La
religion et la science
Harvey
Fletcher (1884-1981)
Physicien américain,
inventeur de l'audioprothèse, du sonomètre et de
la stéréophonie
Discours
prononcé le 24 février 1960 devant un groupe d'étudiants à
l'université Brigham Young, à Provo, en Utah
Je me
souviens que quand je fus ordonné diacre je me rendis à
la réunion de prêtrise présidée par
I'évêque. Soudain il me demanda de parler. Je répondis
à son appel. Je me balançai d'un pied sur l'autre et me
tortillai. Vous savez, quand vous avez peur, vous ne trouvez plus vos
mots. Finalement, je m'entendis prononcer les mots suivants comme si
c'était quelqu'un d'autre qui parlait. Je dis : « Je
préfèrerais être sage que grand », et
m'assis.
Ces
paroles me sont restées à l'esprit. Je pense que ce
qu'il y a de plus important dans notre vie, ce sent nos activités
religieuses. Elles sont plus importantes que tout ce que nous
pourrions réaliser dans le monde profane.
II semble
que « Ia science et Ia religion » soit un des
sujets favoris des jeunes, surtout à notre époque de
l'espace. Je pense que c'est particulièrement vrai pour ceux
qui ont reçu une éducation qui leur a enseigné
les rapports entre Dieu et l'homme, et qui, lorsqu'ils vont à
l'université, découvrent des faits qui semblent
contredire ce qu'on leur a appris chez eux. C'est une adaptation qui
est parfois difficile à réaliser, et il y a des
étudiants qui n'y arrivent jamais.
Un savant
qui a foi en Dieu peut conserver cette foi et continuer à
pratiquer sa religion. Une telle personne est à même de
faire cela en dépit de conclusions scientifiques qui semblent,
momentanément, contredire sa foi religieuse. C'est en tous cas
l'expérience que j'ai faite. Ensuite il essaie de raisonner sa
pensée religieuse et ses découvertes scientifiques pour
voir s'il peut parvenir à les accorder. Il s'aperçoit
fréquemment que ce qu'il pensait être sa foi religieuse,
et ce qu'il pensait être un fait scientifique peuvent être
changés pour être accordés. Parfois pareille
résolution ne satisfait pas ses coreligionnaires ou ses
collaborateurs scientifiques, mais elle satisfait son esprit. Il
arrive parfois aussi qu'il n'y ait aucune possibilité
d'accord. En pareil cas, il ne peut que l'abandonner comme un
problème non résolu et espérer qu'à
l'avenir un supplément de connaissances résoudra Ia
difficulté.
Jetons un
coup d'oeil sur notre monde et voyons quelques-unes des limites qui
empêchent l'esprit de le comprendre. Une des premières
choses que nous voyons, c'est que le monde est fait de matière.
On peut répartir cette matière en deux classes :
ce qui est mort ou inanimé et ce qui est vivant. Les matières
de ces deux classes ont beaucoup de caractéristiques en
commun, et sont toutes deux sujettes à deux grandes forces
universelles. La première s'appelle la force de gravitation.
Chaque particule de l'univers attire toutes les autres. Aucun savant
n'a encore été capable de dire pourquoi il en est
ainsi, mais il est possible de prédire des centaines d'années
à l'avance les éclipses de la lune, et ce à
moins d'une seconde près. Ainsi chacun est attiré vers
chaque autre individu, que cela lui plaise ou non.
En outre
chacun est relié par cette force à toutes les autres
particules de l'univers. Nous sommes conscients, dans toutes nos
activités, de cette traction gravitationnelle que la terre
exerce sur notre corps, et nous devons nous y résigner, bien
que nous ne comprenions pas pourquoi il en ainsi et que nous ne
sachions pas quelle est la propriété de la matière
qui fait qu'il en est ainsi. Il serait d'ailleurs stupide de dire :
« Je ne crois pas ce fait parce que je ne peux pas
comprendre ».
Le
deuxième grand lien physique qui nous relie tous à
toutes les autres particules matérielles vient d'une autre
propriété de la matière. La matière se
compose de molécules qui, de leur côté, peuvent
être décomposées en atomes. Chaque atome est en
soi un univers minuscule. II a un noyau autour duquel gravitent
d'infimes particules d'électricité appelées
électrons. Ces électrons sont les composants de base de
toute matière. Il est facile d'en détacher certains de
l'atome, et quand ils sont ainsi libérés, ils
produisent tous les phénomènes électriques.
Ces
électrons sont un groupe social étonnant. lls sont tous
reliés par des liens invisibles qui sont tels que lorsque l'un
d'eux se déplace, s'arrête ou change son mouvement de
quelque manière que ce soit, tous les autres électrons
de l'univers en sont affectés.
Quand
pareil changement se produit, l'électron émet une onde
qui s'en éloigne à Ia vitesse de la lumière,
soit 300 000 km/seconde. De sorte que toutes les fois qu'un
électron change ainsi de mouvement, cela est signalé
dans toute la terre en moins d'un septième de seconde.
C'est
cette propriété qui rend la radio et la télévision
possibles. Les électrons de l'antenne émettrice sont
obligés de danser sur l'air de la musique ou du discours. Leur
manière de danser est transmise à la vitesse de la
lumière aux électrons qui se trouvent dans votre poste
récepteur, et les vibrations électriques y sont
converties en son.
Les
satellites sont un bon exemple de l'usage de ces fils électroniques.
Les ingénieurs situés sur Ia terre et munis des
appareils électroniques ad hoc peuvent tirer ces fils comme si
les satellites étaient des marionnettes, bien qu'ils fassent
le tour de la terre à six ou sept kilomètres par
seconde.
Les
ingénieurs ont pu guider le satellite explorateur de Vénus
pendant trois mois. Alors même qu'il se trouvait à des
millions de kilomètres, passant tout près de la planète
Vénus, il renvoya des renseignements précieux
concernant la surface de celle-ci.
Toutes
les fois que vous pensez ou pliez un muscle, ces ondes sont émises
par les électrons de votre corps. Toutes les activités
physiologiques, le battement du coeur, Ia respiration, etc., émettent
des ondes électriques. Les appareils électriques
appropriés peuvent les capter, et les médecins les
utilisent pour diagnostiquer les défections du mécanisme
humain.
Je vous
ai donné cette esquisse très rapide dans ses grandes
lignes pour que vous vous rendiez compte que, même dans un sens
matériel, vous faites partie d'une organisation grande et
précise et ne pouvez jamais agir ou penser sans influencer
tous les autres individus dans le monde – fortement ceux
qui son très proches de vous et très faiblement ceux
qui sont le plus éloignés de vous.
Ayant ce
tableau à l'esprit, étudions un peu les limites de
l'esprit humain qui essaie de comprendre ce que nous appelons
I'espace et le temps dans notre univers.
Jetons un
coup d'oeil sur ce que j'appellerai six mondes différents ou
le temps et l'espace sont tellement différents que nous ne
pouvons pas les comprendre.
II y a
tout d'abord le Monde Numéro Un, le monde qui nous entoure,
dans lequel notre esprit peut aisément sentir l'espace et le
temps. Une seconde y est a peu près le temps qu'il faut au
coeur pour battre une fois. Un jour est le temps qui s'écoule
entre deux levers de soleil, et une année est le temps que Ia
terre prend pour faire une révolution autour du soleil. Les
distances sont mesurées en mètres, soit une grande
enjambée, en kilomètres, Ia distance qu'une personne
peut parcourir en dix minutes environ. Ces temps et ces longueurs
sont intimement liés à la vie quotidienne.
Maintenant,
dans ce que j'appellerai le Monde Numéro Deux, il y a ce monde
minuscule ou les molécules, les atomes et les électrons
sont des individus. Il y règne des temps et des distances
entièrement nouveaux. Il faudra quarante millions d'atomes
placés les uns à côté des autres pour
faire un centimètre. L'échelle des temps est en
correspondance.
Il y a
des électrons qui font mille millions de millions de voyages
par seconde autour du noyau de l'atome. Si un être intelligent
pouvait vivre sur un électron et appeler un an le temps qu'il
faut à sa planète minuscule pour faire le tour de son
centre nucléaire, il en conclurait qu'il a fallu mille
millions de millions d'années à la forme colossale
appelée homme pour cligner des yeux.
Ce n'est
pas tout, car lorsque nous entrons dans l'atome que j'appellerai le
Monde Numéro Trois, les échelles de temps et d'espace
changent de nouveau par un nouveau facteur d'un million. Ce sont les
explorations à l'intérieur de ce Monde Numéro
Trois qui ont produit les bombes atomiques et à l'hydrogène,
et la puissance nucléaire.
En nous
éloignant de ces mondes minuscules, jetons un coup d'oeil sur
les mondes plus vastes que le nôtre : le Monde Numéro
Quatre, l'univers étoilé. L'échelle d'espace
qu'il convient d'utiliser ici est la distance parcourue par Ia
lumière en un an, qui est d'environ neuf milliards six cent
millions de kilomètres. Les étoiles brillantes que nous
voyons sont éloignées de nous de trois à cent de
ces unités. De même, l'échelle des temps doit
être changée pour le Monde Numéro Quatre. Les
astronomes nous disant que la grande galaxie d'étoiles dont
notre soleil et ses planètes (dont la terre) font partie, a la
forme d'une immense roue de chariot et tourne lentement autour d'un
centre commun à raison d'une révolution tous les deux
cent millions d'années.
Encore
une lois, si un être intelligent pouvait vivre sur une de ces
étoiles, et s'il appelait année le temps qu'il faut à
cette galaxie pour faire une révolution, et divisait alors
aussi son année en minutes comme nous, il pourrait regarder la
terre pour voir ce qui s'y passe. II ne lui faudrait que quinze
minutes de son temps pour voir tout ce qui s'est passé sur Ia
terre depuis 6000 ans.
Dans le
Monde Numéro Cinq, nous devons à nouveau augmenter
notre échelle un milliard de fois. C'est le monde des
nébuleuses ou de la famille des galaxies. En se servant
d'énormes télescopes, les astronomes peuvent observer
un grand nombre de détails dans ces créations géantes.
Ils nous disent qu'elles sont séparées par des
milliards d'années-lumière. Chacune est une galaxie en
elle-même, semblable à celle dont nous faisons partie.
Il est estimé qu'il y a des millions de ces galaxies dans le
champ de nos télescopes.
Et enfin,
il y a le Monde Numéro Six, appelé le monde éternel,
dans lequel il n'y a pas de temps. Il nous est difficile sinon
impossible de comprendre cela, mais les Écritures en parlent :
« La
ville (la Nouvelle Jérusalem) n'a besoin ni du soleil ni de Ia
lune pour l'éclairer car Ia gloire de Dieu l'éclaire,
et l'agneau est son flambeau. Ses portes ne se fermeront point le
jour, car là, il n'y aura point de nuit. »
(Apocalypse 21:23, 25)
«
Tout est comme un seul jour pour Dieu, et le temps n'est mesuré
que pour l'homme. » (Alma 40:8)
Ce n'est
pas tout à fait une idée unique, car que les Hindous
croient la même chose. Ils croient que la où Dieu
demeure, il n'y a pas de temps, et que le temps n'est que pour
l'homme. Ainsi donc, dans le Monde Numéro Six il n'y a ni
commencement ni fin de temps.
Examinons
maintenant quelques-uns des problèmes de pensée
rationnelle relatifs à la science et à la religion.
Nous mentionnerons d'abord deux difficultés qui se présentent
à la personne qui croit en Dieu, puis nous en verrons deux qui
concernent celui qui ne croit pas en Dieu.
Où
Dieu demeure-t-il ? Où est le ciel ? Comment Dieu
exauce-t-il les prières ? Le ciel n'est pas simplement
au-dessus des nuages comme le pensaient autrefois même les
premiers chrétiens.
Les
Russes affirment que leurs astronautes et leurs satellites ont fait
tout le tour du monde jusqu'à une hauteur de 1500 kilomètres
et ont démontré que les cieux étaient un mythe.
Du moins, s'ils existent, ils ne sont pas visibles aux yeux des
humains. S'ils sont placés quelque part au-delà du
vaste système stellaire, le problème des communications
entre Dieu et l'homme devient presque incompréhensible pour le
savant.
Mais si
on croit que les représentants de Dieu et autres esprits
disparus existent encore sur cette terre ou tout près, mais
qu'à cause de leur nature, les êtres humains ne peuvent
les voir et les sentir, alors la difficulté disparaît.
Comme nous l'avons déjà dit, on peut envoyer partout
dans le monde des messages radio en moins d'un septième de
seconde. Et il n'est pas difficile à un savant de croire que
s'il y a de tels êtres autour de nous, ils peuvent faire
connaître leur présence par certains moyens qu'il
pourrait aisément supposer.
On
pourrait encore résoudre le problème en supposant qu'il
existe un moyen de communication plus rapide que celui dû à
la lumière, quelque chose comme les ondes gravitationnelles.
Bien que l'homme n'ait pas encore trouvé pareille méthode,
elle pourrait exister de sorte que des communications rapides
puissent exister dans l'univers tout entier.
Outre la
croyance en Dieu, il y a la foi en la survie de l'homme après
la mort. C'est la une difficulté réelle pour le savant
qui voit le corps se désintégrer et se fondre dans les
éléments terrestres qui le composent. Du point de vue
strictement scientifique, il semble que cela soit la fin de
l'individu.
À
première vue, il semble que cette difficulté soit
insurmontable. Mais, d'un autre côte, si telle est la fin de
l'homme, l'homme n'a été qu'une machine que le hasard a
constituée. Outre que cette pensée soit révoltante
pour la dignité de chacun, je veux souligner qu'elle est
mathématiquement impossible si nous utilisons strictement les
lois de la probabilité telles que nous les connaissons. On est
alors amené à considérer l'homme comme un être
double dont une partie seulement se désintègre après
la mort tandis que l'autre continue à vivre, bien que nous
n'ayons aucun moyen scientifique d'en sentir la présence.
Ces deux
difficultés pour le croyant sont contrebalancées par
les deux difficultés suivantes qui se dressent devant celui
qui ne croit pas en Dieu :
Dans le
monde organique, nous avons un principe appelé l'entropie. Il
déclare que tous les processus du monde inorganique se
produisent de telle manière que les objets chauds se
refroidissent et que les objets froids se réchauffent. Une
autre manière de le dire est de déclarer que le monde
entier va d'une organisation plus complexe à une organisation
plus simple jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'énergie
disponible. On peut prédire ce résultat par des calculs
mathématiques basés sur les lois de la probabilité.
Lorsque
je dus parler à l'église le premier dimanche qui suivit
l'historique explosion de la bombe atomique, je pris pour sujet :
« La bombe atomique démontre qu'il doit y avoir un
divin créateur ». Ce fut la réaction qu'elle
eut sur moi. Et vous voyez pourquoi. Parce que si le monde décline
constamment, ce qui est une déclaration fondamentale de la
science, qui lui a donné son énergie ?
Dans le
monde du vivant, ce sont des processus exactement opposés qui
se produisent.
Les
choses qui croissent vont du simple au composé, de la petite
graine à une organisation complexe. Chaque chose vivante a un
but vers lequel elle se dirige et, se faisant, surmonte de nombreux
obstacles pour essayer de l'atteindre. Dans ce processus, elle viole
toutes les lois de probabilité qui gouvernent le monde
inorganique. En d'autres termes, il doit y avoir une influence
directrice quelconque pour amener ces processus vivants à leur
but. Certains ont appelé cette influence «
l'anti-hasard », d'autres lui donnent d'autres noms. Les
Hindous croient que toutes les choses vivantes ne sont que les
manifestations d'un grand esprit général qui en est
l'influence directrice. Cela coïncide étroitement avec
notre propre croyance que I'Esprit de Dieu imprègne d'une
certaine façon l'univers entier et influence tout ce qui est
vivant.
Ainsi,
par la raison, nous aboutissons ainsi à des culs-de-sac, que
nous prenions comme postulat qu'il y a un Dieu, ou que nous prenions
comme postulat qu'il n'y en a pas. L'esprit humain ne parvient pas à
réunir en un tout logique tous les phénomènes qu'il
observe et sent. Comme le disait Hamlet : « Horatio,
il y a dans le ciel et sur la terre plus de choses que n'en imagine
ta philosophie. »
En ma
qualité d'être humain, j'ai conscience d'être
vivant, d'avoir des sentiments et des expériences intérieures
subtiles qui sont ce qu'il y a de plus réel dans ma vie. Ces
expériences vibrent si fortement en moi que je suis convaincu
qu'il y a en effet plus dans ce monde que ce que l'esprit peut
comprendre. C'est ainsi que je crois fermement que Dieu vit quelque
part, d'une certaine façon, et que la vie a un but pour chaque
personne qui vit ici-bas.
Certains
des conflits apparents entre la science et la religion sont résolus
quand nous définissons clairement ce qu'est la religion et ce
qu'est la science. La science est un arrangement ordonné de
faits observés. Certaines lois et hypothèses sont
formulées de telle façon que ces faits sont plus
significatifs. Le vrai savant ne dépasse pas de beaucoup la
perspective des données observées. S'il le fait, il
quitte le domaine de la science et entre dans celui de la
spéculation. D'autre part, Ia religion traite des fins
dernières, telles que les rapports de Dieu avec l'homme,
l'existence de l'homme, ses origines, sa raison d'être et sa
destinée. Ces fins sont presque toutes en-dehors du domaine
des faits observés, du moins par Ia plupart des êtres
humains.
Je vais
l'illustrer par un incident qui se produisit dans Ia vie de Thomas
Edison, le grand inventeur. On lui demanda ce qu'était
l'électricité. « Je ne sais pas,
répondit-il. Je comprends seulement certaines des choses
qu'elle peut faire. » « Mais comment
l'expliquez-vous ? » lui demanda-t-on encore. « Je
ne puis l'expliquer. On dirait seulement que Dieu lui a donné
son pouvoir. J'y crois et je continue à travailler. »
La
religion traite aussi d'un mode de vie, d'une manière de
vivre telle que l'on puisse retirer un maximum de joie de cette vie.
On peut raisonner cette partie de la religion. En fait, les
psychologues ont décrit ce que l'on appelle « la bonne
vie » et les caractéristiques de l'adulte mûr,
et cela est en accord étroit avec ce que nos dirigeants
religieux nous enseignent depuis des siècles. Mais
souvenez-vous que ce sont la foi et les convictions honnêtes
qui produisent la force motrice interne et l'allant qui font que l'on
vit cette bonne vie.
Les
sciences physiques sont plus exactes mais traitent seulement de
choses inanimées. Si le savant en physique s'en tient
strictement à son domaine et si l'instructeur religieux reste
dans le sien, ils ne peuvent entrer en conflit, parce qu'ils sont
dans des domaines différents. Des conflits apparents s'élèvent
lorsqu'un chef religieux essaie d'enseigner les lois de la dynamique
ou de la fission atomique alors qu'il n'en connaît pas grand
chose, ou qu'un savant essaie de critiquer le comportement d'une
personne vraiment religieuse, alors qu'il n'a lui-même jamais
ressenti la conviction intérieure qui anime cette personne.
Certains
membres de l'Église ont laissé s'accréditer
auprès d'eux l'idée que, d'une manière générale,
les savants n'ont pas foi en Dieu. II est vrai que beaucoup de
savants sont agnostiques et que quelques-uns ne vivent pas leur
religion, mais je sais par expérience qu'il y a un plus grand
pourcentage de croyants parmi les savants qu'il n'y en a dans le grand
public.
Les
savants peuvent accorder la science et leur propre religion. Un grand
nombre de mormons, savants et ingénieurs bien formés et honorés par
leurs collègues servent en même temps dans l'Église en tant qu'évêques,
membres de grands conseils ou présidents de pieu ou
remplissent fidèlement d'autres offices dans I'Église.
Je
pourrais remplir une page entière de noms de savants du monde
qui ont déclaré leur foi en Dieu mais je dois ici me
contenter d'en citer deux. IIs jouèrent un rôle capital
dans l'issue de la Seconde Guerre mondiale. L'un d'eux est un savant
célèbre, prix Nobel et président d'une
université, Arthur Compton :
« La
science et la religion lutent contre l'ignorance, la superstition, la
maladie, la pauvreté et l'arriération. Si la religion
faiblit, la liberté et la démocratie se dessèchent.
Si la foi religieuse renaît, nous avons la garantie première
de la perpétuation de notre démocratie. Toutes les
églises et toutes les synagogues deviennent des sentinelles de
la liberté. Une Église forte défend la liberté
parce qu'elle engendre la foi qui affranchit les hommes. »
L'autre
est un ingénieur électricien célèbre, le
Dr Vannevar Bush, chef de bureau de recherches et de développement
des États-Unis pendant la dernière guerre :
« Ainsi
ceux qui prétendent que l'humanité est engagée
seulement dans une chorégraphie futile, un papillonnement sans
signification sur la face cruelle de la terre avant qu'un rideau
inexorable ne descende, avec dans la vie rien de plus qu'une lutte
pour une existence médiocre ne le disent pas sur la foi des
enseignements de la science. Ils le font sur la conclusion que
l'observation limitée de nos faibles sens et de leurs
aides dérisoires embrasse tout ce qui existe. Cette
erreur engendre le matérialisme et le fatalisme devenu système
politique en vue de la conquête du pouvoir. »
Plaise au
ciel que de tels savants ne sortent jamais de cette école. Il
n'en sera pas ainsi. Ce sont plutôt des hommes de bonne
volonté, ayant une foi ferme en Dieu et doués en même
temps de grandes capacités scientifiques qui partiront d'ici
dans le monde entier et joueront un rôle important dans le
salut de notre civilisation actuelle au cours des jours sombres qui
nous attendent pendant lesquels les matérialistes et les
fatalistes s'efforceront de la détruire.
Sources :
►Enregistrement sonore du discours donné par l'auteur le 24 février 1960 à l'université Brigham Young
►L'Étoile, mars 1964