Le besoin d'un Rédempteur

 

 

James E. Talmage (1862-1933)

 

Président de l'université d'Utah de 1894 à 1897

Membre du collège des Douze de 1911 à 1933

 

  

 

      Nous avons montré (voir Existence préterrestre et préordination du Christ) que le genre humain tout entier existait sous forme d'êtres d'esprit dans le monde primitif, et que cette terre fut créée afin de leur permettre de connaître les expériences de la mortalité. Alors qu'ils n'étaient que des esprits, ils étaient dotés des facultés du libre arbitre ou du choix ; et le plan divin prévoyait qu'ils naîtraient libres dans la chair, héritiers du droit inaliénable par la naissance de la liberté de choisir par eux-mêmes dans la mortalité. Il est indéniable qu'il est essentiel à la progression éternelle des enfants de Dieu qu'ils soient soumis aux influences du bien et du mal, qu'ils soient mis à l'épreuve, « pour voir s'ils feront tout ce que le Seigneur, leur Dieu, leur commandera » (Abraham 3:25, dans la Perle de grand prix). Le libre arbitre est un élément indispensable de cette mise à l'épreuve.

 

      Le Père éternel comprenait très bien les natures diverses et les capacités variées de ses enfants d'esprit. Sa prescience infinie lui montrait clairement, dès le début, que dans l'école de la vie certains de ses enfants réussiraient et d'autres échoueraient ; les uns seraient fidèles, les autres trahiraient ; les uns choisiraient le bien, les autres le mal, les uns chercheraient le chemin de la vie tandis que les autres décideraient de suivre le chemin de la destruction. Il prévit en outre que la mort entrerait dans le monde et que ses enfants ne posséderaient leur corps personnel que pendant un temps très réduit. Il vit que l'on désobéirait à ses commandements et que l'on violerait sa loi ; et que les hommes, exclus de sa présence et laissés à eux-mêmes, s'enfonceraient plutôt qu'ils ne s'élèveraient, reculeraient plutôt qu'ils n'avanceraient et seraient perdus pour les cieux. Il était nécessaire qu'un moyen de rédemption fût prévu, rédemption qui permettrait à l'homme pécheur de faire amende honorable et de parvenir, en se soumettant à la foi établie, au salut et finalement à l'exaltation dans les mondes éternels. Le pouvoir de la mort devait être vaincu, de sorte que, même si les hommes devaient nécessairement mourir, ils vivraient de nouveau, leur esprit revêtu d'un corps immortel sur lequel la mort ne pourrait plus prévaloir.

 

      Ne permettons pas à l'ignorance et au manque de réflexion de nous faire supposer erronément que la prescience du Père de ce qui serait, dans des conditions données, allait déterminer que ces choses devaient être. Il ne rentrait pas dans ses desseins que les âmes des hommes fussent perdues ; au contraire son œuvre et sa gloire étaient de « réaliser l'immortalité et la vie éternelle de l'homme » (Moïse 1:39, cf. 6:59, dans la Perle de grand prix). Néanmoins il vit le mal dans lequel ses enfants tomberaient assurément ; et avec un amour et une miséricorde éternels, il prévit les moyens de détourner les effets terribles, à condition que le transgresseur décide d'en profiter. L’offre du Premier-né d'établir l'Évangile de salut par son ministère parmi les hommes et de se sacrifier, par le travail, l'humiliation et la souffrance jusqu'à la mort, fut acceptée et devint le plan préordonné grâce auquel l'homme serait racheté de la mort, serait finalement sauvé des effets du péché et pourrait être exalté par une vie d'activité et de justice.

 

      Conformément au plan adopté dans le conseil des Dieux, l'homme fut créé sous forme d'esprit incarné ; son tabernacle de chair fut composé des éléments de la terre (Genèse 1:26, 27 ; cf. Moise 2:26, 27 ; 3:7 ; Abraham 4:26-28 ; 5:7). Il reçut des commandements et des lois et fut libre d'obéir ou de désobéir avec la stipulation juste et inévitable qu'il bénéficierait ou souffrirait des résultats naturels de son choix (Genèse 1:28-31 ; 2:16, 17 ; cf. Moïse 2:28-31 ; 3:16, 17 ; Abraham 4:28-31 ; 5:12, 13). Adam, le premier homme (Genèse 2:8 ; voir le passage du verset 5, disant qu'avant ce moment-là il n'y avait « point d'homme pour cultiver le sol » ; voir aussi Moïse 3:7 ; Abraham 1:3 ; et dans le Livre de Mormon, 1 Né 5:11) placé sur la terre en exécution du plan établi, et Ève, qui lui fut donnée comme épouse et partenaire indispensable pour pouvoir s'acquitter de la mission dont il avait été chargé, peupler la terre, désobéirent aux commandements formels de Dieu et réalisèrent ainsi la « chute de l'homme », par laquelle l'état mortel, dont la mort est un élément essentiel, commença (Genèse, chapitre 3 ; cf. Moïse, chap. 4). Nous n'avons pas l'intention d'examiner ici dans les détails la doctrine de la chute ; pour nos besoins il nous suffit d'établir cet événement capital et ses importantes conséquences (voir 1 Timothée 2:14 ; 2 Corinthiens 11:3). La femme fut trompée et, en violation directe du commandement, prit de la nourriture qui avait été interdite ; il résulta de cet acte que son corps dégénéra et devint sujet à la mort. Adam se rendit compte de la différence qui était intervenue entre sa femme et lui, et sachant dans une certaine mesure ce qu'il faisait, la suivit, devenant ainsi dégénéré comme elle. Remarquez à ce propos les paroles de Paul l'apôtre : « Ce n'est pas Adam qui a été séduit, c'est la femme qui, séduite, s'est rendue coupable de transgression » (1 Timothée 2:14 ; voir aussi 2 Corinthiens 11:3).  

 

      L’homme et la femme étaient maintenant devenus mortels ; en absorbant une nourriture qui ne convenait pas à leur nature et à leur état et contre laquelle ils avaient été clairement avertis, et comme résultat inévitable de leur désobéissance à la loi et aux commandements divins, ils devinrent sujets aux maladies physiques et aux faiblesses corporelles dont l'humanité hérite naturellement depuis ce temps-là. Ces corps étaient maintenant sujets à la dissolution finale ou à la mort. Le maître tentateur qui trompa Ève par ses sophismes, ses demi-vérités et ses mensonges infâmes, n'était autre que Satan, ou Lucifer, ce « fils du matin » rebelle et déchu, dont la proposition, qui impliquait la destruction de la liberté de l’homme, avait été rejetée dans le conseil des cieux et qui avait été « chassé sur la terre » avec tous ses anges, sous la forme d'esprits non incarnés, destinés à ne jamais recevoir de corps à eux (voir, Existence préterrestre et préordination du Christ). Rejeté du conseil, battu par Michel et les armées célestes, expulsé ignominieusement du ciel, Satan, par un acte de représailles diabolique, se fixa pour but de détruire les corps dans lesquels les esprits fidèles - ceux qui avaient conservé leur premier état - naîtraient ; et la manœuvre de tromperie à laquelle il se livra sur la personne d'Ève n'était que le début de ce plan infernal.

 

      La mort est devenue l'héritage universel ; elle peut venir chercher sa victime dans la tendre enfance ou la jeunesse, dans la force de l'âge, ou son appel peut être différé jusqu'à ce que les cheveux soient blanchis par les ans ; elle peut se produire à la suite d'un accident ou d'une maladie, par la violence ou, comme nous disons, à la suite de causes naturelles ; mais elle doit venir, comme Satan le sait bien ; et c'est cette connaissance qui fait son triomphe actuel et temporaire. Mais les objectifs de Dieu sont, comme ils l'ont toujours été et comme ils le seront toujours, infiniment supérieurs aux desseins les plus profonds des hommes ou des démons ; et les machinations sataniques pour rendre la mort inévitable, perpétuelle et suprême avaient été contrecarrées avant même que le premier homme eût été créé dans la chair. L’expiation qui devait être faite par Jésus-Christ fut prévue pour vaincre la mort et fournir un moyen de payer la rançon qui libérerait les hommes du pouvoir de Satan.

 

      Comme le châtiment de la chute s'abattit sur le genre humain à la suite de l'acte d'une seule personne, il serait manifestement injuste et par conséquent impossible dans le cadre du plan divin d'en faire subir les résultats à tous les hommes sans prévoir leur délivrance. En outre, puisque le péché était entré dans le monde et que la mort était devenue le lot de tous par la transgression d'un seul homme, il est conforme à la raison que l'expiation ainsi rendue nécessaire fût accomplie par un seul homme. « C'est pourquoi, de même que par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort a passé sur tous les hommes, parce que tous ont péché... Ainsi donc, comme par une seule faute la condamnation s'étend à tous les hommes, de même par un seul acte de justice, la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes » (Romains 5:12,18). C'est ce qu'enseignait Paul, qui ajoutait : « Car, puisque la mort est venue par un homme, c'est aussi par un homme qu'est venue la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même aussi tous revivront en Christ » (1 Corinthiens 15:21, 22).

 

      Il est clair que l'expiation devait être un sacrifice par procuration, volontaire et inspiré par l'amour chez le Sauveur, universel dans son application à l'humanité dans la mesure où les hommes accepteraient le moyen de délivrance ainsi placé à leur portée. Seul quelqu'un qui était sans péché pouvait être éligible pour une telle mission. Même les victimes de l'autel dans l'ancien Israël offertes à titre de propitiation provisoire pour les offenses du peuple sous la loi de Moïse devaient être pures et exemptes de défauts ou de taches ; sinon elles étaient inacceptables, et essayer de les offrir constituait un sacrilège (voir Lévitique 22:20 ; Deutéronome 15:21 ; 17:1 ; Malachie 1:8, 14 ; cf. Hébreux 9:14 ; 1 Pierre 1:19). Jésus-Christ était le seul Être qui répondait aux exigences du grand sacrifice :

 

      1. Étant le seul et unique homme sans péché ;

      2. Étant le Fils unique du Père et par conséquent le seul être né sur la terre possédant dans leur plénitude les attributs de la Divinité et du genre humain ;

      3. Étant celui qui avait été choisi dans les cieux et préordonné à ce service.

 

      Quel autre homme a été sans péché, et par conséquent pleinement exempt de la domination de Satan, et à qui la mort, salaire du péché, n'est pas naturellement due ? Si Jésus-Christ avait trouvé la mort comme les autres hommes - à la suite du pouvoir que Satan a acquis sur eux par leurs péchés - sa mort n'aurait été qu'une expérience individuelle, qui n'expierait absolument aucune autre faute ou offense que les siennes. L’innocence absolue du Christ le rendait éligible, son humilité et sa bonne volonté le rendaient acceptable au Père, pour être le sacrifice expiatoire par lequel la propitiation pourrait être faite pour les péchés de tous les hommes.

 

      Quel autre homme a vécu avec le pouvoir de résister à la mort, sur lequel la mort ne pouvait pas prévaloir s'il ne s'y soumettait lui-même ? Et pourtant il était impossible de tuer Jésus-Christ avant que son « heure soit venue », à savoir, l'heure à laquelle il abandonnerait volontairement sa vie et permettrait sa propre mort par un acte de volonté. Né d'une mère mortelle, il héritait de la capacité de mourir ; engendré par un Seigneur immortel, il possédait en héritage le pouvoir de résister indéfiniment à la mort. Il donna littéralement sa vie ; c'est ce qu'il affirme lui-même : « Le Père m'aime, parce que je donne ma vie, afin de la reprendre. Personne ne me l'ôte, mais je la donne de moi-même ; j'ai le pouvoir de la donner et j'ai le pouvoir de la reprendre » (Jean 10:17, 18). Et encore : « En effet comme le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d'avoir la vie en lui-même » (Jean 5:26). Seul un Être comme celui-là pouvait vaincre la mort ; ce n'est qu'en Jésus le Christ qu'était réalisée la condition nécessaire pour être Rédempteur du monde.

 

      Quel autre homme est venu sur la terre avec une telle mission, revêtu de l'autorité d'une telle préordination ? Jésus-Christ ne prit pas sur lui d'expier pour les hommes. Il s'était offert, il est vrai, lorsque l'appel fut fait dans les cieux ; il avait été accepté, cela est également vrai, et vint en son temps sur la terre pour mettre à exécution les termes de cette acceptation ; mais il fut choisi par quelqu'un de plus grand que lui. Lorsqu'il affirmait son autorité, la teneur de ses déclarations était toujours qu'il agissait sous la direction du Père, comme en témoignent les paroles suivantes : « Car je suis descendu du ciel pour faire, non ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé » (Jean 6:38). « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m'a envoyé et d'accomplir son œuvre » (Jean 4:34). « Moi, je ne peux rien faire par moi-même : selon ce que j'entends, je juge ; et mon jugement est juste, parce que je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé » (Jean 5:30 ; voir aussi verset 19 ; aussi Matthieu 26:42 ; cf. Doctrine & Alliances 19:2 ; 20:24).

 

      Grâce au sacrifice expiatoire accompli par Jésus-Christ - un service rédempteur, rendu par procuration en faveur des hommes qui se sont tous éloignés de Dieu par les effets du péché tant hérités que commis individuellement - le chemin d'une réconciliation est ouvert, réconciliation qui permettra à l'homme de rentrer en communion avec Dieu et d'être rendu apte à demeurer de nouveau et éternellement dans la présence de son Père éternel. D'une manière pratique, on peut considérer que l'effet de l'expiation est double :

 

      1. La rédemption universelle du genre humain de la mort provoquée par la chute de nos premiers parents ; et

      2. Le salut, qui fournit le moyen de nous libérer des résultats de nos péchés personnels.

 

      La victoire sur la mort se manifesta dans la résurrection du Christ crucifié ; il fut le premier à passer de la mort à l'immortalité, et c'est pourquoi il est connu à juste titre comme « les prémices de ceux qui sont décédés » (1 Corinthiens 15:20 ; voir aussi Actes 26:23 ; Colossiens 1:18 ; Apocalypse 1:5).

 

      Les preuves scripturaires abondent pour montrer que la résurrection des morts ainsi inaugurée doit s'étendre à tous ceux qui ont vécu ou auront vécu. À la suite de la résurrection du Seigneur, d'autres qui avaient dormi dans la tombe se levèrent et beaucoup les virent, non pas comme des apparitions d'esprits mais comme des êtres ressuscités possédant des corps immortalisés : « Les tombeaux s'ouvrirent, et les corps de plusieurs saints qui étaient décédés ressuscitèrent. Ils sortirent des tombeaux, entrèrent dans la ville sainte, après la résurrection de Jésus et apparurent à un grand nombre de personnes » (Matthieu 27:52, 53).

 

      Ceux qui ressuscitèrent ainsi dès le début sont appelés « les saints » ; et d'autres Écritures confirment le fait que seuls les justes seront ressuscités dans les premiers stades de la résurrection qui n'a pas encore eu lieu ; mais la parole révélée fait disparaître tous les doutes quant au fait que tous les morts reprendront, quand leur tour viendra, leur corps de chair et d'os. L’affirmation directe du Sauveur devrait être concluante : « En vérité, en vérité, je vous le dis, l'heure vient – et c'est maintenant – où les morts entendront la voix du Fils de Dieu ; et ceux qui l'auront entendue vivront... Ne vous en étonnez pas ; car l'heure vient où tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront sa voix. Ceux qui auront fait le bien en sortiront pour la résurrection et la vie, ceux qui auront pratiqué le mal pour la résurrection et le jugement » (Jean 5:25, 28, 29 ; une Écriture moderne, qui atteste la même vérité, dit : « Ceux qui ont fait le bien pour la résurrection des justes et ceux qui ont fait le mal pour la résurrection des injustes » - D&A 76:17).


      Les apôtres d'autrefois (voir Actes 24:15 ; Apocalypse 20:12, 13), ainsi que les prophètes néphites (voir 2 Néphi 9:6, 12, 13, 21, 22 ; Hélaman 14:15-17 ; Mosiah 15:20-24 ; AIma 40:2-16 ; Mormon 9:13, 14) enseignèrent la doctrine de la résurrection universelle ; et celle-ci est confirmée par la révélation donnée dans la dispensation actuelle (voir D&A 18:11, 12 ; 45:44, 45 ; 88:95-98). Même les païens qui n'ont pas connu Dieu seront ressuscités de leur tombe ; et étant donné qu'ils ont vécu et sont morts dans l'ignorance de la loi salvatrice, un moyen est prévu pour leur faire connaître le plan de salut. « Alors les nations païennes seront rachetées et ceux qui n'ont pas connu de loi auront part à la première résurrection » (D&A 45:54).

 

      Jacob, prophète néphite, enseigna que la résurrection serait universelle et expliqua pourquoi un rédempteur était absolument nécessaire, car sans lui les desseins poursuivis par Dieu en créant l'homme seraient rendus futiles. Ses paroles constituent un résumé concis et puissant de la vérité révélée portant directement sur notre sujet actuel :

 

      « De même que la mort a passé sur tous les hommes pour accomplir le dessein miséricordieux du grand Créateur, il est nécessaire qu'il y ait un pouvoir de résurrection ; et la résurrection doit venir aux hommes par suite de la chute ; et la chute est venue de la transgression, et parce que l'homme est tombé, il a été retranché de la présence du Seigneur. C'est pourquoi il faut qu'il y ait une expiation infinie ; et si l'expiation n'était pas infinie, cette corruption ne pourrait pas revêtir l'incorruptibilité, et le premier jugement qui a frappé l'homme aurait eu nécessairement une durée éternelle. Et s'il en avait été ainsi, notre chair serait rendue à la terre pour y pourrir et y tomber en poussière sans jamais se relever. Ô la sagesse de Dieu, sa miséricorde et sa grâce ! Car voici, si la chair ne devait plus se relever, notre esprit serait devenu esclave de cet ange qui est tombé de la présence du Dieu éternel, et qui est devenu le diable, pour ne jamais se relever. Notre esprit serait devenu semblable à lui, et nous serions devenus des diables, des anges du diable, pour être retranchés de la présence de notre Dieu, et pour demeurer avec le père du mensonge dans la misère, comme lui! oui comme cet être qui trompa nos premiers parents, qui se transforme presque en un ange de lumière, qui porte les enfants des hommes à des combinaisons secrètes pour commettre des meurtres et toute espèce d’œuvres secrètes de ténèbres.


      « Ô, combien grande est la bonté de notre Dieu, qui prépare une voie pour nous soustraire aux griffes de ce monstre horrible ; oui de ce monstre, la mort et l'enfer, que j'appelle la mort du corps et aussi la mort de l'esprit. Et à cause du moyen de délivrance de notre Dieu, le Très-Saint d'Israël, cette mort dont j'ai parlé, qui est la mort temporelle, rendra ses morts ; laquelle mort est le tombeau. Et cette mort dont j'ai parlé, qui est la mort spirituelle, rendra ses morts ; et cette mort spirituelle est l'enfer. Ainsi, la mort et l'enfer doivent rendre leurs morts ; l'enfer doit rendre ses esprits captifs ; et le tombeau doit rendre ses corps captifs ; et le corps et l'esprit des hommes seront rendus l'un à l'autre ; et cela se fera par le pouvoir de la résurrection du Très-Saint d'Israël. Ô, que le plan de notre Dieu est grand! Car, d'un autre côté, le paradis de Dieu doit rendre les esprits des justes, et le tombeau les corps des justes ; et l'esprit et le corps sont rendus l'un à l'autre ; et tous les hommes deviennent incorruptibles et immortels, et ils sont des âmes vivantes, ayant une connaissance parfaite comme nous dans la chair, seulement avec cette différence que notre connaissance sera parfaite. » (2 Néphi 9:6-13 ; lire tout le chapitre)

 

      Les Écritures attestent d'une manière concluante que l'expiation s'applique aux transgressions de chaque individu, permettant aux pécheurs d'obtenir l'absolution à condition qu'ils se conforment aux lois et aux ordonnances de l'Évangile de Jésus-Christ. Comme il est impossible d'obtenir le pardon des péchés d'une autre façon, étant donné qu'il n'y a dans le ciel ni sur la terre d'autre nom que celui de Jésus-Christ par lequel le salut puisse être apporté aux enfants des hommes (Moïse 6:52 ; cf. 2 Néphi 25:20 ; Mosiah 3:17 ; 5:8 ; D&A 76:1), toutes les âmes ont besoin de la médiation du Sauveur, puisque toutes sont pécheresses. « Car il n'y a pas de distinction: tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu », disait Paul autrefois (Romains 3:23 ; voir aussi verset 9 ; Galates 3:22) et Jean l'apôtre ajouta son témoignage en ces termes : « Si nous disons que nous n'avons pas de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n'est pas en nous » (1 Jean 1:8). 

 

      Qui doutera de la justice de Dieu, qui refuse le salut à tous ceux qui ne se conformeront pas aux conditions prescrites auxquelles il est affirmé que l'on peut l'obtenir ? Le Christ est « pour tous ceux qui lui obéissent l'auteur d'un salut éternel » (Hébreux 5:9) et Dieu « rendra à chacun selon ses œuvres : la vie éternelle à ceux qui, par la persévérance à bien faire, cherchent la gloire, l'honneur et l'incorruptibilité ; mais la colère et la fureur à ceux qui, par esprit de dispute, désobéissent à la vérité et obéissent à l'injustice. Tribulation et angoisse pour toute âme humaine qui pratique le mal » (Romains 2:6-9) !

 

      Tel est donc le besoin d'un Rédempteur, car sans lui l'humanité resterait éternellement dans un état déchu et aurait inévitablement perdu toute possibilité de progresser éternellement. L’épreuve mortelle nous est donnée comme une occasion d'avancement ; mais les difficultés et les dangers sont tels, l'influence du diable est tellement forte dans le monde, et l'homme est si faible à y résister que, sans l'aide d'une puissance supérieure à celle de l'homme, aucune âme ne pourrait retourner à Dieu dont elle vient. Le besoin d'un Rédempteur réside dans l'incapacité de l'homme à s'élever du plan temporel au plan spirituel, du royaume inférieur au royaume supérieur.


      Dans cette conception les analogies ne manquent pas dans le monde naturel. Nous reconnaissons une distinction fondamentale entre la matière inanimée et la matière vivante, entre l'inorganique et l'organique, entre le minéral sans vie d'une part et la plante ou l'animal vivant d'autre part. Le minéral mort grandit, dans les limites de son ordre, par l'acquisition de substances et peut parvenir à un état relativement parfait de structure et de forme, comme on peut le constater pour le cristal. Mais la matière minérale, même si les forces de la nature - la lumière, la chaleur, l'énergie électrique et autres - agissent favorablement sur elle, ne peut jamais devenir un organisme vivant ; et il est impossible aux éléments morts de s'introduire, par un processus quelconque de combinaison chimique dissocié de la vie, dans les tissus de la plante pour en devenir des parties essentielles. Mais la plante, qui appartient à un ordre supérieur, plonge ses racines dans la terre, étend ses feuilles dans l'atmosphère et absorbe par ses organes les solutions du sol, aspire les gaz de l'air, et à partir de cette matière sans vie fabrique le tissu de sa merveilleuse structure. Aucune particule minérale, aucune substance chimique morte n'est jamais devenue partie constituante d'un tissu organique autrement que par l'action de la vie.


      Nous pouvons peut-être pousser avec profit l'analogie une étape plus loin. Il est impossible à la plante de faire progresser son tissu jusqu'au niveau animal. Bien que l'ordre reconnu de la nature soit que le « règne animal » dépend du « règne végétal » pour se nourrir, la substance de la plante ne peut devenir partie intégrante de l'organisme de l'animal que lorsque ce dernier descend de son plan supérieur et incorpore, par son action vitale propre, les éléments végétaux aux siens. À son tour, la matière animale ne peut jamais devenir, même temporairement, partie intégrante d'un corps humain, sans que l'homme vivant ne l'assimile et élève provisoirement, par les processus vitaux de son être, la substance de l'animal qui lui a donné la nourriture au plan supérieur de sa propre existence.


      La comparaison employée ici, nous le reconnaissons, est faible si on la porte au-delà des limites raisonnables de son application ; car l'élévation de la matière minérale au niveau de la plante, du tissu végétal au niveau de l'animal, et l'élévation de l'un ou de l'autre au plan humain, n'est qu'un changement temporaire ; avec la dissolution des tissus supérieurs, la matière qui les constitue retombe au niveau de l'inanimé et de ce qui est mort. Mais l'analogie peut ne pas être entièrement sans valeur pour servir d'illustration (dans sa dissertation « Biogenesis », Henry Drummond traite en détail une comparaison semblable à celle-ci).

 

      Ainsi donc, pour permettre à l'homme de passer de son état déchu et relativement dégénéré actuel à l'état supérieur de la vie spirituelle, il a besoin de la coopération d'un pouvoir supérieur au sien. L’homme peut être touché et élevé par l'opération des lois qui règnent dans le royaume supérieur ; il ne peut se sauver par son seul effort sans aide. Un Rédempteur et Sauveur de l'humanité est indubitablement essentiel à l'accomplissement du plan du Père éternel, « réaliser l'immortalité et la vie éternelle de l'homme » (Moïse 1:39) ; et ce Rédempteur et Sauveur est Jésus le Christ, en dehors de qui il n'y a et il ne peut y avoir personne d'autre.

 

 

Source : James E. Talmage, Jesus the Christ, Salt Lake City, 1915