L'existence prémortelle
 
 
John Morgan (1842-1894) 

Membre des soixante-dix de 1875 à 1884
Membre de la Présidence des soixante-dix de 1884 à 1894
 
 
 
   
À Job, un des anciens écrivains de la Bible, le Seigneur a dit : « Qui est celui qui obscurcit mes desseins par des discours sans intelligence ? Ceins tes reins comme un vaillant homme ; je t'interrogerai, et tu m'instruiras. Où étais-tu quand je fondais la terre ? . . . Alors que les étoiles du matin éclataient en chants d'allégresse, et que tous les fils de Dieu poussaient des cris de joie ? » (Job 38:2-4,7).
 
Job devait certainement se trouver quelque part quand Dieu fonda la terre, sinon pourquoi cette question ?
 
Les mots : « Quand tous les fils de Dieu poussaient des cris de joie », avaient sans doute plus de signification qu'on ne peut le supposer de prime abord. Le lecteur demande : « Qui étaient ces fils de Dieu ? » Luc, en donnant la généalogie de la famille humaine, donne l'information nécessaire à ce sujet : « Fils d'Énos, fils de Seth, fils d'Adam, FILS DE DIEU » (Luc 3:38).
 
Mais prenons un autre texte. Un des écrivains anciens dit : « Avant que la poussière retourne à la terre, comme elle y était, et que l'esprit retourne à Dieu qui l'a donné » (Ecc. 12:9).
 
Comment nous serait-il possible de retourner en un endroit, en un point, en une localité, que nous n'aurions jamais visités ? Comment pourrions-nous retourner à Dieu, si nous n'avions pas déjà été en sa présence ? La conclusion logique est inévitable : pour nous permettre de retourner à lui, il faut que nous ayons déjà goûté sa présence, chose qui a dû se passer dans un état prémortel, avant que nous n'ayons reçu ce corps de chair et d'os.
 
En outre, nous voyons que les apôtres doivent avoir eu une certaine conception de la vie prémortelle à en juger par la question qu'ils posèrent à Jésus : « Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu'il soit né aveugle ? » (Jean 9:2). Il est évident que la question qui se posait à l'esprit des apôtres n'était pas de savoir si un homme pouvait pécher avant son existence dans la chair, mais c'était de savoir si cet homme en particulier avait péché ou non. Paul, dans son épître aux Hébreux, dit : « D'ailleurs, puisque nos pères selon la chair nous ont châtiés, et que nous les avons respectés, ne devons-nous pas à bien plus forte raison nous soumettre au Père des esprits, pour avoir la vie ? » (Héb. 12:9). Nous sommes ici éclairés sur le point de savoir qui étaient les fils de Dieu qui poussaient des cris de joie, au commencement. Nous apprenons aussi la raison pour laquelle nous nous adressons à lui comme à « notre Père qui es aux cieux » (Matt. 6:9) ; c'est pour le distinguer du père de notre tabernacle terrestre. En d'autres termes, il est « le Père des esprits », dans le même sens que notre père terrestre est le père de notre corps de chair et d'os. 
 
La nature des esprits
 
Lorsque la mort survient, nous enterrons le corps terrestre, qui se décompose et se mêle aux éléments qui entourent le lieu où il a été déposé ; mais qu'advient-il de l'esprit qui « retourne à Dieu qui l'a donné » ?
 
Quand Jésus apparut à ses disciples après sa résurrection, ils furent « saisis de frayeur et d'épouvante, ils croyaient voir un esprit ».
 
Mais il les reprit, disant : « Touchez- moi et voyez : un esprit n'a ni chair ni os, comme vous voyez que j'ai » (Luc 24:36-43).
 
Par ces mots, nous pouvons comprendre que l'homme, lorsqu'il existait à l'état d'esprit, ne possédait ni chair ni os, mais que néanmoins, il existait avec la forme exacte qu'il possède maintenant. Il avait des yeux pour voir, des oreilles pour entendre et beaucoup d'autres facultés dont l'homme est doué ici-bas. Il possédait aussi, sans aucun doute, une intelligence et tout ce qui ennoblit l'homme. Il avait la faculté d'aller d'un lieu à l'autre, d'accroître ses connaissances et d'accomplir certains devoirs qui lui étaient dévolus dans cette sphère d'action.

Un esprit non incarné est un esprit qui n'a pas encore pris un corps. Un esprit incarné est un esprit qui demeure dans la chair. Un esprit désincarné est un esprit qui a passé ce stade de l'existence et laissé son corps reposer dans une tombe, pour être finalement repris et uni de nouveau à l'esprit afin qu'esprit et corps ne soient plus jamais séparés.
 
La préordination
 
Le Seigneur a dit à Jérémie : « Avant que je t'eusse formé dans le ventre de ta mère, je te connaissais, et avant que tu fusses sorti de son sein, je t'avais consacré, je t'avais établi prophète des nations » (Jér. 1:5).
 
Ici, nous avons la parole certaine du Seigneur, s'adressant à un des enfants des hommes qui n'était qu'un homme parmi les autres. Dans ce cas particulier, il nous est dévoilé que, pour de bonnes et suffisantes raisons, notre Père commun dans les cieux avait jugé bon d'ordonner un de ses enfants à un certain office avant de l'envoyer sur la terre.
 
Ayant ainsi gagné la confiance de son Père, tandis qu'il se trouvait dans son premier état ou état prémortel, il fut ordonné à un haut et saint appel avant sa venue sur la terre. Nous apprenons par les saintes Écritures que cette confiance ne fut pas mal placée.
 
Nous apprenons qu'il remplit sa mission avec honneur et qu'il se montra digne de la confiance mise en lui, sans dévier ni s'écarter d'un cheveu de la ligne du devoir, quoiqu'il eût rencontré beaucoup d'obstacles qui auraient découragé un coeur moins vaillant.
 
Le lecteur voudra bien veiller à ne pas confondre, dans le cas de Jérémie, le principe de la préordination avec celui de la prédestination, car il y aune grande différence entre les deux. Un homme peut être préordonné, mis à part ou recevoir le commandement de faire un certain travail ; toutefois, il conserve son libre arbitre dans l'affaire et il peut choisir d'accomplir ou non le devoir qui lui a été enjoint. S'il était prédestiné à accomplir un certain travail, il n'aurait d'autre alternative que d'exécuter ce travail.
 
N'ayant aucun choix, il n'aurait pas la responsabilité de ses propres actions, ne les contrôlerait pas, mais serait contrôlé par la puissance qui l'a prédestiné.
 
Bien que Jérémie fût préordonné pour être un prophète aux nations, les Écritures ne disent pas qu'il fut prédestiné à remplir l'office de prophète. 
 
L'existence prémortelle du Christ
 
Le principe de l'existence prémortelle est illustré clairement dans la vie de notre Sauveur, qui parla ainsi au peuple : « Et si vous voyez le Fils de l'homme monter où il était auparavant ? … » (Jean 6:62). Et encore : « Personne n'est monté au ciel, si ce n'est celui qui est descendu du ciel » (Jean 3:13).
 
Avec toutes les apparences humaines, Jésus ressemblait beaucoup aux autres enfants de notre Père commun. Si forte était cette ressemblance que ceux qui l'entouraient ne pouvaient voir aucune différence entre lui et un homme ordinaire. Ils se demandaient l'un l'autre : « N'est-ce pas le fils du charpentier ? N'est-ce pas Marie qui est sa mère ? Jacques, Joseph, Simon et Jude, ne sont-ils pas ses frères ? » (Matt. 13:55).
 
Posons-nous la question : « Est-il si difficile de comprendre notre propre vie prémortelle quand celle de Jésus est si clairement enseignée ainsi que celle d'un grand nombre des personnages bibliques dont nous avons parlé ? » Le grand apôtre Paul, parlant de lui-même dit : « l'espérance de la vie éternelle promise avant le commencement du monde par le Dieu qui ne ment point » (Tite 1:2 ; traduction littérale de la version du roi Jacques).
 
Voici la vie éternelle, qui a été promise à Paul, « promise avant le commencement du monde » à condition qu'il obéisse, comme il avait été dit à Caïn jadis. « Certainement, si tu agis bien, tu relèveras ton visage » (Gen. 4:7).
 
Cependant, malgré cette promesse, Paul était dans l'obligation d'accomplir certains devoirs pour lui permettre de réclamer la promesse faite. Après avoir été frappé de cécité sur le chemin de Damas, et avoir entendu la voix du Rédempteur ressuscité, il lui fut dit : « Lève-toi, entre dans la ville, et on te dira ce que tu dois faire » (Actes 9:6).
 
Après qu'il eût jeûné et prié, un nommé Ananias alla lui rendre visite au bout de trois jours. Dans une vision, le Seigneur lui avait commandé d'aller voir Paul ; en outre il lui avait dit qu'il était un « instrument choisi » ou, en d'autres termes, c'était quelqu'un à qui le Seigneur avait fait des promesses « avant le commencement du monde » et qui avait une mission à accomplir « devant les nations, devant les rois, et devant les fils d'Israël » (Actes 9:15).
 
La question d'Ananias fut : « Et maintenant, que tardes-tu ? Lève-toi, sois baptisé, et lavé de tes péchés, en invoquant le nom du Seigneur » (Actes 22:16).
 
Nous n'avons présenté à la réflexion du lecteur que quelques preuves bibliques de la préexistence de l'homme, choisies parmi un grand nombre. Nous considérons toutefois qu'un nombre suffisant en a été présenté pour pouvoir conclure que la proclamation de la croyance des saints des derniers jours en ce principe est fondée sur les saintes Écritures. Leurs idées ne font que coïncider avec celles des prophètes et des serviteurs de Dieu qui ont fait allusion à ce sujet dans tous les âges du monde.
 
(Source : Plan of Salvation (1881), édité sous forme de brochure en anglais et en français jusqu'au milieu des années 1980)