L’homme : un corps et un esprit

 

 

Marcel Kahne

 

 

 

 

Selon certains groupes religieux, le corps de l’homme ne serait pas habité par un esprit capable de lui survivre et de mener une existence consciente indépendante de lui. Pour employer le terme populaire consacré, l’homme n’aurait pas d’âme. Il ne serait qu’un corps de chair et d’os animé d’un souffle de vie (« rouakh » en hébreu, « pneuma » en grec) et de facultés intellectuelles (« néphech » en hébreu, « psuchê » en grec), et disparaîtrait intégralement à la mort (donc aucune forme de survie dans l’au-delà entre le moment de la mort et celui de la résurrection).

 

Pour appuyer leurs dires, ces groupes s'appuient surtout sur l’Ancien Testament. Or, pour l’Ancien Testament, comme pour tous les textes antiques, la seule réalité est cette vie-ci. La mort, c’est, au pire, la fosse, au mieux, le royaume des ombres. En principe, on n’en revient pas (rarissimes sont les passages bibliques qui envisagent la résurrection. Il faut attendre le texte post-exilique de Daniel pour trouver un passage formel à ce sujet). Il n’est pas question, dans l’Ancien Testament, que les justes aillent vivre avec Dieu, que ce soit au « paradis » ou ailleurs. Le seul espoir qui est offert au juste est de voir sa vie prolongée (Ex 20:12 ou 2 Rois 20:16) ou de connaître une sorte d’éternité par le biais d’une postérité sans fin (Ge 12:2, 13:16, 18:18, 22:17, 26:4, 28:14). De là l’importance d’avoir des fils (Ps 127:35) et de pratiquer si nécessaire le mariage lévirat (De 25:56) permettant d’assurer une postérité à un homme mort sans avoir eu d’enfants.

 

Tout prend donc fin à la mort, lieu de ténèbres (Job 10:21-22), d’ignorance de ce qui se passe (Ec 9:5), de silence (Ps 115:17) d’où il ne peut y avoir de retour (Ec 9:6, Job 14:12,14 ; 16:22 Ps 49:20 ; 78:39 Es 26:14 ; 38:18). Il n’est donc pas étonnant que Job qualifie la mort de « roi des épouvantements » (Job 18:14).

 

Le tableau n’est cependant pas tout à fait négatif, car il y a des lueurs d’espérance en la résurrection : Job 19:25-26  Ps 107:10-16,20  Es 26:19 et surtout Da 12:2,13.

 

En outre, quelques passages énoncent une conception de l’au-delà très généralisée dans l’Antiquité : celle d’une vie végétative en tant qu’ombre : Job 26:5-6  Es 14:9-10 ; 26:14,19  Ez 32:21,31.

 

Bref, l’Ancien Testament est essentiellement préoccupé par cette vie-ci : prolongation ou raccourcissement de la vie individuelle (« Ses jours seront de 120 ans », Ge 6:3 ; « J’ajouterai à tes jours quinze années », 2 R 20:6), dispersion future d’Israël en guise de châtiment, rassemblement futur d’Israël en cas de récompense. Il n’y est pas question d’existence glorieuse en la présence de Dieu au lendemain d’une résurrection générale. Quant à la mort, l’Ancien Testament professe l’ignorance (Ec 3:21).

 

L’idée de la résurrection était tellement inusitée, même du temps de Jésus, et malgré les enseignements des Pharisiens, qui y croyaient, que les disciples du Christ en étaient encore à se demander « entre eux ce que c’est de ressusciter des morts ? »  (Mc 9:10, 31-32 ; voir aussi Ac 26:8). Quant aux païens d’Athènes, dès que Paul leur parla de la résurrection des morts, « les uns se moquèrent, et les autres dirent : Nous t’entendrons là-dessus une autre fois » (Ac 17:32) et même certains saints de Corinthe disaient « qu’il n’y a point de résurrection des morts » (1 Co 15:12).

 

Le Nouveau Testament, lui, présente une conception très différente de l’Ancien. Les enseignements de Jésus et des apôtres sur la survie de l’esprit entre la mort et la résurrection et sur l’éternité de bonheur ou de malheur qui attend l’homme après sa résurrection sont nombreux et sans équivoque.

 

Nous allons maintenant passer en revue ces enseignements, mais il faut d’emblée faire un sort à deux notions erronées :

 

1. Certains prétendent que le grec « pneuma », traduit en français par « esprit », désignerait, comme son équivalent hébreu, quelque chose et non quelqu’un : Il signifierait soit « vent », soit « souffle ». Nous verrons que les premiers chrétiens donnaient aussi à ce mot un sens où il désigne bel et bien un être du monde invisible : personne (le « moi »), fantôme ou démon.

 

2. Le fait que le Nouveau Testament assimile occasionnellement la mort à un sommeil (Jn 11:11 ; Ep 5:14 ; 1 Th 4:14) est avancé comme preuve de l’inconscience de l’homme après la mort. Il est un fait qu’une personne morte semble dormir. L’image s’impose donc. Mais sommeil n’est pas synonyme d’inconscience : les études modernes sur le sommeil l’ont largement démontré. Mais la meilleure réponse à cet argument est encore celle donnée par Shakespeare, dans le fameux monologue de Hamlet, « to be or not to be » :

 

« Mourir, dormir. Dormir ? Rêver peut-être ; oui, voilà le grand obstacle. Car de savoir quels songes peuvent survenir dans ce sommeil de la mort... c’est de quoi nous forcer à faire une pause... » (Hamlet, collection Classiques Hatier, Acte III, scène I, p. 61).

 

Voyons maintenant les passages du Nouveau Testament qui montrent clairement qu’il y a une survie consciente de l’esprit entre la mort et la résurrection.

 

 

1. Enseignements de Jésus-Christ

 

A. Parabole du mauvais riche et de Lazare

« Le pauvre mourut, et il fut porté par les anges dans le sein d’Abraham. Le riche  mourut aussi, et il fut enseveli. Dans le séjour des morts, il leva les yeux ; et, tandis qu’il était en proie aux tourments, il vit de loin Abraham, et Lazare dans son sein... » (Lc 16:22-23).

 

Dans ce texte apparaît clairement la notion d’une survie du moi après la mort, subsistant dans un état de tourment ou de félicité. A cette interprétation, qui laisse l’Écriture dire ce qu’elle dit, on oppose l’argument qu’il s’agit d’une fable et qu’il ne faut pas la comprendre littéralement. On ajoute aussi qu’à ce compte-là, il faudrait aussi prendre littéralement les paroles du riche « ... envoie Lazare, pour qu’il trempe le bout de son doigt dans l’eau et me rafraîchisse la langue ; car je souffre cruellement dans cette flamme »  (v. 24), ainsi que l’expression « sein d’Abraham ».

 

Cet argument se réfute comme suit :

 

(1) une parabole n’est pas une fable : Une fable met en scène des personnages et des situations imaginaires ; une parabole utilise des exemples de la vie de tous les jours pour en tirer une leçon, cette dernière étant renforcée dans l’esprit de l’auditeur par le caractère réaliste de l’exemple sur lequel elle est basée : la veuve qui perd sa drachme, le berger qui part à la recherche de sa brebis égarée, le semeur dont la semence tombe dans différentes sortes de sol, le Juif dévalisé et laissé pour mort sur le chemin de Jérusalem à Jéricho, sont autant d’événements de la vie quotidienne. Jésus a raconté une quarantaine de paraboles, toutes basées sur des faits réels. Il n’y a donc aucune raison de penser qu’il en serait autrement pour la parabole du riche et de Lazare. Le Christ n’aurait pas affaibli son enseignement en prêtant à critique pour le choix d’un exemple ne convenant pas au genre de la parabole.

 

(2) Les détails concrets, tels que « le sein d’Abraham », l’eau pour rafraîchir le bout de la langue du riche et la flamme ne posent aucun problème pour celui qui connaît le procédé typiquement hébraïque de représenter les réalités spirituelles par des images concrètes.

 

B. L’apparition du Sauveur à ses apôtres

« ... lui-même se présenta au milieu d’eux ... Saisis de frayeur et d’épouvante, ils croyaient voir un esprit (dans le texte grec : pneuma !). Mais il leur dit : Pourquoi êtes-vous troublés ... un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’ai » (Lc 24:37-39).

 

Le Christ avait ici une occasion idéale d’enseigner que les esprits n’existaient pas et qu’à la mort l’homme meurt tout entier. Au lieu de cela, il enseigne qu’un esprit n’a ni chair ni os, donc qu’un esprit cela existe et que c’est un être désincarné ou, en tous cas, non incarné.

 

Cette croyance aux esprits en tant que fantômes se retrouve aussi dans Mt 14:26 et Mc 6:49, où le terme utilisé est « phantasma ».

 

C. Le « cas » Jésus-Christ

Jésus-Christ vécut comme un homme parmi les autres hommes. Il naquit, se nourrit, grandit et mourut comme tous les hommes. Dans Jn 20:17, il va jusqu’à se mettre sur un pied d’égalité avec les autres hommes :

 

« ... Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »

 

Pourtant, il dit aussi aux Juifs :

 

« Avant qu’Abraham fût, je suis » (Jn 8:58)

 

Cela implique qu’avant de vivre comme homme mortel, le « moi »  de Jésus-Christ avait une existence extracorporelle dès avant l’époque d’Abraham. Ce passage doit être rapproché de Jn 9:1 où les apôtres demandent au Christ :

 

« Qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle? »

 

Réflexion qui implique que, dans l’esprit des apôtres, sans doute à la suite de l’enseignement reçu du Maître, il y avait également pour l’homme une existence, antérieure à la naissance, du « moi ».

 

L’Écriture témoigne aussi de l’existence extracorporelle du Christ – et par la même occasion des hommes – entre la mort et la résurrection, quand elle dit :

 

« Christ aussi ... ayant été mis à mort quant à la chair, mais ayant été rendu vivant quant à l’[e]sprit, dans lequel aussi il est allé prêcher aux esprits en prison ... Car l’Évangile a été aussi annoncé aux morts ... » (1 P 3:18-19, 4:6). Selon les versions, on trouve « Esprit » ou « esprit », ce qui veut dire que la majuscule est affaire d’interprétation et non de traduction).

 

D. La promesse de Jésus au malfaiteur

« [Le malfaiteur] dit à Jésus : Souviens-toi de moi, quand tu viendras dans ton règne. Jésus lui répondit : Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » (Lc 23:42-43).

 

Ce passage est en rapport direct avec le passage précédent dans 1 P 3 : Le malfaiteur, après une mauvaise vie, et arrivé au seuil de la mort, fait un premier pas vers la conversion : Il reconnaît ses crimes et pose un acte de foi en Jésus-Christ qu’il reconnaît comme Roi. Jésus l’en récompense en lui annonçant qu’il va l’accompagner dans le séjour des morts où il sera évangélisé, « afin que, après avoir été jugé [...] quant à la chair, [il vive] selon Dieu quant à l’[e]sprit » (cf. 1 P 4:6).

 

L’objection faite à cette Écriture est la suivante : dans le manuscrit originel de Luc il n’y avait pas de virgule, celle-ci étant une invention ultérieure. Dans le membre de phrase : « En vérité, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis », la virgule aurait été mal placée. Il faudrait lire : « En vérité, je te le dis aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis. »

 

Rien ne justifie ce déplacement de la virgule, qu’on ne trouve d’ailleurs dans aucune version biblique, qu’elle soit catholique ou protestante. Au contraire, tout milite en faveur de la place actuelle de la virgule :

 

(1) L’expression « en vérité, en vérité, je te le dis »  est toujours employée seule, sans adjonction d’aucun autre mot, comme introduction à un discours.

 

(2) Le contraste entre le vœu du malfaiteur que Jésus se souvienne de lui à l’époque lointaine où il viendrait dans son règne, et la réponse de Jésus : « Aujourd’hui tu seras avec moi » est bien dans le style percutant de celui-ci.

 

(3) En faisant cette promesse, Jésus annonçait aussi au malfaiteur que son supplice serait court, ce qui était une grande consolation quand on sait qu’un crucifié pouvait rester jusqu’à une semaine sur la croix avant de mourir. La promesse se réalisa d’ailleurs le jour même, puisqu’on mit fin à la vie des malfaiteurs en leur brisant les jambes (Jn 19:31-32).

 

Un problème peut être posé par le sens du mot « paradis », qui est employé dans la Bible dans des sens divers. C’est un mot d’origine persane qui signifie « lieu clos ». Il est employé trois fois dans la Bible hébraïque dans le sens de « jardin planté d’arbres » (Ca 4:13, Né 2:8 [garde forestier], Ec 2:5). Les Septante ont traduit par « paradeisos » le jardin d’Éden, et le mot a été employé dans ce sens métaphorique pour exprimer la félicité. À l’époque du Nouveau Testament, le mot « paradis »  désigne aussi bien un jardin ou enclos que le paradis terrestre, ou une région du ciel, ou l’endroit où vont les morts. Les passages du livre d’Énoch sur le paradis sont ceux qui éclairent le mieux le texte de Luc : il s’agit d’un lieu où vont les « âmes »  après la mort. Le mot « paradis » a donc ici le même sens que « le sein d’Abraham » dans Lc 16:23.

 

 

2. Enseignements des apôtres

 

Toute une série de passages montrent clairement que les apôtres concevaient l’homme comme composé d’une enveloppe de chair et d’os, qu’ils appellent « tente », et du « moi », qui quittera un jour ladite tente pour mener une existence indépendante d’elle. La formulation dans le texte grec d’un de ces passages, 2 Co 5:1, « ... si cette tente où nous habitons sur la terre... », est très intéressante : « éan hê épigeios hêmôn oïkia tou skênous » : « si notre maison terrestre de la tente... »

 

« Aussi nous gémissons dans cette tente » (2 Co 5:2)

 

« Car tandis que nous sommes dans cette tente... » (id. v. 4)

 

« ... et nous aimons mieux quitter ce corps et demeurer auprès du Seigneur ... » (id. v. 8)

 

« Nous nous efforçons de lui être agréables, soit que nous demeurions dans ce corps, soit que nous le quittions » (id. v. 9)

 

« ...afin que chacun reçoive selon le bien ou le mal qu’il aura fait, étant dans son corps » (id. v. 10)

 

« ... Comme étant aussi vous-mêmes dans un corps » (Hé 13:3).

 

« Et je regarde comme un devoir, aussi longtemps que je suis dans cette tente, de vous tenir en éveil par des avertissements, car je sais que je la quitterai subitement » (2 P 1:13-14).

 

Trois passages, en particulier, sont parlants à propos de la survie de l’esprit (le « moi ») au corps ou de son existence séparée du corps :

 

« ...car Christ est ma vie, et la mort m’est un gain. Mais s’il est utile pour mon oeuvre que je vive dans la chair, je ne saurais dire ce que je dois préférer. Je suis pressé des deux côtés : j’ai le désir de m’en aller et d’être avec Christ, ce qui de beaucoup est le meilleur ; mais à cause de vous il est plus nécessaire que je demeure dans la chair » (Ph 1:21-24).

 

« ...nous aimons mieux quitter ce corps et demeurer auprès du Seigneur » (2 Co 5:8).

 

Paul fut certainement un des plus grands missionnaires qui aient jamais vécu. Si la mort avait été pour lui l’inconscience, elle aurait été une regrettable perte de temps. Jamais il n’aurait considéré que « la mort [lui était] un gain ». Le dilemme de Paul, sa version du « to be or not to be », ne se serait même pas posé. S’il y avait dilemme, c’est parce que Paul avait le choix entre poursuivre son activité missionnaire, et retrouver le Christ dans l’au-delà, « ce qui de beaucoup [serait] le meilleur », impliquant forcément une existence consciente du moi.

 

« Je connais un homme en Christ, qui fut, il y a quatorze ans, ravi jusqu’au troisième ciel (si ce fut dans son corps, je ne sais, si ce fut hors de son corps, je ne sais, Dieu le sait). Et je sais que cet homme fut enlevé dans le paradis... » (2 Co 12:2-4).

 

On retrouve, ici encore, la même conception du « moi » distingué de son corps. Si Paul avait entretenu la conception que l’homme n’est rien de plus qu’un corps animé par un souffle et doté de facultés intellectuelles, la question de savoir s’il pouvait avoir une vision dans son corps ou hors de son corps ne se poserait même pas. Ce serait dans son corps.

 

Les passages suivants révèlent aussi que les apôtres concevaient l’homme comme étant un corps habité par quelqu’un et non par un simple souffle et par conséquent que les mots grecs « pneuma » et « psuchê », rendus par « esprit »  et « âme », reçoivent un autre sens que le simple sens de « souffle »  ou de « facultés intellectuelles » :

 

« Lequel des hommes, en effet, connaît les choses de l’homme, si ce n’est l’esprit [pneuma] de l’homme qui est en lui ? » (1 Co 2:11).

 

« Qu’un tel homme soit livré à Satan pour la destruction de la chair, afin que l’esprit [pneuma] soit sauvé au jour du Seigneur Jésus » (1 Co 5:5).

 

« Puisque nos pères selon la chair nous ont châtiés, et que nous les avons respectés, ne devons-nous pas à bien plus forte raison nous soumettre au Père des esprits [pneumatôn], pour avoir la vie’ré » (Hé 12:9).

 

« ... vous vous êtes approchés ... des esprits [pneumasin] des justes parvenus à la perfection... » (Hé 12:22, 23).

 

« C’est avec jalousie que Dieu chérit l’esprit [pneuma] qu’il a fait habiter en nous » (Jc 4:5).

 

« Dieu est esprit [pneuma], et il faut que ceux qui l’adorent l’adorent en esprit [pneumati] et en vérité » (Jn 4:24).

 

« ... je vis sous l’autel les âmes [psuchas] de ceux qui avaient été immolés... » (Ap 6:9).

 

« Et je vis les âmes [psuchas] de ceux qui avaient été décapités... Ils revinrent à la vie... » (Ap 20:4).

 

Exemples de « personnes diaboliques » représentées par le terme grec « pneuma » :

 

« …un homme... possédé d’un esprit [pneumati] impur... Jésus lui [dit] : Sors de cet homme, esprit [pneuma] impur. Et il lui demanda : Quel est ton nom ? Légion est mon nom, lui répondit-il, car nous sommes plusieurs... » (Mc 5:1-12)

 

« Jésus, voyant accourir la foule, menaça l’esprit [pneumati] impur, et lui dit : Esprit [pneuma] muet et sourd, je te l’ordonne, sors de cet enfant, et n’y rentre plus. Et il sortit, en poussant des cris... » (Mc 9:25-26)

 

« Lorsque l’esprit impur [to akatharton pneuma] est sorti d’un homme, il va par des lieux arides, cherchant du repos, et il n’en trouve point. Alors il dit : Je retournerai dans ma maison d’où je suis sorti ; et, quand il arrive, il la trouve vide, balayée et ornée. Il s’en va, et il prend avec lui sept autres esprits [pneumata] plus méchants que lui... » (Mt 12:43-45).

 

Pierre enseigne explicitement la survie du « moi »  après la mort et le fait qu’entre sa mort et sa résurrection Jésus-Christ est allé prêcher aux morts :

 

« Christ aussi a souffert une fois pour les péchés, lui juste pour des injustes, afin de nous amener à Dieu, ayant été mis à mort [d’une part] quant à la chair, ayant été rendu vivant [d’autre part] quant à l’[e]sprit, [dans lequel aussi (ou : même) aux esprits en prison étant allé, il prêcha], qui autrefois avaient été incrédules, lorsque la patience de Dieu se prolongeait, aux jours de Noé, pendant la construction de l’arche... » (1 P 3:18-20. Traduction littérale du grec pour les parties entre crochets).

 

Dans les versets suivants, Pierre exhorte les saints à mener une vie droite et à ne pas se plonger dans la débauche comme les païens. Ceux-ci, en effet, « rendront compte à celui qui est prêt à juger les vivants et les morts » (1P 4:5). Cette dernière expression amène Pierre à fournir cette explication supplémentaire, rappel de ce qu’il a dit dans 3:18-20 :

 

« Car l’Évangile a été aussi annoncé aux morts, afin que, après avoir été jugés comme les hommes quant à la chair, ils vivent selon Dieu quant à l’[e]sprit » (1 P 4:6).

 

 

Un plan logique et complet

 

Lorsqu’on laisse ces deux textes dire ce qu’ils disent, on constate qu’ils forment un ensemble logique avec la promesse de Jésus au malfaiteur : « Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » (Lc 23:42-43), avec Mt 28:19-20 :

 

« Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit »

 

et son complément logique dans Mc 16:16 :

 

« Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné »

 

ainsi qu’avec 1 Co 15:29 :

 

« Autrement, que feraient ceux qui se font baptiser pour les morts ? Si les morts ne ressuscitent absolument pas, pourquoi se font-ils baptiser pour eux [1] ? »

 

L’ensemble logique en question est celui-ci : Le Christ est venu pour sauver toute l’humanité. Tous les hommes doivent être sauvés par le même processus : Les envoyés du Christ doivent leur annoncer la bonne nouvelle de l’Évangile, ils doivent croire et être baptisés et on doit leur enseigner « tout ce que [le Seigneur a] prescrit », et ils doivent le vivre. Le texte biblique ne fait ni nuances, ni exceptions : tous les hommes doivent être sauvés de cette façon, les morts comme les vivants. Et par conséquent nous voyons que dans l’Église primitive les vivants se faisaient baptiser pour les morts et que le Christ lui-même est allé inaugurer la prédication aux morts, procédé par lequel tous les hommes auront l’occasion d’entendre l’Évangile et de l’accepter ou de le refuser. Dès lors, « après avoir été jugés comme les hommes quant à la chair » (ils doivent être jugés et recevoir « selon le bien ou le mal [qu’ils auront] fait, étant dans [leur] corps », cf 2 Co 5:10), ils pourront vivre « selon Dieu quant à l’[e]sprit », c’est-à-dire qu’ils vivront comme des saints de Dieu dans le monde des esprits. Un plan admirable par son universalité, sa justice et son équité [2].

 

Quels sont les arguments de ceux qui croient, en dépit de tout ce qui précède, que l’homme est inconscient entre la mort et la résurrection, et de ceux qui rejettent notre lecture des Écritures citées ci-dessus ?

 

Ils rejettent Mc 16:16 parce que, selon les spécialistes, la fin de Marc ne se trouvait pas dans le texte originel, mais a été ajoutée tardivement au manuscrit. D’autre part, certains vont jusqu’à contester la nécessité du baptême ! (Dieu ne peut pas être lié par un geste rituel, disent-ils). Or, s’il est un sujet sur lequel la Bible est claire, c’est bien sur celui-là. Il suffit de consulter Mt 3:13-17, 28:19-20, Lc 7:28-30, Jn 3:5, Ac 2:37-38, Ga 3:27, 1 P 3:21. Le message de Mc 16:16 est donc une conclusion logique.

 

Si on nie l’existence consciente de l’esprit après la mort, 1 P 3:18-20 et 4:6, dans lesquels les catholiques voient « la descente du Christ aux enfers » (cette doctrine fait partie du « Symbole des Apôtres »), doivent être entièrement réinterprétés. Le problème porte alors, entre autres, sur le mot grec « pneuma », employé trois fois dans ces deux passages. Le texte grec originel était entièrement écrit en majuscules. L’emploi de la majuscule ou de la minuscule (Esprit ou esprit) est donc une affaire d’interprétation et non de traduction. Et l’interprétation est affaire de doctrine. Jésus est-il descendu en tant qu’esprit parmi les esprits des morts pour leur prêcher l’Évangile ? A-t-il été ressuscité par le Saint-Esprit et est-ce le Saint-Esprit qui a prêché l’Évangile au nom du Christ aux antédiluviens qui se retrouvèrent en prison plus tard parce qu’ils avaient refusé son témoignage ? Ou bien ces « esprits en prison »  sont-ils des anges rebelles ? Et si le Christ est descendu aux enfers, à quoi cela servait-il ? Et dans 4:6, les morts vivent-ils selon Dieu dans leur état spirituel ou s’agit-il d’anciens pécheurs (morts aux choses de Dieu), devenus justes (vivants quant aux choses de Dieu) qui vivent maintenant selon le Saint-Esprit ? Mais que signifie alors l’idée d’être jugé ou condamné comme (selon) les hommes ? Un coup d’œil sur quelques versions bibliques donnera une idée de la confusion qui règne en la matière :

 

Segond (version 1910) :

 

« ...ayant été mis à mort quant à la chair, mais ayant été rendu vivant quant à l’Esprit, dans lequel aussi il est allé prêcher aux esprits en prison ... Car l’Évangile a été aussi annoncé aux morts, afin que, après avoir été jugés comme les hommes quant à la chair, ils vivent selon Dieu quant à l’Esprit. »

 

Segond (version 1978) :

 

« Mis à mort selon la chair, il a été rendu vivant selon l’Esprit. Par cet Esprit, il est aussi allé prêcher aux esprits en prison ... C’est pour cela, en effet, que les morts aussi ont été évangélisés, afin qu’après avoir été jugés comme les hommes quant à la chair, ils vivent selon Dieu quant à l’esprit. »

 

Crampon :

 

« Mis à mort dans la chair, il est revenu à la vie par l’Esprit. C’est avec cet Esprit qu’il est allé prêcher aux esprits emprisonnés ... C’est bien pour cela que l’Évangile a été aussi annoncé aux morts : pour que, condamnés (à mourir) dans la chair selon la loi des humains, ils vivent par l’Esprit selon la loi de Dieu. »

 

Bible de Jérusalem :

 

« Mis à mort selon la chair, il a été vivifié selon l’esprit. C’est en lui qu’il s’en alla même prêcher aux esprits en prison ... C’est pour cela, en effet, que même aux morts a été annoncée la Bonne Nouvelle, afin que, jugés selon les hommes dans la chair, ils vivent selon Dieu dans l’esprit. »

 

Bible de Maredsous (1977) :

 

« Il a subi la mort dans sa chair, mais fut rendu à la vie quant à l’esprit. C’est dans cet esprit qu’il est allé prêcher aux esprits détenus en captivité ... C’est pour cela d’ailleurs, que l’Évangile a été également annoncé aux morts, afin qu’ils vivent selon Dieu en esprit, quoiqu’ils soient condamnés selon les hommes, dans la chair. »

 

Traduction oecuménique (TOB) :

 

« Lui mis à mort en sa chair, mais rendu à la vie par l’Esprit. C’est alors qu’il est allé prêcher même aux esprits en prison ... C’est pour cela, en effet, que même aux morts la bonne nouvelle a été annoncée, afin que, jugés selon les hommes dans la chair, ils vivent selon Dieu par l’Esprit. »

 

Le malaise des traducteurs et des exégètes face à ce texte est exprimé comme suit par André Chouraqui dans « L’Univers de la Bible », Tome IX, p. 440 : « Ce verset (19) est si difficile à interpréter et si étrange dans son contexte que maints exégètes y ont vu une interpolation. Mais, compte tenu des conceptions régnant alors parmi les Hébreux, il semble avoir une certaine logique et suggérer que Iéshoua’ [Jésus], par la puissance de l’esprit, inspira Noah [Noé] lorsqu’il s’adressa à l’humanité condamnée pour tenter de la sauver. Des commentateurs expliquent ce texte en avançant que Iéshoua’, dans l’intervalle compris entre sa crucifixion et sa résurrection, est descendu au Shéol pour prêcher lui-même aux morts du déluge, leur donnant ainsi une ultime chance de salut. Mais cette théorie ne semble guère trouver ici de support scripturaire. »

 

La traduction littérale des vv. 18-19 donne ceci : « ... thanatôtheis (ayant été mis à mort) mèn (d’une part) sarki (datif sans préposition qu’on ne peut rendre que par « quant à » ou « en ce qui concerne » [la] chair), dzôopoïêtheis (ayant été rendu vivant) dé (d’autre part) tô pneumati (également un datif sans préposition : « quant à l’esprit » ) èn hô (dans lequel) kaï (aussi, même) toïs èn phulakê pneumasin (aux en prison esprits) poreutheis (étant allé) ékêruxèn (il prêcha)... »

 

 

Remarques :

 

1. « mèn » et « dé » servent à marquer une opposition ou un contraste. Il est donc naturel de voir ici un contraste entre le corps de chair mort et l’esprit qui entame une vie autonome.

 

2. « dans lequel » est la traduction la plus directe de « èn hô », comme le rendent Segond 1910, Jérusalem et Maredsous.

 

3. « aussi (même) aux esprits en prison étant allé il prêcha »  dit clairement (1) qu’il alla aux esprits en prison, (2) qu’il leur prêcha, (3) qu’il s’adressa même (également un sens de « kaï ») aux esprits qui avaient été rebelles du temps de Noé. 1 Pi 4:6 : « l’Évangile a été aussi annoncé aux morts » précise que c’est aux morts en général (y compris les antédiluviens) que l’Évangile a été prêché.

 

Ainsi quand on veut bien laisser la Bible parler par elle-même, on lit que le Christ, une fois son corps de chair mort et son esprit rendu libre de mener une existence indépendante, est allé parmi les esprits des morts et même parmi les antédiluviens pour leur annoncer que l’œuvre de rédemption était réalisée.

 

1 P 3:18-19 débouche ainsi tout naturellement sur 1 P 4:5-6, qui est son complément logique, à savoir que l’Évangile a été prêché aux morts aussi bien qu’aux vivants, pour que les morts, une fois jugés pour le comportement qu’ils ont eu, en fonction de la lumière qu’ils avaient quand ils vivaient, puissent, s’ils acceptent l’Évangile dans l’au-delà, le vivre en tant qu’esprits.

 

 

Les objections

 

Mais pour ceux qui rejettent « la descente aux enfers », le passage est embarrassant. De nouveau se présente le mot « esprit ». S’agit-il du Saint-Esprit ou de l’esprit de l’homme ? Les versions qui optent pour la majuscule (Esprit) se basent sur l’interprétation suivante : Les vivants, ce sont les justes. Les morts, ce sont les pécheurs. L’Évangile aurait donc aussi été prêché aux pécheurs, de sorte qu’après avoir été jugés comme les hommes par la chair (?) ils vivent selon Dieu par le Saint-Esprit.

 

Cette interprétation de ce passage n’est une fois de plus pas logique. Le verset 5 dit que Dieu « est prêt à juger les vivants et les morts ». Il est clair que cette expression indique l’humanité, décédée ou non. En outre, nous retrouvons au verset 6 le contraste de 1 P 3:18 entre la chair et l’esprit. Et enfin, les hommes ne seront jugés qu’après leur vie et non après leur baptême, puisque à ce moment-là leurs péchés leur sont remis. Interpréter ce verset comme voulant dire que l’Évangile a été annoncé aux païens, afin qu’après avoir été jugés pour leurs péchés ils vivent selon le Saint-Esprit, ce serait dire qu’il n’y a pas de pardon au moment du baptême. Un autre problème est le mot « aussi » dans « les morts aussi ont été évangélisés ». Si les morts sont les pécheurs, qui aurait « aussi » pu être évangélisé ?

 

Un dernier argument utilisé à propos de ce passage pour montrer que l’œuvre de prédication de l’Évangile aux morts ne peut pas continuer maintenant et a simplement été une action ponctuelle et achevée, c’est que Pierre dit que « les morts aussi ont été évangélisés » ; le verbe étant au passé composé, nous dit-on, la prédication est terminée et l’était déjà au moment où Pierre écrivait ces lignes. L’argument est faible, comme le montre Col 1:23 : « ... l’Évangile que vous avez entendu, qui a été prêché à toute créature sous le ciel... » Là aussi on a un passé composé, et pourtant l’œuvre était loin d’être terminée à l’époque.

 

Enfin, les opposants de la doctrine dite de « l’immortalité de l’âme » invoquent 1 Ti 6:16 : « ... le Seigneur des seigneurs, qui seul possède l’immortalité. » Mais l’argument est faible, car nous avons déjà vu que Paul croyait en un état conscient du « moi » après la mort du corps. Paul n’envisage la notion d’immortalité que par opposition à la situation de l’homme qui doit subir cette séparation du corps et de l’esprit que nous appelons la mort.

 

Indépendamment des problèmes scripturaires qu’elle rencontre, la thèse que l’homme n’est qu’un composé d’éléments physiques qui se décompose à la mort pour disparaître totalement, sans que rien ne subsiste, rencontre plusieurs obstacles logiques insurmontables.

 

1. Si rien ne subsiste de l’homme, il n’y a pas de résurrection. La résurrection est étymologiquement le fait de se relever. Mais qu’est-ce qui va se « relever » à la résurrection ? Si l’homme n’est rien de plus qu’un corps de chair animé d’un souffle et doté de facultés intellectuelles, il n’est rien de plus que l’ensemble de ses cellules. Non seulement la totalité des cellules se renouvelle tous les sept ans, mais le corps, une fois retourné à la terre, se réintègre à d’autres corps par le processus du cycle alimentaire. Quant à la composante intellectuelle et morale de l’homme, si elle n’existe que dans son cerveau, elle est réduite à néant une fois que le cerveau a disparu, et les cellules qui contenaient son « moi conscient » se dissolvent et vont s’intégrer à d’autres organismes vivants. Dans ce cas, il ne peut y avoir de résurrection, mais une « recréation », Dieu créant de toutes pièces des sosies identiques à tous ceux qui sont morts. Après la résurrection, ce ne serait pas les hommes du passé qui seraient debout, mais d’autres êtres qui leur ressembleraient parfaitement.

 

2. Si l’homme n’a pas un « moi » permanent, il n’est pas responsable. Un homme qui n’est rien de plus qu’un corps et un cerveau dotés de vie, n’est rien de plus qu’un robot perfectionné. Il est tel qu’il a été fait et ce n’est donc pas lui qui est responsable de ce qu’il est, mais son Créateur. Dès lors, la notion de péché ne peut pas s’appliquer à lui.

 

3. Si l’homme n’est pas responsable, tout châtiment est forcément injuste. A plus forte raison, le châtiment éternel. Mais les Écritures sont claires : châtiment il y aura. Certains théoriciens affirment que les damnés ressusciteront le temps de subir leur châtiment, ensuite ils retourneront au néant. Cette doctrine, outre qu’elle est contraire aux Écritures, est encore plus injuste que l’injustice qu’elle cherche à corriger : Nous avons déjà vu que si l’homme n’a pas de « moi » permanent, il ne ressuscite pas, mais Dieu doit le remplacer par un sosie qui lui ressemble parfaitement. Ce sosie innocent va devoir souffrir pour le pécheur qu’il remplace, et tout cela pour retourner ensuite au néant. À quoi peut servir un tel châtiment, si c’est pour en revenir à une situation déjà acquise au moment de la mort ? Pour satisfaire un désir de vengeance de la part de Dieu ? C’est inconcevable.

 

En réalité, le châtiment ne peut avoir que deux raisons d’être : La première est une raison éducative. Elle vise à amener le délinquant à se corriger. La seconde, c’est un destin inéluctable lié au fait que l’homme est un être éternel, destin auquel Dieu s’efforce de nous faire échapper grâce à l’Évangile. Ce n’est que si le « moi » de l’homme est éternel et incréé qu’il peut être tenu pour responsable. Ce n’est que s’il est indestructible qu’il aboutit finalement à l’une ou l’autre qualité de vie qui sera définitive. Et apparemment, notre passage ici-bas est la plaque tournante. Le pécheur, comme le juste, choisit la qualité de vie qu’il connaîtra dans l’éternité future, et Dieu cherche à guider l’humanité vers celle qui lui procurera le plus de bonheur.

 

La Bible dit clairement que tous les hommes sans exception ressusciteront :

 

« Car, puisque la mort est venue par un homme, c’est aussi par un homme qu’est venue la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même aussi tous revivront en Christ » (1 Co 15:21-22).

 

Elle dit aussi que le châtiment est une qualité de vie :

 

« Plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, et les autres pour l’opprobre, pour la honte éternelle » (Da 12:2).

 

« C’est là qu’il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob, et tous les prophètes, dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors » (Lc 13:28).

 

... et que ce châtiment est éternel :

 

« Et ceux-ci iront au châtiment éternel, mais les justes à la vie éternelle » (Mt 25:46).

 

« ...être jeté dans la géhenne, où leur ver ne meurt point, et où le feu ne s’éteint point » (Mc 9:47-48).

 

« Et la fumée de leur tourment monte aux siècles des siècles ; et ils n’ont de repos ni jour ni nuit, ceux qui adorent la bête... » (Ap 14:11) [3].

 

 

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[1] La « Traduction du monde nouveau » des Témoins de Jéhovah falsifie ce passage comme suit : « Autrement, que feront ceux qui sont baptisés pour [être] des morts ? Si vraiment les morts ne doivent pas être relevés, pourquoi alors sont-ils baptisés pour [être] de tels [morts] ? Le grec « huper tôn nekrôn »  (huper + complément au génitif) rend impossible le verbe qu’ils ajoutent entre crochets et qui nécessiterait un nominatif.

 

[2] Quand on comprend bien ce programme de prédication aux morts, l’épisode de Jésus et du malfaiteur prend tout son sens : Le malfaiteur a passé toute sa vie dans le péché. L’approche de la mort le rend lucide. S’adressant à l’autre malfaiteur, il dit : « Ne crains-tu pas Dieu ... ? Pour nous, c’est justice, car nous recevons ce qu’ont mérité nos crimes » (Lc 23:40-41). Il fait ainsi le premier pas vers le repentir, qui est l’aveu de ses fautes. Puis il pose un acte de foi envers Jésus en lui disant : « Souviens-toi de moi, quand tu viendras dans ton règne » (v. 42). Jésus lui répond : « Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » (v. 43) : nous allons mourir et nous retrouver en esprit dans le monde des morts où je vais lancer la prédication de l’Évangile à ceux qui, comme toi, n’ont pas eu l’occasion d’en profiter de leur vivant. Tu seras naturellement jugé pour la façon dont tu as vécu, car l’homme est forcément le produit des pensées et des actes de sa vie, mais tu vas entendre l’Évangile, tu pourras l’accepter si tu le veux et des membres de l’Église sur la terre se feront baptiser pour toi, ce qui t’apportera la rémission de tes péchés. Tu pourras alors vivre selon Dieu dans le monde des esprits.

 

[3] Voyez aussi : Mt 8:12 ; 13:42, 50 ; 18:8, 9 ; 22:13 ; 24:51 ; 25:30, 41. Mc 9:44, 46. Lc 3:17. Jn 15:6. Jude 7, 13, 23. Ap 19:20 ; 20:10.