Pourquoi tant d'Églises chrétiennes ?

Un pas vers l’Église de Jésus-Christ


Jean Dressayre

Article mis à jour le 1er janvier 2003




Généralement, toute réflexion se réfère à l’histoire passée, au moment présent et aux perspectives à venir. L’histoire passée relate des faits connus et présumés incontestables, le moment présent favorise la réflexion par rapport au passé et, du tout, il est parfois possible d’envisager les perspectives du lendemain.

Pourquoi tant d’Églises chrétiennes ? Question qui amène nécessairement la réflexion sur le terrain de la « religion comparée ». En effet, comment répondre à cette question sans faire des comparaisons historiques avec d’autres mouvements chrétiens et notamment avec l’Église catholique qui est la plus importante et la plus ancienne communauté chrétienne au monde.

L’Église de Jésus-Christ

Au cours de son ministère terrestre, Jésus-Christ établit une Église. Ce n’était pas l’Église de Jean-Baptiste, ni celle de Pierre, ni celle de Paul, ni d’aucun autre de ses disciples. C’était son Église.

Au-delà de sa mission salvatrice, Jésus-Christ dirigea son Église au sein de laquelle les disciples pouvaient travailler à leur salut et à celui des autres et recevoir de l’aide et du réconfort. Ceux et celles qui acceptaient Jésus-Christ comme étant le Fils de Dieu se joignaient à l’Église par le baptême d’eau, symbole par lequel un homme montrait sa détermination à suivre Jésus-Christ, lui-même ayant été baptisé par Jean-Baptiste.

Le Sauveur savait qu’il quitterait bientôt la terre ; aussi se soucia-t-il du devenir de son Église fraîchement organisée. C’est dans ce but qu’il appela ses apôtres, afin qu’ils siègent à la tête de l’Église. Leur fonction était semblable à celle des anciens prophètes : recevoir la révélation du Seigneur pour diriger le peuple. Sans cette direction céleste, il semble évident que, laissée à elle-même, l’Église s’égarerait. Le rôle des apôtres prenait alors un sens profond et capital en l’absence du Seigneur, d’autant plus important que dans la Bible, le prophète Amos avait précisé : « Ainsi le Seigneur, l’Éternel, ne fait rien sans avoir révélé son secret à ses serviteurs les prophètes » (Amos 3:7).

Les événements qui suivirent l’ascension du Sauveur montrent que l’organisation de l’Église était conçue pour continuer. Lorsque Juda mourut après avoir trahi Jésus, cela laissa un poste vacant au sein du collège des douze apôtres. On convoqua alors une réunion de tous les disciples et ensemble ils se mirent à prier pour savoir lequel d’entre eux devait rejoindre le collège des douze. Ils reçurent la révélation dans leur coeur et Matthias devint membre du collège. L’Église comptait alors de nouveau douze apôtres (Actes 1:15-26). Ce collège devait être un collège de douze apôtres et non de onze ou de dix, sous peine de disparaître à la mort des 12 premiers apôtres, laissant l’Église sans direction divine. C’est ainsi que l’organisation prévue par le Seigneur devait perdurer aussi longtemps que les disciples étaient prêts à recevoir la révélation de Dieu.

Les apôtres avaient reçu le commandement d’aller de par le monde prêcher l’Évangile. Cette responsabilité les obligeait à quitter le berceau de l'Église où ils veillaient sur les nouveaux convertis ; aussi nommèrent-ils des officiers locaux, appelés parfois « anciens » ou « évêques », pour mener à bien les affaires de l’Église dans chaque localité où elle était implantée. Un évêque dirigeait habituellement une assemblée plus importante que celle dirigée par un ancien. Les noms de certains de ces évêques et anciens sont bien connus de nos jours : Tite, Timothée, ou encore Linus qui fut le premier officier président à Rome. Chaque évêque avait une autorité égale à celle des autres évêques. Son ministère était purement local, puisque le collège des douze apôtres exerçait l’autorité générale de l’Église. On ne songeait pas alors à faire présider certains évêques sur d’autres. Ainsi prenait forme la toute jeune Église.

Cependant, la bonne volonté des premiers chrétiens ne tarda pas à être mise à rude épreuve. Tant sur le plan spirituel que sur celui de l’organisation de leur nouvelle communauté, les chrétiens furent constamment persécutés par un environnement hostile.

La persécution des saints des premiers jours

À notre époque, notamment dans la culture catholique, le mot « saint » fait référence à un nombre très restreint de personnes, alors qu’est « saint » celui qui s’efforce de vivre selon les principes de l’Évangile de Jésus-Christ ; c’est pourquoi les premiers chrétiens étaient appelés « les saints ».

Avec sa nouvelle façon de voir la religion, le christianisme bouscula les habitudes du milieu juif d’où il était issu. Les chefs religieux juifs s’opposèrent furieusement aux enseignements de Jésus qui selon eux causaient des divisiojns. Les premiers chrétiens furent ainsi persécutés tout d’abord par leurs propres frères juifs, puis par le pouvoir politique romain. Nombreux furent ceux qui perdirent la vie pour ne pas avoir renié leur témoignage de Jésus-Christ. Ces persécutions eurent pour conséquence la déstabilisation complète de l’Église.

Les saints des premiers jours ne pouvaient plus se réunir librement, et rares étaient les moments où ils pouvaient communiquer ensemble. Les dirigeants locaux ne pouvaient plus être remplacés par les apôtres tant ces derniers étaient eux-mêmes persécutés. L’un après l’autre, les apôtres perdirent la vie. Le dernier d’entre eux, l’apôtre Jean, fut saisi par ses persécuteurs et soumis à de cruels traitements. Il fut enfin exilé sur l’île de Patmos d’où il dirigea pendant un temps encore l’activité de l’Église en qualité de dernière autorité ecclésiastique.

Le collège des Douze apôtres n’existait plus et l’Église alla à la dérive. Chaque évêque ou ancien fut abandonné à lui-même. L’Église était alors victime d’une quadruple attaque : la première provenait des juifs, qui combattaient la doctrine chrétienne et s’opposaient à ce que leur autorité disparaisse au profit de celle des nouveaux dirigeants chrétiens. La deuxième était liée au fait que les romains tenaient les chrétiens pour responsables des troubles de la paix civile au sein du peuple juif. La troisième, moins visible mais tout aussi pernicieuse, provenait de l’influence de la philosophie grecque sur les vérités simples de l’Évangile ; vérités qui furent progressivement changées, notamment la conception même de Dieu, la doctrine du baptême qui finit par passer de l’immersion à l’aspersion, la réunion des saints qui se transforma en messes avec leurs innombrables psaumes, prières, lectures et récitations. Enfin, la quatrième attaque eut lieu au sein même de l’Église. Sans apôtres pour diriger l’Église, la division des évêques et des anciens ne tarda pas. On ne s’entendait plus sur la doctrine. L’ordonnance même du baptême fut changée au point que certains évêques instaurèrent le baptême des petits enfants.

Ainsi, après la mort de Jésus-Christ et celles des apôtres, les saints des premiers jours furent laissés à eux-mêmes, sans guide spirituel. Chaque unité locale de l’Église grandissait seule et développait sa propre interprétation de l’Évangile. Néanmoins, l’Église progressait en nombre au point que la communauté chrétienne devint, à la fin du 3e siècle, suffisamment importante pour peser sur la vie politique romaine.

La perversion politique de l’Église

La communauté chrétienne, bien que non reconnue officiellement par le droit romain, continua à se développer malgré la persécution et les divisions internes. Il fallut attendre le règne de l’empereur romain Constantin le Grand (274-337) pour que le christianisme soit reconnu comme religion à part entière. Maître de Rome, Constantin promulgua en 313 l’édit de Milan qui établissait la liberté religieuse. Cet acte fut accueilli avec enthousiasme par les chrétiens. De plus, la conversion de Constantin au christianisme, qui dut avoir lieu vers 323, donna à l’Église chrétienne une prédominance certaine dans la société romaine.

Sans persécuter les païens, Constantin affirma la victoire du christianisme par des actes dont le plus significatif fut la convocation du concile de Nicée. Sa gloire fut néanmoins ternie par des cruautés qui firent douter de la profondeur de sa conversion. Quoi qu’il en soit, le monde chrétien était enfin regroupé sous une seule autorité, celle de l’empire. Les évêques qui ne reconnurent pas Constantin comme chef de l’Église furent écartés de leurs responsabilités ecclésiastiques et remplacés par ceux qui lui reconnaissaient l’autorité religieuse suprême.

Autant Jésus-Christ et le collège des douze apôtres détenaient l’autorité pour guider et diriger l’Église, autant Constantin ne pouvait s’approprier cette autorité. C’est pourtant ce qu’il fit. Ainsi dirigeait-il l’Église chrétienne comme il dirigeait ses armées, ses finances et toutes les autres administrations de l’Empire. Par la suite, les empereurs romains continuèrent à diriger l’Église et à nommer les hauts dirigeants ecclésiastiques. De leur côté, les évêques mis en place par les empereurs successifs s’arrogèrent de plus en plus de droits au sein de l’Église et ceux qui présidaient de grandes communautés devinrent l’autorité hiérarchique de ceux qui en présidaient de plus petites.

Rome, si longtemps la « maîtresse du monde » dans les affaires séculières, s'appropriait la prééminence dans les affaires ecclésiastiques et l’évêque de Rome réclamait la prépondérance. La suprématie des évêques de Rome, ou des pontifes romains comme on les appela par la suite, ne tarda pas à être remise en cause. En effet, quand l’empereur Constantin fit de Byzance (Constantinople) la capitale de l’Empire, l’évêque de Constantinople réclama l’égalité des pouvoirs. La dispute divisa l’Église, et pendant cinq siècles la dissension s’accrut. Au 9ème siècle, en 855 précisément, cette rivalité mena à un grand schisme et l’évêque de Constantinople, qui se distinguait par le titre de patriarche, refusa l’allégeance à l’évêque de Rome. Cette première grande séparation de l’Église catholique romaine est visible jusqu'à aujourd’hui par la distinction entre les catholiques romains et les catholiques grecs orthodoxes.

Les pontifes romains s’efforcèrent tout au long des siècles d’acquérir une autorité temporelle toujours plus importante. Leur influence était devenue si grande qu’au 11ème siècle, ils revendiquèrent le droit de diriger les princes, les rois et les empereurs dans les affaires temporelles. C’est à cette époque que les pontifes prirent le nom de « pape », ce qui signifie littéralement « papa » ou père. Le pouvoir des papes s’accrut pendant le 12e siècle pour atteindre une autorité suprême sur les princes, les rois et les empereurs au 13e siècle.

Ainsi, dès l’an mille, et ce sans compter les scissions mineures, le monde chrétien était divisé en deux, d’un côté l’Église catholique romaine, de l’autre l’Église orthodoxe grecque.

La prolifération des Églises chrétiennes

L’Église de Rome régna sans rivale sur l’Europe jusqu’à un éveil de l’activité intellectuelle dans la deuxième moitié du 14e siècle. L’une des premières révoltes contre le despotisme temporel et spirituel de l’Église des papes fut celle des Albigeois en France, au cours du 13e siècle. Cette révolte fut écrasée par l’autocratie papale avec beaucoup de cruauté et d’effusion de sang. Un peu plus tard, au 14e siècle, en Angleterre, John Wyclif, théologien anglais et professeur à l’université d’Oxford, critiqua courageusement le pouvoir croissant et abusif des moines et dénonça la corruption de l’Église. Il s’opposa particulièrement à l’interdiction papale de la lecture de la Bible par le peuple. Cependant, jusqu’au début du 16e siècle, peu de gens nièrent l’autorité suprême et infaillible du pape de Rome.

Vint la Réforme. Le mouvement commença en Allemagne vers 1517, quand Martin Luther, moine de l’ordre des Augustins et professeur à l’université de Wittenberg, s’opposa publiquement à la papauté en dénonçant la vente des Indulgences, titres qui assuraient le pardon des péchés à qui pouvait les payer. Luther écrivit ses célèbres quatre-vingt-quinze thèses contre la pratique des indulgences et il en afficha un exemplaire sur la porte de l’église de Wittenberg, invitant tous les érudits à la critique. La nouvelle se répandit rapidement et on discuta de ces thèses dans les milieux culturels européens.

Luther critiqua ensuite d’autres pratiques et principes doctrinaux de l’Église romaine. Le pape Léon X promulgua alors un décret contre Luther lui demandant de reconnaître publiquement ses thèses comme hérétiques, sous peine d’excommunication. En réponse, Luther brûla publiquement le document du pape et déclara ainsi ouvertement sa révolte. La controverse religieuse se répandit dans toute l’Europe. Le pape promulgua alors en 1529 un édit contre les réformateurs. Les représentants des sept principautés allemandes s’y opposèrent en une protestation solennelle à la suite de quoi les réformateurs furent appelés « protestants ».

Le prince allemand Frédéric de Saxe accepta de protéger Luther contre les tentatives d’élimination perpétrées par l’Église de Rome. À la mort de Frédéric de Saxe, son frère Jean de Saxe, qui soutenait également les positions de Luther, déclara que les enseignements de son protégé étaient incompatibles avec ceux de Rome. Le prince décida alors de retirer son appui au pape et de l’accorder désormais à Luther. Ainsi Jean de Saxe organisa-t-il une Église séparée et distincte de celle de Rome. Il chargea Luther d’en établir les formes du culte, traça le genre de gouvernement ecclésiastique qui correspondait aux idées de Luther et décida quels seraient les devoirs et les salaires des religieux. L'Église ainsi réformée, fut placée sous la protection et l’autorité de l’État. Luther mourut en 1546 et les protestants se divisèrent progressivement en de nombreuses Églises rivales.

En Scandinavie, les rois eux-mêmes prirent activement part au dépouillement des biens des évêques catholiques. Ils adoptèrent la nouvelle foi protestante de Luther comme religion d’État. En Suisse, où Calvin réalisa la Réforme parallèlement à Luther, le pouvoir politique intervint encore une fois. Le gouvernement civil de Genève prit les affaires religieuses en main en dessaisissant de leurs pouvoirs les évêques catholiques au profit de la nouvelle doctrine protestante.

En Angleterre, le roi Henri VIII avait décidé de répudier sa femme, Catherine d’Aragon, pour en épouser une autre. Le pape s’y opposa. Irrité contre la position de Rome qui refusait l'annulation du mariage, le Parlement, sous l’influence évidente d’Henri VIII, enleva au pape tout pouvoir religieux et vota en 1535 l’Acte de Suprématie qui fit du roi le chef de l’Église en Angleterre. Henri VIII saisit les biens de l’Église catholique pour fonder et organiser sa propre Église. Il répudia les évêques catholiques qui ne voulurent pas le suivre et en nomma d’autres qui prirent la direction de la nouvelle Église, l’Église anglicane.

Au-delà de ces grandes divisions, et à partir du 16e siècle, un grand nombre de communautés chrétiennes virent le jour, tels les anabaptistes en 1521, les mennonites en 1536, les presbytériens en 1560, les baptistes en 1609, l’Église réformée américaine en 1628, les quakers en 1647, les méthodistes en 1739, les adventistes dès 1833, les témoins de Jéhovah en 1870 et l’Armée du salut en 1888. Certaines d’entre elles sont toujours en activité et qualifiées, selon les pays, d'Églises ou de sectes.

Comment se formèrent ces mouvements religieux ? Sensiblement toujours de la même façon. Par exemple les témoins de Jéhovah : En 1870, à Allegheny aux États-Unis, un groupe d’hommes dirigé par un théologien du nom de Charles Taze Russell entreprend une étude approfondie de la Bible. En juillet 1879, Russell publie le premier numéro du Phare de la Tour de Sion (aujourd’hui La Tour de Garde). En 1884, en Pennsylvanie, les membres de ce groupe se constituent en association sous le nom de Zion’s Watch Tower Tract Society. Charles Taze Russell en est élu président par ses pairs. Au début des années 1900, la Société Watch Tower ouvre des branches en Angleterre, en Allemagne et en Australie. Jusqu’alors appelé « les étudiants de la Bible », c’est en 1931 que le mouvement adopte le nom de « témoins de Jéhovah ».

En réalité, que s’est-il passé ? Un groupe d’hommes en désaccord avec leur religion d’origine se rassemble pour tenter de donner une nouvelle interprétation de la Bible. On ne parle pas de révélation divine, mais simplement de raisonnement intellectuel, d’étude de la Bible. Dès que le groupe d’étudiants (en fait, des érudits de la Bible) semble satisfait de la nouvelle interprétation, cette dernière est diffusée le plus largement possible. Pour cela, une structure juridique est indispensable, d’où la création d’associations ou de sociétés. Enfin, et pour se différencier, il convient de mettre en place certaines règles de vie propres à la communauté, créant ainsi un sentiment d’appartenance. Une nouvelle Église chrétienne est née.

C’est ainsi qu’en l’absence d’autorité divine, les hommes créent leurs propres Églises. Alors que chacune d’elles se targue de détenir « la vérité », la question qui se pose nécessairement est de savoir de quelle autorité divine elle est investie.

Par quelle autorité ?

En organisant son Église et en choisissant douze apôtres, Jésus-Christ donna une autorité divine indiscutable à son oeuvre. Sa crucifixion et la disparition progressive du Collège des Douze mirent fin à la présence de l’autorité divine sur la terre. Ainsi, l’Église de Jésus-Christ s’éteignit avec la mort des derniers apôtres. Malgré cela, les chrétiens ne cessèrent de croire en l’Évangile de Jésus-Christ et la doctrine chrétienne se répandit.

Pierre et Paul moururent vers 68 après J.-C., probablement à Rome. Cette année-là, Jean exerçait son ministère à Éphèse et fut ensuite exilé sur l’île de Patmos où il demeura jusqu’à la mort de l’empereur Domitien en l’an 96 de notre ère. On ne sait plus rien de lui après l’an 101 environ. Le dernier apôtre de Jésus-Christ ayant disparu, l’Église resta sans direction divine. Poiurquoi en fut-il ainsi ? Parce qu'à cette époque-là l'iniquité des hommes étouffa la toute jeune Église. L’orgueil de certains chrétiens dépassait même l’orgueil de ceux qui n’appartenaient point à l’Église. La doctrine et les sacrements avaient été changés et le péché triomphait. Presque toutes les épîtres des apôtres furent écrites pour combattre cet état d'apostasie. Le Seigneur avait prévu cette époque et, de même qu’il refusa d’accomplir des miracles devant les incroyants à Capernaüm, de même choisit de soustraire les apôtres des apostats.

Paul, en s’adressant aux Anciens d’Éphèse, dit : « Je sais qu’il s’introduira parmi vous, après mon départ, des loups cruels qui n’épargneront pas le troupeau, et qu’il s’élèvera du milieu de vous des hommes qui enseigneront des choses pernicieuses, pour entraîner les disciples après eux » (Actes 20:29-30). Paul savait que des divisions viendraient de la part de certains d’entre eux.

Eusèbe Pamphile, évêque de Césarée en Palestine, qui vécut de 260 à 339 environ ap.J-C., cite Hégésippe, un historien qui vécut à une époque très proche de celle des apôtres. Hégésippe rapporte les conditions qui marquèrent la fin du premier siècle et le début du second en ces termes : « L’Église demeura une vierge pure et sans corruption jusqu’au moment où les apôtres et la génération de ceux qui avaient été jugés dignes d’entendre de leurs oreilles la sagesse divine disparurent. Alors, l’erreur athée commença à apparaître par la tromperie des maîtres du mensonge. Ceux-ci, puisqu’il ne restait plus aucun des apôtres, s’efforcèrent d’opposer alors à visage découvert leur connaissance ésotérique des choses divines » (Eusèbe, Histoire ecclésiastique, livre 3, chapitre 32).

Dès le début du deuxième siècle, les chrétiens n’avaient plus de guide spirituel investi de l’autorité apostolique. Seuls restaient les dirigeants locaux, évêques et anciens qui, sans direction supérieure, s’égarèrent promptement dans l’interprétation de la doctrine. Les chrétiens demeurèrent dans cet état pendant près de deux cents ans jusqu’au moment où l’empereur Constantin les regroupa au sein d’une nouvelle organisation qu’il appela l’Église catholique romaine. Catholique (du grec katholikos ; de kata signifiant de haut en bas et de olos signifiant entier), soit Église universelle, répandue partout, à l’image de l’empire romain. Pendant les siècles qui suivirent, l’Église catholique eut le monopole du christianisme.

L’un des coups les plus durs portés à l’autorité, à la fois temporelle et spirituelle, de l’Église fut le déplacement en 1309 du siège pontifical de Rome en Avignon sous l’influence du roi français Philippe le Bel, ville où il resta environ soixante-dix ans. Tandis que le siège de l'Église était établi en ce lieu, tous les papes furent français et leur politique fut façonnée et contrôlée par les rois de France. Des mécontents s’éveillèrent parmi les royaumes d’Italie à propos de ce changement, ce qui mena finalement à une scission ouverte. En 1378, les factions opposées élirent chacune un pape, l’un en Avignon, l’autre à Rome.

La rivalité des deux papes poussa très naturellement les hommes à remettre en question l’infaillibilité papale. Finalement, en 1409 un concile général de l’Église s’assembla à Pise dans le but de régler la querelle honteuse. Le concile déposa les deux papes et élut Alexandre V dirigeant suprême de l’Église. Mais les affaires, au lieu de s’arranger, ne firent qu’empirer car aucun des deux pontifes déposés ne voulut renoncer à son autorité en obéissant aux ordres du concile, et il y eut trois papes au lieu de deux.

La Bible parle de la période d’apostasie qui suivrait le ministère du Christ, période durant laquelle l'autorité divine et la direction céleste seraient enlevées aux hommes : « Voici, les jours viennent, dit le Seigneur, l’Éternel, où j’enverrai la famine dans le pays. Non pas la disette de pain et la soif de l’eau, mais la faim et la soif d’entendre les paroles de l’Éternel. Ils seront alors errants d’une mer à l’autre, du septentrion à l’orient, ils iront ça et là pour chercher la parole de l’Éternel, et ils ne la trouveront pas » (Amos 8:11-12). Les premières grandes divisions du monde chrétien ne sont que l’accomplissement de cette prophétie.

Dans le Nouveau Testament, Paul, s’adressant aux Thessaloniciens, parle d’une façon non équivoque de la période d’apostasie qui doit précéder le retour triomphal du Seigneur : « Pour ce qui concerne l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ et notre réunion avec lui, nous vous prions, frères, de ne pas vous laisser facilement ébranler dans votre bon sens, et de ne pas vous laisser troubler, soit par quelque inspiration, soit par quelque parole, ou quelque lettre qu’on dirait venir de nous, comme si le jour du Seigneur était déjà là. Que personne ne vous séduise d’aucune manière, car il faut que l’apostasie soit arrivée auparavant, et qu’on ait vu paraître l’homme du péché, le fils de perdition, l’adversaire, qui s’élève au-dessus de tout ce qu’on appelle Dieu ou de ce qu’on adore, jusqu’à s’asseoir dans le Temple de Dieu, se proclamant lui-même Dieu » (2 Thessaloniciens 2:1-4).

Comment rester insensible à une telle précision biblique corroborée par l’histoire séculière. L’apostasie commença avec la mort du dernier apôtre et seul un rétablissement de l’autorité apostolique pourrait mettre un terme à cette période de ténèbres spirituelles. Ténèbres spirituelles largement prédites par le dernier apôtre : « Car viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la sainte doctrine, mais ayant la démangeaison d’entendre des choses agréables, ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs, détourneront l’oreille de la vérité et se tourneront vers les fables » (2 Timothée 4:3-4).

L’empereur Constantin, qui avait la démangeaison du pouvoir, se donna « une  foule de docteurs selon ses propres désirs », éliminant simplement ceux qui ne voulaient pas lui dire des « choses agréables ». En excommuniant l’évêque de Rome, l’évêque de Constantinople, fort de la séparation politique de l’empire romain, s’entoura lui aussi d’une  « foule de docteurs selon son bon plaisir » pour créer son Église. En soutenant la noble cause de Luther, Jean de Saxe choisit lui-même sa « foule de docteurs » pour édifier sa propre Église, le protestantisme. Enfin, le roi Henri VIII d’Angleterre, parce qu’il avait « la démangeaison d’entendre des choses agréables, s’est donné une foule de docteurs selon son bon plaisir », devenant le chef de l’Église anglicane. Ces grands mouvements religieux chrétiens naquirent tous au cours de l’apostasie prédite. L’Histoire démontre que leur autorité ecclésiastique ne repose que sur celle de l’homme.

L’idée que les Églises sont égarées et dénuées de toute autorité divine est en accord avec le jugement de certains de nos plus grands penseurs en la matière. Dans un livre rédigé par 73 théologiens nous lisons : « Nous ne devons pas nous attendre à voir l’Église de l’Écriture sainte exister réellement dans sa perfection sur terre. On ne peut la trouver parfaite dans les fragments réunis de la chrétienté, et moins encore dans l’un quelconque de ces fragments » (Dr. William Smith, Smith’s Dictionary of the Bible, Houghton, 1896).

Roger Williams, pasteur de la plus ancienne Église baptiste d’Amérique, refusa de rester pasteur parce qu’il n’y avait, dit-il «  ...aucune Église du Christ régulièrement constituée sur terre, aucune personne autorisée à administrer aucun sacrement de l’Église, et qu’il ne pouvait y en avoir tant que de nouveaux apôtres ne seraient pas envoyés par le grand chef de l’Église. » (Picturesque America, or the land We live in ed. by William Cullin, Bryant, New-York 1872)

Le Dr. Harry Emerson Fosdick, un ecclésiastique baptiste et auteur américain, décrivit l’état de décadence des Églises chrétiennes de la première moitié du vingtième siècle par ces mots : « Le christianisme contemporain s’est écarté de la religion que Jésus a prêchée, enseignée et vécue. Il a introduit à sa place une religion toute différente. Si Jésus revenait sur terre maintenant, apprenait quelles mythologies ont été élaborées autour de son nom, et constatait la confusion des credo, des confessions et des sacrements qui se réclament de lui, il dirait certainement : si c’est cela le christianisme, alors je ne suis pas chrétien. » (The Elder’s Journal, 20 avril 1926)

Par quelle autorité les Églises chrétiennes sont-elles dirigées depuis des siècles si ce n’est par l’autorité de l’homme ? C’est la rupture avec le pouvoir des cieux (l’apostasie) qui permit la prolifération des Églises chrétiennes. Depuis lors, il n’y eut ni prophète ni apôtre ayant l’autorité et le pouvoir d’agir au nom de Dieu. Et parce que personne ne détenait cette autorité, chacun organisa sa propre Église selon son bon plaisir.

Actuellement, le monde est-il toujours dans la confusion, laissé à tout vent de doctrine ? Les Écritures bibliques ne prophétisent-elles pas la seconde venue de Jésus-Christ précédée du rétablissement de toutes choses ? Ce rétablissement ne serait-il pas le retour des prophètes et des apôtres auxquels l'Éternel révèle ses intentions avant d'agir ? Un prophète aujourd’hui marquerait la fin de la longue période d’apostasie, et le rétablissement promis de toutes choses offrirait à tous les hommes et à toutes les femmes de bonne volonté la possibilité de se diriger vers l’Église de Jésus-Christ.

Un pas vers l’Église de Jésus-Christ

L'apôtre Pierre a fait l'exhortation suivante : « Repentez-vous donc et convertissez-vous pour que vos péchés soient effacés, afin que des temps de rafraîchissement viennent de la part du Seigneur, et qu’il envoie celui qui vous a été destiné, le Christ Jésus. C’est lui que le ciel doit recevoir jusqu’aux temps du rétablissement de tout ce dont Dieu a parlé par la bouche de ses saints prophètes d’autrefois » (Actes 3:19-21). Pierre enseigne à la foule que ce Christ qu’elle a crucifié est reçu dans le ciel pour y demeurer jusqu’au moment choisi par le Père où tout sera rétabli. Pierre prend à témoin les saints prophètes d’autrefois pour affirmer le retour du Seigneur dans les derniers jours.

Dans le livre d’Ésaïe on retrouve l’annonce à la fois de la période d’apostasie et du rétablissement de tout : « Quand ce peuple s’approche de moi, il m’honore de la bouche et des lèvres, mais son coeur est éloigné de moi, et la crainte qu’il a de moi n’est qu’un précepte de tradition humaine (période d’apostasie). C’est pourquoi, je m’en vais accomplir dans ce peuple une oeuvre merveilleuse et un prodige (le rétablissement de tout), et la sagesse de ses sages périra, et l’intelligence de ses hommes intelligents disparaîtra. » (Ésaïe 29:13-14)

Ces deux prophéties bibliques, pour ne citer que celles-ci, montrent qu’une oeuvre merveilleuse, un rétablissement de tout, doit se produire avant la seconde venue de Jésus-Christ.

Daniel prophétise sur les derniers jours

Le prophète Daniel donne des informations très précises concernant un rétablissement de toutes choses dans les derniers jours. Il dit : « Ce que le roi demande est un secret que les sages, les astrologues, les magiciens et les devins ne sont pas capables de découvrir au roi. Mais il y a dans les cieux un Dieu qui révèle les secrets, et qui a fait connaître au roi Nebucadnetsar ce qui arrivera dans la suite des temps. Voici ton songe et les visions que tu as eus sur ta couche. Tu regardais lorsqu’une pierre se détacha sans le secours d’aucune main, frappa les pieds de fer et d’argile de la statue et les mit en pièces. Alors le fer, l’argile, l’airain, l’argent et l’or, furent brisés ensemble et devinrent comme une balle qui s’échappe d’une aire en été ; le vent les emporta, et nulle trace n’en fut retrouvée. Mais la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne et remplit toute la terre. » (Daniel 2:27-29 ; 34-35).

La grande statue aux pieds de fer et au corps d’argile dont parle Daniel n’est rien d’autre que l’ensemble des institutions et des personnes, religieuses ou non, qui gouvernent le monde selon la raison humaine. Cette grande statue qui règne sur le monde sera, prophétise Daniel, brisée par une simple pierre qui se détachera sans le secours d’aucune main et qui finira par remplir toute la terre. Que représente cette pierre qui brisera la grande statue ?

Un Évangile éternel

Dans le livre de l’Apocalypse, l’apôtre Jean révèle des choses très intéressantes à propos d’un Évangile éternel. Il dit : « Je vis un autre ange qui volait par le milieu du ciel ayant un Évangile éternel pour l’annoncer aux habitants de la terre, à toute nation, à toute tribu, à toute langue, et à tout peuple » (Apocalypse 14:6-7). Cette révélation est assez troublante dans la mesure où elle est donnée bien après que Jésus-Christ eut donné lui-même le contenu de son Évangile. Pourquoi Jean annonce-t-il un Évangile éternel ? La décadence du monde chrétien en est la cause. Livrés à eux-mêmes, les chefs religieux des différentes Églises ont changé, modifié et parfois perverti le contenu de la « bonne nouvelle » laissée par le Sauveur lui-même. L’apostasie a fait son oeuvre.

Bien qu’étant un puissant témoignage de la mission de Jésus-Christ, la Bible devint au cours des siècles de l’apostasie une source de confusion du monde chrétien, chacun l’interprétant à sa façon, favorisant ainsi la prolifération des Églises. Jean savait que l’Évangile de la Bible serait corrompu. Il savait également qu’un grand rétablissement se produirait dans les derniers jours et qu’un Évangile éternel, préservé des souillures du monde et de toute interprétation arbitraire, serait envoyé au monde par l’intermédiaire d’un ange.

Cette pierre qui se détache sans le secours d’aucune main n’est-elle pas l'Évangile éternel prophétisé par Jean ? N'est-ce pas un témoignage de Jésus-Christ en plus de celui de la Bible ? La pierre doit se détacher « sans le secours d’aucune main », car cet Évangile contenant toute la plénitude des enseignements du Sauveur est envoyé directement par un ange de Dieu pour rétablir toute chose.

Le rétablissement de tout

Alors qu’on demandait à un grand journaliste américain quel message radiodiffusé au monde entier serait considéré comme dépassant tout autre en importance, il répondit que ce serait d’annoncer qu’un homme qui avait vécu sur terre et était mort, revenait avec un message de Dieu. Il est indiscutable qu’un rétablissement de tout, grâce à un Évangile éternel conformément aux prophéties bibliques, ne pourrait se faire sans l’intervention de Dieu lui-même. Dans sa prophétie, Jean parle d’un ange. À qui cet ange apporterait-il un Évangile éternel si ce n’est à un homme choisi de Dieu ? Si un tel événement devait se produire, alors marquerait-il la fin de l’apostasie, car Dieu parlerait de nouveau à des prophètes. « Car le Seigneur, l’Éternel, ne fait rien sans avoir révélé son secret à ses serviteurs les prophètes » (Amos 3:7). C’est ce qui arriva en 1820 lorsqu’un jeune garçon de 14 ans, du nom de Joseph Smith, reçut la visite de personnages célestes qui lui remirent un « Évangile éternel ».

Joseph Smith, prophète du Rétablissement

Joseph relate son histoire :

« À un moment donné, au cours de la deuxième année qui suivit notre installation à Manchester, il y eut, dans l’endroit où nous vivions, une agitation peu commune à propos de la religion. Elle commença chez les méthodistes, mais devint bientôt générale chez toutes les confessions de cette région du pays. En effet, toute la contrée paraissait en être affectée, et de grandes multitudes s’unirent aux différents partis religieux, ce qui ne causa pas peu de remue-ménage et de divisions parmi le peuple, les uns criant : Par ici !, les autres : Par là ! Les uns tenaient pour les méthodistes, les autres pour les presbytériens, d’autres pour les baptistes… On s’aperçut que les bons sentiments apparents des prêtres et des convertis étaient plus prétendus que réels, car il s’ensuivit une grande confusion et de mauvais sentiments, prêtre luttant contre prêtre et converti contre converti... J’étais alors dans ma quinzième année…

« Pendant cette période de grande agitation, mon esprit fut poussé à réfléchir sérieusement et à éprouver un grand malaise mais, quoique mes sentiments fussent profonds et souvent poignants, je me tins cependant à l’écart de tous ces partis tout en suivant leurs diverses assemblées aussi souvent que j’en avais l’occasion… La confusion et la lutte étaient si grandes entre les diverses confessions, qu’il était impossible à quelqu’un d’aussi jeune et d’aussi peu au courant des hommes et des choses que je l’étais, de décider d’une manière sûre qui avait raison et qui avait tort…

« Au milieu de cette guerre de paroles et de ce tumulte d’opinions, je me disais souvent : Que faut-il faire ? Lequel de tous ces partis a raison ? Ou ont-ils tous tort ? Si l’un d’eux a raison, lequel est-ce, et comment le saurai-je ? Tandis que j’étais travaillé par les difficultés extrêmes causées par les disputes de ces partis de zélateurs religieux, je lus, un jour, l’épître de Jacques, chapitre 1, verset 5, qui dit : « Si quelqu’un d’entre vous manque de sagesse, qu’il la demande à Dieu qui donne à tous simplement et sans reproche et elle lui sera donnée ». Jamais aucun passage de l’Écriture ne toucha le cœur de l'homme avec plus de puissance que celui-ci ne toucha alors le mien. Il me sembla qu’il pénétrait avec une grande force dans toutes les fibres de mon cœur. J’y pensais constamment, sachant que si quelqu’un avait besoin que Dieu lui donne la sagesse, c’était bien moi, car je ne savais que faire, et à moins de recevoir plus de sagesse que je n’en avais alors, je ne le saurais jamais, car les professeurs de religion des diverses confessions comprenaient si différemment les mêmes passages de l’Écriture que cela faisait perdre toute confiance de régler la question par un appel à la Bible.

« Enfin, j’en vins à la conclusion que je devais, ou bien rester dans les ténèbres et la confusion, ou bien suivre le conseil de Jacques, c’est-à-dire demander à Dieu. Je me décidai finalement à « demander à Dieu » concluant que s’il donnait la sagesse à ceux qui en manquaient, et la donnait libéralement et sans faire de reproche, je pouvais bien essayer. Ainsi donc, mettant à exécution ma détermination de demander à Dieu, je me retirai dans les bois pour tenter l’expérience.

« C’était le matin d’une belle et claire journée du début du printemps de l’an mil huit cent vingt. C’était la première fois de ma vie que je tentais une chose pareille, car au milieu de toutes mes anxiétés, je n’avais encore jamais essayé de prier à haute voix. Après m’être retiré à l’endroit où je m’étais proposé au préalable de me rendre, ayant regardé autour de moi et me voyant seul, je m’agenouillai et me mis à exprimer à Dieu le désir de mon cœur…

« Je vis, exactement au-dessus de ma tête, une colonne de lumière, plus brillante que le soleil, descendre peu à peu jusqu’à tomber sur moi… Quand la lumière se posa sur moi, je vis deux Personnages dont l’éclat et la gloire défient toute description, et qui se tenaient au-dessus de moi dans les airs. L’un d’eux me parla, m’appelant par mon nom et dit, en me montrant l’autre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Écoute-le ! »

« Mon but, en allant interroger le Seigneur, était de savoir laquelle des confessions avait raison, afin de savoir à laquelle je devais me joindre. C’est pourquoi, dès que je fus assez maître de moi pour pouvoir parler, je demandai aux Personnages qui se tenaient au-dessus de moi, dans la lumière, laquelle de toutes les confessions avait raison… et à laquelle je devais me joindre. Il me fut répondu de ne me joindre à aucune, car elles étaient toutes dans l’erreur ; et le personnage qui me parlait dit que tous leurs credos étaient une abomination à ses yeux ; que ces docteurs étaient tous corrompus ; qu’ils 's’approchent de moi des lèvres, mais leur coeur est éloigné de moi ; ils enseignent pour doctrine des commandements d’hommes, ayant une forme de piété, mais ils en nient la puissance'. Il me défendit de nouveau de me joindre à aucune d’elles et me dit encore beaucoup d’autres choses que je ne puis écrire maintenant. Quand je revins à moi, j’étais couché sur le dos, regardant au ciel. » (Joseph Smith, Histoire, 5 à 8 et 10 à 20).

Cet événement vécu par le du jeune Joseph est connu sous le nom de « Première Vision ». Il s'agit d'un événement capital dans l’histoire de la religion chrétienne dans la mesure où la communication avec les cieux, par révélation directe, était rétablie. En effet, comme Dieu l’avait fait auparavant, il allait à nouveau parler à l’homme par l’intermédiaire d’un prophète.

Le jeune garçon fut persécuté dès lors qu’il raconta sa vision et, bien qu’il ne fût encore qu’adolescent, l’ensemble des chefs religieux de toute la région s’opposèrent à lui. « Personne ne peut voir Dieu et vivre ! » (Exode 33:20), déclaraient-ils en affirant que les apparitions et les visions, cela n'existait plus depuis 2000 ans. En prétendant cela, ils s’arrogeaient le droit de limiter le pouvoir de Dieu. Si Dieu avait décidé d’apparaître à ce jeune garçon, qui eût pu l’en empêcher ?

Plus tard, Joseph écrivit dans son journal : « Je me fis sérieusement la réflexion alors, et je l’ai souvent faite depuis, qu’il était bien étrange qu’un garçon obscur, d’un peu plus de quatorze ans, qui de surcroît, était condamné à la nécessité de gagner maigrement sa vie par son travail journalier, fût jugé assez important pour attirer l’attention des grands des sectes les plus populaires du jour, et ce au point de susciter chez eux l’esprit de persécution et d’insulte le plus violent… Cependant il n’en restait pas moins un fait que j’avais eu une vision.

« J’ai pensé depuis que je devais ressentir plus ou moins la même chose que Paul quand il se défendit devant le roi Agrippa et qu’il raconta la vision qu’il avait eue, lorsqu’il avait aperçu une lumière et entendu une voix ; et cependant, il y en eut peu qui le crurent ; les uns dirent qu’il était malhonnête, d’autres dirent qu’il était fou ; et il fut ridiculisé et insulté. Mais tout cela ne détruisait pas la réalité de sa vision… Il en était de même pour moi… Pourquoi le monde pense-t-il me faire renier ce que j’ai vraiment vu ? J’avais eu une vision, je le savais et je savais que Dieu le savait, et je ne pouvais le nier ni ne l’osais, du moins je savais qu’en le faisant j’offenserais Dieu et tomberais alors sous la condamnation. » (Joseph Smith, Histoire, 23-25)

La Première Vision inaugura le rétablissement de l’Église de Jésus-Christ.

L’Évangile éternel de la prophétie de Jean

La vision de Joseph Smith n’a d’intérêt que si elle témoigne au monde d’une mission divine de première importance. En effet, nombreux sont ceux qui prétendent avoir eu des visions et des révélations de Dieu, et le jeune Joseph se fondrait parmi eux s’il n’avait été choisi pour recevoir l’Évangile éternel mentionné par Jean (dans Apocalypse 14:6-7).

Trois ans et demi après la Première Vision, Joseph reçut la visite d’un ange du nom de Moroni qui lui remit un « Évangile éternel ». Joseph raconte :

« Tandis que j’étais ainsi occupé à invoquer Dieu, je m’aperçus qu’une lumière apparaissait dans ma chambre ; la lumière s’accrut jusqu’à ce que la chambre fût plus claire qu’à l’heure de midi, et, tout à coup, un personnage parut à côté de mon lit ; il se tenait dans l’air, car ses pieds ne touchaient point le sol. Il était vêtu d’une tunique ample de la plus exquise blancheur… Toute sa personne était glorieuse au-delà de toute description…D’abord je fus effrayé de le voir, mais la crainte me quitta bientôt.

« Il m’appela par mon nom et me dit qu’il était un messager envoyé d’auprès de Dieu vers moi et que son nom était Moroni ; que Dieu avait une oeuvre à me faire accomplir et que mon nom serait connu en bien et en mal parmi toutes les nations, familles et langues... Il dit qu’il existait un livre caché, écrit sur des plaques d’or, donnant l’histoire des anciens habitants de ce continent... Il dit aussi que la plénitude de l’Évangile éternel y était contenue, telle qu’elle avait été donnée par le Sauveur à ces anciens habitants… Il me dit encore que lorsque j’aurais reçu les plaques d’or dont il avait parlé… je ne devrais les montrer à personne…sauf à ceux à qui il me serait commandé de les montrer… Tandis qu’il conversait avec moi au sujet des plaques, une vision s’ouvrit à mon esprit, de sorte que je pus voir l’endroit où les plaques étaient cachées… » (Joseph Smith, Histoire, 30-42)

Si l’on roule aujourd’hui dans l’État de New-York, sur la grande route 21, de Palmyra vers Manchester, on passe à côté du monument le plus impressionnant du nord de cet État : un immense pilier de granit surmonté d’une statue représentant l’ange Moroni. La colline sur laquelle se trouve le monument se nomme la colline de Cumorah. Lorsque le jeune Joseph monta sur cette colline, il ne se doutait pas des conséquences de sa visite en ce lieu.

Suivant les indications de l’ange Moroni, Joseph marcha directement vers l’endroit qui lui avait été montré dans la vision. Au niveau du sol, il vit la surface supérieure arrondie d’une grande pierre recouverte de terre et d’herbe. En utilisant un bâton comme levier, il arriva à soulever la pierre. Joseph écrit à ce propos : « Je regardai à l’intérieur et j’y vis en effet les plaques comme le messager l’avait déclaré ». Joseph s’agenouilla devant le réceptacle de pierre dans lequel des plaques metalliques étaient restées cachées pendant quatorze siècles. Il était en présence des annales de peuples qui avaient couvert le pays pendant des siècles puis avaient disparu. Alors que ces plaques étaient restées ensevelies bien longtemps, les caractères qui y étaient gravés étaient cependant intacts. Joseph Smith en fit plus tard une description : « Ces annales étaient gravées sur des plaques qui avaient l’apparence de l’or. Chaque plaque avait quinze centimètres de large et vingt centimètres de long et était un peu moins épaisse que le fer blanc ordinaire. Elles étaient remplies de signes gravés en caractères égyptiens et reliées en un volume comme les pages d’un livre. Trois anneaux traversaient le tout pour relier les plaques entre elles. Le livre avait quelque chose comme quinze centimètres d’épaisseur. »

Le secret de la préservation des annales résidait dans la nature des matériaux utilisés. Il n’y avait pas d’encre qui pût pâlir, mais des lettres gravées dans de fines feuilles de métal d’un alliage d’or. La langue dans laquelle étaient écrites ces annales ne correspondait à aucun système antique connu alors. Les auteurs des plaques l’appelaient l’égyptien réformé. Cette forme d’écriture en symboles hiéroglyphes était anciennement utilisée parce qu’elle occupait moins de place que le langage écrit de l’époque, apparenté à l’hébreu. Joseph Smith recopia à la main quelques-uns des caractères qui se trouvaient sur les plaques, et par l’intermédiaire d’un ami, Martin Harris, il obtint des professeurs Anthon et Mitchell, spécialistes en la matière, un certificat d’authenticité desdits caractères. Néanmoins, ni l’un ni l’autre ne surent les traduire.

Le Livre de Mormon

Si Dieu avait permis que le jeune Joseph reçût les anciennes annales, et alors que les spécialistes en langues orientales semblaient être impuissants à les traduire, c’est qu’il attendait de Joseph qu'il le fasse lui-même. Avec seulement trois années d’enseignement primaire, ce jeune garçon ne pouvait en aucune manière avoir la capacité de traduire ces annales. Il reçut le pouvoir divin de le faire. La traduction terminée et les plaques restituées à l’ange Moroni, Joseph donna au nouvel ouvrage le nom de « Livre de Mormon » en mémoire du prophète-historien qui avait gravé les plaques. Mormon vécut dans la première partie du 4e siècle après J.-C., sur le sol alors inconnu de l'Amérique. Il fut l’un des derniers témoins de la grande destruction de son peuple, les Néphites.

Le Livre de Mormon est un recueil de saintes Écritures comparable à la Bible ; il contient le récit des relations entre Dieu et les anciens habitants du continent américain. Il révèle la plénitude de l’Évangile éternel. Ce livre fut écrit par de nombreux prophètes dont les paroles furent abrégées et gravées par le prophète-historien Mormon. Ces annales racontent l’histoire de deux grandes civilisations : l’une venue de Jérusalem en 600 av. J.-C. se sépara en deux nations, les Néphites et les Lamanites. L’autre, arrivée beaucoup plus tôt, à l’époque où le Seigneur avait confondu la langue des hommes à la tour de Babel, vers 2200 av. J.-C. est appelée Jarédites. Des milliers d’années plus tard, ces civilisations furent détruites à l’exception des Lamanites qui sont les ancêtres de certains Indiens d’Amérique.

L’événement suprême relaté dans le Livre de Mormon est le ministère personnel de Jésus-Christ parmi les Néphites peu après sa résurrection. Quand Mormon eut terminé ses écrits, il transmit le récit à son fils Moroni. Ce dernier y ajouta quelques paroles et cacha les plaques dans la colline Cumorah. En 1823, ce même Moroni, alors un être ressuscité, apparut au jeune Joseph et l’instruisit concernant les annales anciennes et leur traduction. Ces annales constituent un témoignage nouveau et supplémentaire que Jésus-Christ est le Fils de Dieu. Avant que l’ange Moroni ne reprenne les plaques, le Seigneur permit à onze autres personnes de les voir et d’attester de leur authenticité.

En plus des persécutions perpétrées par l’ensemble des mouvements religieux de sa région, Joseph eut, après la traduction des plaques, de grosses difficultés pour financer l’édition de l’ouvrage. L’opinion publique elle-même s’opposait farouchement à l’oeuvre de Joseph. Comment une « autre Bible » pouvait-elle entrer en concurrence avec la vraie ? Le poids de l’opinion publique défavorable à Joseph Smith finit par décourager les éditeurs d’entreprendre une première publication de l’ouvrage. C’est alors qu’un ami de Joseph, Martin Harris, lui vint en aide. Martin Harris hypothéqua sa ferme pour emprunter l’argent nécessaire à l’impression de 5000 exemplaires du Livre de Mormon et persuada un imprimeur de faire ce travail. Les premiers exemplaires sortirent de presse en mars 1830.

Par quelle autorité ?

L’histoire séculière et religieuse montre combien l’absence d’une autorité céleste est génératrice de prolifération d’Églises. L’apparition de Dieu le Père et de Jésus-Christ au jeune Joseph Smith en 1820 n’a pas été en soi un rétablissement de cette autorité. En effet, le jeune prophète ne reçut cette autorité que neuf ans plus tard. C’est au cours du mois de mai 1829, alors que Joseph Smith et Oliver Cowdery, son secrétaire, interrogeaient le Seigneur au sujet du baptême pour la rémission des péchés, qu’un messager céleste descendit dans une nuée de lumière. Ayant posé les mains sur eux, l'ange les ordonna disant : « À vous, mes compagnons de service, au nom du Messie, je confère la Prêtrise d’Aaron, qui détient les clefs du ministère d’anges, de l’Évangile de repentance et du baptême par immersion pour la rémission des péchés ; et elle ne sera plus jamais enlevée de la terre, jusqu’à ce que les fils de Lévi fassent de nouveau une offrande au Seigneur selon la justice » (Doctrine et Alliances 13).

Le terme « prêtrise » signifie ici « autorité d’agir au nom de Dieu ». L’ange dit encore que cette prêtrise d’Aaron n’avait pas le pouvoir d’imposer les mains pour le don du Saint-Esprit, mais que celui-ci serait conféré plus tard. Joseph Smith raconte : « Le messager qui nous visita à cette occasion et qui nous conféra cette prêtrise nous dit qu’il se nommait Jean, celui-là même qui est appelé Jean-Baptiste dans le Nouveau Testament, qu’il agissait sous la direction de Pierre, Jacques et Jean, lesquels détenaient les clefs de la Prêtrise Melchisédek, prêtrise qui, dit-il, nous serait conférée en temps voulu ».

Comme annoncé par Jean-Baptiste, Joseph Smith reçut un peu plus tard la prêtrise de Melchisédek des mains de Pierre, Jacques et Jean qui l’avaient eux-mêmes reçue de Jésus-Christ. Les plus sceptiques peuvent douter du rétablissement de cette autorité ; il n’en demeure pas moins que son origine est étrangère à celle dont se disaient investis l’empereur Constantin et ses successeurs, ou Henri VIII, ou d’autres encore.

Le prophète Joseph avait pour mission de « rétablir » toutes choses. Il n’a pas créé une nouvelle Église chrétienne, mais rétabli ce qui avait existé à l'origine, à savoir l’Église organisée par Jésus-Christ. C’est en ce sens que le jeune Joseph rétablit « toutes choses ». Il ne pouvait pas le faire sur le fondement de la Bible uniquement car la diversité des interprétations données à celle-ci avait contribué à la multiplication des Églises. S’il avait agi ainsi, Joseph Smith ne serait qu’un théologien parmi tant d'autres qui écrivirent de nombreux livres commentant et expliquant la Bible. Joseph Smith n’était pas non plus l’auteur du Livre de Mormon, il en était le traducteur.

La grande originalité et le caractère unique de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours sont marqués par deux points fondamentaux. Le premier c’est qu’elle n’est issue d’aucun mouvement religieux existant. Le deuxième, c’est qu’elle est dépositaire d'un témoignage supplémentaire de Jésus-Christ, à savoir, le Livre de Mormon.

L’Église de Jésus-Christ fut rétablie et organisée par l'intermédiaire du prophète Joseph Smith et dirigée avec l’aide de douze apôtres. Un prophète vivant dirigeait à nouveau l’Église du Christ. À la mort de Joseph Smith, c’est le doyen des apôtres qui prit la direction de l’Église, tout comme Pierre le fit en son temps. L’organisation primitive est rétablie et les sacrements accomplis le sont par l’autorité de Dieu et non plus par celle des hommes.

Depuis 1830, l’Église est dirigée ainsi, devenant la pierre qui, détachée sans le secours d’aucune main, commence à remplir la terre pour préparer la seconde venue de Jésus-Christ.