L’histoire de l'Église en Polynésie française



Yves Perrin


Papeete, Tahiti, 1982





PRÉFACE

Aucune reconstitution historique aussi fidèle qu’elle soit ne peut rendre à chacun des participants l’hommage qui lui est dû. L’abrégé de l’histoire de l’Église mormone en Polynésie Française qui suit n’échappe malheureusement pas à cette règle. Il est donc nécessaire d’exprimer des remerciements sincères à certaines catégories de participants dans une ou plusieurs desquelles tous ceux qui ont œuvré à l’agrandissement du royaume dans cette partie de la vigne pourront s’identifier.

Le peuple tahitien : Les nombreuses qualités du peuple Tahitien font que ceux qui sont nés sur cette terre bénie peuvent être fiers de leur héritage et que ceux qui y sont venus de l’extérieur restent à jamais marqués par leurs expériences. Les pages qui suivent montrent que le Seigneur n’a pas oublié ses enfants vivant à Tahiti. Il avait promis par l’intermédiaire du prophète Néphi : « ne savez-vous pas que moi, le Seigneur votre Dieu, j’ai créé tous les hommes et que je me souviens de ceux qui sont sur les îles de la mer… » (2 Néphi 29 :7)

Les acteurs : C’est aux nombreux membres, dirigeants et missionnaires qui ont laborieusement travaillé dans cette région du monde que cet abrégé historique est particulièrement dédié. Ceux dont les noms ne figurent pas dans les pages qui suivent auront souvent eu une influence, par leurs témoignages et leurs sacrifices, aussi profonde que ceux qui figurent dans cet ouvrage.

Les chroniqueurs : Cet abrégé historique a été réalisé grâce à ceux qui ont patiemment compilé les rapports historiques de la Mission et du pieu ainsi qu’aux dirigeants qui ont écrit leur Journal personnel. Il faut également remercier les auteurs qui suivent pour leurs ouvrages : James S. Brown : Life of a Pioneer ; S. George Ellsworth : Zion in Paradise ; Bengt Danielson pour son article sur les mormons dans le Mémorial Polynésien – Tome 2 desquels se sont inspirés les compilateurs.

Les compilateurs : Des remerciements sincères doivent être adressés au Système éducatif de l’Église et à son représentant en Polynésie Française, Jean A. Tefan, pour les encouragements et le soutien fournis. Un remerciement tout particulier doit être exprimé à Carolyn Bonnet et Anne-Marie Ruffier-Meray pour leur patient travail de recherche dans les documents originaux ainsi que pour leur travail de compilation et traduction. Leur travail a été capital dans la finition de ce document dans les délais fixés. Un grand merci doit également être adressé à Leila Hapairai pour la composition graphique de la couverture, à Photolux pour m’avoir permis d’utiliser certaines photos et aux secrétaires de l’école mormone pour leur aide précieuse. Je dois préciser que malgré mes recherches, je n’ai pas pu trouver des photos des trois derniers présidents de Mission avec leurs missionnaires et que celles-ci manquent malheureusement à la fin de cet ouvrage.

Il est nécessaire de souligner que de nombreuses manifestations du pouvoir de la prêtrise n’ont pas été retenues dans cet ouvrage et que celles qui ont été gardées sont destinées à permettre à chacun de mettre en pratique l’exhortation d’Alma : « Et maintenant, mes frères bien-aimés, je désire ... que vous viviez en rendant grâces, chaque jour, pour les miséricordes et les bénédictions qu’il vous accorde. » (Alma 34 :37-38)

Yves Perrin, Papeete, Tahiti, juin 1982


L’ÉVÈNEMENT PAR LE TEXTE

Tout commence le 11 mai 1843 à Nauvoo, lorsque Joseph Smith entouré du Collège des douze apôtres décide d'envoyer Addison Pratt, Knowlton F. Hanks, Noah Rogers et Benjamin F. Grouard en mission à plein temps aux îles Sandwich (Hawaii).

Noah Rogers est le plus âgé et possède une solide expérience dans les affaires de l'Église : il est donc désigné comme chef du petit groupe. Knowlton F. Hanks, qui est le seul à ne pas être marié, souffre de tuberculose et l'on espère que ce voyage l'aidera à se rétablir.

Quant à Addison Pratt et Benjamin F. Grouard, ils s'intègrent tout naturellement dans une telle aventure car tous les deux sont d'anciens marins et connaissent déjà le Pacifique. Le premier en 1822 a même commandé un navire aux îles Hawaii et a vécu six mois à Oahu où il a pu apprendre la langue locale. Le second est un excellent matelot et un remarquable mécanicien puisqu'il a participé à la construction du premier cuirassé des États-Unis.

Les futurs missionnaires quittent Nauvoo le 1er juin 1843 et s'embarquent à New Bedfort le 9 octobre de la même année sur le baleinier « Timoleon », à destination des îles de la Société, car il n'y a pas, semble-t-il, de bateau en partance pour Hawaii.

Malheureusement après un mois de mer, Elder Hanks meurt et son corps est immergé. Le reste du voyage s'effectue sans problème, mais il faut sept mois au « Timoleon » pour arriver en Polynésie, plus exactement à Tubuai, où il jette l'ancre le 30 avril 1844.

Dès que les natifs apprennent la présence de missionnaires à bord, ils réclament avec insistance qu'au moins l'un d'entre eux demeure dans l'île. Addison Pratt qui est le moins dépaysé par les habitudes et la langue locale se porte volontaire, désireux de répondre « à la gentillesse, au sens de l'hospitalité et au besoin de religion manifesté par les habitants. »

Le « Timoleon » quitte Tubuai le 9 mai et entre dans le port de Papeete le 15 avec à son bord les Elders Rogers et Grouard. Les débuts de l'Église à Tahiti sont difficiles et peu de personnes assistent aux réunions tenues par les 2 missionnaires. Au début du mois d'octobre Elder Noah Rogers part pour Huahine où il restera jusqu'au début du mois de janvier 1845. En avril, c'est au tour d'Elder Grouard de quitter Tahiti et le 23avril 1845, il embarque à Tahiti pour l'île de Anaa ou île de la Chaîne, située à environ deux cents miles à l'est de Tahiti. Il écrit : « Nous avions beaucoup entendu parler d'une île, appelée île de la Chaîne où Anaa, dans l'archipel des Tuamotu's, et située à environ deux cents miles à l'est de Tahiti, mais ces récits étaient généralement si défavorables que nous n'avions, jusqu'à maintenant, aucune envie de nous y rendre. On nous l'avait décrite comme une terre très basse à peine au-dessus du niveau de la mer, ne produisant rien si ce n'est des noix de coco, et peuplée d'habitants sauvages, vindicatifs et sans lois. En un mot, on nous avait prévenus que nos vies ne vaudraient pas chères au milieu de ces gens-là. Et pourtant nous n'avons accordé aucun crédit à ces avertissements puisque la volonté de Dieu était qu'au moins l'un d'entre nous aille dans cette île. »

L'accueil des natifs est chaleureux et Elder Grouard entreprend une œuvre merveilleuse à Anaa. Cinq mois seulement après son arrivée, il préside une réunion générale de tous les fidèles de Anaa dans le district de Matahora. Les 620 membres de Anaa sont alors répartis en 6 branches. Après cette réunion, Elder Grouard sent le poids de la solitude et le besoin d'avoir de l'aide pour continuer le travail commencé. Étant donné que Noah Rogers est déjà rentré en Amérique en juillet 1845 à bord du « Free Brothers », il décide de contacter Elder Pratt qui se trouve à Tubuai. Après avoir construit sa propre pirogue avec l'aide des membres de l'Église, il quitte Anaa le 14 octobre pour n'arriver à Tahiti que vers la fin novembre, après un naufrage près de l'île de Mehetia et un voyage tourmenté. Le 20 décembre Elder Grouard arrive à Tahiti. Les retrouvailles sont chaleureuses. Les deux missionnaires décident de rester quelque temps à Tahiti et ordonnent aussi un jeune frère, déjà baptisé par Elder Grouard, afin qu'il surveille et anime la petite communauté.

Pendant ce temps, les missionnaires protestants ont déposé une plainte contre Elder Grouard afin d'empêcher son retour à Anaa parce que, disent-ils, lors de son séjour dans cette île, il a illégalement utilisé leurs maisons de prières. Mais comme ces maisons ont été construites par les natifs et qu'ils en sont les propriétaires, le gouverneur donne raison à Elder Grouard. Il semble d'ailleurs, qu'à cette époque, les autorités françaises préfèrent les missionnaires
américains aux anglais avec qui elles n'arrêtent pas d'avoir de gros problèmes. Le consul américain, M. Chapman est aussi favorable aux Elders et les natifs offrent même à Elder Grouard la place de prêcheur dans deux temples réservés aux missionnaires anglais à la Pointe Vénus et à Tautira.

À la fin de l'année 1845, Elders Pratt et Grouard travaillent donc ensemble sur l'île de Tahiti dans des conditions supportables et avec un bon espoir de succès, tant chez les natifs que chez les blancs. Les baptêmes déjà mentionnés n'ont pas manqué de susciter une grande agitation chez les missionnaires anglais à Tahiti, qui aussitôt commencent à répandre toutes sortes de mensonges sur les mormons et à accuser les Elders devant le gouverneur français de prêcher de fausses doctrines, etc ... Mais le gouverneur, après avoir examiné le Livre de Mormon ainsi que d'autres brochures, choisit d'ignorer ces accusations.

Le 13 janvier 1846, après avoir mis de l'ordre dans les affaires de l'Église à Tahiti, Elders Pratt et Grouard s'embarquent pour Anaa sur une pirogue double locale. Mais une tempête menace et après quelques miles le long de la côte, les Elders sont obligés de débarquer à la Pointe Vénus et de retourner à Papeete. Là, les deux hommes obtiennent un passage sur le navire français « Mary » en route pour une expédition perlière dans les Tuamotu. Le prix de leur billet, 1.000 noix de coco par personne, sera payé avec bonne grâce par les habitants de Anaa à leur arrivée. Le 27 janvier, ils s'embarquent donc à nouveau pour Anaa.

Après un bref séjour à Anaa, les deux2 missionnaires reviennent à Tahiti d'où Elder Pratt repart vers l'Amérique en mars 1847 et Elder Grouard vers Tubuai. Rappelé en mission par Brigham Young, Elder Pratt arrive à Tahiti avec un compagnon missionnaire, Elder James S. Brown, le 24 mai 1850. Quelques semaines après leur arrivée, ils rencontrent les Elders Grouard et Thomas Whittaker qui ont été déportés de Tubuai vers Tahiti où Elder Whittaker est retenu prisonnier. La déportation et l'emprisonnement sont basés sur des accusations mensongères qui attestent que les 2 missionnaires ont utilisé un langage séditieux. Devant la faiblesse des accusations, le gouverneur de Tahiti, Mr Bonard relâche les Elders et leur accorde un permis de séjour après avoir perçu la somme de trois francs et obligé les missionnaires à signer un accord de n'enseigner rien qui porte atteinte au gouvernement français. Après ces mois de tracasseries administratives, Elder Pratt, président de la Mission, doit se rendre à Tubuai fin janvier 1851, où l'attendent sa femme, Louisa Barnes Pratt, ses quatre enfants, sa sœur et son mari ainsi que six missionnaires arrivés d'Amérique, après 36 jours de voyage, le 21 octobre 1850.

Pendant ce temps, Elder James S. Brown prêche l'Évangile dans l'île lointaine de Raivavae. Les habitants de Raivavae sont querelleurs et superstitieux et observent des coutumes païennes. Quelques habitants de l'île écoutent Elder Brown et assistent aux réunions du dimanche, mais la majorité a trouvé l'annonce de l'Évangile de plus en plus insupportable et un jour, ils ont décidé de tuer Elder Brown. Voici son propre récit de cette fameuse journée du 6 avril 1852 :

« Toute la population se rassemble à Tatahi et organise une fête. Les salves de mousquets sont constantes et il est évident que la guerre se prépare. À une heure de l'après-midi, on m'appelle pour comparaître devant le conseil et écouter la sentence. Deux hommes apparaissent, chargés, disent- ils, de m'escorter jusqu'au conseil et avec l'ordre, si je refuse, de me traîner comme un chien. Je n'ai pas d'autre choix que d'obéir et je les suis, accompagné de quelques frères et sœurs jusqu'au lieu de l'assemblée où nous sommes accueillis par des cris sauvages et des gestes menaçants. Nous sommes 28 membres de l'Église en face de presque 200 adversaires. En quelques minutes, je suis condamné à être brûlé vif sur un grand feu de bois que l'on a dressé tout près de là. Déjà les bourreaux, de quinze à vingt, se préparent pour l'exécution. »
Tabate, le chef responsable de cette affaire, s'avance alors devant moi et me montrant le tas de bois, déclare : « Regarde ce feu qui doit brûler la chair de tes os. Nous avons décidé que tu dois mourir et qu'ainsi, nous allions débarrasser notre pays des mormons. »

« Je suis, en effet, accusé d'avoir prêché, que Dieu est une entité vivante et d'avoir encouragé les saints à prier en son nom. À cet instant critique, je demande à
Dieu si j'ai perdu la protection de la bénédiction que ses serviteurs m'avaient donnée. La réponse s'impose en un éclair : « Non, tu n'as rien perdu ! » C'est pourquoi, avec l'assurance de celui qui ne doute pas et qui se sait protégé, je défie la foule au nom de Dieu d'Israël, les avertissant qu'il a déjà délivré Daniel de la fosse aux lions ainsi que les trois enfants hébreux de la fournaise ardente. À ces mots et plus vite que je ne peux l'écrire, l'assemblée est plongée dans la plus grande confusion, des bagarres éclatent de tous côtés, et le petit groupe de saints et moi-même, nous retournons en paix à la maison. Quant aux éléments les plus agressifs, ils se dispersent dans leurs foyers et semblent très calmes et soumis.

« Deux mois plus tard, un des vieux notables me racontera, que s'ils ne m'ont pas brûlé ce jour-là, c'est qu'une lumière éclatante ou une colonne de feu est apparue au-dessus de ma tête au moment où je les provoquai. Devant ce miracle, les membres du conseil s'étaient souvenus d'avoir lu dans la Bible que le prophète Elie avait fait appel au feu du ciel pour consumer les capitaines et les soldats qui le menaçaient. Quant à la confusion qui s'ensuivit, elle était due au fait que les bourreaux et la majorité des gens n'avaient pas remarqué cette manifestation du Ciel et qu'ils ne comprenaient pas le changement d'attitude du conseil. »

Elder Brown fait une courte escale à Rapa où il peut observer que le ricin et les melons poussent en abondance dans l'île. On lui indique que ces plantes viennent d'un pays lointain situé à l'Est avec de beaux arbres, de grands lacs et des rivières longues et magnifiques, mais qu'elles ont été importées, il y a plusieurs générations. Il quitte Rapa le 27 octobre. Le 30, une tempête arrache toutes les voiles, et le 10 novembre, la goélette à son arrivée à Tahiti, est dans un tel état qu'elle ne pourra plus jamais reprendre la mer.

Lorsque Elder Brown quitte la Polynésie au mois de novembre 1852, il est pratiquement le dernier missionnaire mormon en activité dans le Territoire. Les familles Pratt et Grouard avaient quitté la Polynésie le 15 mai 1852 à bord du « Callio ».

Elder Benjamin Grouard avait consacré 8 ans de sa vie à prêcher l'Évangile aux Polynésiens et avait épousé 2 femmes des îles. La première mourut en lui laissant une petite fille de un mois, tandis que sa deuxième épouse, qui quitta la Polynésie avec réticence pour aller en Amérique, lui donna 3 fils.

Elder Sydney Alvarus Hanks dont les derniers efforts missionnaires étaient concentrés dans l'Est des Tuamotu's est le dernier missionnaire à quitter la Polynésie peu après Elder James Brown, fin novembre 1852. Cet exode des missionnaires est en grande partie due à l'application des lois de 1851 et de mars 1852 qui placent les Églises sous le contrôle de l'État. Les pasteurs sont désormais choisis par les chefs et élus à la majorité et un étranger ne peut assumer cette fonction qu'avec l'autorisation du gouverneur. Le travail de missionnaire itinérant devient ainsi presque impossible et les prêtres mormons comme les pasteurs protestants n'ont pas d'autre alternative que celle de partir en espérant des temps meilleurs.

P
rivée de ses missionnaires, la jeune Église mormone meurt dans certaines îles et a beaucoup de mal à survivre dans d'autres. Même dans les bastions de la foi comme Tubuai ou Anaa, les membres sont désorientés. À Anaa par exemple, l'arrivée des prêtres catholiques en mai 1850 où les mormons sont plus de 600 pour une population de 2000 âmes, des querelles éclatent. Ces querelles se transforment en émeute et en révolte en novembre 1852. Dès le 27 septembre, le capitaine Bovis, envoyé par le gouverneur de Papeete, abolit la religion mormone et interdit tous les lieux de culte mormons. La révolte gronde et atteint son paroxysme le 9 novembre 1852 lorsque, au cours d'une bataille, le gendarme Viry est tué par la populace de 17 coups de lance et de massue. La répression est sévère, 5 habitants de Anaa sont pendus et de nombreux membres de l'Église sont déportés dans d'autres îles. Avec le départ des missionnaires et les membres éparpillés sans dirigeants sous un régime très hostile à l'Église, celle-ci semble, en 1852, destinée à s'éteindre en Polynésie française.

Cependant, en 1880, Thomas W. Smith, un missionnaire de l'Église réorganisée de Jésus-Christ des saints des derniers jours arrive dans les îles de la Société. À cette époque, il n'y a plus de missionnaires américains de l'Église Originale travaillant à Tahiti et les autres îles de la Mission depuis près de 30 ans, bien qu'il reste encore quelques branches de l'Église et de nombreux membres fidèles. Beaucoup de membres croient que Mr Smith et ses compagnons missionnaires de l'Église Réorganisée appartiennent à la même Église que les premiers missionnaires de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours et acceptent donc leurs règles et leurs enseignements.

Lorsque Elders Joseph W. Damron et William A. Seegmiller arrivent à Tahiti en provenance de Samoa le 27 janvier 1892, ils trouvent beaucoup de confusion parmi les membres qui ne savent plus qui croire. Pour aider les missionnaires à établir leur identité, la Première Présidence envoie de nouveau à Tahiti, Elder James S. Brown, l'un des anciens missionnaires. De nombreux polynésiens le reconnaissent, et beaucoup, parmi les anciens membres, reviennent dans le troupeau. L'oeuvre missionnaire reprend, les conversions augmentent et de nouvelles branches sont organisées.

Le 24 novembre 1892, parlant de la controverse suscitée à Tubuai autour des églises : appartiennent-elles aux saints des derniers jours ou à l'Église réorganisée ? Elder Brown dit : « Le chef de la Police, se référant aux livres, décide en notre faveur, disant que l'Église Réorganisée n'est pas reconnue. » Nous avons appris que des décisions semblables ont été prises dans l'Archipel des Tuamotu's. Le gouverneur français a souligné, que nous sommes les premiers arrivés, que les églises nous appartiennent, et que nous avons en outre toute la liberté d'enseigner nos doctrines sans aucune interférence. À partir de ce jour, les missionnaires mormons travaillent sans interruption et sans interférence sérieuse, jusqu'au 19 novembre 1940, date à laquelle les missionnaires doivent rentrer aux États-Unis à cause de la Deuxième Guerre mondiale.

En 1899, Daniel T. Miller, David Neff, William H. Chamberlin, et Israël E. Willey commencent à traduire le Livre de Mormon en tahitien. Ce travail terminé, Frank Cutler, Eugène M. Cannon, David Neff et Daniel T. Miller impriment le livre en 1903-1904. Ce livre et la Bible, traduite par les premiers missionnaires de la Société Missionnaire de Londres, sont les seuls ouvrages canoniques édités en tahitien.

Au début du siècle, le président William H. Chamberlin est chargé de la mission, et des missionnaires travaillent dans les districts de Tahiti et dans les îles Tubuai, Bora Bora, Raiatea et Hikueru. Plusieurs missionnaires travaillent aussi à Taiohae, Nukuhiva aux îles Marquises, d'autres sont à Rarotonga dans les îles Cook. Le président Chamberlin est relevé le 1er mars 1900 et Elder Joseph Y. Haight est désigné pour être le nouveau président de mission, recevant son appel le 7 mars 1900.

Pendant qu'Elder Haight est chargé de la mission, les branches continuent à se développer, des brochures sont imprimées et l'Évangile est prêché à tous avec diligence.

Elder Haight dit dans son journal de la mission : « Je peux dire sans réserves que, à ce jour, le porte à porte a été pratiqué dans tous les districts de Tahiti sauf à Mataiea et Papeari, et Elders Mc Grégor et Pratt ont maintenant la responsabilité de faire le tour de ces districts. » Non seulement le message de l'Évangile est donné à Tahiti et dans les branches organisées aux Tuamotu's et Tubuai, mais les missionnaires sont aussi envoyés dans l'île de Mangareva (dans l'Archipel des Gambiers) pour y introduire l'Évangile.

Dans les îles Cook, l'oeuvre missionnaire a été jusque-là limité à l'île de Rarotonga, mais selon les instructions qui lui ont été données, Elder Mervin W. Davis se rend à l'île de Aitutaki, ou, le 19 juillet
1900, il fait une prière pour consacrer l'île à l'enseignement de l'Évangile. Les missionnaires se font de nombreux amis en travaillant aux îles Cook, mais à cause de la très grande influence de la Société Missionnaire de Londres, les gens ont peur d'accepter les nouvelles doctrines qui leur sont enseignées par les missionnaires. La Première Présidence demande alors au président de Mission que toutes les parties de la Mission où les missionnaires ont travaillé un an où plus sans aucun converti soient fermées. De ce fait, en 1903, les missionnaires qui y avaient travaillé pendant 4 ans sans résultat sont rappelés des îles Cook et cette partie de la Mission est fermée.

Elder Heber James Sheffield raconte dans son journal que la débauche est telle à Hikueru à la fin de l'année 1902, qu'au cours d'un discours le 7 décembre : « L'Esprit de prophétie vient en moi, et je prophétise au nom de Jésus-Christ et par l'autorité de la sainte prêtrise, que s'ils ne se repentent pas rapidement, de grandes destructions et afflictions vont s'abattre sur eux. »

Les 14 et 15 janvier 1903, un terrible ouragan avec raz-de-marée s'abat sur l'Archipel des Tuamotu's, balayant tout sur son passage, et faisant de nombreux morts. Elders Herber J. Sheffield, Jr et Joseph E. Allen quittent Hikueru après la tempête sur la première goélette à vapeur et reviennent à Papeete le 24 janvier 1903. Ils ont travaillé à Hikueru pendant la saison des nacres et racontent qu'il y a eu beaucoup de pertes en vies humaines et en biens matériels.

Les missionnaires se sont attachés avec des cordes autour des cocotiers et ont sauvé leur vie de justesse. Elder Sheffield signale : « Nous sommes très faibles à cause de notre situation, n'ayant presque aucun vêtement, et étant restés sans eau et sans nourriture pendant si longtemps, presque trois jours et trois nuits. Nous n'avons plus rien sur nous sauf nos pantalons et quelques fragments de garment. Plus tard, nous retrouvons nos vieux manteaux accrochés à l'arbre pendant la tempête. » Selon une évaluation, sur 1700 polynésiens rassemblés dans les Tuamotu's de l'Est pour la saison des nacres, 515 personnes ont trouvé la mort, 375 à Hikueru, dont environ 100 membres de l'Église sur certaines îles ; très peu d'arbres et pas une maison ne sont restés debout.

Après la tempête, il ne reste que peu d'eau et de vivres à Hikueru, et les efforts des deux missionnaires mormons
pour distiller 250 gallons d'eau par jour, (grâce à un vieux réservoir et à des tuyaux) sauvent toute la population jusqu'à l'arrivée des secours extérieurs.

Lorsque le président Joseph Y. Haight est relevé, Elder Edward S. Hall est nommé responsable de la Mission jusqu'au 28 février 1903 où il reçoit son appel officiel de président de Mission. L'année suivante, l'oeuvre missionnaire est arrêtée aux îles Marquises sur un ordre de la Première Présidence. En effet après des années d'effort, il n'y a toujours aucun converti dans cet archipel où la population est entièrement catholique.

C'est le 9 mars 1905 que le président Hall achète une propriété à Orovini, Papeete, située au coin de la rue « Béa » et de la rue « Dumont d'Urville. » Cette propriété, achetée à Mademoiselle Céline Bonnet, pour la somme de 9000 francs, au nom du président F. Smith de Salt Lake City est un terrain bas et marécageux qui est remblayé pour $ 220. Le président Hall fait alors un court voyage à Salt Lake City pour voir la Première Présidence et planifier les arrangements pour la construction d'une nouvelle église et d'une nouvelle Mission sur ce terrain. Pendant son absence de trois mois et demi, le président Hall se marie et revient à Tahiti avec son épouse et Elder James S. Noall de la Mission. Le président Hall et de nombreux missionnaires commencent les fondations le 8 novembre 1905. Le travail avance rapidement jusqu'au 10 avril 1906, où l'on tient une petite réunion durant laquelle la Maison de la Mission est consacrée.

Dans la soirée du 7 février 1906, une tempête tropicale se lève, et la mer monte jusqu'au matin suivant. L'intérieur de l'île de Tahiti n'est pas très touché, mais le long des rivages, la mer fait de grands ravages. Sur le front de mer, chaque bâtiment s'est effondré et plusieurs ont été emportés par la mer. Le consulat américain est démoli, son toit s'étant aplati sur le sol. Sans le travail de 7 missionnaires, la plupart des registres du consulat auraient été perdus. Les missionnaires, au péril de leur vie, aident à sortir ce qu'ils peuvent du bâtiment. Le consul, Mr Doty, et sa famille sont hébergés à la maison de la Mission jusqu'à ce que d'autres dispositions soient prises pour eux. Les dégâts sont aussi nombreux dans l'archipel des Tuamotu's où beaucoup trouvent la mort (comme cela avait été le cas en 1903). Elder Joseph T. Wilkinson Jr et son épouse arrivent à Tahiti le 7 juin 1905 pour imprimer le journal de la Mission, le « Heheuraa Api ».

C'est en 1907 qu'Elder L. A. Miner et Elder L. A. Harper sont envoyés dans l'archipel des Gambiers pour fermer cette partie de la mission, et vendre la petite église de façon à économiser le loyer. Il n'y avait aucun membre de l'Église parmi les habitants de cet archipel. La petite église avait été construite par les saints de Marokau qui étaient venus là après l'ouragan de 1903, mais étaient depuis rentrés chez eux, aux Tuamotu's. Un nouveau président de Mission, Elder Franck Cutler, arrive à Papeete avec sa famille le 18 août 1907. Un an plus tard, il tombe gravement malade et doit être rapatrié aux États-Unis avec sa famille. Le président William A. Seegmiller le remplace à la tête de la Mission. Celui-ci se rend à Tubuai avec Elder Isaac Hunt pour ramener dans le troupeau certains saints qui se sont éloignés. Les problèmes ne sont résolus qu'en janvier 1911 lorsqu'une lettre du président Joseph F. Smith est lue et acceptée par les saints. Le président Seegmiller a l'honneur de consacrer l'église de Takaroa, le 1er avril 1910.

Le président Franklin J. Fullmer et son épouse arrivent le 23 septembre 1911 pour succéder au président Seegmiller. Durant la présidence du président Fullmer, un essai est fait pour scolariser les membres. Des écoles sont établies à Takaroa et Hikueru avec les missionnaires comme instituteurs. Cependant, cet essai est de courte durée, car le 17 août 1914, le gouverneur des Tuamotu's interdit aux missionnaires d'enseigner dans les écoles quelle que soit l'île. À cette époque, Toae a Maire, un missionnaire polynésien est le premier des saints à faire un voyage aller-retour aux États-Unis. Il quitte Tahiti avec le président Fullmer et sa famille qui rentrent également aux États-Unis. Chaque missionnaire donne 11 dollars pour aider Toae à couvrir ses dépenses de voyage. Le 22 septembre 1914, deux vaisseaux de guerre allemands bombardent la ville de Papeete. Ils réduisent le fort en silence, et font de grands dégâts dans la ville. Cependant, la perte en vies humaines est légère (seulement 2 morts). Toute la population s'est en effet retirée dans les montagnes derrière la ville, et dans les districts avoisinants. La maison de la Mission est touchée par deux obus perdus, mais il n'y a aucun dégât.

À ce moment-là, le journal de la Mission est publié aux États-Unis, et envoyé à la Mission pour être distribué. Quelques articles du journal traitant de la guerre, les autorités gouvernementales pensent qu'il faut cesser la distribution du journal jusqu'après la guerre. Cependant le président Ernest C. Rossiter, qui vient d'arriver à la tête de la Mission, a une entrevue avec le gouverneur, et finalement, la permission de continuer la distribution du journal est obtenue. Peu de temps après son arrivée à Tahiti, le président Ernest C. Rossiter se rend à Takaroa pour régler certains problèmes internes à la branche. Dès son arrivée, il constate que les cocotiers portent peu ou pas de fruits. Les membres de l'Église s'adressent au président Rossiter, disant :
« Le Seigneur ne nous a pas favorisés. Nos cocotiers se flétrissent. Leur feuillaison est molle et les noix tombent sur le sol quand elles sont encore vertes. Les commerçants nous menacent de fermer la plantation si nous ne leur payons pas ce que nous leur devons. Chaque année, quand c'est la saison, nous partons à la pêche aux perles, mais nous en revenons encore plus endettés qu'à notre départ. Comme tu le vois, nous avons grandement besoin de toi, pour sauver ce que nous possédons. » Ce à quoi il répond : « Je vais jeûner et prier pendant 3 jours, et à la fin de cette période, je vous aiderai si le Seigneur me le fait savoir, autrement je rentrerai directement à Papeete. »

Pendant ces trois journées, il examine avec soin leur condition spirituelle et temporelle. Les résultats sont révélateurs et renversants. Ainsi, il découvre qu'ils n'obéissent pas à la parole de Sagesse, ne payent ni dîme, ni offrande de jeûne et n'honorent pas la prêtrise. Le président Rossiter
demande donc aux membres de Takaroa de se repentir. Après avoir jugé de la sincérité de leur repentance, l'Esprit le pousse à les aider. Il revient alors à Tahiti, s'entretient avec le gouverneur et visite le bureau de la firme anglaise de commerce Maxwell et compagnie, et les persuade de lui louer un bateau et des provisions pour 10.000 dollars pour être utilisés pendant la saison de la pêche à la perle. Ceci fait, il retourne à Takaroa à bord de ce grand vaisseau et donne aux indigènes quelques instructions pour embarquer avec leur maison, leurs biens, leurs effets personnels, et leurs animaux. Le bateau ressemble alors plus à l'arche de Noé qu'à un bateau de commerce. Quand l'embarquement est fini, le bateau navigue vers les lieux de plongée, près d'une autre île et là, le président Rossiter demande aux membres une obéissance totale.

Il organise la communauté selon les principes de la loi de consécration, ce qui fait l'admiration du gouverneur des îles lorsqu'il visite ce camp mormon. En fait, l'admiration du gouverneur est telle qu'il défend l'Église contre toutes les plaintes portées par les commerçants qui cherchent à détruire le bon travail des saints. La première saison de pêche permet de récolter 50.000 dollars, permet aux membres de payer une grande partie de leurs dettes. Au retour vers Takaroa, les membres versent des larmes de joie et remercient le Seigneur en voyant que, pendant leur absence, dans la lumière éclatante du matin, le feuillage des cocotiers a changé, passant d'un vert maladif à une couleur profonde, et sur chaque arbre, les noix sont plus abondantes que jamais auparavant. L'expérience est répétée au cours des 2 années suivantes et bientôt toutes les dettes des saints de Takaroa sont payées.

L'église de Marokau est consacrée le 6 avril 1917 par Georges A. Compton en présence de 180 saints, venant de Marokau, Hikueru, Taega, Tauere. L'année suivante, le
8 novembre 1918, une belle église construite à Hikueru pour 6.000 dollars est consacrée par le président Ernest C. Rossiter en présence de 700 saints et 200 visiteurs. Pour le repas qui suit la consécration, on a reçu de Tahiti 7 tonnes de fruits et de légumes, 3 cochons, 8 tortues, une cargaison de noix de coco et une grande quantité de poissons et de pain.

En novembre 1918, une épidémie de la terrible grippe espagnole se déclare et balaye comme du feu, Tahiti et les îles avoisinantes, faisant entre 3.800 et 4.000 morts en un mois. Presque tout le monde est malade en même temps et beaucoup meurt par manque de nourriture et de soins. Les gens meurent si vite qu'il est impossible de les enterrer tous. On creuse donc un trou dans le cimetière. Des camions au toit plat passent chaque jour dans les rues. On charge les corps sur ceux-ci pour les transporter au cimetière. Là on place les cadavres dans la fosse et l'on y verse du goudron chaud. Cette méthode est une précaution sanitaire. Presque devant chaque maison, on peut voir des cadavres à transporter. De nombreuses familles sont entièrement détruites, tandis que beaucoup d'enfants restent orphelins, 5 des 7 missionnaires du bureau de la Mission sont touchés par la maladie, mais se rétablissent rapidement et se portent volontaires pour aider le gouvernement à rassembler les morts et à soutenir les affligés.

Pendant cette épidémie, le président Rossiter décide de démissionner un couple de missionnaires locaux qui a travaillé diligemment pendant 2 ans à Tubuai. Il explique
que dès leur arrivée à Tahiti il apprend que l'Esprit de nos missionnaires a été séduit par la ruse de Satan et qu'ils se sont laissés entraîner hors du droit chemin par quelques membres rebelles, bien que, de chœur, ils soient de bons saints des derniers jours. Leur projet est de venir à Tahiti recevoir leur démission et de retourner peu après à Tubuai pour y organiser leur propre Église, lui devant devenir leur pasteur et être rémunéré.

Cependant peu de temps après leur retour à Tahiti, les missionnaires sont atteints de cette terrible grippe espagnole. En quelques heures, les deux missionnaires gisent morts chez eux. Avant que les anciens creusent leur tombe, leur corps est décomposé et c'est avec beaucoup de difficultés qu'ils sont allongés d'une seule pièce dans leur cercueil. Le président Rossiter parle d'eux en disant que le Seigneur n'a pas oublié leur bon travail missionnaire et qu'il a préféré abréger leur vie mortelle plutôt que de les laisser détruire leur salut éternel sans le savoir.

Les voyages inter insulaires du début du siècle sont souvent périlleux et nombreux sont les missionnaires qui ont dû faire face aux éléments déchaînés pour se rendre sur leur lieu de travail. Le président Rossiter relate une expérience au cours de laquelle il est sur un bateau qui se rend à Takaroa et dont le capitaine, Tahauri, est membre de l'Église. Après avoir été perdu en mer pendant plusieurs jours, le capitaine s'adresse au président de Mission en disant : « Ereneta, le bateau est entre tes mains. Je refuse de m'en occuper plus longtemps. » Le président Rossiter demande alors à tous de se joindre à lui en prière. Après cela il raconte : 

« Bientôt, j'ai eu une vision de l'île de Takaroa. L'île semblait être derrière nous plutôt qu'en face. Je sus alors que le Seigneur avait répondu. J'appelais les marins pour qu'ils tournent le bateau et fissent marche derrière ; pas exactement le même trajet, car il apparaissait que nous avions dépassé l'île de nombreux miles à l'Est, trop loin pour la voir quand nous étions passés. Je dis : 'Nous virerons deux heures à droite et deux heures à gauche, et nous débarquerons sûrement à l'île de Takaroa.' Après plusieurs jours en mer le bateau luttant contre les courants, les passagers et l'équipage débarquent à Takaroa le cœur plein de reconnaissance. »

Le président Rossiter est relevé le 17 juin 1919, mais reste plusieurs mois encore pour terminer la grammaire tahitienne. Cette grammaire a été composée par Mr Franck J. Stimpson, de l'Université de Yale, qui a passé un contrat avec le président Rossiter pour réaliser ce travail.

C'est le 9 avril 1921, qu'Elder David O. McKay et le président Hugh J. Cannon du pieu de Liberty visitent la Mission. Ces frères viennent avec l'intention de rencontrer les saints des Tuamotu's et espèrent être de retour à Papeete à temps pour prendre le bateau pour la Nouvelle-Zélande. Ils sont déçus de ne pas trouver le président Léonidas H. Kennard Jr à la Mission. Il est à Tubuai et à cause du manque de bateau n'a pu revenir à Papeete à temps pour les accueillir. On essaye d'affréter une goélette pour visiter l'archipel des Tuamotu's, mais ceci aussi se révèle impossible. Toutes les personnes concernées arrivent alors à la conclusion que la Mission de Tahiti a grand besoin d'un bateau.

Après avoir passé seulement quelques jours à Tahiti, les autorités en visite continuent leur voyage sur la Nouvelle-Zélande. Lorsque le président Kennard revient de Tubuai, il se rend immédiatement en Nouvelle-Zélande pour contacter Elder McKay selon ses instructions pour discuter des problèmes de la Mission. C'est en 1921 qu'Elder Leroy Mallory organise un orchestre à Takaroa et le 6 avril 1924 que l'École du dimanche de la branche de Papeete a sa première super intendance locale. Émile Huri a Tehua est
soutenu et mis à part comme super intendant avec Tetavahi a Mariteragi et Marcel Bonnet comme conseillers. Avant ce jour, les missionnaires avaient dirigé toutes les réunions.

Quelques problèmes s'élèvent au sujet des propriétés de l'Église à Tubuai pendant les derniers mois de la présidence de F. Kennard, et peu après l'arrivée du président Ole B. Peterson, les portes des églises de Taahueia et Huahine sont clouées par ceux qui cherchent à priver l'Église des propriétés qu'elle possède là-bas. Le président Peterson et Elder George C. Nelson se rendent à Tubuai pour s'informer et utiliser leur influence pour régler le problème. Ils réussissent à trouver une solution momentanée, mais ce ne sera que sous la présidence de Leroy Mallory que les droits de propriété seront clairement donnés à l'Église par l'administration.

Dans les premiers mois de 1925, les missionnaires s'occupent également de l'impression du livre de grammaire et vocabulaire en français, tahitien et anglais, livre qui vient satisfaire les besoins des missionnaires qui doivent apprendre le tahitien. Cette année-là, l'histoire de Joseph Smith est traduite et imprimée en tahitien et cette brochure est une grande aide pour les réunions de prêtrise aussi bien que pour l'oeuvre missionnaire.

Un cyclone d'une intensité inhabituelle balaye les îles de la Société en janvier 1926. Une pluie torrentielle tombe pendant plusieurs jours, accompagnée d'un vent très fort, qui détruit les récoltes, les maisons et les terres. À Tahiti, de nombreux ponts sont emportés, et la route du tour de l'île est impraticable pendant plusieurs semaines. De nombreuses maisons sont emportées par la mer, et un grand nombre de personnes trouvent la mort. Nombre de cocotiers sont arrachés et dépouillés de leur feuillage et la plupart des récoltes de vanille de l'île sont détruites, et sur les îles avoisinantes, les dégâts sont encore plus grands. Sur deux îles, les villages entiers sont rasés, et les habitants forcés de rester sous la pluie jusqu'à ce qu'elle cesse. Pour les dirigeants de la Mission, ce cyclone est plus qu'un simple caprice des éléments. Comme en témoigne le compte-rendu de la Mission : « Les années passées, les habitants des îles ont beaucoup prospéré, et ont négligé d'adorer le Seigneur comme il l'a commandé. Ils se sont tournés vers le monde, commettant toutes sortes de péchés sans penser à l'avenir. »

La première Société d'Amélioration Mutuelle (SAM) est organisée en 1926 par le président Alma G. Burton. Cette organisation qui s'adresse aux jeunes gens et aux jeunes filles est au premier abord mal acceptée par les personnes âgées, mais bientôt, ils participent aux réunions de SAM avec les jeunes. Cette organisation aide les jeunes à rester actifs dans l'Église, ce qui a été difficile jusque-là. Le 26 juin 1927, la branche de Papeete tient sa première conférence. Les saints reçoivent de bonnes instructions et ils rendent témoignage de la véracité de l'œuvre des Derniers Jours. L'Esprit du Seigneur est très fort.

En 1927 la main du Seigneur se manifeste à Takume, où quelques saints sont rassemblés pour la saison des nacres. Sur cette île, il n'y a pas de bâtiments de l'Église mais puisqu'elle a été choisie comme lieu de la conférence semi annuelle, il faut un endroit correct pour tenir cette réunion. L'opposition rencontrée au début est plutôt décourageante, parce que les Catholiques possèdent les terres et ne permettent pas l'édification d'une maison de réunion temporaire.

Grâce aux prières des saints et des missionnaires, leur cœur est finalement adouci, et l'Église peut réaliser ses plans, recevant souvent de l'aide de la part de ceux qui ont été si opposés au début. Ceux-ci manifestent également un grand changement dans leurs sentiments à l'égard de l'Église pendant les quelques mois où les missionnaires travaillent là. Beaucoup deviennent des amis de l'Église, et il y a même quelques investigateurs qui cherchent la vérité. Jusqu'en 1927, la Mission a été divisée en 3 districts : Tahiti, Tubuai et l'archipel des Tuamotu. En 1927, pour faciliter le travail des dirigeants on réorganise les Tuamotu's en 2 districts, dont les 2 centres sont Takaroa et Hao. Les 4 districts sont appelés respectivement Tahiti, Tubuai, Tuamotu's du Nord et Tuamotu's de l'Est. Le district des Tuamotu's de l'Est comprend les branches suivantes : Hikueru, Hao, Marokau, Tauere, Takapoto, Fakarava, Faaite, Katiu, Kauehi et Raraka.

De nombreux rapports de l'année 1928 montrent l'aide du Seigneur dans la Mission. Elders Larsen et Pace rapportent un incident où le Seigneur a protégé ses serviteurs. Au cours d'un voyage d'une île des Tuamotu's à l'autre, sur un petit voilier, ils sont pris dans un orage dans lequel le destin semble les avoir guidés pour les détruire. Après une lutte contre les éléments pendant environ sept heures, le voilier est renversé sur le côté, le mat est sous l'eau, et la mer commence à remplir la coque. À ce moment, alors que tout semble perdu, un pouvoir invisible redresse le voilier, l'orage se calme et les missionnaires peuvent arriver à destination sains et saufs. Ils rendent alors témoignage que, si le Seigneur ne les avait pas aidés à ce moment-là, toutes les chances de vie étaient perdues.

Elder O. E. Johnson raconte également une guérison remarquable à Takaroa, où il a travaillé pendant un an. Lui et son compagnon Elder S.R. Diamond visitent les membres. Sur la route, un des frères les appelle et leur demande de se rendre rapidement dans un foyer où la mère de famille est entrain de mourir. Ils vont et arrivent bientôt dans cette maison remplie de visiteurs qui se sont réunis là, comme c'est la coutume lorsque quelqu'un va mourir. Les missionnaires renvoient tout le monde, sauf la sœur du mari et le fils de cette dame. Ensembles, ils prient pour être purifiés de tous péchés. Puis ils bénissent cette sœur qui est semble-t-il sur le point de mourir, et témoignent que, moins de 10 minutes après la bénédiction, la malade se lève et sort de la maison. Elle est guérie immédiatement d'un mal qui la terrassait depuis plusieurs mois. De nombreux autres rapports font état du pouvoir de la prêtrise et de la bonté du Seigneur envers ses enfants.

Pendant les derniers mois de 1928, deux épidémies s'abattent sur Tahiti : la grippe et la rougeole. Nombre de personnes sont touchées. Il faut dire, cependant, que pendant toute la durée de ces maladies, le pourcentage de saints touchés est très bas par rapport aux non membres. Les missionnaires également sont grandement bénis et guidés dans leurs efforts pour veiller sur les membres aussi bien que les non membres pendant leur maladie. Dieu veille sur ceux qui l'aiment et qui le servent sur la terre. Le Seigneur aide aussi en adoucissant le cœur des non membres de telle sorte qu'ils soutiennent fortement l'Église en paroles et en actions.

Monsieur Lulu Spitz, homme d'affaires de Papeete, ainsi qu'un dirigeant politique de l'un des partis cherchant à être élu pour représenter Tahiti en France, appellent la mission, ayant en mains un rapport disant que les missionnaires ont
influencé les Polynésiens pour leur vote dans certaines îles des Tuamotu's. Le rapport est faux bien sûr, et les missionnaires prennent l'occasion d'expliquer à Mr Spitz la position de l'Église face à la politique. Mr Spitz les informe d'un autre rapport qui montre que la présence de l'Église mormone dans ces îles cause un préjudice au gouvernement français. Cependant, Mr Spitz fait part de son appréciation pour les efforts de l'Église dont bénéficient les polynésiens, et rappelle que, s'il peut faire ou dire quelque chose en faveur de l'Église, il sera content de le faire.

L'imprimerie de la Mission imprime en 1929 près de 300 nouveaux cantiques et 1.500 exemplaires d'une brochure traduite en langue tahitienne intitulée : « Est- ce que le baptême est essentiel au salut ? » Cette brochure est une grande aide pour le porte-à-porte. À cette époque, le journal de la Mission « Te Heheuraa Api » est florissant. En 1929 l'attention de la Mission est attirée par un incident très semblable à ce qui est arrivé à Joseph Smith lorsqu'il a prié pour connaître la vraie Église de Jésus-Christ. Ainsi, sur l'île de Hereheretue, située à environ 450 kilomètres de Tahiti, on assiste à une sorte de répétition de cette expérience religieuse :

À cause des diverses opinions et des discussions qui s'ensuivent, un jeune homme, Paheroo a Tataoa, âgé de 17 ans est amené à prier sincèrement le Seigneur pour connaître laquelle, parmi toutes les Églises sur la terre, est la vraie. Cette nuit-là un personnage lui apparaît 3 fois, lui répétant à chaque fois qu'il n'y a qu'une seule vraie Église du Christ sur la terre, l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, connue sous le nom d'Église mormone. Ce jeune homme a entendu parler de l'Église mormone mais personne à Hereheretue ne détient l'autorité de le baptiser et de le confirmer. Il sait que les bureaux de la Mission mormone se trouvent à Papeete. Paheroo a Tataoa prend donc le premier bateau pour Tahiti. Là, il est baptisé et enthousiasmé, s'engage dans le travail de l'Église avec diligence.

Ces 3 dernières années, des efforts considérables ont été faits à Fakarava pour aider les membres de cette branche à changer leur vie et à se repentir, mais sans résultat. Alors, au cours du mois de février 1929, leur église est démontée et reconstruite à Taega située à plus de 200 kilomètres. Le Seigneur enlève à ceux qui ne développent pas leurs dons, et donnent à ceux qui se montrent de bons intendants.

En 1932, une amélioration évidente apparaît dans l'attitude des officiels envers les missionnaires mormons à Papeete. Ils sont plus aimables et plus coopératifs avec les missionnaires. Cette même année voit également la consécration de plusieurs nouveaux bâtiments. Le 4 octobre 1931, la nouvelle église de la branche de Haramea
(Tubuai) est consacrée. Ce bâtiment a été en construction pendant plus d'un an car il est fait de pierres, et tout le travail a été accompli gratuitement par les polynésiens. Les membres ont fourni toutes les pierres (des blocs de corail pour lesquels ils ont plongé) et une grande partie du bois de construction (des cocotiers taillés selon les besoins). C'est un bâtiment solide et de belle apparence qui peut contenir 200 à 250 personnes.

Le 1er novembre 1931, on consacre aussi la nouvelle église de Hikueru. Ce bâtiment a été construit essentiellement avec les matériaux de l'ancienne église que l'on a détruite parce que les autorités de Hikueru pensaient qu'il manquait de sécurité. C'est également une construction solide et agréable à regarder. Il pleut le jour de la consécration – un dimanche. En fait, il pleut depuis 3 ou 4 jours. La pluie ne semble pas vouloir cesser le dimanche matin, et les saints pensent remettre les réunions. Les missionnaires responsables insistent pour tenir ces réunions à 12h00 comme prévu. À 11h45, la pluie cesse soudain, et les saints se rassemblent à l'église. À 12h00, on chante et tout le monde entre dans le bâtiment. À 12h05, lorsque chacun est assis, la pluie recommence à tomber sans arrêt jusque tard dans la soirée. Chaque personne présente sent bien que le pouvoir de Dieu s'est manifesté en ce jour. Plusieurs autres églises sont construites et consacrées à cette époque, dans les endroits où les membres les désirent vraiment et travaillent de toutes leurs forces pour voir le rêve devenir réalité.

En 1932, les relations avec le gouvernement français sont pauvres. Les réglementations concernant l'entrée des missionnaires en Polynésie sont strictes et peu équitables. Même lorsque ces règlements sont respectés, il semble que le gouvernement cherche autre chose contre l'Église. Les officiels pensent que les missionnaires influencent les polynésiens, pour leur vote en période d'élection, et voient en toutes réunions entre membres et missionnaires une réunion politique. Cependant, beaucoup de difficultés s'aplanissent en 1933, et des relations plus amicales s'installent entre l'Église et le gouvernement. Le 30 novembre 1932, on peut lire dans le journal de la Mission : « Nos relations avec le gouvernement français se sont beaucoup améliorées. Nous ne pourrions attendre mieux, et les dirigeants semblent vouloir nous aider autant que possible. Nous n'aurons plus de problèmes à faire venir nos missionnaires ; nous avons reçu la permission de recommencer la publication du journal de la Mission, qui ne paraît plus depuis le mois de mars. Nous espérons aussi obtenir un titre de propriété pour un terrain, ce qui est cause de difficultés depuis longtemps. »

En 1934, le président F. Mallory et sa famille font un voyage dans les Tuamotu's du Nord, et mentionnent le merveilleux travail fait dans toutes les branches là-bas. Le premier collège des diacres, dans toute l'histoire de la Mission, est alors organisé à Takaroa. L
e président F. Mallory et sa famille passent 6 semaines à Takaroa où le président Mallory réorganise l'orchestre qu'il avait organisé et formé au cours de son premier séjour (de 1919 à 1922). L'orchestre est excellent, et est une aide pour la jeunesse. Il est le seul de ce genre dans les îles, et les officiels du gouvernement complimentent l'Église pour cela. En novembre 1934, ils demandent aux 26 membres de l'orchestre de se rendre à Fakarava pour jouer à l'occasion d'une journée récréative.

Cette reconnaissance de l'orchestre de l'Église donne à ses dirigeants l'occasion de se rapprocher des autorités gouvernementales. L'orchestre gagne le 1er prix lors de cette journée et reçoit, outre une médaille et 125 francs en argent, les félicitations des officiels. En 1934, une grève éclate sur la côte Ouest des États-Unis, ainsi qu'en Australie et en Nouvelle-Zélande. Les services postaux sont très ralentis : un seul courrier arrive entre avril et août. Le travail dans la Mission est grandement gêné aussi, parce que l'huile et le gaz sont épuisés et toutes les goélettes sont hors service. Il est donc impossible aux missionnaires de se déplacer ou d'avoir des nouvelles des branches éloignées. Ils n'ont aucune nouvelle de certaines branches pendant 4 mois (avril-août). Les produits alimentaires importés sont épuisés également dans plusieurs endroits et les
missionnaires vivent de produits locaux (œufs d'oiseaux, poissons, crabes, noix de coco et huîtres).

La conférence annuelle de la Mission a lieu à Papeete, Tahiti, du 5 au 7 avril 1935. Ceux qui y participent en gardent un souvenir mémorable. Des îles Tuamotu's arrivent de nombreux saints ainsi que l'orchestre de la branche de Takaroa. Dans la soirée du 4, l'orchestre donne un concert dans le parc public auquel assiste le gouverneur de Tahiti. Les jeunes jouent de telle façon qu'ils touchent le cœur des gens, et sont félicités de toutes parts et sont reconnus comme le meilleur orchestre dans les îles de la Société. L'assistance est très bonne aux réunions des vendredi, samedi et dimanche ; et spirituellement, chacun les apprécie. Samedi 6 dans la soirée, la SAM de la branche de Papeete présente une pièce en trois actes, la Primaire une pièce en 2 actes, l'orchestre joue et différents numéros musicaux sont donnés. Plus de 1.400 personnes assistent à cette soirée.

Le dimanche soir, la SAM de la branche de Takaroa présente une pièce et de nombreux numéros musicaux, appréciés par tous. 3.208 personnes assistent à cette réunion, le plus grand nombre jamais atteint dans une conférence à Tahiti. Le lundi 8 avril au matin, 200 saints partent en truck avec l'orchestre pour faire le tour de l'île. Ils jouent dans chaque district et sont bien accueillis par la population. Dans l'après- midi, ils arrivent à Tautira. Là, ils participent à des matches de football et « Patia-Fa » (lancer de javelot) entre les mormons et les habitants du district. L'orchestre donne un concert dans la soirée qui se passe en chansons. Les habitants du district les nourrissent et les logent, et des liens d'amitié sont tissés. Chaque membre se sent grandement récompensé pour les efforts faits pour assister à la conférence. Ce récit sur la conférence annuelle est typique de chaque conférence ou réunion où les saints se réunissent pour se réjouir ensemble et partager le festin spirituel préparé pour eux.

En novembre 1935, la Mission termine la publication du livre « 2.000 citations de l'Évangile » ainsi que d'un livre de leçons en tahitien. Le président Leroy Mallory, son épouse Muriel R. et leurs enfants quittent la Mission le 18 mars 1937 après une présidence de 3 ans et 8 mois. Toute la famille quitte Tahiti estimée, honorée et aimée par les saints et par le peuple en général.

L'appréciation des membres et non-membres envers un président de Mission est typique et tous ceux qui ont travaillé parmi les polynésiens peuvent en témoigner.
Le président Thomas L. Woodbury succède au président Mallory. Lui et son épouse sont les invités d'honneur d'un banquet donné à Papeete, Tahiti, par un groupe d'anciens combattants de la Première Guerre Mondiale. 123 soldats en permission se sont arrêtés à Salt Lake City, Utah, en 1913 et ont discuté avec les anciens missionnaires de Tahiti. Le président Woodbury a dirigé la visite de Salt Lake City à cette époque.13 de ces soldats sont présents au banquet. En 1938, passe une nouvelle loi interdisant à quiconque n'est pas résident de se rendre à Tubuai et les autres îles des Australes.

Le 14 avril
1939, une lettre du gouverneur annonce que l'Église n'a plus la permission d'envoyer des missionnaires blancs à Tubuai. Du 8 août 1939 où les missionnaires reviennent de Tubuai jusqu'au 9 août 1947, c'est-à-dire 8 années plus tard presque jour pour jour, aucun missionnaire ne peut travailler dans cette île. Des missionnaires retourneront à Tubuai le 9 août 1947, lorsque la permission sera donnée de continuer le prosélytisme sur cette île. Pendant le temps où les missionnaires ne pouvaient aller à Tubuai, Teao a Nauta, un ancien mis à part le 28 mai 1939 par elder Rufus K. Hardy, fait l'oeuvre missionnaire dans cette île. Frère Nauta se montre très diligent, travailleur et bien informé. Souvent il mentionne que le travail avance.

Elder Rufus K. Hardy,
qui a mis à part Teao a Nauta à Tubuai, est l'un des 7 présidents des soixante-dix. Il est arrivé le 2 mai 1939 à bord du M.V. Hauraki. Il reste presque deux mois dans la Mission, pendant lesquels il tient des conférences avec les saints dans différentes îles. Sa visite est la première de ce genre pour Tahiti. Aucune autorité générale de l'Église n'a visité les îles, excepté le président David O. McKay qui s'est arrêté à Tahiti lors de son voyage. Elder Hardy accompagné du président Kenneth R. Stevens, de son épouse, Iona, et leur famille, ainsi que de 2 missionnaires, quittent Tahiti sur la goélette « Denise ». Elle les mène à Fakarava, Takaroa, une distance de 2.200 kilomètres environ.

Dans chaque île, on organise des réunions de prêtrise, des conférences de branche et d'auxiliaires, etc. On accomplit également des ordinations, des baptêmes, des confirmations et des bénédictions. Les autorités en viste donnent
des conseils et des avis aux membres et aux dirigeants des différentes organisations. Grâce à la ressemblance de la langue Maori et du vieux Paumotu, les membres peuvent comprendre en partie les idées que Elder Hardy exprime en maori. Le groupe de visiteurs est traités royalement dans chaque île. Aimants et hospitaliers, les membres préparent pour eux la meilleure nourriture et leur donnent le meilleur endroit pour dormir.

Plusieurs autres évènements sont à noter au cours de mai 1939. Dans le district de Tahiti, la primaire est organisée dans la branche de Tahiti le 10 mai. Le 28 mai, un nouveau district est formé, le district « des Tuamotu's centrales » comprenant les îles Katiu, Makemo, Taega, Nihiru, Raroia et Takume. Le 2 juillet 1939, sous la supervision des missionnaires travaillant là, la branche de Tauere (Tuamotu de l'Est) est organisée, les auxiliaires sont mises sur pied. Les missionnaires ont beaucoup de succès dans ces îles.

Lors de sa visite, Rufus K. Hardy suggère, que le nombre des missionnaires soit réduit à 16 – y compris le président et son épouse. Les dirigeants du gouvernement pensent aussi qu'il y a trop de missionnaires (ils sont au nombre de 24). En apprenant que l'Église désire réduire graduellement le remplacement des missionnaires (2 tous les 4 mois), ils informent le président de Mission qu'il ne doit rester que 16 missionnaires avant d'en faire venir d'autres. La Mission doit écrire à 2 missionnaires prêts à partir qu'ils n'ont pas la permission d'entrer en Polynésie française. Le 1er novembre 1939, une nouvelle loi stipule que toute personne entrant en Polynésie doit avoir un permis du gouverneur d'Océanie.

Au début de 1940, la Mission donne les articles prévus pour le journal de la Mission aux dirigeants du gouvernement pour vérification avant publication. Le gouverneur, Mr de Gery, envoie une lettre à la mission, disant en partie : « Le 13 février dernier, vous avez déposé une série d'articles à paraître dans le journal « Te Heheuraa Api », pour obtenir l'autorisation de les publier. J'ai l'honneur de vous informer que, si dans l'ensemble, je n'ai pas d'objection à formuler concernant la diffusion de ces articles, il y en a un que je ne peux laisser passer. C'est celui intitulé : 'la loi de la dîme'. Les lois françaises, qui sont les seules à considérer, n'autorisent aucune aide pécuniaire à une croyance exceptée sous la forme de dons en nature et n'importe quelle autre méthode tend à créer des taxes autres que celles du gouvernement et cela ne peut être toléré. De plus dans les circonstances présentes que vous ne devez pas négliger chacun peut comprendre le besoin qu'à la France de toutes ses ressources, et je pense que je dois vous le rappeler pour que vous donniez les instructions nécessaires aux missionnaires et à ceux qui détiennent un poste de responsabilité dans votre Église, afin que les collectes de contributions volontaires cessent. »

Le président Stevens discute de ce problème avec le consul américain et Mr Brault, fondé de pouvoir, qui pensent tous deux que le gouverneur n'est pas d'humeur à parler de cela, parce que la guerre retient toute son attention. Ils conseillent de se soumettre à cette demande, car, disent-ils : « Nous savons que vous, votre Église et vos missionnaires, êtes dans ces îles par tolérance et non pas de droit ; on peut vous demander de partir à n'importe quel moment ; et personne ne pourrait dire quoi que ce soit contre la décision. En fait, ils seraient satisfaits si vous cessiez votre travail ici. » Il n'est pas besoin de dire que le président Stevens accepte leur conseil.

Le 30 mars 1940, l'administration française envoie une lettre à la Mission, demandant de cesser la diffusion de nouvelles de la guerre et du gouvernement dans le journal « Te Heheuraa Api ». Cette année-là, il y a partout des tensions au sujet des problèmes mondiaux. En 1940 également, sur conseil de Mr Cobb, consul américain, tous les missionnaires de la Polynésie française sont rappelés à Tahiti. La raison de ce conseil est que la nourriture manque sur les autres îles, étant donné que les goélettes ne font plus les voyages. Il n'y a pas de marché pour le coprah, ainsi les goélettes n'ont pas les moyens de se déplacer.

Le 22 juillet 1940, on apprend que le consulat anglais est fermé après action de l'administration française. Le rapport précise aussi que les navires anglais ne viendront plus à Tahiti tant que ces îles n'auront pas défini leur position : soutenir les Alliés ou les pouvoirs de l'Axe. Le peuple est très inquiet de l'influence de cette décision sur l'importation de nourriture et autre, car on voit déjà la nourriture limitée dans les Tuamotu's et à Tahiti. Après une insurrection, et grâce à l'union des tahitiens, le
gouvernement organise un plébiscite : le peuple veut-il soutenir De Gaulle et la France libre, ou Pétain et le gouvernement de Vichy. Le vote donne 5.564 voix pour la France libre contre 18 voix pour le gouvernement de Vichy. Là-dessus, le gouverneur des Colonies démissionne, et le gouvernement est laissé aux mains du gouvernement provisoire d'Océanie française composé de E. Ahnne, G. Lagarde, E. Martin et G. Bambridge. Ces hommes annoncent qu'ils n'interfèreront avec aucune croyance. Ce sont des personnes intègres, dévouées à la recherche du bien-être des habitants des îles.

Le 14 octobre 1940, le président Cannon, le nouveau président de la Mission, reçoit un télégramme du président Grant, lui demandant de renvoyer tous les missionnaires aux États-Unis dès que possible, et de laisser la Mission dans les mains des membres locaux. Les missionnaires sont tristes d'apprendre cela parce qu'ils aiment la Mission. Ils hésitent à la laisser sans missionnaires à cause des nombreux problèmes qui ne sont pas résolus. Les arrangements pour le départ sont faits avec Mr Charley Brown de Tahiti, propriétaire du bateau « Bénicia », qui doit les amener à Honolulu, Hawaii. À cause de la guerre, beaucoup de difficultés doivent être surmontées pour préparer le voyage. En effet, le bateau ne peut prendre qu'un nombre limité d'américains et Mr Brown est sujet à des restrictions nombreuses.

Le président Cannon envoie et reçoit de nombreux télégrammes. L'Église veut que les missionnaires voyagent sur un bateau plus grand appartenant à la « Union Steam Ship Company », mais il faudrait attendre 6 mois avant de partir. Donc ils continuent leurs préparations et quittent Tahiti le mardi 19 novembre 1940 par le « Bénicia ». Le président de branche Ani a Mariteragi est chargé des propriétés de mission, jusqu'à l'arrivée du nouveau président de mission, Ernest C. Rossiter, le 6 juin 1941. Le président Rossiter voyage beaucoup dans les îles, essayant de garder le contact avec toutes les branches. Pourtant le manque de missionnaires se fait sentir, et les branches ont beaucoup de difficultés.

L'une des plus grandes est l'incident de Takaroa en 1942. Une jeune femme annonce partout qu'elle a reçu la visite d'un ange qui l'a désignée pour diriger l'Église à Takaroa, et que celui-ci lui a donné un plus grand pouvoir que celui détenu par le président Rossiter ou par n'importe quel détenteur de la prêtrise de l'Église : le pouvoir de la Trinité et des anciens prophètes. À son tour, elle confère ce pouvoir à d'autres membres de la branche et bientôt, presque toute la branche de Takaroa est entraînée par ses déclarations. Heureusement, le président Rossiter redresse rapidement la situation.

Deux ans et demi après son arrivée, il devient nécessaire de rapatrier sœur Rossiter aux États-Unis à cause de son asthme et le président Heber J. Grant démissionne sœur Rossiter tandis que le président Rossiter reste à Tahiti. En décembre 1943, deux bateaux en partance pour les États-Unis sont dans le port. L'un est un paquebot anglais, l'autre est un cargo américain. Après avoir essayé d'obtenir un titre de passage sur un des deux bateaux sans succès, le président Rossiter décide à demander l'aide du Seigneur :

« Nous nous agenouillons donc près de notre lit et nous prions pour que Dieu prépare le chemin afin que ma femme et mon fils puissent partir sur le grand cargo américain. »
Nous nous habillons en blanc et allons sur le quai où nous restons debout à côté du navire. Persuader le capitaine de modifier sa décision afin qu'il accepte comme passagers ma femme et mon fils me paraît trop difficile à accomplir par mon propre pouvoir. Comme je m'interroge sur la méthode à employer, nous nous éloignons un peu du bateau, dans un endroit retiré, et invoquons de nouveau le Seigneur pour qu'il bénisse nos efforts. Revenant près du bateau, nous nous tenons debout pendant un moment ; un garde, carabine à la main, se tient au bas de la passerelle avec les instructions strictes de ne laisser monter personne à bord s'il n'a une autorisation signée du consul américain. Le consul de son côté a reçu l'ordre du capitaine de ne délivrer aucun permis. Je me tiens donc là, sachant que, par mon propre pouvoir, je ne pourrai obtenir la permission de monter à bord.

Tout d'un coup, l'inspiration me vient, disant :
'Frère Rossiter, marche droit devant toi, ne regarde ni à droite ni à gauche, tu dépasseras le garde sans être vu.' Immédiatement, et sans hésitation, je m'avance dépassant le garde, et monte à bord sans être remarqué de personne. Je rencontre le capitaine sur le troisième pont. Je tremble de tout mon corps, mais j'ai en moi l'assurance qu'à partir de cet instant tout va bien se dérouler. Le capitaine me parle, sa voix douce et tendre me rassure. Je sens que l'Esprit de Dieu est venu avant moi et a préparé le chemin. Il m'invite à venir dans son bureau oùje lui raconte toute mon histoire. Il m'écoute très attentivement, reste silencieux quelques instants, puis dit : « Monsieur Rossiter, je n'arrive pas à comprendre ; il me semble qu'il y a quelque chose qui me pousse à accepter votre requête. Je pense que c'est peut-être le Seigneur. Faites les préparatifs nécessaires à l'embarquement de votre femme et de votre fils pour l'Amérique, à bord de ce navire. »

L'après-midi même, tous les papiers prêts. Les deux places de bateau sont achetées, et ma femme et mon fils s'éloignent de Papeete en direction de l'Amérique, vers un climat convenant mieux à une personne asthmatique.

En 1944, c'est au tour du président Rossiter, de tomber gravement malade, et d'être évacué à Hawaii pour y être soigné. Le président Edger Bentley Mitchell Jr arrive à Tahiti le 17 février 1945, suivi par son épouse et sa famille le 8 novembre 1945. Après beaucoup de difficultés, il obtient des visas d'entrée pour de nouveaux missionnaires, et le 3 juin 1946, les premiers missionnaires, depuis 1940, arrivent à Tahiti. Par le même bateau, arrivent également deux anciens présidents de Mission : les présidents Alma G. Burton et Franck J. Fullmer. Ces derniers ont reçu une mission de la Première Présidence : aider à choisir un endroit approprié pour les nouveaux bureaux de la Mission à Tahiti. Leur mission est un succès, puisque peu de temps après leur arrivée, les personnes autorisées par les lois françaises à détenir des propriétés de l'Église en Océanie, achètent le terrain situé au coin de l'avenue du Prince Hinoï et de l'avenue du commandant Chessé. L'activité missionnaire augmente avec l'arrivée de nouveaux missionnaires, qui rétablissent le contact avec les différentes branches de l'Église dans les Tuamotu's et les Australes. Une nouvelle branche est organisée à Huahine dans les îles Sous-le Vent. Les membres de l'Église sont recensés pour essayer de les localiser, parce qu'ils sont par nature de grands voyageurs et se déplacent beaucoup. Les fichiers de la Mission sont corrigés et un nouveau système de fiches est établi dans les branches.

Frère Leland Carver, un ancien missionnaire à Tahiti, arrive avec sa femme et sa famille, le 12 septembre 1947. Il a été appelé en mission pour aider à la construction de la nouvelle église et la nouvelle maison de la Mission à Fariipiti. Le président Franck J. Fullmer arrive le 28 décembre 1947 avec 400 tonnes de matériaux. Le travail est déjà commencé, mais avance rapidement avec l'arrivée des matériaux et du président Fullmer qui supervise la construction. Le 1er janvier 1948 le président Mitchell dirige une petite cérémonie pour le 1er coup de pioche et de dédicace du site de la nouvelle église. Chaque personne présente à l'occasion d'enlever une pelletée de terre. En février 1948, le président Mitchell se rend aux Tuamotu's pour consacrer un nouveau hall pour les activités à Takaroa, que le président Rossiter a commencé. Le manque de matériaux a provoqué l'arrêt des travaux pendant un temps, mais peu après l'arrivée du président Mitchell, le travail reprend jusqu'à la réalisation du hall.

Elder Matthew Cowley, du Collège des douze apôtres, président des Missions des îles du Pacifique, visite la Mission au cours d'un voyage le 28 juin 1948. Le président Cowley, accompagné du président Mitchell, se rend à Tubuai et Raivavae pour y voir les saints et les missionnaires. Peu après, un autre voyage le même à Huahine, Raiatea, Bora Bora, Mopihaa et Motuone où il s'arrête pour rendre visite aux saints et aux amis de l'Église. Il voudrait aller voir les branches des Tuamotu's, mais à cause des difficultés rencontrées pour obtenir un moyen de transport rapide, la visite est remise à une date ultérieure. La décision est alors prise d'annuler les plans faits pour la suite du voyage et de tenir la cérémonie de la pose de la première pierre le 14 août 1948.

Le président Leroy Mallory et son épouse arrivent à Tahiti le 3 janvier 1950 pour présider sur la Mission où ils ont déjà travaillé de 1933 à 1937. Comme il l'a fait auparavant il organise de nouveau un orchestre à Papeete qu'il forme et dirige lui-même. Presque aucun des polynésiens ne lit la musique, mais les efforts en valent la peine : c'est pour les jeunes un bon divertissement.

Le 18 mars 1950, arrive un télégramme de Première Présidence annonçant le départ du Yacht « Fandango » le 17 mars et son arrivée à Tahiti pour le 8 avril suivant. Ce yacht doit servir à la Mission. Les membres de la Mission sont reconnaissants pour ce bateau qui s'avère très utile pour l'Église dans ces îles où il est difficile de trouver un moyen de transport sûr. C'est seulement le 29 juillet 1950 que le « Fandango » est légalement enregistré. Lors de la levée du drapeau français, son nom est changé en « Paraita », nom tahitien du premier missionnaire mormon venu dans ces îles, Addison Pratt. Une réception a lieu à bord du « Paraita » où sont réunis les dirigeants du gouvernement et d'autres personnalités de Tahiti. Puis le « Paraita » commence son premier voyage sous pavillon français le 31 juillet 1950.

Ce voyage est une excursion de deux jours pour les missionnaires, et aussi une prise en main du bateau par le capitaine Charles A. Palmer, et le nouvel équipage. En octobre, le gouvernement demande le « Paraita » pour emmener un policier et un docteur à Marutea, Tuamotu's du Nord, où les polynésiens sont rassemblés pour la saison des nacres. Le président Mallory décide alors, qu'il va lui- même visiter les branches de l'Église dans cette partie de la Mission. Arrangements faits, le « Paraita » quitte Tahiti le 23 octobre pour Marutea, ayant à son bord le président et sœur Mallory, les officiels et plusieurs saints. Le bateau revient le 10 novembre, après avoir visité Hao, Marutea, Hikueru, Raraka et Fakarava. Chaque fois que c'était possible, une réunion a été tenue. Toutes les églises étant en mauvais état, le président a demandé que tous les bâtiments de l'Église soient arrangés. À Taega, les missionnaires reçoivent de la peinture et autres matériaux pour réparer l'église.

Le 1er novembre 1950, les membres de la branche de Papeete coulent une dalle pour faire un terrain de basket et une piste de danse. La Société de secours prépare de la nourriture pendant 23 heures sans arrêt. C'est le plus beau terrain de Tahiti. Ceci aide beaucoup le programme des jeunes de l'Église que le président Mallory a lancé pour garder les jeunes loin des endroits de mauvaise réputation qui pullulent en ville. Beaucoup de monde assiste à la première partie de basket le 23 décembre au soir. Le programme débute par différents numéros musicaux interprétés par l'orchestre.

Au mois de décembre, l'île est balayée par une épidémie de rougeole. À cause des complications, nombreux sont ceux qui trouvent la mort, mais grâce au pouvoir de la prêtrise, peu de membres meurent. Le président Mallory et les missionnaires du bureau visitent les membres jour et nuit, bénissent les malades et leur montrent comment prendre soin d'eux-mêmes. L'épidémie dure jusqu'en mars 1951. Ses conséquences sont graves parce que la maladie n'a pas touché les îles depuis plusieurs années, et l'immunité des Polynésiens est minime. Tous les missionnaires continuent à bénir les malades. Comme le diront plusieurs polynésiens par la suite, beaucoup seraient morts sans le pouvoir de la prêtrise.

Le 25 juillet 1951, le « Paraita » part pour Takaroa où se tient pour la première fois une conférence de la jeunesse. Environ 50 jeunes accompagnent le président Mallory et son épouse, dont l'équipe de basket, l'orchestre et les dirigeants de la SAM. Le premier arrêt est à Makatea où tout le groupe est merveilleusement accueilli par la Compagnie des Phosphates et les habitants de l'île. Avec l'aide de nombreux amis, la branche a préparé un grand repas tahitien. L'après-midi, on joue au basket, et le soir, 1.200 personnes assistent à un concert donné par l'orchestre. Les dirigeants des autres Églises font des discours de remerciement, et peu après le bateau repart pour la conférence de jeunesse. Le groupe arrive à Takaroa le 28 juillet 1951, et est reçu à la manière locale, avec des chants, des couronnes de fleurs, etc.

 La branche de Takaroa accueille tous les visiteurs qui prennent deux jours pour préparer la réception du gouverneur de la Polynésie française qui visite l'île à ce moment-là. Deux réunions sont ensuite tenues chaque matin ; chacun a l'occasion d'y prendre la parole. Les après-midi sont réservés à des activités sportives et les soirées à des divertissements sociaux présentés par différents groupes musicaux. Le matin du 3
août, après une réunion de témoignage de quatre heures, le groupe se prépare à repartir, le bateau quitte Takaroa dans l'après-midi, au milieu des au revoir et d'un duo à la trompette interprétant « Aloha Oe ». La conférence a été réussie et inspirante pour tous. Pendant le voyage de retour, le bateau s'arrête à Fakarava et Faaite. Le dimanche est passé en mer, et une réunion de Sainte Cène a lieu à bord du bateau. Tous ceux qui ont participé à la conférence de la jeunesse pensent que cela a été un voyage merveilleux, et sont reconnaissants pour le « Paraita » qui l'a rendu possible.

Le 17 décembre 1951, le gouverneur de la Polynésie française annonce au président Mallory que le quota des missionnaires passe de 12 à 8, et que le visa demandé pour 2 missionnaires a été refusé. Depuis le mois d'octobre, le président Mallory essaye d'obtenir ces visas, et a rencontré plusieurs fois le gouverneur pour cela. Mais la réponse est toujours défavorable. Aucun nouveau missionnaire n'est autorisé à entrer dans le territoire avant que d'autres n'en soient partis. Au moment de Noël, plusieurs concerts sont donnés en faveur des groupes nécessiteux et la Primaire présente un programme exceptionnel à la branche de Papeete. En partageant ces talents, chacun ressent profondément l'Esprit de Noël.

Au début de l'année suivante, la Mission reçoit une note spécifiant que, à cause des évènements mondiaux, aucun jeune américain en âge d'être sous les drapeaux et en bonne condition physique n'aura la permission de faire une mission. Ceci diminue grandement la force missionnaire. Pourtant, la Mission continue à fonctionner. L'orchestre de Papeete fait le tour de l'île et donne plusieurs concerts, ce qui aide à créer des liens et à prêcher l'Évangile. Au début du mois de mai 1952, le président Othello Pearce, le nouveau dirigeant de la Mission accompagné d'un ami influent, Tony Bambridge, rencontre plusieurs fois les dirigeants du gouvernement pour demander la permission d'augmenter le nombre de missionnaires.

Leurs efforts sont couronnés de succès, et de plus en plus de missionnaires peuvent entrer en Polynésie française. Le 25 juillet 1952, plusieurs membres quittent Tahiti pour Takaroa et Hikueru pour la saison des nacres. Cette année, le président Othello Pearce a assigné à des missionnaires la responsabilité de peser et de garder les nacres pour les saints. Grâce à ces dispositions, ces derniers gagnent davantage, et une grande économie est réalisée puisqu'il n'y a pas de main d'œuvre à payer.

C'est en octobre que les Elder Jay Larson et Richard Pearce reçoivent la tâche de traduire la Perle de Grand Prix en langue tahitienne avec l'aide de Taumata « Tommy » Tekuravehe. À la fin de l'année 1952, le président Pearce achète une terre pour les membres. Elle est divisée en 20 lots à vendre aux polynésiens qui paient la moitié comptant. Le reste sera payé dans les 2 années suivantes. Le but de ceci est de rassembler les saints et de les éloigner des endroits indésirables.

En mars 1954, le président de Mission, J.K. Orton se rend à Salt Lake City (Utah) pour assister à une conférence. Il assiste à une réunion avec la Première Présidence pour parler des problèmes de la Mission Tahitienne et pour faire un bilan de santé. Pendant ce temps, Elder Larson Caldwell agit en tant que président de Mission. Au mois de mai, le président Orton revient après avoir été retenu à Fidji par la maladie. En arrivant à Tahiti, il reçoit bientôt un télégramme le relevant de son poste de président de Mission. Il peut ainsi rentrer aux États-Unis et recevoir des soins médicaux. Elder Larson Caldwell est de nouveau désigné comme président de Mission.

Le 2 juillet 1954, la Première Présidence accorde la permission de construire une salle couverte pour les activités. Le président J. K. Orton et la Première Présidence donnent l'argent nécessaire à la construction. Chaque homme de l'Église doit donner 120 jours de travail. Nombreux sont ceux qui participent aux fondations et ceux qui font les parpaings. Le 3 octobre
1954, la Primaire tient sa première réunion de graduation : 30 enfants, dont certains ont plus de 12 ans, reçoivent des certificats. Sœur Caldwell se procure des emblèmes, des banderoles, ainsi que des livres de leçons en anglais pour la Primaire. Elle choisit des instructrices connaissant l'anglais, capables de traduire les leçons en tahitien. Ces leçons traduites sont dactylographiées par sœur Caldwell pour être envoyées dans les îles.

En 1954, le « Paraita » est entièrement révisé, et le 16 novembre, il sert aux saints qui veulent venir des Tuamotu's pour une conférence de Mission. La conférence débute le 29 novembre 1954 par la cérémonie d'inauguration du « Fare Basket ». Environ 1.500 personnes regardent le maire de Papeete Mr. Alfred Poroi couper le ruban. Le site est consacré le 2 décembre 1954 par le président Caldwell. Le 6 décembre, dernier jour de conférence, est réservé à un grand repas tahitien, préparé sur la plage d'Arue. 2.000 personnes se partagent 2 tonnes de nourriture, c'est un jour d'activités, de jeux, de natation. Dans la soirée, deux missionnaires locaux dirigent un coin de feu pour terminer cette merveilleuse conférence.

Le 18 janvier 1955 est un jour important dans la Mission tahitienne et dans la vie de tous les membres. Le président David O. McKay, son épouse et frère Franklin J. Murdock arrivent par la Teal à 13h30. Le président et sœur Caldwell, et les missionnaires vont l'accueillir au quai. Quelques jeunes filles leur font une petite réception. Il est interviewé par la presse, et après avoir passé la douane, se rend à la Mission. Là, les saints couronnent le prophète et ses compagnons, puis tous se rendent à l'église pour un court programme de bienvenue. Le président Caldwell traduit le discours du président McKay. Pour la soirée, les polynésiens préparent et servent un dîner à tous les missionnaires, au président McKay, son épouse et les personnes qui l'accompagnent. Ensuite, ils présentent un programme de danses et chants locaux. Tout le programme est dirigé par les saints eux-mêmes.

Le 19 janvier, le président McKay rencontre le gouverneur de l'île, avec qui il a rendez-vous. C'est une entrevue courte mais agréable. Ensuite, il assiste à une réunion avec les missionnaires (rapport et témoignage). Dans la soirée, le président Murdock, sœur McKay et le président McKay parlent au cours de la réunion. La musique est assurée par le chœur sous la direction de sœur Caldwell. C'est une réunion très édifiante. Le lendemain, 20 janvier, le président McKay et ses compagnons quittent Tahiti. Ils laissent derrière eux un renouveau dans l'esprit missionnaire et la foi des membres. Chacun a été fortifié par leur visite. C'est au mois de mai que commence le travail avec les francophones de Papeete. Deux missionnaires doivent commencer à contacter plusieurs personnes et à enseigner en langue française.

Au cours de mois de juin, le nouveau président de Mission, Ellis V. Christensen rencontre le gouverneur de l'île et ils s'entretiennent pendant environ 30 minutes. Le gouverneur est très gentil et demande au président de lui rendre visite à nouveau ; il demande également que le président ne fasse aucune comparaison défavorable entre le gouvernement français et celui des États-Unis. Le 19 juin 1955, deux missionnaires travaillant à Papeete débutent une École du dimanche en français. La réunion a lieu dans le salon de la Mission et 36 personnes y assistent.

C'est en avril 1956, au cours d'un entretien avec le gouverneur de la Polynésie française, que le président Christensen sollicite un permis de séjour pour 20 missionnaires et fait une demande pour la construction d'une école mormone à Tahiti. Les deux requêtes sont acceptées à condition que seules des personnes de nationalité française soient employées pour la construction et le fondement de cette école. C'est pendant cette même année que les membres de l'Église sont invités à présenter un spectacle de danses et de chants polynésiens aux touristes voyageant sur les bateaux de la Matson Line et que le premier programme radio de l'Église est présenté sur les ondes de Radio Tahiti. Ce programme d'une durée d'une demi-heure consiste principalement en chants par le chœur des jeunes sous la direction d'Elder Thomas R. Stone.

De nombreux problèmes ternissent les relations entre le gouvernement et la Mission. Celles-ci sont si tendues qu'en 1959 la Première Présidence envoie un télégramme au président Reeder pour lui demander d'engager un avocat pour aider la Mission à améliorer ses relations avec le gouvernement. Les visas des missionnaires, les projets de construction, les demandes d'activités et autres permis sont souvent bloqués par les autorités administratives. Le 20 mars 1959 un bal payant et un match de boxe sont organisés par la branche de Paea. De nombreux membres et non membres de Papeete, Paea et des districts se présentent aux portes d'entrée lorsque les gendarmes interviennent pour annuler la soirée sur ordre du gouverneur Sicaud.

Le 23 juillet 1959 Ernest C. Rossiter arrive à Papeete sur assignation de la Première Présidence pour aider le président Reeder dans ses relations avec le gouvernement français. Après plusieurs jours de travail avec les autorités du Territoire, le président Reeder explique : « Les résultats me déçoivent, et les conditions sont pires que ce que j'appréhendais, et ce n'est pas étonnant que nous ne soyons pas en bonnes relations avec l'État car les incidents et les accusations contre l'Église sont graves. Le président Rossiter et moi-même visitons nos membres, et leur demandons de nous soutenir. Nous leur rappelons le 12e Article de foi, et demandons leur coopération à 100 %, car nous avons promis au gouverneur Sicaud, notre soutien loyal. Nous avons aussi rappelé aux saints qu'ils ne peuvent recevoir aucune bénédiction du Seigneur, s'ils ne respectent pas les lois du pays. Je suis reconnaissant envers le Seigneur, pour son inspiration et ses bénédictions. Cela renforce mon témoignage car je sais que le Seigneur nous donne les moyens d'accomplir ses buts, et ma prière est que je sois toujours humble pour accepter ses conseils. »

En juillet 1959, les préparatifs vont bon train pour permettre à 30 membres tahitiens de se rendre au temple de Hawaii sur le bateau de la Mission, le « Paraita ». Le capitaine, frère Raituia T. Tapu, a réussi à obtenir la permission de l'administration française pour réaliser ce voyage et a également reçu celle du président David O. McKay. Par ailleurs les membres ont beaucoup travaillé et longuement épargné pour préparer ce déplacement et tout semble prêt. Cependant, dès son arrivée, Ernest C. Rossiter demande à tenir une réunion avec les membres qui se préparent à aller au temple pour leur expliquer que le président David O. McKay désire que le voyage soit annulé. Le président de Mission explique dans le journal de la Mission que quelques jours seulement avant le départ des saints tahitiens pour Hawaii :

« Nous sommes allés à la réunion avec les membres de la prêtrise. Après avoir entendu le message de la Première Présidence, ils ont dit qu'ils étaient persuadés que si cela venait des dirigeants de l'Église, c'était inspiré du Seigneur, et que l'unique façon de lui montrer qu'ils l'aimaient et qu'ils étaient reconnaissants pour les bénédictions qu'Il leur avait données, c'était d'obéir à la recommandation qu'on leur avait faite. Je les ai ensuite fait voter et toutes les mains se sont levées pour accepter la décision de la Première Présidence. »


Ainsi le voyage a été annulé, et ni le président Rossiter, ni le président de Mission, ni les saints tahitiens fidèles ne savaient réellement pourquoi le prophète de Dieu leur avait demandé de ne pas le faire. Ils l'avaient annulé parce qu'ils avaient foi aux dires du prophète.

Frère Tapu explique plus tard que la raison du prophète est devenue évidente lorsqu'il a reçu un appel téléphonique provenant du chef du port lui signalant que le « Paraita » était en train de couler. Frère Tapu raconte en ses propres termes : « Le Chef du Port m'a dit : 'ton bateau est en train de couler.' Et j'ai répondu : 'Quoi ? Je viens de le sortir du chantier naval !' Il a renchéri : 'Ton bateau est en train de couler. Dépêche- toi !' Je me suis donc précipité au port et le bateau était à moitié englouti. Mon second se trouvait sous la coque, essayant de voir ce qui se passait. Il a découvert que le tuyau d'évacuation des cuisines était pourri. L'ouvrier avait repeint du bois complètement pourri et un tuyau rouillé, qui s'était brisé ! Ce qui avait permis à l'eau de pénétrer dans le bateau. Donc, que se serait-il passé si nous nous étions trouvés à trois ou quatre cents kilomètres en mer sur un canot de sauvetage ? Si nous étions partis comme prévu, nous aurions été à cette distance quand le conduit et le bois pourri avaient cédé. »

Un nouvel épisode dans le développement de la Mission s'ouvre le 21 octobre 1961 lorsque le président Kendall Young organise la branche de Nouméa. Cette petite branche est composée de membres tahitiens travaillant en Nouvelle-Calédonie. L'année suivante le président Young se rend en France pour choisir un directeur pour la future école mormone de Tahiti. Frère Louis Bertone et sa famille arrivent à Tahiti en janvier 1963 et l'autorisation finale de bâtir l'école est accordée en février de la même année. De nombreux membres participent activement à la construction de l'école et les travaux avancent au rythme prévu. Sa consécration aura lieu le 9 septembre 1964.

Le 23 mai 1963, la goélette « Manuia » transportant les membres de l'Église ayant assisté à l'inauguration de l'église de Haapu, connaît une fin dramatique. Ayant embarqué en plus de ses quatre membres d'équipage, quarante-sept personnes, et au moment de s'engager dans une des plus mauvaises passes de la Polynésie Française, celle de Maupiti, là où les vagues forment des creux de quatre mètres, elle se met de travers et est brutalement jetée sur le récif, se renversant quille en l'air et entraînant ses passagers à l'eau, dont neuf se noient et sis sont portés disparus. Trois bébés et une fillette de quatre ans sont parmi les victimes. Tel est le triste bilan de cet effroyable drame de la mer, qui a endeuillé tout le Territoire et la Mission mormone. Cette pénible insolente réalité.

Le 15 novembre 1963, un télégramme de la Première Présidence autorise le président Stone à organiser un voyage de membres tahitiens pour le temple de Nouvelle-Zélande. Le voyage est fixé au mois de décembre et 69 membres se préparent activement pour ce grand évènement. À leur arrivée à Auckland le 18 décembre 1963, des reporters Néo-Zélandais sont à l'aéroport pour accueillir les « pèlerins tahitiens » qui ont tant sacrifié pour venir au temple. Le jour de Noël 1963, en Nouvelle-Zélande, le groupe dans sa totalité participe à la première session du temple en tahitien. Quel jour mémorable pour tous. Une note des archives de la Mission datant du 5 janvier 1964 parlant du retour des membres nous donne le renseignement suivant :

« Aujourd'hui a été un jour exceptionnel et une expérience enrichissante pour la Mission. Les membres qui sont revenus de Nouvelle-Zélande et reflètent l'esprit de l'Évangile. Nous savons qu'ils seront d'une grande aide à
la Mission. Une longue réunion d'une heure est tenue à l'église de Fariipiti, pour honorer les voyageurs fatigués mais heureux. Nos frères et sœurs polynésiens, ont finalement participé au travail du temple, but qu'ils se fixaient depuis de nombreuses années. Nous savons que ce voyage est le premier d'une série qui suivra dans les années à venir. »

Le 17 février 1967, le président Karl M. Richards, un avocat international, qui a travaillé pour le gouvernement américain en France rencontre le gouverneur de la Polynésie Française, Monsieur Sicurani. Le président Richards reçoit l'autorisation d'augmenter le nombre de missionnaires « popaa » jusqu'à 60, ce qui représente un grand pas en avant pour la Mission. Une entrevue avec le gouverneur de Nouvelle-Calédonie, Monsieur Risterruci, dix jours plus tard à Nouméa marque une autre étape importante lorsque la permission est donnée par le gouverneur d'ouvrir une Mission mormone en Nouvelle-Calédonie. C'est l'année suivante, en mai 1968 que la terre calédonienne est consacrée pour la prédication de l'Évangile par Elder Thomas S. Monson, du Collège des douze apôtres.

Le recensement des membres de l'Église fait en février 1969 donne les chiffres suivants : 1.022 hommes de plus de 20 ans ; 507 jeunes gens de 12 à 20 ans ; 675 enfants masculins de moins de 12 ans ; 840 femmes de plus de 25 ans ; 1680 jeunes-filles de 12 à 25 ans et 53 enfants féminins de moins de 12 ans. Lors de la conférence de district du mois d'avril, la barre du millier est dépassée pour la première fois quand 1.003 fidèles assistent à la session générale du dimanche.

L'année 1970 commence par une merveilleuse expérience du pouvoir de la prêtrise. Le 6 janvier 1970, Elder John E. Call, à la demande du président de Mission Ralph J. Richards, écrit un compte rendu sur les évènements passés dont voici un extrait : « Maui Turoa était malade quand Elder Summers et moi-même sommes allés en ville le jour de Noël. Nous nous sommes arrêtés au quartier mormon, et Takua, son mari, nous demanda de la bénir. »

Le dimanche 4 janvier 1970, après la réunion de témoignage, un membre de la branche de Papeete 1, frère Tava Kote, m'a arrêté pour me dire que plusieurs personnes pensaient qu'un démon, en elle, était responsable de son état. Beaucoup de membres de la branche Papeete 1 avaient consacré ce jour de jeûne pour l'aider à guérir.
Maintenant, ils voulaient que j'aille, avec un autre Elder, chasser cet esprit. Je répondis que puisque c'était le président Richards qui avait baptisé Maui pendant sa mission, ce serait une bonne idée de lui demander de le faire ; Tava Kote accepta et j'allais informer le président. Il fut décidé que nous irions aux environs de 19 heures, ce soir-là.

Maui était couchée sur le sol quand le président Richards arriva. Sept d'entre nous étaient rassemblés : Elders Scott, Sutherland, Bailey, Roundy ; Merrill et moi
étions déjà dans la maison. Elder Roundy fut le premier à entrer, puis Elder Scott. Quand le président entra dans la pièce, Maui sauta en l'air et se déplaça vers un côté du lit, près de sœur Manava, paraissant terrifiée et agitant son doigt vers le président. Le reste des Elders entra dans la pièce pendant ce temps.

Le président dit :
« Maui, me connais-tu ? » Maui répondit : « Nous ne vous connaissons pas, vous êtes très différents de nous, vous nous effrayez, vous avez un grand pouvoir. » « Elle a le démon en elle », ajouta Elder Merrill. « Maui, me connais-tu ? Je suis Ioane. Je suis le missionnaire qui t'a baptisée, me reconnais-tu ? » demanda le président. Elle secoua la tête : « Non. » Pendant ce temps, Maui s'était de nouveau tassée derrière Manava comme un chien. « Qui êtes-vous ? » demanda le président. « Marama Vahine » répondit Maui. « Qui » ?' demanda le président. « Marama Vahine ». Président, elle a dit qu'il y avait 7 esprits en elle. « Combien d'entre vous sont-ils présents ? » demande le président. « Nous sommes sept ». « Combien ? » « Sept ». « Quels sont vos noms ? » « Marama Vahine, Puai, Aie, Patu, Pai », puis elle dit « non », comme si elle ne voulait pas que nous sachions qui étaient les deux autres.

« Vous savez que le pouvoir de la prêtrise de Melchisédek est dans cette pièce, et qu'aucun esprit dépravé ne peut rester ici », déclara le président.
« Nous allons partir, nous allons partir ». Soudain, le président Richards leva son bras droit en angle droit et dit : « Au nom de Jésus-Christ et par le pouvoir de la sainte prêtrise de Melchisédek, je vous ordonne de la quitter. » Maui tomba instantanément sur le sol. Nous fûmes tous surpris et essayâmes de l'attraper pour arrêter sa chute. Une fois qu'elle fut sur le sol, le président nous suggéra de prier. Nous inclinâmes nos têtes, pendant qu'il demandait à notre Père dans les cieux d'aider Maui et de ne pas permettre à ces esprits d'entrer en elle à nouveau.

Puis, il suggéra de porter Maui sur le lit, mais Elder Merrill dit que ce ne serait pas possible et qu'elle serait probablement mieux par terre. C'est ainsi que nous fîmes, vu qu'elle avait déjà passé les quelques jours écoulés, couché sur le sol. Le président me demanda si j'avais de l'huile consacrée, je répondis par l'affirmative. Il nous demanda à tous, avant cela, de joindre notre foi. Puis, dans le scellement, il demanda à nouveau au Seigneur de ne pas laisser les esprits revenir en elle, comme bénédiction pour elle, pour Maui et sa famille. Puis, il demanda, après cela, que nous jeûnions tous, le jour prochain. Nous partîmes tous. Quarante à cinquante personnes virent ce qui s'était passé.

Le lendemain matin, quatre d'entre nous retournèrent chez Maui, d'assez bonne heure. Nous entrâmes et pûmes tout de suite sentir la différence d'esprit qu'il y avait comparativement à celui qui existait, l'après-midi précédent. Nous commençâmes à lui parler et elle nous dit que ses voisins avaient essayé de lui faire croire que nous étions venus chez elle la veille et que le président Richards était avec nous. Elle refusa de nous croire, disant que peut-être elle était profondément endormie et ne pouvait pas s'en souvenir. Nous retournâmes plus tard ce soir-là, avec le président et parlâmes avec elle un moment. Encore une fois, elle ne se souvenait plus de ce qui s'était passé, mais elle commençait à croire ce que nous lui disions. Elle était très attristée de penser que son corps était devenu l'habitation d'esprits néfastes. Le président me demanda de donner une courte prière puis nous partîmes.

Le 14 mai 1971. Le président Ralph Richards et Elder John Tchan Fat rencontrent Monsieur Teissier, secrétaire général du gouverneur à cause d'une pétition signée par 3 membres de conseil de district de Raivavae demandant l'expulsion des missionnaires. Monsieur Teissier suggère de ralentir le travail à Raivavae pour quelque temps. Le président Richards décide de transférer les missionnaires de Raivavae à Papenoo. 1971 est l'année des quatrièmes Jeux du Pacifique Sud et de nombreuses compétitions sportives ont lieu dans les locaux de l'Église (judo dans le Fare Basket et le ping-pong dans la cantine de l'école) et l'Église organise l'équipe de soft-ball qui va représenter Tahiti à ces Jeux. Pour l'ouverture, le 8 septembre, les Elders Cave et Perrin représentent le président de Mission dans la tribune officielle.

Tahiti a toujours été bénie par les nombreuses visites d'Autorités générales. Une nouvelle raison de se réjouir survient lorsqu'une lettre de Spencer W. Kimball (président du Collège des douze apôtres) au président Karl M. Richards (qui vient de revenir à Tahiti une deuxième fois pour remplacer Ralph J. Richards rapatrié aux États-Unis pour raison de santé) annonce que la création d'un pieu à Tahiti a été approuvée par la Première Présidence. Le président Kimball dit dans sa lettre : « Je suis heureux de m'être désigné moi-même pour venir organiser votre pieu ». Malheureusement le président Spencer W. Kimball devra subir une opération à cœur ouvert et Elder Marvin J. Ashton du Collège des Douze et Elder Franklin D. Richards, assistant du Collège des Douze sont désignés par la Première Présidence pour organiser le pieu de Papeete-Tahiti.

Le 15 mai 1972, frère Raituia Tehina Tapu est appelé comme président de pieu, Raymond Baudin comme 1er conseiller, Fernand Caumet comme 2eme conseiller, Francis Schatt comme greffier et Charles Arthur Palmer comme patriarche.

La création d'un pieu à Tahiti, le premier de langue française, est annonciateur de grandes bénédictions. Pendant la décade qui va suivre l'organisation du pieu de Papeete-Tahiti, celui-ci va suivre le rythme de l'Église dans l'implantation des programmes destinés à bénir les saints.

La Société Généalogique tout d'abord recrute frère Yves Perrin à la fin de sa mission en juillet 1972 pour recueillir les généalogies orales des tahitiens. Certains membres avec l'aide de leurs livres de généalogie de famille arrivent à réciter jusqu'à 70 générations. Par ailleurs, à la suite d'un incendie au greffe de Papeete, l'Église reçoit la permission de récupérer le fichier généalogique de Tahiti. Après de longues heures de travail bénévole par des membres dévoués, les fiches sont nettoyées et répertoriées pour être microfilmées. Le micro filmage s'étend également à d'autres archives du Territoire.

Le programme de Séminaire & Institut est ensuite introduit en Polynésie française. En 1975, frère Jean- Michel Carlson est appelé alors qu'il était étudiant à Brigham Young University à Provo pour commencer ce travail. En septembre 1975, un programme d'étude quotidienne du Nouveau Testament est enseigné à Tahiti à 230 étudiants.

De nombreuses visites d'Autorités générales continuent à bénir la vie des saints de Polynésie française. La plus marquante est la visite du président Spencer W. Kimball, accompagné du président Nathan Eldon Tanner et de plusieurs autres Autorités générales, du 2 au 5 mars 1976. Une autre visite marquante est celle de Elder Marvin J. Ashton, le 16 novembre 1975, qui réorganise le pieu de Papeete-Tahiti. Victor D. Cave, âgé de 27 ans, est appelé à présider le pieu, en remplacement de Raituia Tehina Tapu, qui est appelé comme patriarche.

Pour mieux faire face aux besoins des paroisses et branches de l'Église à Tahiti et dans les îles et pour faciliter la mise en place des certains programmes temporels, un Bureau régional des affaires temporelles est organisé en 1981 lorsque frère Joël Hart est appelé à superviser les différents services temporels de l'Église. À la conférence générale semi annuelle de l'Église en octobre 1980, une annonce surprend tous les membres de Tahiti. Celle de la construction d'un temple à Tahiti. Après plusieurs mois passés à chercher un terrain adéquat, le département de la construction des temples décide que le temple de Tahiti sera bâti dans la cour de l'école mormone. Le 13 février 1981, le président Spencer W. Kimball consacre le terrain du temple en ces termes :

« Notre Père qui est aux cieux, que ton nom soit sanctifié. Nous sommes rassemblés, ici, aujourd'hui, dans ce beau pays de Tahiti, pour dédicacer et consacrer cet endroit qui a été choisi par inspiration pour la construction d'un saint temple, une maison du Seigneur. Nous te remercions, Père, pour le rétablissement de l'Évangile de ton Fils Jésus-Christ, dans ces derniers jours. Nous sommes reconnaissants que tu nous aies révélé le but des temples et les saintes ordonnances qui y sont accomplies. Nous sommes reconnaissants aussi, Père, pour la venue d'Élie le prophète, qui a rapporté les clefs pour tourner le cœur des pères vers les enfants et le cœur des enfants vers leurs pères. Nous te remercions pour le pouvoir sacré de scellement qui est utilisé dans le temple, par lequel ceux qui sont scellés sur la terre sont scellés aussi dans les cieux.

« Père céleste, bénis ce beau pays. Bénis ses dirigeants, bénis ses habitants qui sont des enfants de Léhi. Donne leur la paix et le bonheur. Nous te prions de protéger ce pays de toute influence ou de toute condition qui pourrait perturber la paix et la tranquillité de ces belles îles. Père, nous pensons à tous les hommes, femmes et enfants, à tous les saints fidèles qui te donnent volontairement leur temps, leurs talents et leur argent pour aider l'édification de ce temple. Nous disons notre amour et notre gratitude à tous ceux qui participent ainsi, si généreusement. Nous te demandons de leur donner la joie et la satisfaction, et que cette joie grandisse tandis que le temple sort de terre et se termine, et qu'il est ici, ta sainte maison pour toujours et à jamais.

« Père céleste, bénis tous ceux qui participent à la construction de ce bel édifice. Donne leur ton esprit en abondance jusqu'à la fin, de manière que le travail effectué soit digne d'un bel édifice, et que l'ouvrage puisse progresser rapidement, pour que le temple soit terminé à temps, prêt pour sa consécration et son utilisation par tes enfants. Fais que, aucun accident ni aucun mal n'arrive aux personnes engagées dans ce travail, ainsi qu'au temple. Protège ce dernier des ravages du temps, de la nature ou des hommes. Nous prions pour que le travail fait pour les vivants et les morts dans ce nouveau temple soit accompli tout au long des jours à venir et pendant le millénium, pour la bénédiction de milliers de tes enfants. Puisse ce temple être une lumière pour tous dans ces îles, et un sujet d'inspiration, non seulement pour les saints des derniers jours, mais aussi pour tous les autres.

« Maintenant, Père céleste, en tant que serviteurs, et par l'autorité de la sainte prêtrise que je détiens, nous consacrons et sanctifions cet endroit pour être une terre sacrée pour la construction d'un autre saint temple. Maintenant, veuille accepter cette dédicace et le premier coup de pioche qui va suivre, et consacrer tout ce qui est dit et fait ici pour que tes buts soient pour la bénédiction éternelle et le bien de tes enfants, nous te le demandons humblement, au nom de Jésus-Christ, notre Sauveur et Rédempteur. Amen. »

Le rapport du premier trimestre 1982 met en évidence la progression de l'Église en Polynésie Française. Le pieu compte en effet 4204 membres et la Mission 1820 membres. Le chiffre record pour une conférence de pieu est atteint en janvier 1982 quand 1920 membres assistent à la session générale du dimanche.

Juin 1982 marque un tournant capital dans l'histoire de l'Église en Polynésie française. L'oeuvre du temple commence, un représentant régional de Tahiti est appelé, le pieu est divisé et l'école mormone ferme ses portes. Ces changements importants sont autant de raisons de se réjouir et de remercier le Seigneur pour son amour envers ses enfants.


Note de la Rédaction

Pour poursuivre l'histoire jusqu'en 1993, voir : George Ellsworth et Kathleen Perrin, Chronique de la foi et du courage : Les saints des derniers jours en Polynésie française
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