Doctrine et Alliances

Contexte des sections 102 et 107



Joseph F. Darowski et James Goldberg




En mai 1829, Joseph Smith et Oliver Cowdery s’agenouillent près de la rivière Susquehanna. Ils viennent de lire ce qui est dit dans 3 Néphi sur le baptême et ils veulent savoir où trouver cette même autorité que Jésus a donnée à ses disciples d'autrefois. En réponse à leurs prières, Jean-Baptiste apparaît et pose les mains sur leur tête pour leur conférer l’autorité dont ils ont besoin pour se baptiser mutuellement. « Pensez un instant », explique plus tard Cowdery, à son ami W. W. Phelps, « à la joie qui emplit notre cœur et avec quelle surprise, nous dûmes nous agenouiller [...] quand nous reçûmes, de sa main, la sainte prêtrise. » [1]

Mais le rétablissement de l’autorité de la prêtrise ne s’accompagne pas immédiatement du rétablissement de l’organisation de la prêtrise. Les détenteurs de la prêtrise, individuellement, peuvent accomplir des ordonnances, mais comment doivent-ils travailler de concert à l’œuvre du Seigneur ?

Direction par conférences

Dans les années 1830, beaucoup d’Églises de l’État de New York traitent leurs affaires par des conférences trimestrielles de leurs anciens. L’Église rétablie suit cette pratique familière au cours de sa première année d’existence. Après l’organisation de l’Église au mois d’avril, les anciens se réunissent en juin et en septembre pour rendre compte de sa progression et pour régler des affaires. Ce système de conférences trimestrielles est mentionné dans les Articles et Alliances (maintenant D&A 20) lors de son enregistrement dans la version manuscrite du livre des révélations de l’Église. [2]

Mais, en 1831, il devient de plus en plus évident que les conférences de l’Église doivent être plus que des réunions de routine. Au cours de la première conférence de l’année, est reçue une révélation (maintenant D&A 38) qui présente des projets et des objectifs que l’Église doit réaliser. Bientôt le nombre de conférences que l’on tient pour maintenir le rythme de l’œuvre du Seigneur s’accroît considérablement : d’août à décembre 1831, il y a des procès-verbaux pour vingt-six conférences, soit en moyenne plus d’une conférence par semaine.

Lors d’une de ces conférences, le prophète souligne la nécessité de dépasser les modèles connus et « d’appréhender la manière ancienne de diriger les réunions selon qu’elles étaient dirigés par le Saint-Esprit » [3]. Les diverses questions de planification et de discipline auxquelles fait face la jeune Église requièrent efforts et inspiration communs. Mais, lorsqu’il y a beaucoup d’affaires à régler au cours d’une conférence de tous les anciens, qui doit en avoir la charge ?

Le système des conseils

Une révélation du 11 novembre 1831 (maintenant D&A 107:60-100) permet aux saints de comprendre comment utiliser la puissance de l’inspiration commune en répartissant les problèmes complexes de l’administration de l’Église. Certains types de cas sont attribués à l’évêque, qui à son tour peut appeler des conseillers pour l’aider dans ses devoirs. Le président de la Haute Prêtrise doit examiner les problèmes les plus difficiles, aidé en cela par douze grands prêtres comme conseillers. Les présidents de collège des anciens, des prêtres, des instructeurs et des diacres doivent aussi être appelés pour « siéger en conseil » avec leur groupe.

Mais, l'ajout au système connu de conférences d'un nouveau système de conseils se révèle être un processus graduel. Le président de chaque groupe n’est pas choisi tout de suite et les greffiers ne font pas toujours la distinction entre conférence et conseil. En juillet 1832, les membres du Missouri « décident du mode et de la manière de gérer l’Église du Christ » comme cela est indiqué dans la révélation de novembre : « Prendre effet dès maintenant » [4], mais ne choisissent pas de président des anciens avant septembre [5]. Et, bien qu’il soit soutenu comme président de la Haute Prêtrise et qu’il ait choisi deux conseillers, Joseph Smith doit réunir des grands prêtres disponibles pour siéger dans un grand conseil de présidence au grand complet chaque fois que le besoin s’en fait sentir. [6]

Le comportement des participants aux réunions pose aussi des problèmes. Apparemment, certains chuchotent entre eux, s'agitent de manière visible ou même partent en plein milieu de la session du conseil. Il est aussi difficile de rechercher la volonté du Seigneur du fait des préjugés et des faiblesses. [7]

Joseph Smith assume la responsabilité de ces défauts partagés. En février 1834, il déclare au cours d’une réunion : « Je n’ai jamais exposé, auparavant, dans son ensemble, devant un conseil, l’ordre selon lequel celui-ci doit être dirigé, ce qui l’a peut-être privé de quelques, voire de nombreuses bénédictions. » [8] Il essaie ensuite de « montrer l’ordre des conseils dans les temps anciens tel qu’on le lui a montré en vision ». La vision du prophète d’un conseil présidé à Jérusalem par l’apôtre Pierre et deux conseillers, est devenu un modèle pour l’organisation du premier grand conseil normal [9], lequel à son tour devait servir de modèle pour les autres conseils dans toute l’Église. Des procès-verbaux précisant certaines fonctions importantes du conseil tel que le droit de l’accusé d’avoir la moitié du conseil comme défenseurs, ont été plus tard intégrés au canon des Écritures dans D&A 102:15. [10]

Avant que le grand conseil juge le premier cas, Joseph Smith bénit ses deux conseillers. Ensuite, deux pères — Joseph Smith, père et John Johnson, bénissent leur fils [11]. De même que les conférences existaient conjointement avec le système des conseils en cours d'établissement, de même l’organisation administrative de la prêtrise dans l’Église allait coexister avec la prêtrise centrée sur la famille.

Les collèges

Une semaine après que le grand conseil de Kirtland a été organisé, Parley P. Pratt et Lyman Wight arrivent du Missouri pour demander des instructions, de la part des saints qui ont été chassés de chez eux [12]. En réponse à leur visite, Joseph Smith et le grand conseil prévoient une expédition pour les aider.

Pendant que Joseph Smith et le grand conseil rassemblent des hommes et des fonds dans les branches de l’Église dans l’est pour ce qui allait être connu comme le camp de Sion et qu’ils se rendent de l’Ohio au Missouri, Joseph Smith passe beaucoup de temps dans les petites branches de l’Église. Le système des conseils aide à répartir les problèmes sur le temps des détenteurs de la prêtrise dans les centres de l’Église, mais on avait fait moins d’efforts pour organiser la prêtrise au plan physique, pour offrir une uniformité entre les deux principaux centres de l’Église ou pour répondre aux besoins des branches plus éloignées. Besoin de révélations supplémentaires.

Au Missouri, où beaucoup de membres de l’Église sont regroupés près de l’emplacement prévu pour Sion, on a organisé un autre grand conseil selon le modèle du premier. Joseph Smith bénit une nouvelle fois le président du conseil et ses deux conseillers, mais cette fois ce sont deux autres pères, Peter Whitmer et Joseph Knight , qui bénissent leurs fils [13]. Mais que doit-on faire pour les petites branches de l’Église ? De retour du Missouri après le camp de Sion, on crée deux nouveaux groupes de la prêtrise : les douze apôtres, dont le devoir sera d’agir comme « grand conseil président voyageur » pour les branches de l’Église, et les soixante-dix, qui aideront les Douze [14]. Outre servir les branches existantes de l’Église, les Douze et les soixante-dix doivent prêcher l’Évangile dans le monde entier et organiser de nouvelles branches

Au printemps de 1835, les douze apôtres nouvellement appelés sont envoyés en mission dans l’est pour « régir » les branches de l’Église [15]. Avant leur départ, Joseph Smith leur donne des instructions détaillées sur l’organisation de la prêtrise, que l’on trouve maintenant dans D&A 107. Ces instructions données au Collège des douze apôtres précisent les relations au sein de la prêtrise. Elles mettent en lumière l’histoire et le rôle des ordres de la Prêtrise de Melchizédek et d’Aaron. Elles présentent le concept du « collège » pour expliciter les fonctions uniques et l’autorité de la Première Présidence, celles des douze apôtres, celles des soixante-dix et celles des grands conseils qui se chevauchent. On nomme aussi des patriarches (que l’on appelle toujours « ministres évangéliques ») pour perpétuer l’ordre familial de la prêtrise en parallèle avec celui de l’ordre administratif.

Soutien de la nouvelle organisation

Au printemps et à l’été de 1835, quatre sections sur l’organisation de la prêtrise sont collectées et placées au début des nouvelles Doctrine et Alliances, juste après la préface révélée. La première se trouve être les Articles et Alliances de l’Église (maintenant D&A 20). Ensuite vient un nouveau texte tiré des instructions dispensées aux Douze, qui a été regroupé en une seule section (maintenant D&A 107) avec une version mise à jour de la révélation de novembre 1831 sur les conseils de la prêtrise. En troisième, on trouve une révélation qui contient le serment et l’alliance de la prêtrise (maintenant D&A 84). Puis vient le procès-verbal de la première organisation du grand conseil, mis à jour avec une référence qui éclaire le rôle du Collège des douze apôtres. Ensemble, ces sections servent comme une sorte de manuel pour administrer l’Église.

Le 17 août 1835, les membres de l’Église approuvent officiellement les Doctrine et Alliances, en acceptant cette organisation révélée de la prêtrise [16]. Au cours des sept mois suivants, ils prennent des dispositions pour pourvoir des offices afin que les collèges de la prêtrise puissent être complètement organisés pour être proposés au soutien des membres lors de la consécration du Temple de Kirtland.

NOTES

[1] Cowdery, Oliver, « Dear Brother », Messenger and Advocate, octobre 1834, 15-16.

[2] Revelation Book 1, vol. R-1, 83, Joseph Smith Papers.

[3] Minutes, 11 Oct 1831, Minute Book 2, JSP.

[4] Minutes, 3 juillet 1832, Minute Book 2, JSP.

[5] Minutes, 15 sept 1832, Minute Book 2, JSP.

[6] Voir, for example, Minutes, 21 Juin 1833, Minute Book 1, JSP.

[7] Minutes, 12 février 1834, Minute Book 1, JSP.

[8] Minutes, 12 février 1834, Minute Book 1, JSP.

[9] Minutes, 17 février 1834, Minute Book 1, JSP.

[10] Ces minutes sont à l’origine de la session du conseil du 17 février 1834, mais Joseph Smith et le grand conseil les ont révisées avant leur canonisation.

[11] Minutes, 19 février 1834, Minute Book 1, JSP.

[12] Minutes, 24 février 1834, Minute Book 1, JSP.

[13] Minutes, 3 juillet 1834, Minute Book 2, JSP.

[14] 1835 D&A Sec. iii

[15] Minutes, 12 mars 1835, Record of the Twelve, JSP.

[16] Minutes, 17 août 1835, JSP.