Les
mormons, Église ou secte ?
Jean
Dressayre
Article
mis à jour le 1er janvier 2003
L'histoire
du monde témoigne que l'association d'individus au sein de
communautés, qu'elles soient de nature spirituelle,
philosophique ou philanthropique, soulève toujours de
l'inquiétude, voire de la suspicion parmi l'opinion publique.
Ainsi, de nos jours, sous la notion de « secte »,
se cache toute une psychologie de cette peur collective de l'inconnu,
se traduisant souvent par le rejet et la persécution.
Cependant, s'il est bon d'être prudent face au développement
considérable de ces divers mouvements, il est également
de notre intérêt de nous informer objectivement des
valeurs qu'ils véhiculent afin de lutter contre ceux qui
menacent l'intégrité psychologique et morale de
l'homme, et de soutenir ceux qui lui permettent réellement de
s'épanouir.
Les
mormons, Église ou secte ?
Avant
d'entreprendre de répondre à cette question, il
convient d'éclaircir, pour le lecteur, ce que l'on entend par
la dénomination « mormon ».
On
appelle « mormons » ceux et celles qui
reconnaissent le Livre de Mormon comme un autre témoignage de
la réalité de Jésus-Christ, le premier se
trouvant dans la Bible. En fait, le nom officiel de l'Église
mormone est Église de Jésus-Christ des saints des
derniers jours. Sa dénomination souligne le fait qu'elle est
une Église chrétienne, et que ses membres sont, au même
titre que les premiers disciples du Christ, des saints, au sens où
ils bénéficient de la présence du Saint-Esprit
qui sanctifie. Quant à la notion de temps, elle met l'accent
sur le fait qu'il s'agit de l'Église de Jésus-Christ
rétablie de nos jours.
Le
Livre de Mormon est un recueil de saintes Écritures comparable
à la Bible ; il contient le récit des relations
entre Dieu et les anciens habitants du continent américain. Il
révèle la plénitude de l’Évangile
éternel. Ce livre fut écrit par de nombreux prophètes
dont les paroles furent abrégées et gravées par
le prophète-historien Mormon. Ces annales racontent l’histoire
de deux grandes civilisations : l’une venue de Jérusalem
en 600 av. J.-C. se sépara en deux nations, les Néphites
et les Lamanites. L’autre, arrivée beaucoup plus tôt,
à l’époque où le Seigneur avait confondu
la langue des hommes à la tour de Babel, vers 2200 av. J.-C.
est appelée Jarédites. Des milliers d’années
plus tard, ces civilisations furent détruites à
l’exception des Lamanites qui sont les ancêtres de
certains Indiens d’Amérique. L’événement
suprême relaté dans le Livre de Mormon est le ministère
personnel de Jésus-Christ parmi les Néphites peu après
sa résurrection.
Mormon
vécut au 4ème siècle après J.-C. Il fut
en fait l’un des derniers témoins de la grande
destruction de son peuple, les Néphites. Lorsqu'il eut terminé
ses écrits, il transmit le récit à son fils
Moroni. Ce dernier y ajouta quelques paroles et cacha les plaques
dans la colline Cumorah située près de Palmyra, dans le
nord de l'État de New-York. En 1823, ce même Moroni,
alors un être ressuscité, apparut au jeune Joseph Smith.
Il l’instruisit au sujet des annales anciennes et le chargea de
leur future traduction. Celle-ci terminée et les plaques d’or
restituées à l’ange Moroni, l'ouvrage fut édité
et publié sous le titre de Livre de Mormon, du nom du
prophète-historien qui avait gravé les plaques.
En 1830, Joseph Smith reçut
la révélation lui commandant de rétablir
l’Église telle que Jésus-Christ lui-même
l'avait fondée, Église qui prit le nom officiel
d’Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours.
Quelques
définitions en préambule
Il
est nécessaire, avant tout, d'apporter quelques précisions
sur certains termes : église vient du latin ecclesia qui
veut dire assemblée. Il est étroitement associé
à celui de religion du latin religio qui se traduit par
« culte rendu à la Divinité ».
Ainsi, une Église est une assemblée qui rend un culte à
la Divinité. Le mot secte, lui, vient du latin secta qui veut
dire « suivre ». Une secte se définit
donc comme un ensemble de personnes qui « suit »
une voie différente de celle de l’assemblée.
Le
mot évoque l'idée de désaccord, de dissidence,
de schisme, voire de trahison. Il est souvent insupportable à
la majorité de voir la minorité penser différemment.
Penser autrement implique parfois d'entrer en conflit avec l’autre.
En matière de religion, on parlera d'hérétiques,
d'illuminés, de fanatiques et, depuis un certain temps, de
groupes dangereux et aliénants. Les Juifs appelaient « la
secte du Nazaréen » (Actes 24:5) le groupe des
leurs qui avait décidé de suivre les enseignements de
Jésus-Christ.
L’Église
catholique romaine a persécuté pendant longtemps ceux
et celles qui avaient une opinion religieuse différente de
celle de Rome, alors qu’elle-même était issue de
la « secte du Nazaréen ». Au milieu du
19ème siècle, elle désignait encore comme
« secte » tout ce qui n’était pas
catholique, à commencer par les protestants, les sociétés
bibliques, les sociétés républicaines et les
groupes socialistes.
En
plus de désigner une minorité, le mot secte a été,
peu à peu, associé à méfiance et
trahison. Aujourd’hui encore, à l’égard des
religions minoritaires, nombreux sont ceux qui confondent les termes
« minorité » et « dangerosité » ;
ils les considèrent souvent, à tort, comme
indissociables.
Le
critère de la minorité
Une
minorité n’est pas systématiquement dangereuse ;
elle peut même être l’embryon d’une grande
religion. La « secte du Nazaréen »
n’est-elle pas devenue l’une des plus grandes religions
de notre temps ? Quand Martin Luther, moine de l’ordre des
Augustins et professeur à l’université de
Wittenberg, s’opposa publiquement à la Papauté en
dénonçant la vente des Indulgences (titres assurant le
pardon des péchés à qui pouvait les payer), une
nouvelle minorité vit le jour en Allemagne vers 1517. Qui
pouvait imaginer alors que cette opposition deviendrait un grand
mouvement religieux appelé le Protestantisme ? Aujourd'hui, en
Europe, il ne viendrait à l’esprit de personne de
considérer l’Église catholique comme une secte.
Cependant, cette comparaison se fait aisément à l'égard
des mormons. En Utah (aux États-Unis) la majorité de la
population est mormone ; aussi, les autres Églises,
largement minoritaires, pourraient sans difficulté être
considérées comme des sectes. Le critère de la
minorité n’est pas en soi synonyme de dangerosité.
Le critère de
la dangerosité
Le
dernier rapport de la Commission d’enquête de l’Assemblée
Nationale française (Rapport n° 2468 adopté le 22
décembre 1995) intitulé « Les sectes en
France » donne la définition suivante des sectes :
Groupes visant par des manoeuvres de déstabilisation
psychologique à obtenir de leurs adeptes une allégeance
inconditionnelle, une diminution de l’esprit critique, une
rupture avec les références communément admises
(éthiques, scientifiques, civiques, éducatives), et
entraînant des dangers pour les libertés individuelles,
la santé, l’éducation, les institutions
démocratiques. Ces groupes utilisent des masques
philosophiques, religieux ou thérapeutiques, pour dissimuler
des objectifs de pouvoir, d’emprise et d’exploitation des
adeptes.
Le nombre de
mouvements recensés par la Direction Centrale des
Renseignements Généraux et répondant à
l’un des critères de dangerosité s’élevait
en 1995, selon le rapport, à 172 pour les
« organisations-mères ». L’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours, surnommée
parfois « l’Église mormone », ne
figure pas parmi cette liste de mouvements considérés
comme sectaires. Ainsi, les pouvoirs publics français
reconnaissent-ils l’Église de Jésus-Christ des
saints des derniers jours comme une religion à part entière.
En 2000, elle compte onze millions de fidèles, répartis
dans 180 pays ou territoires, dont 30.000 en France. Elle est
aujourd’hui l’une des confessions dont la croissance dans
le monde est la plus rapide.
La
Commission a été consciente que ni la nouveauté,
ni le petit nombre d’adeptes, ni même l’excentricité
ne pouvaient être retenus comme des critères permettant
de qualifier de secte un mouvement se prétendant religieux.
Néanmoins, certains indices permettent d'établir la
réalité des soupçons conduisant à
qualifier de secte un mouvement qui se présenterait comme
religieux. La Commission d’enquête a retenu dix critères
utilisés par les services des Renseignements Généraux
du Ministère de l’Intérieur.
1)
La déstabilisation mentale : C’est le fait, par la
persuasion, la manipulation ou tout autre moyen, de déstabiliser
quelqu’un pour le soumettre à une emprise. Cette
déstabilisation mentale peut prendre des formes très
diverses et très insidieuses. En revanche, d’autres
procédés sont nettement plus brutaux comme le fait
d’affaiblir l’individu en lui imposant une discipline
très rigoureuse ou de réduire son esprit critique afin
d’obtenir sa soumission.
2)
Le caractère exorbitant des exigences financières :
Plusieurs témoignages recueillis par la Commission montrent
qu’elles auraient conduit de nombreux adeptes à une
grave situation d’endettement.
3)
La rupture induite avec l’environnement d’origine :
Evidemment contestable dans la vie en communauté, elle
implique une séparation totale d'avec la famille, les amis,
l'entourage familier. Mais elle est plus insidieuse lorsque les
adeptes continuent, en apparence, de mener une vie familiale et
sociale normale, mais dont l'engagement les conduit progressivement à
cesser toute relation véritable avec le monde extérieur.
4) Les atteintes à
l’intégrité physique : Il peut s’agir
de mauvais traitements, coups et blessures, séquestration,
non-assistance à personne en danger ou exercice illégal
de la médecine, et plus grave, d’agressions sexuelles.
5) L’embrigadement
des enfants : Le rapport ne précise pas ce que ses
auteurs entendent sous ce terme, il ne fait que citer les sectes qui
le pratiqueraient sous une forme plus ou moins insidieuse.
6) Le discours plus ou moins
antisocial : Le rapport précise que le discours est
clairement antisocial et caractérisé par la promotion
de pratiques contraires aux lois et à la morale commune. Elles
expliquent à leurs adeptes que ces lois et cette morale sont
mauvaises et que seuls les principes de la secte méritent
d’être suivis.
7)
Les troubles à l’ordre public : Il s'agit de faits
qui perturbent la paix sociale et seraient à l’origine
de certains troubles à l’ordre public.
8)
L’importance des démêlés judiciaires :
Le rapport de la Commission d’enquête de l’Assemblée
Nationale donne les références de nombreuses décisions
judiciaires pénales allant des atteintes physiques à la
violation de certaines obligations familiales, en passant par les
délits de diffamation, de fraude fiscale, d'escroquerie ou de
violation du droit du travail.
9)
L’éventuel détournement des circuits économiques
traditionnels : Selon les analyses des Renseignements Généraux,
le détournement des circuits économiques traditionnels
se caractérise par l'appel au travail clandestin ou à
diverses formes de fraude ou d’escroquerie.
10)
Les tentatives d’infiltration des pouvoirs publics : Il
s'agit, selon le rapport, de placer, suivant une stratégie
déterminée, ses membres afin d'influencer et de
corrompre le pouvoir en sa faveur.
Si
ce rapport a eu le mérite de sensibiliser l’opinion
publique à la dangerosité de certains mouvements
pseudo-religieux, il a été très critiqué
par les milieux scientifiques qui lui reprochent son manque
d’objectivité et de rigueur quant à la justesse
des informations citées (Commentaires du CESNUR -Centre
d'études sur les nouvelles religions- notamment l'ouvrage de
Massimo Introvigne et J. Gordon Melton « Pour en finir
avec les sectes » Juillet 1996).
La
Commission d’enquête de l’Assemblée
Nationale reconnaît que l’Église de Jésus-Christ
des saints des derniers jours fait partie des nouveaux mouvements
religieux de la première vague (19ème siècle)
donc qu'elle n'est pas une secte. Au-delà de ce fait, il est
néanmoins intéressant de l'analyser par rapport aux
critères de la commission afin d'expliquer et de mieux
comprendre pourquoi il est logique qu'elle ne figure pas sur la liste
des sectes en France.
1)
Déstabilisation mentale ou conversion ?
La
déstabilisation mentale correspond à la perte des
notions sociales, familiales et individuelles. C’est en ce sens
qu’elle est dangereuse. L’individu qui en est victime se
trouve dépourvu de toute protection personnelle. Il devient
alors un danger pour lui-même, pour son entourage et pour la
société. Est associé à la déstabilisation
mentale le « lavage de cerveau », technique qui
serait susceptible d’amener une personne à changer
d’opinion sous la pression et la manipulation psychologique.
Suivant cet ordre d’idée, de nombreux ordres religieux
de type monastique qui pratiquent la rupture avec la famille et la
société, qui sont astreints à des obligations
d’abstinence en tout genre et, dans certains cas, à des
châtiments corporels, devraient également être
qualifiés de sectaires.
Que
l’on parle de « déstabilisation mentale »
ou de « lavage de cerveau », on associe, la
plupart du temps, ces pratiques à des manœuvres
frauduleuses telles que le mensonge, l’escroquerie et l’abus
de confiance, qui amènent celui qui en est victime à
subir un préjudice moral ou/et matériel (souvent
économique).
La
conversion, quant à elle, est le fait de changer d’opinion
sur certaines valeurs. En principe, la conversion est une affaire de
réflexion et de sentiments personnels. De ce fait, la
conversion est nécessairement incompatible avec la pression
psychologique et les manoeuvres frauduleuses. Ainsi, il ne fait aucun
doute pour les chrétiens du monde entier que Pierre, Jacques
et Jean ont été convertis au christianisme alors qu’ils
étaient juifs. Pourtant, il est facile d’imaginer qu’à
cette époque les proches de ces trois hommes ont pensé
que ces derniers étaient victimes d’une
« déstabilisation mentale » ou d’un
« lavage de cerveau » puisqu’ils avaient
rejoint la « secte de Jésus de Nazareth »,
comme on l’appelait alors.
En
matière de religion, comme dans tout autre domaine, celui qui
arrive à convaincre l’autre exerce nécessairement
une influence sur lui. Si cette influence apporte un bien-être
certain à celui qui la reçoit en toute conscience et
dans les limites du respect des libertés individuelles, c'est
de conversion dont il s'agit, tout simplement.
Le
message de l’Église de Jésus-Christ des saints
des derniers jours engendre-t-il ou non, de près ou de loin,
une restriction intellectuelle et mentale, voire matérielle
des libertés individuelles ?
Les
fondements essentiels de l'Église : la liberté de
choisir et le Christ
« L'hommes
est la plus grande création de Dieu. C'est pour lui que le
monde a été formé. C'est son bonheur qui est le
plus grand souci du Père. Mais Dieu n'a pas fait de l'homme un
pion. Il exhorte, il dirige mais il ne force jamais. L'homme est
libre de choisir son chemin » (Gordon B. Hinckley, « Qui
sont les mormons ? », brochure). En venant sur terre, nous
recevons un corps à travers lequel nous exerçons notre
liberté de choix et en choisissant le bien, nous montrons à
Dieu notre désir de revenir à Lui. Mais étant
libre et imparfait, nous commettons des actes qui nous rendent
indignes de retourner auprès du Père. Pour nous aider,
Il envoie des prophètes qui témoignent du Christ. C'est
en acceptant celui-ci comme Sauveur et en vivant selon son exemple
que nous pouvons être rachetés de nos péchés.
Seule la liberté peut
nous permettre d'aller à la vérité. Et c'est
pour que celle-ci soit enseignée aux hommes que Jésus,
lors de son ministère terrestre, organisa son Église,
l'Église de Jésus-Christ. Il donna aux apôtres
l'autorité de diriger son Église, c'est-à-dire
le pouvoir d'avoir au nom de Dieu. Mais les hommes se rebellèrent
contre le Seigneur et le crucifièrent.
Après
la mort du Christ, pour cause de persécution et de mort des
apôtres, l'Église des premiers jours tomba entre les
mains d'hommes avides de pouvoir. L'autorité divine fut
retirée, ce qui favorisa la prolifération
d'interprétations et d'Églises guidées par des
hommes sans autorité divine. Cette situation perdura pendant
près de dix-sept siècles mais avait été
prédite par les prophètes de jadis (Amos 8:11, 12 ;
2 Thessaloniciens 2:1-4). Pendant cet âge de ténèbres
sans prophètes ni apôtres pour guider les hommes, une
part importante de la vérité fut perdue. Mais les
Écritures annonçaient le rétablissement de la
vérité, de l'Église de Jésus-Christ. Les
hommes allaient être à nouveau libres de venir au
Christ.
Le
Rétablissement de l’Église de Jésus-Christ
Tout comme le Christ établit
lui-même son Église sur terre c’est également
lui qui devait la rétablir. En 1820, dans l'État de
New-York, au milieu d'une série de réveils destinés
à ramener la population à la pratique religieuse,
diverses confessions se disputent l'adhésion de ceux à
qui elles prêchent. Au milieu de ces voix discordantes, un
jeune homme de quatorze ans, du nom de Joseph Smith, se pose la
question de savoir à quelle Église il doit se rallier.
Quatre des membres de sa famille, dont sa mère, se sont déjà
joints à l'Église presbytérienne et le jeune
Joseph se demande s'il doit les suivre.
Un
passage lu dans la Bible l'incite à demander directement à
Dieu (Jacques 1:5). En réponse à sa prière,
Dieu, le Père, et son Fils, Jésus-Christ, lui
apparaissent et lui font part de leur volonté de rétablir
l'Église de Jésus-Christ dans toute la pureté de
sa doctrine et de ses préceptes, et ils lui confient la
mission d'être leur porte-parole. Trois ans plus tard, un
messager céleste remet au jeune Joseph un livre écrit
sur des plaques d'or, le Livre de Mormon, annales d'un peuple
descendant d'émigrants partis de Jérusalem et qui se
sont installés en Amérique. Ces annales racontent les
relations de ce peuple avec Dieu, notamment son expérience de
la visite du Christ ressuscité, ce qui en fait un autre témoin
de Jésus-Christ. Deux autres apparitions viendront plus tard
apporter un complément indispensable, l'autorité de
faire les choses au nom de Dieu. La première est celle de
Jean-Baptiste, ressuscité, qui confère à Joseph
Smith l'autorité de baptiser. La deuxième est celle de
Pierre, Jacques et Jean, également ressuscités, qui
confèrent au jeune prophète l'autorité qu'ils
ont eux-mêmes reçu de Jésus-Christ de diriger
l'Église. Tout est donc prêt pour rétablir
l'Église de Jésus-Christ, ce qui se fait officiellement
le 6 avril 1830.
Alors
que les Églises chrétiennes avaient à leur tête
des hommes choisis par d’autres hommes, cela depuis des
siècles, l’Église de Jésus-Christ avait à
sa tête un homme choisi et appelé de Dieu dès son
adolescence. Depuis ce temps-là, elle affirme agir avec
l'autorité de Dieu, celle qui fut donnée aux premiers
apôtres, pour diriger l’Église et pour administrer
les sacrements.
La
vision de Joseph Smith et le rétablissement de l'Église
de Jésus-Christ, mythe ou réalité ?
Aujourd'hui, le surnaturel
trouve difficilement sa place. Néanmoins, ce que Joseph Smith
dit avoir vu et entendu n'est pas si différent (en matière
de surnaturel), que la plupart des histoires bibliques notamment,
telles que la croyance à la réception des dix
commandements par Moïse, la traversée de la mer Rouge à
pied par les Hébreux ou encore la résurrection de
Jésus-Christ. Le fait que Dieu a parlé à un
jeune garçon au cours du 19ème siècle semble
inconcevable à certaines personnes alors que pour elles il ne
fait aucun doute que Dieu parla à Adam, à Abraham, à
Moïse, à David et à un grand nombre d’autres
prophètes. Par ailleurs, il semble qu’il soit plus
facile de croire à des événements surnaturels
qui eurent lieu il y a plusieurs siècles que de croire à
ce même type d’événements s’ils ont
lieu à notre époque. Comment croire aux prophètes
anciens dont on suppose, par la foi, qu’ils ont existé
et ne pas se demander si Joseph Smith fut également un
prophète de Dieu ? Le message spirituel de l'Église
est déjà plus ou moins enseigné, sous des formes
diverses, par la plupart des grandes religions chrétiennes. La
différence essentielle avec les autres communautés
chrétiennes réside dans le fait que l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours dit être
une religion révélée et détenir la
plénitude de l’Évangile, ceci grâce
notamment au second témoignage de Jésus-Christ : le
Livre de Mormon.
On
croit ou on ne croit pas à la vision du jeune Joseph Smith.
C’est une affaire de foi. Si on y croit, on accepte le message
spirituel de l’Église de Jésus-Christ des saints
des derniers jours. On croit que les dirigeants actuels de l’Église
sont inspirés de Dieu et on s’efforce de suivre leurs
conseils. Cette situation n’est en rien différente de
celle de la plupart des grandes religions traditionnelles
(catholique, juive, orthodoxe, protestante...) dont les fidèles
suivent les recommandations de leurs dirigeants. Comme eux, les
saints des derniers jours, dans tout ce qu’ils font ou ne font
pas, sont libres de leurs choix et s’efforcent de vivre au
quotidien leur religion.
Celui
qui se joint à l’Église par le baptême
s’engage moralement et spirituellement à honorer ces
commandements. Lorsqu’il décide de ne plus les suivre,
il peut quitter en toute liberté l’Église ou en
sera excommunié si ses manquements graves et répétés
portent un préjudice à l'Église. C’est ce
qui se passe au sein de toutes les grandes religions chrétiennes
traditionnelles.
2)
Extorsion ou financement ?
Généralement,
celui qui fait preuve de zèle et d’engagement au sein
d'un groupe religieux donne beaucoup de son temps et parfois de son
argent pour la progression du mouvement. Ce don de soi est la plupart
du temps motivé par une sincère conviction. Parfois
même, le fidèle le fait au prix d’une vie de
sacrifice et d’abnégation au profit de la hiérarchie
du groupe. Ainsi en est-il de ceux qui vivent volontairement et
sincèrement une vie appauvrie pour envoyer des fonds à
leur gourou qui vit luxueusement. Il en est de même des
ecclésiastiques de base de la plupart des communautés
religieuses qui vivent souvent dans des conditions matérielles
précaires par rapport à celles réservées
aux prélats.
Dans
son étude sur les sectes en France, le rapport de la
Commission rappelle que généralement le financement de
ces minorités repose essentiellement sur le paiement de
services, de dons librement consentis ou de cotisations à
barème fixe ou proportionnel aux revenus et qui, en rien, ne
paraissent illégaux. Faut-il rappeler que les Églises
établies ont toujours bénéficié de dons
émanant de leurs membres (quêtes, héritages,
offrandes pontificales...), qu’elles font payer les messes de
mariage et d’enterrement et qu’elles demandent à
leurs fidèles de leur verser le denier du culte. En fait,
quelle association, qu'elle soit religieuse ou non, ne cherche pas à
s’étendre et n’a pas, pour ce faire, besoin
d’argent ? Par ailleurs, lorsque ces exigences financières
deviennent exorbitantes au point de mettre en danger l’équilibre
financier de certains donateurs, le législateur a prévu
suffisamment de textes, notamment dans le Code pénal, pour les
protéger et punir cette forme de délinquance. Il faut
retenir les infractions d’escroquerie et d’abus de
confiance, la publicité fausse ou trompeuse, la quête
sur la voie publique.
L’article
225.13 de ce même code précise que : le fait
d’obtenir d’une personne, en abusant de sa vulnérabilité
ou de sa situation de dépendance, la fourniture de services
non rétribués ou en échange d’une
rétribution manifestement sans rapport avec l’importance
du travail accompli est puni.... De même, l’article
225.14 dit que : le fait de soumettre une personne, en abusant
de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance
à des conditions de travail ou d’hébergement
incompatibles avec la dignité humaine est puni...
Autant de situations
différentes qui démontrent combien l’utilisation
de l’argent au sein des communautés religieuses peut
prendre des orientations diverses. Qu’en est-il chez les saints
des derniers jours ?
Avec
les dix commandements que Dieu donna à Moïse, que la
plupart des chrétiens connaissent, l’Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours reçut le
commandement de donner la dîme. En effet, la façon dont
l'argent est perçu est décrit dans les Écritures
comme un principe religieux. Il n'y a pas de collecte, la dîme
est une loi ancienne acceptée par les saints des derniers
jours comme un commandement. La Bible témoigne à
plusieurs reprises de la pratique de cette loi (Malachie 3:8-12).
Abraham payait déjà la dîme à Melchisédek
(Genèse 14:20) ; Jacob fit alliance de donner la dîme
à Dieu (Genèse 28:22) et Moïse commanda aux
enfants d’Israël qu’ils donnent la dîme à
l’Eternel (Lévitique 27:30-34). Pour un saint des
derniers jours, payer la dîme consiste à remettre à
l’Église un dixième de ses revenus.
Deux
éléments gouvernent l’application du principe de
la dîme. Le premier est d’ordre spirituel : en nous
créant et en organisant cette terre, Dieu nous a tout donné.
Le principe de la dîme consiste à apprendre à se
détacher des choses matérielles en donnant une partie
de ce que l’on possède au profit des autres. Le deuxième
est d’ordre matériel : il permet à chacun de
contribuer au développement de l’Église. Grâce
à la dîme des fidèles il est possible de
construire des églises (400 nouveaux lieux de culte par an),
de les entretenir et de payer les frais afférents à
leur utilisation, tels que le chauffage et l'électricité ;
d'éditer des ouvrages pédagogiques et de les distribuer
gratuitement aux membres ; de gérer des établissements
scolaires, notamment l'Université Brigham Young à Provo
(Utah) la plus grande université privée d'Amérique
financée par une Église, avec une population de plus de
28.000 étudiants. Avec d'autres fonds à vocation
humanitaire qu'elle récolte auprès de ses fidèles
(le don de jeûne), l'Église de Jésus-Christ des
saints des derniers jours apporte une aide conséquente aux
victimes des guerres, des séismes, des inondations, des
sécheresses et d'autres désastres. Elle participe à
cette œuvre caritative avec bon nombre d'organisations non
gouvernementales telles le Secours catholique, le Mercy Corps
International, la Croix-Rouge américaine, le Croissant Rouge,
l'Armée du Salut, l'Habitat for Humanity et d'autres groupes
de par le monde. Au cours de l'année 1999, l'Église a
envoyé une aide humanitaire en participant à 829
projets dans 101 pays, donnant 11,2 millions de dollars en argent
liquide et 44 millions de dollars en matériel, soit un total
de 55,2 millions de dollars (Gordon B. Hinckley, magazine « Le
Liahona », août 2000).
Il
n'y a pas d'obligation de payer la dîme pour un membre. Chacun
dispose de l’entière liberté de le respecter ou
non. Un saint des derniers jours qui ne paie pas sa dîme à
l'Église reste membre. Tout comme le denier du culte et les
quêtes, propres à d'autres Églises, sont des dons
volontaires, chacun apprécie le don de la dîme selon son
degré de foi. Charge au croyant de donner ou non le denier du
culte ou la dîme. À combien s’élèvent
les exigences financières pour un saint des derniers jours ?
À rien, si celui-ci n’a pas acquis la conviction
personnelle que la dîme est un commandement de Dieu, au même
titre que les Dix commandements. À un dixième de ses
revenus s’il pense que c’est une bonne chose pour sa
progression spirituelle et le soutien matériel de l’Église.
3) Rupture ou
accueil / intégration ?
Le
rapport de la Commission d’enquête de l’Assemblée
Nationale parle des techniques de recrutement des sectes aujourd’hui
bien connues. Il fait remarquer également que les thèmes
de propagande utilisés sont extrêmement divers :
l’éthique, l’écologie, la médecine,
la guérison, la culture, l’éducation, la
transformation personnelle, l’épanouissement sexuel. Il
dit par ailleurs que les instruments de telles propagandes sont
également très divers : le démarchage dans
la rue ou à domicile, la diffusion de journaux, la publicité
par voie d’affichage ou de presse, les conférences, les
cycles de formation etc...
C'est
justement dans ces méthodes d'approche que réside la
grande différence entre l'Église de Jésus-Christ
et les sectes. Alors que celles-ci se gardent bien de révéler
leur identité lors des premiers contacts avec leurs futurs
adeptes, les personnes qui sont abordées par les missionnaires
de l'Église savent, d'entrée de jeu, à qui elles
ont affaire. Les 60.000 missionnaires de l'Église (année
2000) sont de jeunes hommes et femmes âgés entre 19 et
25 ans, et aussi des couples retraités, qui dans tous les pays
du monde donnent, bénévolement et de leur plein gré,
de leur argent et de leur temps pour servir leurs prochains. Le nom
de l'Église figure sur leur badge et ils se présentent
comme missionnaires de l'Église, porteurs d'un message
chrétien.
Le
rapport cite le Dr Jean-Marie Abgrall : « Le
recrutement d’un adepte passe par trois phases à partir
desquelles l’adhésion va s’obtenir
progressivement, en même temps qu’apparaît une
forme de dépendance intellectuelle et affective. Tour à
tour, le nouvel adepte va être séduit, persuadé
puis fasciné par la secte et ses membres recruteurs ».
La première phase est celle de la séduction. Elle vise
à proposer une alternative séduisante aux difficultés
de la vie quotidienne. La seconde phase est celle de la persuasion.
Elle consiste à persuader le futur adepte de la crédibilité
du discours de la secte. La troisième phase, conduisant à
l’adhésion, est la fascination obtenue le plus souvent
lors de la rencontre avec la pièce maîtresse de la
dynamique sectaire (résultats positifs à un test,
assistance à un rite, rencontre du gourou, etc...). En fait,
le rapport ne dit rien d’autre qui ne se passe déjà
au sein même des grandes religions traditionnelles. Ce sont les
termes employés par les rédacteurs du rapport qui
donnent une connotation péjorative à la méthode.
À l’égard des nouveaux mouvements religieux on
dira : « recrutement » plutôt que
« conversion » ; « adepte »
plutôt que « fidèle » ;
« embrigadement » plutôt que
« catéchèse ».
Ce
n’est pas la démarche qui est perverse en elle-même
mais ce qu’elle prône quand cet enseignement conduit à
la restriction des libertés individuelles. Combien ont été
séduits par le message du christianisme qui invite les
individus à « remettre leurs difficultés
entre les mains du Sauveur du monde » (première
phase) ? Combien ont été persuadés de la
crédibilité du discours du Nouveau Testament et des
enseignements des missionnaires chrétiens (deuxième
phase) ? Combien ont été fascinés ou touchés
par des sentiments spirituels très forts en présence
d’autorités ecclésiastiques chrétiennes,
notamment le Pape (troisième phase) ? Est-ce pour autant qu’il
faille dire que les 600 millions de catholiques ont tous été
manipulés par une démarche psychologique
intentionnellement mauvaise ?
L’un
des derniers commandements que Jésus-Christ donna à ses
disciples avant de les quitter fut d’aller de par le monde
prêcher la « bonne nouvelle ». Quoi de
plus naturel que l’Église qui porte son nom aujourd’hui
soit une Église missionnaire ? C’est pourquoi des
milliers de jeunes saints des derniers jours partent en mission.
Celui qui adopte une
autre religion que celle transmise par la tradition familiale est
souvent seul dans sa différence. Cela peut ne pas être
toléré par le reste de la famille et engendrer un
conflit, voire une rupture. La plupart du temps, la rupture avec le
milieu d’origine vient d’un conflit intellectuel et
émotionnel, quand la majorité des membres d’une
famille n’accepte pas qu’un des leurs puisse penser
différemment. Cette réaction est souvent motivée
par le noble instinct de protection de l’être aimé
contre l’inconnu. Cette majorité est alors facilement
tentée de croire que celui qui a changé d’opinion
a été « manipulé » ou
« embrigadé ». Elle ne peut croire qu’il
se soit converti, en toute connaissance de cause, à une autre
religion. La rupture ne vient pas tant de celui qui change que de
celui qui n’accepte pas que l’autre puisse changer.
Enfin, et pour justement
minimiser ce type de rupture, l'Église de Jésus-Christ
applique des règles très précises en la matière.
Ainsi, un enfant ne pourra être baptisé sans le
consentement écrit de ses parents, et une personne mariée
ne pourra l'être tout autant sans le consentement écrit
de son conjoint.
4)
Atteintes ou protection de l’intégrité physique ?
Dans le contexte religieux,
les atteintes à l'intégrité physique peuvent
s'entendre de deux façons. Celle relative aux persécutions
d'un groupe infligées par d'autres groupes hostiles, et celle
relative aux atteintes à l'intégrité physique
pratiquées par un groupe sur la personne de ses propres
adhérents.
Concernant
le premier cas, et dans toute l’histoire des États-Unis,
peu de gens ont autant souffert pour leurs convictions religieuses
que les saints des derniers jours. Les deux premières
décennies de l’Église de Jésus-Christ des
saints des derniers jours sont décrites comme des cycles
répétés de migrations, d’installations et
d’expulsions sous la force, causées par l'opposition du
monde ecclésiastique de l’époque, qui considérait
comme hérétique la doctrine des prophètes
vivants.
Les mormons
firent même l’objet d’un ordre d’extermination
émanant de Lilburn W. Boggs, gouverneur du Missouri, qui signa
le 27 octobre 1838 l’un des documents les plus
antidémocratiques de l’histoire américaine. Cette
directive politique et militaire contraignit à l’exode
environ vingt mille hommes, femmes et enfants qui quittèrent
le Missouri en plein hiver, laissant derrière eux les terres,
les maisons et les biens qu’ils avaient achetés. Depuis
les premières pistes gelées traversant le Mississippi
au milieu de l’hiver, jusqu’à la chaleur torride
de juillet dans la vallée du Grand Lac Salé, les
pionniers mormons ont laissé leurs traces sur 2000 kilomètres
marqués par les tragédies et l’espoir. La quête
de la liberté religieuse et le rassemblement de dizaines de
milliers d’immigrants dans l’Ouest américain aride
font de l’exode des pionniers mormons une épopée
sans égale dans l’histoire des États-Unis.
Quant au deuxième
cas, en France la loi dispose de suffisamment de textes qui, d’une
part, préviennent les agissements délictueux et,
d’autre part, punissent sévèrement ceux qui se
rendent coupables d'atteintes à l'intégrité
physique d'autrui. Que l’on soit mormon, musulman ou
catholique, la loi est la même pour tous. Aussi, un mormon qui
se rendrait coupable d’atteinte à l’intégrité
physique d’autrui, pour quelque motif que ce soit, serait bien
évidemment poursuivi par la justice.
Parce
que l'esprit et le corps sont l'âme de l'homme, les saints des
derniers jours considèrent celui-ci comme sacré. Il est
enseigné et appris que notre corps doit être protégé
par la vertu et la pureté personnelles, et que les membres
doivent respecter le corps des autres en vivant chastement et
fidèlement. Ainsi, rien dans la doctrine de l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours n’encourage
à la violence physique ou psychologique. Elle conseille, au
contraire, aux hommes et aux femmes de bonne volonté de suivre
l’exemple de patience et d’amour de Jésus-Christ,
notamment dans son 13è article de foi : « Nous
croyons que nous devons être honnêtes, fidèles,
chastes, bienveillants et vertueux, et que nous devons faire du bien
à tous les hommes ; en fait, nous pouvons dire que nous
suivons l’exhortation de Paul : nous croyons tout, nous
espérons tout, nous avons supporté beaucoup et nous
espérons être capables de supporter tout. Nous
recherchons tout ce qui est vertueux ou aimable, tout ce qui mérite
l'approbation ou est digne de louange. »
L'élément majeur
de la doctrine de l’Église de Jésus-Christ des
saints des derniers jours est la progression éternelle des
individus et des familles. Celle-ci n'est possible que dans le cadre
de la liberté de choix. Quelqu'un que l'on force à
faire quelque chose n'évolue pas, et dès que la
contrainte cesse, reprend son comportement d'origine. L'ascèse
forcée, les humiliations, le manque de sommeil etc…
vont tout à fait à l'encontre d'une doctrine qui prône
la progression volontaire.
5)
Embrigadement ou accompagnement à l'éducation ?
Affirmer quelque chose à
son enfant, c’est nécessairement l’instruire. Tout
dépend de l’endroit où l’on se trouve : on
parlera « d’éducation religieuse »
pour des enfants issus d’une religion traditionnelle et
« d’embrigadement » pour ceux dont les
parents sont membres d’une communauté religieuse
minoritaire mal connue. Doit-on remettre en question la liberté
des parents de transmettre à leurs enfants les idées et
les valeurs religieuses auxquelles ils croient ?
Pourrait-on
reprocher à des parents catholiques d’éduquer
leurs enfants dans la tradition catholique sous prétexte
qu’ils vivent dans un État islamique ou à des
musulmans d’enseigner l’Islam à leur postérité
sous prétexte qu’ils demeurent à Rome ? Personne
ne peut s’opposer à ce que les jeunes enfants reçoivent
l’éducation de leurs parents, sauf si cette éducation
entre dans le cadre d’interdits juridiques. Tout comme des
parents athées « enseignent »,
« éduquent » ou « embrigadent »
leurs enfants de telle sorte qu'ils pensent que Dieu n’est que
le fruit de l’imagination des hommes, ou décident de les
laisser choisir, des parents croyants enseignent leurs croyances à
leurs enfants. En fait, l'embrigadement prend son vrai sens dès
lors qu'une secte prend les enfants aux parents pour les mettre dans
des centres où on les « forme »
intensivement. C'est aussi le cas lorsque la secte les envoie mendier
pour son compte. Ou lorsqu'elle les utilise pour espionner et
dénoncer leurs parents.
Tous
les mouvements de jeunesse peuvent aussi constituer un embrigadement,
une association sportive, une chorale, un regroupement scout, etc...
Ce qui est dangereux, au sens moral et parfois juridique du terme,
c'est le détournement de la personnalité des enfants du
groupe, à l'insu des parents, à des fins contraires aux
principes des libertés individuelles.
L’enseignement
religieux que reçoivent les enfants dans les familles des
saints des derniers jours est essentiellement fondé sur
l’exemple de Jésus-Christ et la croyance en la
perpétuation de la cellule familiale au-delà de la
mort. Très tôt, les enfants apprennent que la famille
peut vivre ensemble à jamais. Dans les familles fidèles
de l’Église, on prie ensemble tous les jours. On se
réunit une fois par semaine pour la « soirée
familiale », un moment où les membres de la famille
jouent ensemble, travaillent ensemble, servent leur prochain et
s’enseignent l’Évangile les uns aux autres. C’est
la croyance au caractère éternel de la famille et
l'invitation du Christ à le suivre qui pousse les membres
d’une même famille à vivre des principes élevés.
6) Le discours peu ou prou
social ?
Il est
vrai que certaines communautés religieuses tiennent parfois un
discours antisocial et le rapport de la Commission d’enquête
de l’Assemblée Nationale en cite quelques exemples.
L’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours, elle, insiste
sur l'obligation de respect et incite ses fidèles à
participer à la vie de la collectivité pour que leur
présence soit constructive. Chacun est invité à
être un citoyen à part entière et à
briller par son intégrité. L'Église encourage à
être honnête et travailleur. En tout cela, les saints des
derniers jours croient qu’en servant leurs semblables, c’est
Dieu qu’ils servent.
Réputés
pour être un peuple honnête et industrieux, les saints
des derniers jours, dans leur 12ème article de foi, précisent
quel genre de citoyens ils aspirent à être : « Nous
croyons que nous devons nous soumettre aux rois, aux présidents,
aux gouverneurs et aux magistrats, et que nous devons respecter,
honorer et défendre la loi ».
7)
Troubles à l’ordre public ou souci de cohésion ?
Le rapport de la Commission
d’enquête de l’Assemblée Nationale rappelle
que le phénomène des sectes ne date pas d’aujourd’hui.
Il précise que, déjà sous l’Empire romain,
les premières communautés chrétiennes furent
persécutées tant à cause de leur refus du
serment à l’Empereur qu’en raison des accusations
de sorcelleries (réunions nocturnes) ou d’anthropophagie
(rite de la Communion) dont elles firent l’objet. Le rapport
précise encore que les procès en sorcellerie, dont
furent victimes au Moyen-Âge et jusqu’au début de
la Réforme près de 100.000 personnes en Europe,
témoignent de la persistance de phobie des sectes.
Depuis l’arrivée
du premier missionnaire mormon en France en 1849 jusqu’au début
des années 1980, soit pendant plus de 130 ans, l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours a souffert des
préjugés de l’opinion publique française.
Au cours des années soixante, l’Église a connu en
France une croissance spectaculaire ; néanmoins cela n'a
pas suffi à lui donner une image respectable et elle est
encore restée considérée comme une « secte
venue d’outre-Atlantique ».
Ce
n’est qu’à partir des années quatre-vingts,
notamment grâce aux deux rapports de l'Assemblée
Nationale sur les sectes en France, que l’Église de
Jésus-Christ des saints des derniers jours a acquis une
notoriété certaine au titre de nouveau mouvement
religieux en voie d'être reconnu aux côtés des
grandes religions traditionnelles. Au début des années
quatre-vingts, l’opinion publique française fut émue
par des drames qui eurent lieu au sein de certaines communautés
minoritaires à caractère religieux. Monsieur Pierre
Mauroy, alors Premier Ministre, confia au député Alain
Vivien la tâche de lui remettre un rapport sur les sectes en
France. Ce rapport, publié en 1982, faisait un premier état
de l’implantation des minorités religieuses en France,
de leur idéologie et de leur dangerosité éventuelle.
C’est grâce à
ce premier rapport, relayé par la presse nationale, que
l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours est sortie du « grand sac » dans lequel étaient
mises, sans distinction aucune, toutes les minorités
religieuses ou philosophiques mal connues.
Le deuxième
rapport, adopté par l’Assemblée Nationale le 22
décembre 1995, émane de la Commission d’enquête
de l’Assemblée Nationale. Comme celui de 1982, il est
intitulé « Les sectes en France ». Ce
dernier rapport met en évidence non seulement le fait que
l’Église mormone est une Église chrétienne
respectable mais qu’elle a aussi un effet bénéfique
sur ses fidèles.
En
ce qui concerne les troubles à l’ordre public, depuis
qu’elle est installée en France, l’Église
n’a fait l’objet d’aucun procès à ce
propos. D’ailleurs, les saints des derniers jours sont
encouragés à respecter les gouvernements et les lois
qui régissent le pays dans lequel ils vivent. Le 12ème
article de foi, cité précédemment, les y
encourage.
8)
Démêlés judiciaires ou respect de la loi ?
Pour analyser les dangers que
font courir un certain nombre de mouvements, la Commission d’enquête
sur les sectes en France s’est fondée principalement sur
deux sources d’information : les décisions judiciaires
et les données collectées par les Renseignements
Généraux. De l’ensemble des décisions de
justice auxquelles la Commission a eu accès, notamment celles
fournies par la Direction des affaires criminelles et des grâces
du Ministère de la Justice, il ressort que de nombreuses
sectes, au cours des dix dernières années, se sont
rendues coupables d’illégalités. Ces
condamnations pénales s’appuient exclusivement sur des
faits matériels incontestables. Cependant, tous les actes
répréhensibles commis par les sectes ne font pas
l’objet d’une condamnation. En effet, pour prononcer une
condamnation, il est nécessaire de réunir plusieurs
éléments. Il faut, tout d’abord, que la personne
ayant subi un préjudice en soit consciente, d’où
la nécessité pour l’adepte d’avoir pris
suffisamment de distance vis-à-vis de la secte pour dénoncer
son préjudice. Il faut ensuite que l’intéressé
décide de porter plainte. Or cette démarche est loin
d’être systématique, beaucoup préférant
« tourner définitivement la page » d’une
période de leur vie. Il faut, enfin, que les faits reprochés
à la secte correspondent à une incrimination prévue
et sanctionnée par la loi.
Au-delà
des décisions judiciaires à l’encontre de
certains mouvements minoritaires à caractère religieux
ou philosophique, il convient de distinguer les actes répréhensibles
commis par des personnes, membres de sectes, et ceux causés
par les sectes en tant que telles. Aussi faut-il être vigilant
et ne pas faire d’amalgames. Par exemple : dirait-on que le
corps des enseignants de l’Éducation Nationale est
pervers lorsqu’un enseignant se rend coupable de viol ?
L’ensemble des officiers de police judiciaire doit-il être
réprouvé dès lors que certains d’entre eux
commettent des « bavures » ? Le corps médical
devrait-il faire l’objet d’une suspicion d’incompétence
générale lorsqu’un médecin est reconnu
coupable d’une erreur de diagnostic aux conséquences
fatales ? Des déviants évoluent dans tout groupe ;
ce n’est pas pour autant que les groupes eux-mêmes sont
déviants.
L’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours n’échappe
pas à cette vérité objective. Il peut arriver
que certains de ses membres, alors même qu'on leur apprend à
respecter des principes de haute moralité, transgressent
ceux-ci et arrivent à enfreindre les lois du pays. C’est
dans ces cas qu’ils font, bien naturellement, l’objet de
condamnations pénales. Mais, l'Église, en tant que
telle, n'a jamais fait l'objet de condamnation judiciaire pour
violation des lois du pays.
9)
Détournement ou application des règles ?
En évoquant le
détournement des circuits économiques, le rapport
d’enquête sur les sectes en France est avare
d’explications. Il n’évoque que très
succinctement l’importance des sommes en jeu et ce qui pourrait
expliquer la stratégie de nombreuses associations qui
choisissent de s’implanter dans des pays dotés d’une
législation fiscale « tolérante ».
Il dénonce cependant, l’exploitation impitoyable de
l’adepte par les dirigeants au mépris des lois sociales,
notamment lorsque le travail n’est pas déclaré.
Mais la fuite des capitaux vers des « paradis fiscaux »,
la fraude fiscale et le travail clandestin ne sont pas l’apanage
des minorités religieuses.
L’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours ne bénéficie
pas d’un régime de faveur particulier à ce propos
de la part des gouvernants, tout au moins en France. De plus, force
est de constater qu’aucune condamnation pénale pour
fraude à la législation fiscale ou sociale n’est
relevée à son encontre. Et pour cause : son
système d’apurement est peut-être le plus détaillé
et le plus complet qui soit au monde. En France, érigée
en association, seul statut juridique lui permettant d'exister au
titre d'institution, l'Église est soumise aux contrôles
fiscaux comme le sont toutes les autres formes d'associations.
10) Infiltration ou
promotion au mérite ?
La
Commission d'enquête fait allusion aux mouvements
pseudo-religieux qui font des efforts concertés pour rallier à
leur cause des personnalités en place, afin de s'assurer de
hautes protections ou en vue d'une prise future du pouvoir.
En France il faut entendre par
« pouvoirs publics », d’une part, les
hommes et les femmes élus pour diriger la nation et, d’autre
part, les hommes et les femmes recrutés par voie de concours
pour assurer le Service Public. Les premiers sont démocratiquement
mis en place par le peuple, les seconds bénéficient du
principe d’égalité d’accès à
la Fonction Publique.
On
utilisera plus facilement le terme « infiltration »
à l’égard de ceux qui sont membres d’une
communauté religieuse minoritaire, et le terme « accès
à la Fonction Publique » pour les autres, comme si
le fait d’avoir une opinion religieuse différente de
celle de la majorité était une traîtrise à
l’État. Ce genre d'attitude discriminatoire a bien des
fois engendré des drames qui sont encore aujourd’hui une
honte pour l’humanité. C’est le détournement
du pouvoir qui est blâmable et non le fait d’être
membre d’une religion ou de tout groupe minoritaire. On peut
être décideur politique, membre d’une religion
traditionnelle majoritaire, et être peu soucieux de l’intérêt
public ; tout comme l’on peut être décideur
politique, membre d’une communauté religieuse
minoritaire, et avoir un sens aigu de la démocratie et de la
moralisation de l’État.
De
nombreux documents à portée internationale réaffirment
le principe de liberté de choix, également dans le
domaine de la religion et du respect vis-à-vis des choix de
chacun. La Déclaration de l’UNESCO du 16 novembre 1995
constitue la référence internationale la plus récente.
Lors de la 28ème session de sa Conférence générale,
elle a émis une déclaration de principe sur la
tolérance adoptée solennellement par les États
membres dont la France fait partie et dans laquelle il peut être
notamment relevé que : « la tolérance
est la clé de voûte des droits de l’homme, du
pluralisme, de la démocratie et de l’État de
droit ». En son alinéa 1.4, il peut être
relevé également que : « la pratique de
la tolérance signifie que chacun a le libre choix de ses
convictions et accepte que l’autre jouisse de la même
liberté. Elle signifie l’acceptation du fait que les
êtres humains, qui se caractérisent naturellement par la
diversité de leurs valeurs, ont le droit de vivre en paix et
d’être tels qu’ils sont ».
Dans
la mesure où une minorité se définit comme une
religion à part entière, et dans la mesure où
elle s’exprime légalement, pourquoi s’étonner
de l’effort qu’elle fait pour être entendue ?
L’objectif de l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours est de proclamer
la plénitude de l’Évangile de Jésus-Christ.
Aussi, en quoi l’un de ses fidèles, alors qu’il
serait élu ou fonctionnaire, pourrait-il être un danger
pour l’État, dès lors qu’il est respectueux
de la loi ?
Conclusion
Toutes les grandes religions
du monde furent, à l’origine, des sectes dont les
fondateurs se distinguèrent de leur environnement en proposant
une doctrine nouvelle. Il en est ainsi de Jésus par rapport au
judaïsme traditionnel, de Luther et Calvin avec le catholicisme,
du roi Henri VIII d’Angleterre par rapport au pouvoir souverain
du Saint-Siège de Rome, de Bouddha vis-à-vis du
brahmanisme rigidifié dans ses castes, de Lao Tseu avec à
la vieille religion agraire chinoise.
Plusieurs
générations plus tard, la « minorité »
devient une institution respectable. En fait, il n’y a pas de
différence conceptuelle entre une secte (au sens minoritaire
du mot, excluant toute dangerosité) et une religion. C’est
le temps qui permet à une minorité qui s’intègre
socialement de se voir reconnue comme religion. Aussi, dans la mesure
où il exprime des convictions religieuses et respecte la loi,
tout mouvement, fût-il le plus petit, est protégé
par le principe de la liberté de conscience.
La
liberté de conscience, notamment en matière religieuse,
est garantie par l’article 10 de la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen de 1789, par le 5ème
alinéa du préambule de la Constitution de 1946, ainsi
que par l’article 2 de la Constitution de 1958. Le principe en
est consacré par l’article 9 de la Convention européenne
de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés
fondamentales, ratifiée par la France en 1973. D’autre
part, tout mouvement jouit de la liberté de réunion
garantie par la loi du 30 juin 1881, ainsi que de la liberté
d’association, prévue par l’article 2 de la loi du
1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
Ces trois libertés (de
conscience, de réunion, d'association) ne peuvent toutefois
s’exercer que dans certaines limites. Celle du respect de
l’ordre public, c’est-à-dire, au sens large, la
tranquillité, la sécurité, la salubrité
et la moralité publiques ; celle du respect de la liberté
et des droits d’autrui, car, comme l’affirme l’article
4 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen
de 1789 : « la liberté consiste à faire
tout ce qui ne nuit pas à autrui » ; et,
enfin, celle du respect du principe de laïcité sur lequel
repose la séparation des Églises et de l’État,
décidée par la loi du 9 décembre 1905.
C’est en rappelant ces
notions, que la Commission d’enquête sur les sectes en
France a bien veillé à ne pas faire un amalgame entre
tous les groupes spirituels existants. Aussi, le rapport
précise-t-il : « La Commission a pris grand
soin de faire la part des choses afin de dissiper un éventuel
malentendu : tous les mouvements spirituels autres que les religions
traditionnelles et communément appelés sectes ne sont
pas dangereux, comme, par exemple, les baptistes, les quakers ou les
mormons. Leur rôle peut même être, parfois,
considéré comme très positif. »
Tout mouvement religieux, s’il
évolue dans la plus stricte légalité, en
promouvant des valeurs morales élevées, n’est
rien d’autre qu’une religion. C’est ce qu’est
l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers
jours.