L'expiation
de Jésus-Christ
Jeffrey R. Holland
du Collège des Douze
L’expiation de
Jésus-Christ est l’acte préordonné mais
volontaire du Fils unique de Dieu. Il a offert sa vie, dont son
corps, son sang innocents et son angoisse spirituelle, comme rançon
rédemptrice (1) pour l’effet de la Chute d’Adam
sur toute l’humanité et (2) pour les péchés
personnels de tous ceux qui se repentent, d’Adam jusqu’à
la fin du monde. Les saints des derniers jours croient que c’est
là le fait central, le fondement crucial, la doctrine
principale et la plus grande expression de l’amour divin dans
le plan du salut. Le prophète Joseph Smith a déclaré
que toutes les « choses qui ont trait à notre
religion [ne] sont que des annexes » à l’expiation
du Christ (EPJS, p. 95).
L’expiation de
Jésus-Christ était indispensable à cause de la
transgression, ou Chute, d’Adam, qui a introduit la mort dans
le monde quand Adam et Ève ont mangé du fruit de
l’arbre de la connaissance du bien et du mal (Ge. 2:9 ;
3:1-24). Les saints des derniers jours admettent sans difficulté
la mort physique et spirituelle qu’Adam et Ève ont
attirée tant sur eux-mêmes que sur toute leur postérité,
la mort physique causant la séparation provisoire de l’esprit
et du corps, la mort spirituelle éloignant l’esprit et
le corps de Dieu. Mais ils croient aussi que la Chute faisait partie
d’un plan divin préordonné sans lequel Adam et
Ève n’auraient jamais pu avoir d’enfants mortels.
Si ces premiers parents n’avaient pas choisi librement de
quitter le jardin d’Éden par leur transgression, il n’y
aurait pas eu de genre humain sur cette terre pour connaître
l’opposition et la progression, le libre arbitre et le choix,
et la joie de la résurrection, de la rédemption et de
la vie éternelle (2 Né. 2:23 ; Moï.
5:11).
La nécessité
d’une expiation future a été expliquée
lors d’un Conseil prémortel dans les cieux auquel les
esprits de la famille humaine tout entière assistaient et que
Dieu le Père présidait. Les deux principaux associés
de Dieu à ce conseil étaient Jésus prémortel
(également connu sous le nom de Jéhovah) et Adam
prémortel (également connu comme étant Michel).
C’est dans ce contexte prémortel que le Christ a
volontairement contracté une alliance avec le Père,
acceptant de renforcer le libre arbitre de l’humanité
tout en expiant ses péchés et a laissé au Père
tout l’honneur et toute la gloire de cet acte désintéressé.
Ce rôle préordonné du Christ comme médiateur
explique pourquoi l’Apocalypse décrit le Christ comme
« l’agneau qui a été immolé…
dès la fondation du monde » (Ap. 13:8) et pourquoi
les prophètes, les prêtres et les rois de l’Ancien
Testament, notamment Moïse (De. 18:15, 17-19), Job (19:25-27),
le Psalmiste (Ps. 2, 22), Zacharie (9:9 ; 12:10 ; 13:6),
Ésaïe (7:14 ; 9:6-7 ; 53) et Michée
(5:2), ont pu parler du Messie et de son rôle divin des siècles
avant sa naissance physique. Un prophète du Livre de Mormon a
écrit : « Aucun des prophètes n’a
écrit ni prophétisé sans parler de ce Christ »
(Jacob 4:4 ; 7:11). Le Christ prémortel a déclaré
au frère de Jared, qui vivait environ deux mille ans avant la
naissance du Rédempteur : « Voici, je suis
celui qui a été préparé dès la
fondation du monde pour racheter mon peuple » (Et. 3:14).
Ces préfigurations scripturaires se reflètent dans la
conversation que le Christ a eue avec deux de ses disciples sur le
chemin d’Emmaüs : « Et, commençant
par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua
dans toutes les Écritures ce qui le concernait »
(Luc 24:27 ; cf. aussi 24:44).
Pour les saints des
derniers jours, il est capital de voir la chute de l’homme,
convenue et comprise, uniquement dans le contexte de la rédemption
de l’homme, également convenue et comprise, rédemption
assurée par l’expiation de Jésus-Christ. Ainsi,
l’un des passages les plus importants et les plus souvent cités
des Écritures modernes dit : « Adam tomba pour
que les hommes fussent, et les hommes sont pour avoir la joie. Et le
Messie vient dans la plénitude du temps, afin de racheter de
la chute les enfants des hommes » (2 Né.
2:25-26).
Les Écritures
modernes enseignent que la mission du Christ comme Rédempteur
et le commandement d’offrir des sacrifices d’animaux
comme rappel et symbole anticipés de cette expiation divine à
venir ont été enseignés à l’origine
à Adam et à Ève peu après leur expulsion
du jardin d’Éden (Moï. 5:4-8). L’expiation du
Christ a été enseignée aux parents de la famille
de l’homme pour qu’eux et leur postérité
observent les ordonnances du sacrifice pendant toutes leurs
générations, gardant ainsi en mémoire la mission
et la miséricorde du Christ qui devait venir. Les saints des
derniers jours enseignent formellement que l’envergure de cette
expiation est universelle, ouvrant la voie à la rédemption
de toute l’humanité, des non-chrétiens aussi bien
que des chrétiens, des athées aussi bien que des
croyants, de l’enfant en bas âge ignorant aussi bien que
de l’adulte entièrement converti et bien informé.
« Il est nécessaire qu’il y ait un grand et
dernier sacrifice », dit Amulek dans le Livre de Mormon,
« un sacrifice infini et éternel… il n’est
rien moins qu’une expiation infinie qui suffise pour les péchés
du monde » (Alma 34:10, 12).
Cette expiation infinie
du Christ – et du Christ seulement – a été
possible parce que (1) il a été le seul homme sans
péché à jamais vivre sur cette terre et n’était
donc pas sujet à la mort spirituelle qui découle du
péché ; (2) il était le Fils unique du Père
et possédait donc les attributs de l’état divin,
qui lui donnaient pouvoir sur la mort physique (voir 2 Né.
9:5-9 ; Al. 34:9-12) ; et (3) il était le seul à
être suffisamment humble et disposé au conseil prémortel
à y être préordonné à ce service
(JC, p. 24-73).
L’expiation de
Jésus-Christ a plusieurs aspects universels, infinis et
inconditionnels. Ils comportent sa rançon pour la
transgression originelle d’Adam, de sorte qu’aucun membre
de la famille humaine ne sera jugé responsable de ce péché
(2e A de F). Un autre don universel est la résurrection des
morts pour chaque homme, femme et enfant qui vit, a jamais vécu
ou vivra jamais sur la terre. Ainsi, l’Expiation est non
seulement universelle dans le sens qu’elle sauve la famille
humaine entière de la mort physique, mais elle est également
infinie dans le sens que son impact et son efficacité à
rendre la rédemption est accessible à tous, puisqu’elle
est rétroactive jusqu’au début des temps et
s’étend dans le futur à toute éternité.
En bref, l’Expiation a des conséquences universelles,
infinies et inconditionnelles pour toute l’humanité à
toute éternité.
Mettant l’accent
sur ces dons inconditionnels découlant du sacrifice expiatoire
du Christ, les saints des derniers jours croient que d’autres
aspects du don du Christ sont fonction de l’obéissance
et de la diligence à garder les commandements de Dieu. Par
exemple, alors que les membres de la famille humaine sont
libéralement et universellement soulagés du péché
d’Adam sans aucun effort ou action de leur part, ils ne sont
pas libéralement et universellement soulagés de leurs
propres péchés à moins de s’engager à
avoir foi au Christ, de se repentir de leurs péchés,
d’être baptisés en son nom, de recevoir le don du
Saint-Esprit et la confirmation dans l’Église du Christ,
d’aller résolument de l’avant avec une espérance
ferme et la persévérance fidèle pour le reste du
voyage dans la vie. Le Christ a dit à propos de ce défi
personnel : « Car voici, moi, Dieu, j’ai
souffert ces choses pour tous afin qu’ils ne souffrent pas
s’ils se repentent. Mais s’ils ne se repentent pas, ils
doivent souffrir tout comme moi. Et ces souffrances m’ont fait
trembler de douleur, moi, Dieu, le plus grand de tous, et elles m’ont
fait saigner à chaque pore et m’ont fait souffrir de
corps et d’esprit — et j’ai voulu ne pas devoir
boire la coupe amère, mais je n’ai pas non plus voulu me
dérober » (D&A 19:16-18).
En outre, bien que la
rupture des liens de la mort temporelle par la résurrection du
corps soit un don libéral et universel du Christ, un produit
de sa victoire sur la mort et le tombeau, le genre ou la nature du
corps (ou le « degré de gloire » du
corps), ainsi que le moment de la résurrection de la personne
sont affectés d’une manière très directe
par la mesure de fidélité dont elle a fait preuve dans
cette vie. L’apôtre Paul explique, par exemple, que ceux
qui auront été totalement engagés vis-à-vis
du Christ « ressusciteront premièrement »
(1 Th. 4:16). Paul parle aussi de différents ordres de corps
ressuscités (1 Co. 15:40). Les corps des ordres ou degrés
de gloire les plus élevés dans la résurrection
sont promis à ceux qui adhèrent fidèlement aux
principes et aux ordonnances de l’Évangile de
Jésus-Christ ; ils jouiront non seulement de
l’immortalité (un don universel fait à chacun)
mais également de vies éternelles dans le royaume
céleste de gloire (D&A 88:4 ; 132:24).
Les saints des derniers
jours soulignent le fait que ni les bénédictions
inconditionnelles ni les bénédictions conditionnelles
de l’Expiation ne seraient à la disposition de
l’humanité s’il n’y avait la grâce et
la bonté du Christ. Il est évident que les bénédictions
inconditionnelles de l’Expiation sont imméritées,
mais que les conditionnelles ne sont pas non plus entièrement
méritées. En vivant fidèlement et en gardant les
commandements de Dieu, on peut recevoir des bénédictions
supplémentaires ; mais elles sont malgré tout
données libéralement, pas entièrement gagnées.
Elles sont toujours et dans tous les cas le fait de la grâce de
Dieu. Les Écritures modernes disent formellement que « il
n’y a aucune chair qui puisse demeurer en la présence de
Dieu, si ce n’est par les mérites, et la miséricorde,
et la grâce du saint Messie » (2 Né.
2:8).
L’Église est
également formelle en ce qui concerne le salut des petits
enfants, des handicapés mentaux, de ceux qui ont vécu
sans jamais entendre l’Évangile de Jésus-Christ
et ainsi de suite : ceux-ci sont rachetés par le pouvoir
universel de l’expiation du Christ et auront l’occasion
de recevoir la plénitude de l’Évangile dans le
monde d’esprit.
Pour satisfaire aux
exigences de l’Expiation, le Christ, qui était sans
péché, est d’abord allé au jardin de
Gethsémané pour y connaître l’agonie
spirituelle de l’âme que lui seul pouvait supporter. « Il
commença à éprouver de la frayeur et des
angoisses », disant à ses trois disciples
principaux : « Mon âme est triste jusqu’à
la mort » (Marc 14:34). Les laissant monter la garde, il
alla plus loin dans le jardin, où il allait subir « les
souffrances de tous les hommes, oui, les souffrances de tous les
êtres vivants, tant des hommes que des femmes et des enfants,
qui appartiennent à la famille d’Adam »
(2 Né. 9:21). Là il « [lutta et gémit]
sous un fardeau dont aucun autre être qui a vécu sur la
terre ne pourrait même concevoir la possibilité »
(JC, p. 745).
L’expiation du
Christ répondait aux exigences de la justice et de ce fait
payait la rançon et rachetait les âmes de tous les
hommes, femmes et enfants « afin que ses entrailles soient
remplies de miséricorde, selon la chair, afin qu’il
sache, selon la chair, comment secourir son peuple selon ses
infirmités » (Alma 7:12). Ainsi, les saints des
derniers jours enseignent que le Christ « est descendu
au-dessous de tout » – y compris de toutes les
espèces de maladies, d’infirmités et de désespoir
ressenties par chaque mortel – « en sorte qu’il
a compris toutes choses, afin d’être en tout et à
travers tout, la lumière de la vérité »
(D&A 88:6). C’est essentiellement dans le jardin de
Gethsémané qu’il a senti cette angoisse
spirituelle sonder les profondeurs de la souffrance et de la douleur
humaines. C’est là qu’il était « en
agonie » et « priait plus instamment ».
C’est là que sa sueur « devint comme des
grumeaux de sang, qui tombaient à terre » (Lu.
22:44) car il saigna « à chaque pore »
(D&A 19:18). C’est là qu’il entreprit la
marche finale vers le Calvaire.
La majesté et le
triomphe de l’Expiation atteignirent leur point culminant
quand, après des mauvais traitements sans nom de la part des
soldats romains et d’autres, le Christ supplia sur la croix :
« Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils
font » (Lu. 23:34). Le pardon était la clef du sens
de toute la souffrance qu’il était venu endurer.
Cette mission si
absolument solitaire et atroce est exprimée de manière
poignante dans ce presque dernier cri, le plus douloureux de tous :
« Éli, Éli, lama sabachthani ?
c'est–à–dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi
m'as–tu abandonné ? » (Mt. 27:46). Dans
les profondeurs de cette angoisse, la nature elle-même a été
ébranlée : « Il y eut des ténèbres
sur toute la terre… Le soleil s’obscurcit… le
voile du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu’en
bas, la terre trembla, les rochers se fendirent » (Lu.
23:43-45 ; Mt. 27:51-52). Finalement, même ce qui était
apparemment insupportable fut supporté et Jésus dit :
« Tout est accompli » (Jn. 19:30), puis en
disant : « Père, je remets mon esprit entre
tes mains », « il expira » (Lu.
23:46). Les saints des derniers jours croient que toutes les langues
confesseront un jour, quelque part, comme le centurion romain à
la crucifixion : « Assurément, cet homme était
Fils de Dieu » (Mt. 27:54).
« Le Sauveur
devient ainsi maître de la situation : la dette est payée,
la rédemption faite, l’alliance accomplie, la justice
satisfaite, la volonté de Dieu faite et tout pouvoir est
maintenant remis entre les mains du Fils de Dieu : le pouvoir de
la résurrection, le pouvoir de la rédemption, le
pouvoir du salut… Il devient l’auteur de la vie
éternelle et de l’exaltation. Il est le Rédempteur,
le Ressusciteur, le Sauveur de l’homme et du monde »
(Taylor, p. 171). En outre, son expiation touche toute vie :
animaux, poissons, oiseaux et la terre elle-même.
C’est, pour la
femme et l’homme qui réfléchissent, « une
source d’étonnement sans bornes » (AF, p.
100) que le sacrifice volontaire et miséricordieux d’un
seul être puisse satisfaire aux exigences infinies et
éternelles de la justice, expier toutes les transgressions et
tous les méfaits humains, et amener ainsi toute l’humanité
dans les bras protecteurs de son étreinte compatissante. Un
président et prophète de l’Église des
saints des derniers jours, écrivant à ce sujet, a
déclaré :
« D’une
certaine manière, mystérieuse et incompréhensible,
Jésus a assumé la responsabilité qui aurait
normalement incombé à Adam, mais qui ne pouvait être
accomplie que par sa propre Médiation, et en prenant sur lui
leurs souffrances, en assumant leurs responsabilités et en
supportant leurs transgressions ou leurs péchés. D’une
manière qui est incompréhensible et inexplicable pour
nous, il a pris sur lui le poids des péchés du monde
entier, non seulement d’Adam, mais de sa postérité ;
et en faisant cela, il a ouvert le royaume des cieux non seulement à
tous les croyants et à tous ceux qui ont obéi à
la loi de Dieu, mais à plus de la moitié de la famille
humaine qui meurt avant d’atteindre la maturité aussi
bien qu’aux païens qui, étant morts sans loi,
ressusciteront, grâce à sa médiation, sans loi,
et seront jugés sans loi, et participeront ainsi… aux
bénédictions de son expiation » [Taylor, p.
148-149].
Les saints des derniers
jours chantent un de leurs cantiques préférés,
écrit par Charles H. Gabriel, qui exprime leurs sentiments les
plus profonds concernant ce don, le plus grand de tous :
Merveilleux l’amour
que Jésus, le Christ, m’a donné !
Avec quelle grâce
souvent il m’a pardonné !
Je tremble d’apprendre
qu’il mourut pour moi, pécheur,
Souffrant sur la croix
pour que j’obtienne le bonheur.
Oh ! que c’est
merveilleux que son amour pour moi
L’ait fait mourir
pour moi !
Oh ! que c’est
merveilleux, merveilleux pour moi !
[Cantiques, n° 117]
Bibliographie
•
McConkie, Bruce R.
The Promised Messiah. Salt Lake City, 1978.
•
Nibley, Hugh W.
“The Atonement of Jesus Christ”, Ensign 20, juillet 1990,
p. 18-23 ; août 1990, p. 30-34 ; sept. 1990, p.
221-226 ; oct. 1990, p. 26-31.
•
Taylor, John. The
Mediation and Atonement. Salt Lake City, 1882.
Article tiré de l'Encyclopédie du mormonisme, Macmillan Publishing Company, 1992, traduction Marcel Kahne, source www.idumea.org, avec autorisation