pas vraiment sûrs de ce qu’elle signifie. En conséquence,
ils ne comprennent pas non plus pleinement pourquoi elle est si
essentielle et ce qu’elle nécessite.
Des études
montrent effectivement que la plupart des Américains
saisissent l’idée générale. Pour le
citoyen moyen, la liberté religieuse est le droit dont
jouissent beaucoup de gens, dans le monde libre, de croire à
propos de Dieu et de la vérité morale ce qu’ils
choisissent de croire, ainsi que le droit de célébrer
ces croyances par le culte, s’ils le veulent. Intuitivement,
c’est cohérent. Il ne serait pas juste que quelqu’un
soit contraint en matière de croyance religieuse ou de
moralité, ou empêché d’adorer selon sa
conscience. (voir
« Survey Fact Sheet: What Americans Know About Religious
Freedom », American Religious Freedom Program, accessed January
14, 2012,
http://religiousfreedom.org/research/detail/survey-fact-sheet-americans-views-on-religious-freedom
; et « What It Means to Be an American », Brookings
Institute and Public Religion Research Institute, accessed January
14, 2012,
http://www.brookings.edu/reports/2011/0906_american_attitudes.aspx)
L’étendue de
la liberté religieuse
Mais si ces
activités personnelles et intérieures sont des éléments
vitaux de la liberté religieuse, ils ne rendent pas compte de
tout ce que celle-ci englobe. La liberté religieuse est en
réalité d’une portée beaucoup plus large
et plus profonde que ne le suggère cette description. Dans un
sens plus fondamental, la liberté religieuse, apparentée
à la « liberté de conscience », est le
droit qu’ont les hommes de penser, de croire et aussi
d’exprimer ce qu’ils croient profondément et
d’agir en fonction de ces croyances, selon ce que leur dicte
leur conscience morale. Cette liberté s’applique aussi
bien à ceux qui adhèrent à des croyances
religieuses qu’à ceux qui n’en ont pas.
La notion complète
de liberté religieuse révèle une liberté
profonde qui va beaucoup plus loin que le simple droit de croire ce
que l’on veut, et qui va bien au-delà du droit à
la dévotion personnelle dans un lieu de culte ou chez soi. En
effet, la liberté religieuse n’est pas seulement
intérieure et personnelle, pour que nous en jouissions
intérieurement dans notre esprit et dans le secret de notre
vie privée. Elle comprend aussi le droit d’agir selon
ses croyances et convictions morales. Et plus que la liberté
d’adorer en privé, c’est le droit de vivre sa foi
librement et en public.
Les croyances
mènent aux actes, tandis que la liberté de croire sans
la capacité d’agir selon ces croyances, dans les limites
de la loi, n’est nullement une liberté. La plupart des
gens conviendront que les croyances morales et religieuses ne veulent
pas dire grand-chose si elles n’influencent pas la façon
dont nous vivons. En d’autres termes, nous nous attendons à
ce que les croyances religieuses aient une influence sur le
comportement des gens, sur leur façon d’élever
leur famille et de traiter les autres. Et de fait, la liberté
religieuse protège le droit des individus d’agir en
accord avec leurs croyances religieuses et leurs convictions morales.
La liberté religieuse ne nous permet pas seulement de méditer
sur nos convictions ; elle nous permet de les mettre en action.
Pour cette raison,
la religion ne peut être confinée au cadre de la vie
privée. Bien évidemment, la liberté religieuse
protège les droits des individus de vivre leur religion dans
le cadre de lieux privés. Mais le langage religieux et moral
est aussi protégé dans l’air libre du domaine
public. Que ce soit à la mairie, dans les colonnes des
journaux, sur l’Internet ou ailleurs dans la sphère
publique, les gens ayant des convictions morales ont, en vertu de
leur liberté religieuse, le droit de faire part de ces
convictions, de raisonner et de persuader, et de défendre leur
vision de la société.
Les études
montrent en fait qu’aux États-Unis les personnes
religieuses contribuent à enrichir et à améliorer
la société. Elles ont tendance à se distinguer
par un niveau plus élevé de qualités sociales
telles que le bon voisinage, la générosité, le
service et l’engagement civique. Par conséquent, ce
n’est pas seulement une exigence de la liberté
religieuse que les personnes religieuses et leurs voix soient
accueillies dans la sphère publique ; mais en outre cela
renforce le tissu civique de la société (voir
Robert D. Putnam and David E. Campbell, American Grace: How Religion
Divides and Unites Us, New York, Simon and Schuster, 2010).
Mettre en pratique et
protéger la liberté religieuse
Le fait que la
liberté religieuse soit publique et qu’elle recouvre
davantage que la seule croyance ne veut bien sûr pas dire
qu’elle supplante toute autre considération dans la
société. L’objectif d’une démocratie
est de concilier les divers intérêts de tous ses
membres. La liberté religieuse et la liberté de
conscience sont essentielles parce qu’elles aident à
soutenir ce système de coexistence pacifique, et elles
doivent être contrebalancées par d’autres
considérations, telles que les droits d’autrui, la loi
et la sécurité publique. Néanmoins, étant
donné que ces libertés sont si essentielles à la
dignité humaine et qu’elles apportent tant à la
société, elles méritent d’être
soigneusement protégées.
Cette protection
relève de la responsabilité de tous les citoyens qui
chérissent leur liberté et reconnaissent que les
libertés des uns sont autant assurées que celles des
autres. La protection de la liberté religieuse exige aussi
qu’elle soit pleinement comprise et respectée dans son
intégralité. Une mauvaise compréhension de la
liberté religieuse peut être problématique si
elle conduit, par exemple, à établir des règles
et des lois qui la définissent trop étroitement et la
protègent trop faiblement. L’ignorance de la liberté
religieuse peut aussi, si on n’y prend garde, permettre qu’elle
subisse une érosion lente et subtile, fragilisant ou
compromettant cette liberté fondamentale. Une conscience forte
de la liberté religieuse, une compréhension de sa
pleine signification, est indispensable pour qu’elle se
perpétue et s’épanouisse.
2.
Pourquoi nous avons besoin de la liberté religieuse
Ces deux dernières
années, des officiers généraux de l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours ont fait des
déclarations majeures sur de nombreux aspects de la liberté
religieuse : ce qu’elle signifie, ce qu’elle fait,
les menaces auxquelles elle fait face et pourquoi elle est aussi
vitale pour les peuples libres de partout. Dallin H. Oaks, du Collège
des douze apôtres de l’Église, a dit : « Il
y a une bataille sur la signification de la liberté
[religieuse]. Ce combat a une importance éternelle. »
Un autre apôtre, Quentin L. Cook, a lancé à des
diplômés universitaires le défi de « travailler
avec des gens d’autres confessions » pour protéger
et « être un avocat de la liberté religieuse
et morale. »
En plus du soutien
des saints des derniers jours à la liberté religieuse
se trouvent les efforts significatifs d’autres dirigeants
religieux et citoyens. Pourquoi alors apportons-nous une telle
attention à la liberté religieuse ? Pourquoi les
citoyens américains en ont-ils tant besoin ?
Le besoin vient de
l’immense diversité de la nation et de la société
américaines. Depuis le commencement, les États-Unis ont
été le foyer de nombreuses croyances religieuses. Sans
une Église d’État définie (brisant ainsi
une tradition européenne de mille cinq cents ans) et avec un
flot constant d’immigrés, le pluralisme religieux a été
un signe distinctif en Amérique. Les Américains, dans
cette nouvelle nation en mouvement, ont découvert une
multitude de choix religieux qu’ils ne connaissaient pas
jusque-là : ils pouvaient choisir leur propre groupe
religieux, leur assemblée (ou débuter la leur) et
trouver un ministre de culte. Ils pouvaient aussi choisir de
n’adhérer à aucune religion. Ce large panel de
choix religieux a montré une liberté de conscience
vivifiante et une liberté religieuse florissante. Les
Américains n’ont pas seulement toléré les
autres croyances religieuses, mais ils ont adopté la liberté
religieuse à bras ouverts, comprenant que le « seul
moyen de l’avoir pour eux-mêmes était de la
garantir à tous les autres. » (voir
Robert Booth Fowler, Allen D. Hertzke, Laura R. Olsen, Kevin R. Den
Dulk, Religion and Politics in America, Faith, Culture and Strategic
Choices, p. 6)
Pourtant, la
liberté religieuse ne s’est pas imposée
facilement aux États-Unis. Les baptistes, les juifs, les
catholiques et ceux d’autres confessions, qui pendant un temps
avaient été des religions nouvelles, impopulaires et
mineures, ont ressenti l’aiguillon de la persécution
religieuse et du préjudice de la société. Mais
la possibilité d’une société où
diverses confessions et croyances peuvent coexister est enracinée
dans les hauts principes de liberté de conscience et les
protections habilitantes de la religion par le premier amendement.
C’est ce cadre architectural qui assure un espace physique,
social et légal pour que les groupes et personnes vivent leurs
différentes croyances de manière significative tant
dans leur vie privée que publiquement. Une déclaration
des principes signée par les érudits et hommes d’États
met en lumière ces principes : « Les clauses
de la liberté religieuse sont à la fois une protection
de la liberté individuelle et une disposition pour organiser
le lien entre la religion et la vie publique. Elles nous permettent
de vivre avec nos différences les plus profondes. »
(La charte de Williamsburg, Summary of Principles, 1988)
Mais la liberté
religieuse et de conscience demandent plus que de simplement vivre et
coexister avec nos différences. Ces libertés
importantes créent aussi des obligations rajeunissantes. Tous
les bénéficiaires de la liberté religieuse,
chaque groupe et individu libre de vivre selon ce que lui dicte sa
conscience doit à son tour protéger cette même
liberté pour tous les autres, surtout les plus vulnérables,
qu’ils soient religieux ou non. Voilà l’obligation.
Et elle est rajeunissante parce qu’elle « permet à
la diversité d’être la source d’une force
nationale. » (Ibid.)
Ces principes sont
remarquablement éloquents dans la Charte de Williamsburg.
Écrite comme une « confirmation du premier amendement »,
les signatures comprennent celles des dirigeants des gouvernements (y
compris deux anciens présidents des États-Unis),
d’hommes d’affaires, de groupes d’enseignants, de
groupes religieux et d’autres domaines. Dallin H. Oaks a signé
le document au nom de l’Église de Jésus-Christ
des saints des derniers jours. La charte met l’accent sur la
nature vitale et l’importance morale de l’obligation
associée à la liberté religieuse, comprenant
l’observation incisive qu’une « société
n’est libre qu’en étant respectueuse de la
[liberté religieuse et de conscience] pour les minorités
les plus faibles et les communautés les moins populaires ».
De récentes
études ont montré les bénéfices
sociétaires de la liberté religieuse (voir
par exemple Brian J. Grim et Roger Finke, The Price of Freedom
Denied, et le Hudson Institute’s Center for Religious Freedom
study). Elles ont par exemple découvert que :
•
La liberté
religieuse promeut la stabilité dans une société
pluraliste, mais que quand elle est limitée, il y a plus de
violence et de conflit.
•
Quand la
liberté religieuse est élevée, il y a plus de
prospérité économique, une meilleure santé,
une moins grande disparité des revenus et une démocratie
plus forte.
•
La liberté
religieuse a un lien direct avec la protection accordée à
d’autres droits civiques et humains ; si quelque liberté
peut contrôler les aspirations de la foi et de la conviction,
alors cette liberté pourrait, d’après les paroles
de James Madison, « balayer tous nos droits fondamentaux »,
comme la liberté d’expression, de la presse et de
réunion.
Voilà
quelques-unes des conséquences de la liberté religieuse
qui contribue à une société juste et libre où
les tensions sont traitées et où les gens vivent
paisiblement avec leurs plus grandes différences. C’est
l’essence même de la démocratie.
3.
Pourquoi la liberté religieuse est importante pour les mormons
L’histoire des
mormons et la liberté religieuse
Étant l’une
des libertés humaines les plus essentielles, la liberté
religieuse est précieuse pour tous les peuples. Pourtant, elle
a un sens particulier pour ces groupes qui, à un moment ou un
autre, se sont retrouvés impopulaires ou vulnérables à
cause de leurs convictions religieuses. C’est aussi vrai même
dans un pays aussi libre et tolérant que les États-Unis,
où la tolérance et la liberté religieuse ont
toujours été un idéal mais pas toujours mis en
pratique. Des baptistes et quakers aux catholiques, musulmans ou
juifs, les groupes de minorités religieuses en Amérique
ont ressenti l’aiguillon de la persécution pour leur foi
et pour leur efforts à s’y conformer.
Religion
minoritaire en Amérique, les mormons ont aussi fait face à
l’intolérance, y compris à certaines des
persécutions religieuses les plus tristement connues de
l’histoire américaine. Quand l’Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours a été
fondée par Joseph Smith au début du dix-neuvième
siècle, ses membres ont souvent été confrontés
à l’hostilité et à la suspicion. La
croissance de l’Église, attirant de nombreux convertis,
a entraîné des conflits avec d’autres groupes, dus
aux pratiques et croyances religieuses uniques des mormons.
À cette
période, les conflits allaient jusqu’à
l’intimidation et, parfois, à la violence. Les émeutiers
et les milices incendiaient leurs maisons et détruisaient
leurs récoltes, obligeant les mormons à quitter leurs
campements à plusieurs reprises. Un conflit particulièrement
mortel est survenu en 1838, après que le gouverneur du
Missouri ait ordonné que tous les mormons soient chassés
de l’État ou « exterminés ».
De violents émeutiers ont attaqué une petite ville
rurale et ont dispersé les colons mormons, massacrant dix-sept
d’entre eux, hommes et garçons. À la lumière
de ces différents incidents, les saints des derniers jours ont
demandé de l’aide et de la protection à la fois à
l’État et aux gouvernements nationaux. Des amis
sympathisants de l’Église ont essayé d’aider,
mais les mormons n’ont pu que légèrement s’en
remettre.
Ces jours de
violence et de campements mormons frontaliers sont maintenant très
loin derrière nous, l’Église de Jésus-Christ
des saints des derniers jours est depuis devenue une foi mondiale et
grandement respectée. Mais les leçons de l’Histoire
demeurent. À la lumière de tout cela et d’autres
expériences dans leur histoire, les mormons n’oublient
pas que la liberté religieuse ne doit pas être prise
pour acquise.
Enseignements sur la
liberté religieuse
Pendant ce temps,
les premiers dirigeants de l’Église, comme Joseph Smith,
enseignaient l’importance de la liberté religieuse
qu’ils recherchaient. Les dirigeants de l’Église
enseignaient que la liberté religieuse n’était
pas seulement pour les mormons mais pour tous. Joseph Smith était
un partisan particulièrement engagé envers ces
principes. Par exemple dans le premier campement mormon de Nauvoo, en
Illinois, Smith a dit :
« S’il
a été démontré que j’ai accepté
devant les cieux de mourir pour un « mormon »,
j’ose affirmer devant les cieux que je suis tout aussi prêt
à mourir pour la défense des droits d’un
presbytérien, d’un baptiste ou d’un brave homme de
toute autre dénomination ; car le même principe qui
foulerait les droits des saints des derniers jours foulerait les
droits des catholiques ou de toute autre religion, qu’elle soit
impopulaire ou trop faible pour se défendre. »
(History
of The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints,
volume 5, p. 498–99 ; volume 4, p. 306)
Plus tard, Smith a
présenté un décret qui protégerait les
libertés des peuples de toutes confessions, y compris les
non-chrétiens, à Nauvoo. Ces groupes bénéficieraient
d’une « libre tolérance et de privilèges
égaux dans cette ville ». Joseph Smith a reconnu
qu’assurer la liberté religieuse signifiait la garantir
pour tous. L’importance de la liberté de conscience et
de religion a aussi été intégrée en 1842
dans l’un des treize Articles de foi de l’Église :
« Nous affirmons avoir le droit d’adorer le Dieu
Tout-Puissant selon les inspirations de notre conscience et
reconnaissons le même droit à tous les hommes :
qu’ils adorent comme ils veulent, où ils veulent ou ce
qu’ils veulent. »
Après
Joseph Smith, les dirigeants de l’Église ont continué
à enseigner la liberté religieuse. James E. Talmage, un
apôtre de l’Église de longue date, a écrit
en 1899 que « les saints des derniers jours proclament
leur allégeance inconditionnelle aux principes de
liberté religieuse et de tolérance. Ils affirment que
la liberté d’adorer le Dieu Tout-Puissant, comme la
conscience peut le dicter, est l’un des droits inhérents
et inaliénables de l’humanité » (James
E. Talmage, The
Articles of Faith,
1899, p. 406).
J. Reuben Clark, membre de la Première Présidence de
l’Église, a enseigné en 1935 qu’une
garantie de liberté religieuse
est essentielle dans la vie publique, car « après
tout ce qui compose notre vie et tout ce que nous en faisons, se
trouvent notre religion, notre culte, nos croyances et notre foi en
Dieu. » (J.
Reuben Clark, dans Conference Report, avril 1935, p. 94)
En 1985, l’apôtre
Bruce R. McConkie a écrit que la liberté religieuse est
« pour parler simplement, la partie la plus basique de la
doctrine » de l’Évangile (Bruce
R. McConkie, A New Witness for the Articles of Faith, 1985, p. 655 ;
voir aussi W. Cole Durham, The Doctrine of Religious Freedom, BYU
devotional address, 3 avril 2001). C’est vrai pour les
saints des derniers jours car, comme il l’a expliqué, le
principe du libre arbitre, la liberté innée de choisir
et d’exercer ses croyances religieuses et ses convictions
morales, est à la base de tous les autres enseignements et
points de doctrine essentiels des mormons. La dignité humaine
et le libre arbitre reposent sur la liberté de conscience.
Les dirigeants de
l’Église actuels continuent de rappeler et de mettre
l’accent sur ces principes, expliquant ce qu’est la
liberté religieuse et pourquoi elle est importante. Dallin H.
Oaks a souvent parlé du besoin de préserver la liberté
religieuse à une époque de moins en moins respectueuse
de la religion. Dans un discours magistral à l’université
Chapman en février 2011, il a défendu le principe de la
liberté religieuse et a souligné les tendances
inquiétantes qui la menacent de nos jours. Quentin L. Cook a
aussi encouragé les saints des derniers jours à être
« des avocats de la liberté religieuse et de la
moralité. » Ces dirigeants actuels de l’Église
font écho aux enseignements sur la liberté religieuse
qui font partie de la foi mormone depuis le début.
Avocats de la liberté
religieuse
Les mormons
chérissent la liberté religieuse en vertu de leur
histoire et de leur foi. Mais bien qu’ils aient des raisons
particulières de chérir la liberté religieuse,
ils ne se l’approprient pas ; tout comme Joseph Smith, les
mormons veulent voir ces libertés préservées et
protégées pour tous. À une époque où
la liberté religieuse est de plus en plus menacée, il
en est de la responsabilité de chaque croyant en foi et en
conscience de comprendre et de faire progresser cette liberté
humaine fondamentale pour lui-même et son prochain. Les mormons
ont de nombreuses raisons de conserver cette responsabilité.
4.
Ce que la liberté religieuse requiert de nous
« Les conflits
et les débats sont vitaux pour la démocratie.
Toutefois, si des controverses sur la religion et la politique
doivent refléter la grande sagesse du premier amendement et
mettre en avant les meilleurs intérêts des
contestataires et de la nation, alors notre façon de débattre
et ce dont nous débattons sont critiques. » (La
charte de Williamsburg, Summary of Principles, 1988 ; Dallin H. Oaks
a signé ce document au nom de l’Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours)
Les exigences de la
liberté religieuse
Il y a un paradoxe
avec la liberté religieuse : un gain véritable
découle d’une perte apparente. Le dilemme va comme
suit : si vous voulez protéger vos croyances religieuses,
vous devez protéger les croyances religieuses qui diffèrent
fondamentalement des vôtres. Cela ne nécessite pas
d’adhérer à ces croyances, mais cela requiert un
respect particulier pour elles (voir W. Cole Durham, The
Doctrine of Religious Freedom, discours prononcé à
l’université Brigham Young le 3 avril 2001). Les
affirmations concurrentielles de vérité et de croyance
ne coexistent pas facilement. Toutefois, « la liberté
religieuse pour moi mais pas pour toi » ne peut pas
marcher, surtout dans un monde aussi diversifié que le nôtre.
Des siècles de conflits sectaires ont montré que de
telles attitudes dégradent la liberté de chacun. Le
moyen de s’assurer sa propre liberté est de l’assurer
aux autres.
La liberté
religieuse est autant un devoir que c’est un droit, autant une
exigence de donner qu’un privilège de recevoir. De
telles responsabilités et bénéfices ne sont pas
seulement l’héritage d’une constitution éprouvée
par le temps. Ils façonnent la façon dont nous vivons
notre vie jour après jour. Les fruits de la liberté
religieuse dépendent du dur labeur continuel des communautés
à alimenter la civilité, le respect et la réciprocité
: la rue à double sens de la vertu civique. Soutenir la
liberté religieuse fait partie d’une société
juste et libre.
Cette obligation
mutuelle repose sur la dignité de chacun et la conscience
morale qui guide le libre arbitre humain. Garder cette obligation est
le plus grand défi d’une société en paix.
Ayant été l’objet de persécutions et
d’intolérance par le passé, les membres de
l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours peuvent comprendre les groupes religieux minoritaires qui
souffrent de façon similaire. Un esprit de solidarité a
inspiré Joseph Smith, le prophète fondateur de
l’Église, à affirmer : « C’est
l’amour de la liberté qui inspire mon âme :
la liberté civile et religieuse de toute l’humanité ».
La civilité et ses
conséquences
Une grande part de
cette responsabilité réciproque repose sur la façon
dont nous, citoyens, nous nous traitons les uns les autres. Nos
interactions publiques révèlent quel peuple nous sommes
et quel genre de société nous choisissons de bâtir.
Ces interactions définissent continuellement nos valeurs. Un
soin constant est requis pour cultiver les usages et libertés
de la civilisation.
Nos paroles et
comment nous les prononçons font toute la différence.
Le besoin de civilité ne requiert pas que les citoyens cachent
ou amenuisent leurs croyances en gentilles généralités.
Une discussion sensée peut être à la fois humaine
et vigoureuse. La civilité est un appel pour assurer que
chaque voix est entendue et respectée, même si ce n’est
suivi d’aucun accord. Les organisations religieuses et
individuelles sont responsables d’exposer leurs vues
raisonnablement et respectueusement pour contribuer à obtenir
une discussion fructueuse. L’intensité d’une
démocratie pluraliste nécessite d’être
tempérée par des discours mûrs où
différents partis expriment leurs opinions sans mettre des
croyances de côté.
Discuter d’idées
contraires, signe d’une démocratie saine, enseigne aux
citoyens à reconnaître et à respecter les grandes
différences de chacun. Nous, citoyens, devons toujours parler
avec compassion et être patients envers les gens en désaccord
avec nous. Nous bénéficions de tolérance et de
respect en les donnant nous-mêmes. Personne ne devrait être
critiqué pour suivre ce que lui dit sa conscience morale.
Un climat de bonne
volonté
Dallin H. Oaks, du
Collège des douze apôtres, nous a exhortés :
« En tant que croyants, nous devons argumenter et nous
positionner de manière à contribuer à une
discussion raisonnée et aux arrangements qui sont essentiels à
un gouvernement démocratique dans une société
pluraliste. Ce faisant, nous contribuerons à la civilité
qui est essentielle pour préserver notre civilisation. »
En s’efforçant
de communiquer et de promouvoir leurs valeurs pour toucher les gens
de leur communauté, les saints des derniers jours s’ajoutent
à la multitude de voix soucieuses du bien-être de la
société. Thomas S. Monson, président de
l’Église, a capturé cette aspiration : « En
tant qu’Église, nous nous tournons non seulement vers
les nôtres, mais aussi vers toutes les personnes de bonne
volonté partout dans le monde dans cet esprit de fraternité
qui vient du Seigneur Jésus-Christ. »
Tant que les êtres
humains continuent de s’organiser en société,
d’agir selon leur conscience et de faire des affirmations sur
la vérité ultime, il y aura de grandes différences,
parfois intraitables. Le paradoxe de la liberté religieuse
continuera de requérir que nous accomplissions cette
obligation mutuelle de civilité. Détenir cette liberté
est une rue à double sens.
Sources :
http://www.presse-mormons.ca/article/introduction-a-la-liberte-de-religion
http://www.presse-mormons.ca/article/liberte-de-religion
http://www.presse-mormons.ca/article/ce-que-la-liberte-religieuse-requiert-de-nous