Vous n'y ajouterez rien, et vous n'en retrancherez rien

 

 

Howard W. Hunter (1907-1995)

 

Membre du collège des Douze de 1959 à 1994

Président suppléant du collège des Douze de 1985 à 1988

Président de collège des Douze de 1988 à 1994

Président de l’Église de 1994 à 1995

 

 

 

      Récemment un de mes jeunes amis du champ de la mission m'a écrit une lettre concernant une question qu'on lui avait posée sur les derniers versets de la Bible et leur application au Livre de Mormon. Vous vous souviendrez qu'à la fin de l'Apocalypse, le dernier livre de la Bible, I'auteur, Jean, donne un avertissement et jette I'anathème à quiconque ajoute quelque chose au livre ou en retranche quelque chose. Voici très exactement ce qu'il écrit :

 

      « Je le déclare à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre : Si quelqu'un y ajoute quelque chose, Dieu le frappera des fléaux décrits dans ce livre ; et si quelqu'un retranche quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de I'arbre de la vie et de la ville sainte, décrits dans ce livre » (Apocalypse 22:18, 19).

 

      Ces versets d'Écriture ont été cités maintes et maintes fois par ceux qui essaient de discréditer le Livre de Mormon, prétendant que la révélation de Dieu aux hommes a pris fin. On ne doit plus rien y ajouter et on ne peut rien en retrancher. Ils affirment que le Livre de Mormon est une tentative d'ajouter aux paroles de la Bible. On a avancé cet argument lorsque le Livre de Mormon fut publié et on a continué à I'avancer depuis lors et on l'avance toujours aujourd'hui. Y a-t-il quelque chose de valable dans de telles affirmations ?

 

      La réponse à cette question est en fait très simple. L'étude soigneuse des paroles montre bien que la mise en garde contre le fait d'ajouter ou de retrancher ne concerne pas la Bible tout entière ni même le Nouveau Testament, mais, pour utiliser les paroles de Jean, uniquement les paroles du « livre de cette prophétie », c'est-à-dire la prophétie contenue dans l'Apocalypse. Ceci est confirmé par le fait que certains livres du Nouveau Testament n'avaient pas encore été écrits quand Jean écrivit l'Apocalypse ; et même ceux qui avaient été écrits et existaient à I'époque n'avaient pas encore été rassemblés en une seule compilation.

 

      Le recueil d'écrits composé des soixante-six livres que nous appelons la Bible fut constitué et compilé en un seul volume longtemps après que Jean eut écrit le livre prophétique qui a été placé à la fin de l'ensemble. Il est donc clair que les châtiments terribles décrétés contre ceux qui ajoutent au livre ne pouvaient absolument pas s'appliquer à I'intégralité de la Bible ni même au Nouveau Testament, mais uniquement à l'Apocalypse.

 

      Deuxièmement la mise en garde utilise les mots « la prophétie de ce livre » et aussi les « paroles du livre de cette prophétie ». Le mot livre est dans les deux cas au singulier et ne pouvait désigner que le livre de prophétie écrit par Jean qui est intitulé « Apocalypse de Jean », mot grec qui signifie révélé. Le mot livre devait nécessairement se trouver au singulier parce que lorsqu'il fut écrit, il n'était associé à aucun autre livre et que ce ne fut qu'après beaucoup d'années et bien des débats ecclésiastiques qu'il fut ajouté à la collection qui prit le nom de nouveau canon d'Écritures ou Nouveau Testament.

 

      Il est intéressant aussi de remarquer que Jean lui-même ajouta aux Écritures après avoir écrit I'Apocalypse que I'on pense généralement avoir été rédigé pendant qu'il était dans l’île de Patmos. Ce ne fut que longtemps après avoir quitté Patmos que Jean écrivit sa première épître. Ce fait à lui seul suffirait pour réduire à néant I'affirmation que la révélation était terminée et qu'il était interdit à I'homme d'ajouter aux Écritures. Ceci ajoute une preuve supplémentaire au fait que Jean ne parlait que du livre de l'Apocalypse.

 

      Dans l' Ancien Testament on trouve aussi des dénonciations vigoureuses et des commandements du même genre interdisant d'enlever ou d'ajouter aux paroles qui étaient écrites. La première se trouve dans le Deutéronome, écrit au moment où Moïse exhortait Israël à vivre la loi du Seigneur. La Torah était une loi orale et elle n'avait pas été mise par écrit avant I'époque de la codification de la loi dans le Deutéronome. Maintenant qu'elle était mise par écrit par Moïse avant sa mort et était censée être complète, Moïse écrivit :

 

      « Vous n'ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n'en retrancherez rien ; mais vous observerez les commandements de I'Éternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris » (Deutéronome 4:2).

 

      Plus loin dans le même livre de la loi, Moïse répète l'ordre dans des termes semblables. II dit : « vous observerez et vous mettrez en pratique toutes les choses que je vous ordonne ; vous n'y ajouterez rien, et vous n'en retrancherez rien » (Deutéronome 12:32).

 

      Dans I'esprit de certains, ces recommandations de l'Ancien Testament soulèvent la même question que I'injonction et la mise en garde à la fin de l'Apocalypse, à propos du Livre de Mormon comme tentative d'ajouter à I'Écriture. En fait ces passages contiennent le même commandement que celui qui apparaît à la fin de l'Apocalypse, et si on leur appliquait la même interprétation et le même argument qu'au dernier verset du livre de l'Apocalypse, il n'y aurait pas d'écrits après les écrits de Moïse. Pareille absurdité aurait pour résultat I'abandon de la majeure partie de I'Ancien Testament et tous les livres du Nouveau Testament.

 

      La lecture soigneuse de chacune de ces exhortations montre bien que l'homme ne doit apporter aucun changement aux révélations du Seigneur : l'homme ne doit ni ajouter ni retrancher aux paroles de Dieu. Rien n'indique, rien ne laisse penser que Dieu ne pourrait pas ou ne voudrait pas ajouter ou retrancher ; et personne de raisonnable croyant aux pouvoirs divins de Dieu ne croira volontairement que Dieu se limiterait à ce point. Il ne fait pas de doute qu'il a le droit et le pouvoir d'apporter des révélations supplémentaires pour guider ses enfants à n'importe quelle époque et pour ajouter des Écritures.

 

      L'étude des révélations du Seigneur dans I'Écriture sainte confirme le fait que c'est la révélation continue qui guide les prophètes et I'Église à toute époque. S'il n'y avait pas la révélation continue, Noé n'aurait pas été préparé pour le déluge qui enveloppa la terre. Abraham n'aurait pas été guidé de Charan à Hébron, la terre de promission. La révélation continue fut ce qui amena les enfants d'Israël de l'esclavage à leur Terre Promise. C'est la révélation donnée par les prophètes qui guida l’œuvre des missionnaires, dirigea la reconstruction du temple de Salomon et dénonça I'infiltration des pratiques païennes parmi les Israélites.

 

      Avant son ascension, le Christ promit aux onze apôtres restants : « Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde » (Matthieu 28:20). Après son ascension il guida I'Église par révélation jusqu'à la mort des apôtres et I'apostasie de I'Église de Jésus-Christ qui la suivit.

 

      Le même apôtre qui rédigea I'Apocalypse vit aussi un signe distinctif des derniers jours qui précéderait la seconde venue finale du Seigneur. Il dit :

 

      « Je vis un autre ange qui volait par le milieu du ciel, ayant un Évangile éternel, pour I'annoncer aux habitants de la terre, à toute nation, à toute tribu, à toute langue, et à tout peuple » (Apocalypse 14:6).

 

      Le fait que Jean vit qu'à une époque future un messager de Dieu révélerait à nouveau un Évangile perdu réfute I'argument qu'il ne serait pas nécessaire d'ajouter des révélations à la Bible.

 

      Nous témoignons au monde entier que des anges du ciel sont déjà apparus à notre époque, apportant I'autorité du ciel et rendant les vérités perdues par les enseignements et les pratiques corrompus. Dieu a de nouveau parlé et continue à guider aujourd'hui tous ses enfants par un prophète vivant. Nous déclarons que, comme promis, il est toujours avec ses serviteurs et dirige les affaires de son Église dans le monde entier. Comme dans les temps passés, c'est la révélation qui dirige l’œuvre des missionnaires, la construction de temples, l'appel d'officiers dans la prêtrise et met en garde contre les maux de la société qui risquent d'interdire le salut aux enfants de notre Père.

 

      Dans une révélation donnée à un oracle moderne, Joseph Smith, le Seigneur dit :

 

      « Car je ne fais pas acception de personnes, et je veux que tous les hommes sachent que le jour vient rapidement ; I'heure où la paix sera enlevée de la terre et où le diable aura pouvoir sur ses possessions n'est pas encore arrivée, mais elle est proche. Le Seigneur aura, lui aussi, pouvoir sur ses saints, et règnera au milieu d'eux » (D&A 1:35, 36).

 

      Le Sauveur règne aujourd'hui au milieu de ses saints grâce à la révélation continue. Je témoigne qu'il est de nos jours avec ses serviteurs et le sera jusqu'à la fin de la terre.

 

      Ne soyons pas limités dans notre intelligence au point de reléguer la révélation aux seuls hommes d'autrefois. Dieu est miséricordieux et aime ses enfants à toutes les époques et s'est révélé à eux à notre époque de l'histoire. J'en témoigne solennellement au nom de Jésus-Christ. Amen.

 

 

Source : L'Étoile, octobre 1981, p. 115-118