Croire le Christ



Stephen E. Robinson




©1992 Stephen Edward Robinson

Titre de l'édition originale : Believing Christ
Traduction : Claude Boisseau




REMERCIEMENTS
CHAPITRE 1 : LE GRAND DILEMME
CHAPITRE 2 : LA BONNE NOUVELLE
CHAPITRE 3 : L’ALLIANCE
CHAPITRE 4 : LE SALUT PAR LA GRÂCE
CHAPITRE 5 : INCOMPRÉHENSION DE LA DOCTRINE DE LA GRÂCE
CHAPITRE 6 : « SEIGNEUR  ? COMMENT EST-CE POSSIBLE ? »



Pour Sarah, Rebekah, Emily, Michael, Mary et Leah


REMERCIEMENTS

Je remercie tous ceux qui ont partagé avec moi les expériences relatées ici, surtout ma femme, Janet, pour m’avoir autorisé à les écrire afin qu’elles puissent être une bénédiction pour qui se trouverait dans semblable situation. Dans les cas qui ne concernaient pas ma famille, j’ai changé certains noms et autres renseignements significatifs se rapportant aux personnes, mais je n’ai pas changé la teneur des expériences. Dans un cas, les caractéristiques de plusieurs personnes ayant des histoires semblables ont été combinées en une seule.

Je me dois de dire un mot à propos de ma femme, Janet, puisqu’une une des expériences clés relatées ici la concerne tout particulièrement, on m’a dit une fois qu’en parlant d’elle ainsi je la montrais sous un mauvais jour et que je faisais briller son mari à ses dépens. Habituellement, Janet et moi pensons en termes de nous plutôt qu’en termes d’elle ou moi, mais si nous devions comparer nos statures respectives, je crois que le sketch suivant illustrerait à peu près les proportions exactes.

Lorsque Janet arrivera aux portes des cieux, le Seigneur dira aux anges quelque chose de ce genre : « Hé ! Regardez, voilà Janet Robinson ! La voilà enfin ! Sortons tous pour lui souhaiter la bienvenue et invitons la à entrer ». Mais au moment où il la saluera sur les marches, il s’arrêtera et dira : « Mais Janet, qu’est-ce que c’est que cette triste chose que tu traînes derrière toi ? » Ce à quoi elle répondra : « Oh, ça ? C’est mon mari. Est-ce que je peux le faire entrer aussi ? » Sans elle, je n’ai pas la moindre chance, et tous ceux qui nous connaissent le confirmeront.

J’ai longtemps soutenu qu’un livre sans notes ne vaut pas la peine d’être lu, car l’absence de documentation indique que son contenu ne représente que l’opinion personnelle de l’auteur et que celle-ci n’est pas admise sur le plan académique. Dans ce cas, je plaide coupable. Fournir une documentation sur soi-même ou sur ses expériences, ses réflexions, et ses opinions est chose peu aisée. C’est pourquoi le lecteur acceptera mon opinion ou la rejettera, c’est son choix. Comme c’est un sujet personnel, j’ai essayé d’utiliser le même style qu’en classe ou lors d’une conversation, qu’il soit familier, elliptique, ironique ou sarcastique. Je présente mes excuses à Mademoiselle Wood, mon institutrice à l’école primaire, qui m’a enseigné à faire mieux. Je ne fais appel à aucune autorité extérieure pour appuyer mes dires, même si j’ai inclus toutes les notes que j’ai pu dans ce genre de livre, qui est évidemment axé sur la théologie, mais aussi indiscutablement tourné vers la piété. J’aimerais que le lecteur sache que je crois ce que j’ai dit ici.

Qu’il soit clair que j’ai écrit ce livre en tant que saint des derniers jours pour un lectorat de saints des derniers jours. Je n’ai pas la prétention d’être objectif, scientifique et détaché. Si cette œuvre avait été un papier à l’adresse de mes collègues dans le domaine académique de la religion, la méthodologie et le ton en auraient été très différents. Mais il n’y a aucun problème à être bilingue, et j’ai choisi pour ce livre le langage de la foi.

On me demande souvent comment un président de département trouve le temps d’écrire. Dans ce cas, la réponse se trouve dans le soutien exceptionnel de ma secrétaire. Je remercie Joell Woodbrey de me protéger des choses non essentielles.

Une petite partie de ce livre a été présentée en mai 1990 lors d’un discours à BYU intitulé : « Believing Christ : A Practical Approach to the Atonement et il a été édité dans « BYU Today » de novembre 1990 et dans Brigham Young University 1989-90 Devotional and Fireside Speeches (Provo : University Publications, 1990). Une version légèrement révisée de ce discours a aussi été réimprimée dans l’Ensign et les magazines internationaux de l’Église en avril 1992

L’auteur n’a aucune autorité pour s’exprimer dans ce livre au nom de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours. Les idées qui y sont exprimées représentent un point de vue sincère, mais strictement personnel.


CHAPITRE UN : LE GRAND DILEMME

Pour l’homme, le problème universel, la grande contradiction, dilemme, ou dichotomie réside en deux simples faits :

Le premier est clairement cité dans les Doctrine et Alliances 1:31 : « Car moi, le Seigneur, je ne puis considérer le péché avec la moindre indulgence. »

Cette Écriture semble dure, car elle déclare nettement que Dieu ne peut tolérer le péché ou l’état de péché à quelque degré que ce soit. Il ne peut fermer les yeux ou l’ignorer, ni se détourner et regarder ailleurs. Il ne va pas l’occulter ni dire : « Oh ! C’est juste un petit péché. Ça ira. » Le principe divin qui règne au ciel est absolu, et il n’autorise aucune exception. Il n’y a aucun moyen de l’éviter

Beaucoup pensent que le Jugement dernier se passera comme lors d’une pesée. Les bonnes actions d’un côté et les mauvaises de l’autre. Si les bonnes œuvres sont supérieures aux mauvaises, ou si les cœurs sont fondamentalement bons et surpassent le péché, alors ils peuvent être admis en présence de Dieu. Cette notion est fausse.

Dieu ne peut et ne veut pas,ainsi que l’illustre D&A 1:31, qu’aucune imperfection morale ou éthique de quelque degré que ce soit, demeure en sa présence. Il ne peut tolérer le péché « avec la moindre indulgence  ». La question n’est pas de savoir si le nombre de nos bonnes œuvres est supérieur à celui de nos péchés. Si nous savons qu’il n’existe qu’un seul péché en nous, c’en est fini de nous. Le principe céleste inclut une innocence totale, pure et simple. Rien d’autre qu’une totale innocence ne saurait être acceptée dans le royaume de Dieu. Maintenant, quoique vous en pensiez, n’arrêtez votre lecture à ce point. Bien qu’il soit déprimant de constater à quel point sont stricts les principes divins, une incroyable bonne nouvelle s’en suit.

L’autre point, qui a pour conséquence que ce dilemme représente le problème le plus important pour l'homme, est assez simple : je pèche tous les jours, et vous aussi. Personne n’est innocent selon les critères célestes. Nous ne pouvons être parfaits tout le temps. Nos actions ne sont pas en accord avec le comportement exigé pour se tenir dignes en la présence divine dans le royaume de Dieu. Une des nombreuses Écritures illustrant cela se trouve dans Romains 3:23 « Car tous ont péché, et sont privés de la gloire de Dieu. »

En d’autres termes, tous les êtres humains, même le meilleur, ont commis des péchés ou démontré des imperfections incompatibles avec les principes célestes et Dieu ne peut le tolérer. Dans ce passage comme ailleurs, Paul laisse entendre qu’il n’existe que deux catégories : Pour lui, soit vous êtes parfait, soit vous êtes pécheur à un degré plus ou moins important. Il n’existe pas de juste milieu. Après tout, un petit péché a suffi pour qu’Adam et Ève soient expulsés du Jardin d’Éden et chassés de la présence de Dieu. Lorsqu’ils étaient totalement innocents, ils pouvaient marcher et parler avec lui. Une transgression, et c’en a été fini pour eux.

À partir de ces deux faits (l’exigence divine absolue de la perfection et notre incapacité absolue à l’assumer) une conclusion est inévitable : en raison de notre imperfection et notre nature pécheresse nul ne peut demeurer en présence de Dieu. Cette contradiction entre les exigences divines et notre incapacité à les satisfaire représente un problème important comportant les conséquences les plus dangereuses de tout l’univers.

Parfois nous avons tendance à penser que tout le monde agit mieux que soi. Nous pensons que le voisin ne pêche pas, qu’il garde tous les commandements tout le temps, et nous nous décourageons de ne pouvoir faire de même. En conséquence, beaucoup et même les meilleurs d’entre nous, se désespèrent devant ce gouffre infranchissable séparant les exigences divines des actions de l’homme. C’est pourquoi lorsque le grand pêcheur d’hommes, Simon Pierre fut pour la première fois témoin de la puissance du Maître, il s’écria : « Éloigne-toi de moi, Segneur, car je suis un pécheur. » (Luc 5:8)

Lorsqu’il a vu le pouvoir de Jésus-Christ et qu’il a su avec certitude qu’il était envoyé de Dieu, Pierre en est arrivé à la seule conclusion possible : « Je ne suis pas digne. Tu ne devrais pas être ici avec moi. Si tu savais combien je suis corrompu, tu saurais que c’est sans espoir et que je ne suis pas comme toi : je suis un pécheur. Alors, ne perds pas ton temps avec moi ; va trouver un homme juste et pieux, qui a des chances d’être sauvé. Saint comme tu l’es, tu mérites un bien meilleur disciple que le pauvre misérable que je suis ». Nul ne connaissait mieux que Pierre l’immense abyme existant entre les exigences divines et l’incapacité des hommes à les satisfaire. Avant d’avoir eu connaissance de la bonne nouvelle, même le grand pêcheur d’hommes ne semblait avoir aucun espoir, aucune issue quant au Grand Dilemme.

Je pourrais illustrer notre situation par une analogie prise dans mes expériences familiales. J’ai cinq adorables filles, mais je n’ai qu’un fils. Je suis assez sévère avec Michael, mon fils, parce que je l’aime et que je voudrais qu’il grandisse mieux que moi. Un jour quand Michael avait cinq ou six ans, il a fait quelque chose que j'estimais tout à fait indigne ; alors je l’ai corrigé, je lui ai crié dessus et je l’ai expédié dans sa chambre en lui disant : « Ne t’avise pas de sortir tant que je ne serais pas venu te chercher ! »

Et je l’ai complètement oublié. Les heures se sont écoulées. Je me souviens que j’ai lavé la voiture et tondu la pelouse et j’étais à la moitié d’un match de football que j’étais en train de regarder à la télé quand j’ai entendu la porte de la chambre de Michael qui s’ouvrait là bas tout au fond du vestibule après la salle de séjour.

« Ho ! Non » me suis je dit en battant ma coulpe en me rappelant Michael. Je bondis vers le vestibule. Mon petit garçon se trouvait là bas à l’autre bout du vestibule. Il avait les yeux gonflés, la figure rouge, et les larmes coulaient sur ses joues. Il était un peu nerveux et hésitant, car je lui avais dit de rester dans sa chambre jusqu’à ce que je vienne le chercher, mais il me regarda du fond du couloir et me dit : « Papa, est-ce qu’il n’y a pas moyen d’être encore amis ? »

Alors là, j’ai eu le cœur brisé. Je me précipitai vers lui et je l’ai serrai dans mes bras et je l’assurai qu’aucun petit garçon n’avait jamais été autant aimé par son père que lui.

Nous sommes dans le même bateau, spirituellement parlant, que Michael. Nous savons tous ce que nous ressentons quand nous sommes spirituellement « renvoyés dans notre chambre c’est à dire chassés de la présence de notre Père céleste, retranchés et isolés. C’est dans la mortalité que nous goûtons à la douleur du Grand Dilemme. Sachant mieux que quiconque notre dramatique insuffisance, il nous arrive, comme Pierre, d’être tentés de dire au Seigneur de se tourner vers quelqu’un plus digne que nous. Ce n’est pas une manifestation de rejet ou de refus du Sauveur ; c’est au contraire l’expression de notre désespérance.

Nous avons tous fait des choses honteuses, et nous avons tous ressenti le poids horrible de la culpabilité, du remords et avons tous battu notre coulpe. Il existe des péchés qui nous rendent infirmes spirituellement ; des péchés qui ne nous tuent pas sur le coup, mais pourrissent et ne guérissent pas ; des péchés qui ont une odeur d‘égouts ou pour lesquels on a l’impression d’avoir contracté quelque maladie mortelle, des péchés dont on se lave, mais dont on n’arrive pas à se purifier. Dans les griffes de ces péchés, au sein de la culpabilité et du désespoir, dans notre terrible solitude, retranchés de Dieu, nous élevons les yeux vers le ciel et nous écrions : « Oh ! Père, est-ce qu’il n’y a pas moyen d’être encore amis ? »


CHAPITRE DEUX : LA BONNE NOUVELLE

La réponse donnée par tous les prophètes et que l’on trouve dans toutes les Écritures à la question du Grand Dilemme est un retentissant « Oui ! Le monde imparfait peut se réconcilier avec Dieu dans sa perfection pour demeurer en sa présence. « Et comme c’est un Dieu qui parle, il nous assure qu’aucun fils ou fille n’a jamais été plus aimé par un père mortel que nous. En fait, la solution au Grand Dilemme, à la désaffection de l’humanité imparfaite d’avec son Dieu parfait, se trouve précisément dans ce que toutes les Écritures rendent témoignage d’une façon ou d’une autre : La Réconciliation (Atonement en anglais, ndt) de Jésus-Christ.

La Réconciliation signifie rapprocher deux personnes qui ont été séparées, détachées ou qui ne sont pas de la même nature, comme Dieu et sa perfection et moi ou vous et nos imperfections pour les rassembler afin de n’en faire plus qu’une. Historiquement, le mot dérive de deux mots plus petits et d’un suffixe at.one.ment (réunifier). Le mot grec pour atone est souvent traduit par « réconcilier«. C’est pourquoi Jésus-Christ ajoute une troisième dimension aux deux dures réalités mentionnées plus haut dans les Doctrine et Alliances 1:31 et dans Romains 3:23, à savoir : L’expiation, la réconciliation, la « bonne nouvelle » de l’Évangile, c’est que nonobstant notre séparation d’avec Dieu, il existe un processus qui nous permet de redevenir un avec lui.

J’aime beaucoup la façon dont le Seigneur le dit dans Ésaïe 1:18 : « Venez et plaidons ensemble : si vos péchés sont comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige ; s’ils sont rouges comme la pourpre, ils deviendront comme la laine. » Je voudrais m’arrêter un peu sur cette Écriture afin que sa signification ne nous échappe pas.

Voici ce que dit le Seigneur dans cette Écriture : « Peu importe ce que vous avez fait. Quoique ce soit, qu’importe son horreur ou sa vilenie, là n’est pas la question. Quel que soit votre péché, je peux l’effacer, je peux vous purifier et vous rendre à l’innocence, à la pureté et à la dignité, et je peux le faire aujourd’hui, dès maintenant. »

Croire le Christ

Malheureusement, de nombreux membres de l’Église n’y croient pas. Tout en affirmant avoir le témoignage du Christ et de son Évangile, ils rejettent celui des Écritures et des prophètes concernant la bonne nouvelle de l’expiation du Christ. Ils soutiennent souvent de façon naïve des affirmations contradictoires sans discerner ces mêmes contradictions. C’est ainsi qu’ils croient que l’Église est vraie, que Jésus est le Christ, et que Joseph Smith était un prophète de Dieu, et ils refusent la possibilité de leur pardon total et complet et de leur exaltation finale dans le royaume de Dieu. Ils croient en l’existence du Christ, mais pas vraiment en son pouvoir rédempteur absolu. Il leur dit : « Même si vos péchés sont comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige. Je peux vous rendre purs, dignes et célestes.» Et ils lui répondent : « Non, tu ne peux pas. L’Évangile marche pour les autres ; mais pas pour moi. »

Pour autant la « bonne nouvelle » de l’Évangile me concerne particulièrement non parce qu’elle annonce que d’autres meilleurs que moi peuvent être sauvés, mais qu’elle promet que moi, pauvre individu misérable inadapté et imparfait, je peux être sauvé. Et tant que je n’aurais pas accepté cette éventualité, tant que je ne croirais pas que le Christ peut me faire entrer dans le royaume pour me placer sur un trône, je n’accepterais pas la bonne nouvelle de l’Évangile. En fait j’accepte le messager, mais je rejette son merveilleux message.

La foi est le premier principe de l’Évangile, mais il ne se limite pas à croire à ses revendications historiques. Croyez-vous que l’Église est vraie, que Joseph Smith était un prophète, et que l’Évangile a été rétabli dans les derniers jours ? C’est bien, mais ce n’est pas suffisant. Le premier Article de Foi précise que l’on doit avoir foi au Seigneur Jésus-Christ. On s’imagine souvent que la foi en Christ se résume à croire à son identité en tant que Fils de Dieu et Sauveur du monde. Mais la croyance dans son identité en tant que Christ n’est pas tout. Il faut aussi croire en sa capacité, en son pouvoir de purifier et de sauver, de rendre dignes ses fils indignes.

Nous ne devons pas nous limiter à croire en son existence, nous devons aussi croire en sa capacité à réaliser ce qu’il affirme. Nous ne devons pas seulement croire au Christ, nous devons aussi croire ce qu’il dit quand il annonce qu’il peut nous purifier et faire de nous des êtres célestes. Il dit que, par son sacrifice expiatoire, toute l’humanité sera sauvée et, logiquement, chacun d’entre nous fait partie de cette ‘humanité’. C’est pourquoi tant que nous n’acceptons pas la possibilité de notre exaltation dans le royaume de Dieu, nous n’avons pas foi au Christ ; nous ne croyons pas encore.

On pourrait prétexter : « Vous ne comprenez pas. J’ai eu une enfance difficile. Quand j’étais jeune, j’ai fait des choix qui m’ont fait prendre un chemin différent, et après toutes ces années, je ne peux pas m’en sortir. Quelqu’un m’a dit un jour : « Oh ! Non, je ne m’attends pas à être exalté. Je ne suis rien. Je suis juste un membre dans la moyenne, qui va à l’église. J’ai toujours eu des appels modestes dans l’Église. Je n’ai jamais été dirigeant, et je n’ai aucun talent. Je ne serais jamais évêque (ou présidente de la Société de secours). Je n’ai rien à apporter, alors je n’attends pas grand chose de la résurrection. J’espère seulement arriver au minimum acceptable dans le royaume céleste, mais je sais que je ne serais pas exalté. »

Mon exemple favori de ce type de réflexion m’a été donné par un membre qui m’a dit un jour : « Écoutez, frère, je ne suis pas du bois dont on fait les célestes. » Je crois que j’en suis arrivé à perdre patience, car je lui ai dit : « Et alors ? Évidemment que vous n’êtes pas fait de ce bois là. Ni moi, ni personne. C’est la raison pour laquelle nous avons besoin du sacrifice expiatoire du Christ. Jean, pourquoi n’admettez vous pas votre problème : vous n’avez pas foi dans le Christ ? « À ce moment, il s’est un peu énervé, car avant d’être membre de l’Église, il avait été protestant et à ce titre, tout comme maintenant, il croyait en Jésus-Christ. Il me répliqua : « Comment osez vous me dire cela ? Je sais que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu Oui,répliquai je, vous croyez dans le Christ, mais vous ne croyez pas dans son pouvoir rédempteur. Jésus dit qu’il peut transformer votre nature pour devenir céleste, et vous avez l’audace de vous planter là et de me dire : ‘Non, il ne peut pas’. Vous croyez : très bien, mais vous ne croyez pas que le Christ peut tenir les promesses qu’il fait. »

Ces quatre exemples forment une variation sur le même triste thème. Ils se résument à : « Je ne crois pas que le Christ peut faire ce qu’il prétend. Je n’ai pas la foi dans sa capacité à m’exalter. Si on demande à ces gens de définir leurs problèmes spirituels, ils vont insister sur X, Y ou Z ; quelque problème particulier qu’ils ont rencontré lors de leur parcours spirituel. Mais en fait leur véritable problème n’est pas X, Y, ou Z. Il n’est pas particulier et il n’est pas situé à un point quelconque de leur vie spirituelle. Leur vrai problème, le numéro un, c’est le tout premier pas. Car toutes les objections ou autres raisons susceptibles d’être avancées ne sont que prétextes à cacher le même problème de base : le manque de foi au Seigneur Jésus-Christ.

Ces gens ne veulent tout simplement pas croire que l’Évangile peut les sauver. Ils ne jouiront pas du pouvoir et des bénédictions qui découlent de la foi en Christ ou des principes qui suivent celle-ci (le repentir, le baptême, et le don du Saint-Esprit) tant qu’ils n’intégreront pas dans leur vie le premier principe de l’Évangile, et qu’ils ne démontreront pas une foi sincère en Christ. Ils ne sont pas encore spirituellement nés, même s’ils se considèrent comme des membres mûrs et expérimentés.

Si nous nous bornons à croire au Christ sans croire à son pouvoir, alors c’est comme si nous étions dans des demeures sombres et froides environnés d’ampoules et d’appareils de chauffage électriques familiers, mais inutilisés et dont nous nous refuserions l’usage. C’est comme si on prétendait, à qui veut l’entendre, que le simple fait de croire à l'existence de l’électricité suffit à se réchauffer et à s'éclairer, mais tant qu’on n’a pas branché le courant, on continue à frissonner. Même si le matériel fonctionne et que la connectique est bonne, si nous n’acceptons pas le courant, et que nous nous bornons à accepter la théorie, nous ne pourrons apprécier la chaleur et la lumière. C’est pourquoi il est indispensable que la foi sincère (l’acceptation active de son pouvoir et pas simplement une croyance passive en sa réalité physique) soit le tout premier principe de l’Évangile. Tout ce que nous apprenons ou croyons en théorie importe peu ; tant que nous n’acceptons pas la réalité de notre salut, nous n’avons pas encore la lumière.

L’exigence de la perfection

La raison pour laquelle il est fréquent que des gens n’acceptent pas pleinement les bénédictions de l’Évangile c’est que la perfection absolue qui est exigée d’eux les désespère. Ils croient à tort qu’ils doivent commencer à devenir parfaits en faisant les efforts nécessaires pour que l’Expiation puisse être effective dans leur vie. Mais si on pouvait arriver à cela, on n’aurait pas besoin de celle-ci, car on serait déjà réconcilié avec Dieu, ayant rempli les critères divins de perfection de son propre chef sans passer par le Christ et son sacrifice, et ceci n’est pas possible.

Permettez que j’insiste encore : la bonne nouvelle, ce n’est pas que des gens parfaits puissent être réconciliés avec Dieu, mais que des gens imparfaits puissent l’être. À chaque fois que j’entends quelqu’un dire que l’on va devenir parfait par soi même, je me fais tout petit. Je voudrais leur dire : « Pensez-vous vraiment que l’exaltation consiste à rentrer en vous-même pour en extraire toute l’énergie et la détermination dont vous avez besoin pour vivre parfaitement ? Si c’est-ce que vous pensez, ce n’est pas d’un sauveur que vous voulez, ce que vous voulez c’est vous sauver vous-même. » Maintenant, il est vrai que pour atteindre la gloire céleste, nous devons devenir parfait. Nous avons à cœur de nous répéter entre nous à quel point nous devons être parfaits. En réalité, quelle que soit la bonne volonté que nous montrons à bien faire dans notre vie, il y a toujours un saint bien intentionné qui arrive au bon moment pour nous faire sentir que nous ne sommes pas parfaits et que nous devons faire mieux la prochaine fois. Beaucoup d’entre nous agissent ainsi de temps en temps, quel que soit le soin apporté à ce que nous faisons, nous ne nous accordons même pas un petit compliment mérité.

Le raccourci vers la perfection

C’est vrai, nous sommes très forts pour dire à quel point nous devons être parfaits si nous voulons hériter du royaume. Le hic, c’est que nous oublions souvent de nous demander comment nous pouvons atteindre cette perfection. Vous voyez, il existe un truc pour acquérir la perfection, un raccourci. Si vous ne connaissez pas le truc, le raccourci, vous allez vous épuiser à essayer de devenir parfait par vous même. Voici le grand secret : Jésus-Christ veut partager sa perfection, son impeccabilité, sa justice, ses mérites avec nous. Par sa miséricorde, il nous offre d’utiliser sa perfection, à défaut de la nôtre, afin de satisfaire aux exigences de la justice.

Dans l’immédiat, nous sommes considérés et acceptés comme étant parfaits, en devenant un avec le Christ parfait. À plus long terme, cela nous permettra à l’avenir de devenir parfaits à notre rythme ; mais ce sera longtemps après le jour du jugement dernier et longtemps après avoir hérité du royaume de Dieu, par les mérites, la grâce et la perfection de Jésus-Christ. C’est pourquoi le plus important, ici bas, consiste à devenir un en Christ par l’alliance de l’Évangile afin de bénéficier de cette union dans sa perfection plutôt que de rester isolé à tenter (vainement) de devenir parfait pour se sauver soi-même.

Ici comme dans d’autres ouvrages, j’utilise une figure de rhétorique pour ménager mon effet. En fait, il n’y a pas de raccourci pour ce cas. Permettez moi de vous donner un exemple : il y a assez longtemps notre famille vivait à Williamsport en Pennsylvanie. La vie était agréable là-bas. Nous étions propriétaires d’une petite maison dans un cadre agréable, et nous avions des voisins sympathiques. J’avais un bon travail au collège du coin et ma carrière marchait bien. Notre famille était relativement heureuse. Nous faisions nos soirées familiales et nos prières ensemble tous les soirs. Nous avions une recommandation pour le temple et y allions le plus souvent possible. J’étais dans l’épiscopat du pieu local et Janet était présidente de Société de secours.

Cette année là a été très difficile pour Janet. En plus d’être la présidente de la Société de secours, elle avait redoublé la classe de comptabilité et s’était présentée à l’examen de comptabilité pour prendre un travail dans une entreprise du coin. Elle a aussi donné naissance à notre quatrième enfant (Michael), tout cela pendant ses heures de loisir, évidemment. Il s’en est suivi que Janet était plus que stressée cette année, mais comme beaucoup de maris, je n’avais pas remarqué ni évalué la pression sous laquelle elle était jusqu‘à ce qu’elle craque. Et elle a craqué.

Un jour la lumière a disparu. Comme si Janet était morte spirituellement ; elle était épuisée. Elle adopta une attitude très passive par rapport à l’Église. Lorsque ses conseillères de la Société de secours l’appelèrent, elle leur répondit de faire ce qu’elles voulaient, qu’elle avait demandé à être relevée de son appel. Un des pires côtés de ce brusque changement, c’est que Janet ne voulait pas en discuter ; elle ne voulait pas me dire ce qui clochait.

Finalement, au bout de deux semaines, à force de l’asticoter, un soir que nous étions dans notre chambre, elle me dit : « Bon, tu veux savoir ce qui ne va pas ? Je vais te le dire ce qui ne va pas ; je ne peux plus y arriver. Ma charge est trop lourde. Je ne peux pas assumer tout ce que je suis censée faire. Je ne peux pas me lever à cinq heures et demie du matin, faire le pain, faire la couture, aider les enfants à faire leurs devoirs du soir, faire les miens, faire le petit déjeuner, le ménage et tous les trucs de la Société de secours, étudier les Écritures, faire ma généalogie, écrire au député, aller aux réunions des soeurs, organiser nos réserves d’un an, aller aux réunions de pieu, écrire aux missionnaires… Elle commença à parler des choses qu’elle ne pouvait pas faire ou ne faisait pas bien, des charges qu’on lui avait imposées au nom de la perfection jusqu’à ce quelle craque.

« J’essaie de ne pas crier après les enfants, continua-t-elle, mais je ne peux m’en empêcher ; je me mets en colère et je hurle. J’essaie de ne pas me mettre en colère, mais je finis par m’y mettre. J’essaie de ne pas avoir de mauvais sentiments envers untel ou unetelle, mais je finis par en avoir. Je ne suis pas d’une nature christique. Quels que soient les efforts que je fais pour aimer tout le monde, je n’y arrive pas. Je n’ai pas les talents de sœur Une telle, et je ne suis pas aussi aimable que telle autre sœur; je ne suis pas parfaite, je n’y arriverai jamais, et je n’ai aucune prétention à l'être. J’ai finalement admis au fond de moimême que je ne suis pas faite pour le royaume céleste, alors pourquoi est-ce que je devrais me briser les reins à essayer ? »

Ce fut la nuit la plus longue que nous passâmes ensemble. Je demandais à Janet : « As-tu un témoignage ? Elle me répondit : Bien sûr j’en ai un, c’est ça qui est terrible. Je sais que l’Évangile est vrai, mais je ne peux pas le vivre. Je lui demandais si elle avait gardé les alliances du baptême, et elle me dit : Non, j’ai essayé plusieurs fois, mais je ne peux pas garder tous les commandements tout le temps. » Je lui demandais si elle avait gardé les alliances contractées au temple, et de nouveau elle me dit : « J’essaie, mais même si je fais tous les efforts du monde, je n’ai pas l’impression de pouvoir faire tout ce qui est requis de moi. » Je voudrais préciser que j’ai épousé Janet dans ma jeunesse, parce que je n’ai jamais rencontré de femme plus belle, plus douce, et qui m’offre un amour plus sincère et généreux qu’elle. Aussi, ce qu’elle me racontait ne correspondait pas avec l’image que j’avais d’elle. Alors pendant un moment, elle fit la liste de tous ses défauts, ses insuffisances, et ses imperfections, pendant que moi, je m’évertuais à lui dire qu’elle était la meilleure femme au monde, tout en essayant de comprendre ce qui n’allait pas. Finalement, le problème m’apparut dans toute sa clarté, et franchement j’étais stupéfait. Moi qui suis censé avoir un « doctorat « en religion, je ne voyais pas le mont Everest devant mon nez. Je réalisais finalement que Janet ne comprenait pas complètement le cœur de l’Évangile : l’expiation du Christ. Elle en connaissait les exigences, mais ignorait la bonne nouvelle.

Qui aurait pu penser qu’après toutes ces réunions, toutes ces leçons, touts ces discours et témoignages, toutes ces soirées familiales, quelque part, le cœur de l’Évangile lui avait échappé ? Elle connaissait tout et elle y croyait, sauf le principal. Voyez vous, Janet essayait d’arriver au salut par elle même. Elle tentait de faire tout ça en considérant Jésus comme un simple conseiller. Janet savait pourquoi on peut considérer Jésus comme un entraîneur, un meneur de ban, un conseiller, un instructeur, le frère aîné, le chef de l’Église, et même Dieu. Elle comprenait tout cela, mais elle ne comprenait pas pourquoi on l’appelle Sauveur.

Le salut

Mais les saints des derniers jours croient-ils qu’ils sont sauvés ? Si je pose cette question à ma classe avec mon accent traînant du Sud, en général, j’ai le tiers de la classe qui va secouer la tête et dire : « Non, nous ne croyons pas que nous sommes sauvés. Ce sont les autres types, là, à la télé. » Quelle tragédie ! Bien sûr que les saints des derniers jours croient qu’ils sont sauvés. Ils le croient aujourd’hui et ils l’ont toujours cru. Comment Jésus pourrait-il être appelé Sauveur, s’il ne sauve jamais personne ?

C’est comme si on avait un garde du corps qui ne bougerait pas de son siège : « Hé ! Regarde ça. Y’en a encore un qui se pointe. Bah, c’est bien dommage ! Ce garde du corps pourrait aussi donner des conseils avisés : « Fais lui un crochet ! » S’il ne se mouille pas un tant soit peu, à quoi sert-il ? Et qu’est-ce que c’est qu’un Sauveur qui ne sauve personne ? C’est tout le message du Livre de Mormon, et de la Bible : Jésus est le Sauveur du monde. Mais Janet, comme tant d’autres, essayait d’acquérir le salut par elle même, et elle n’y arrivait pas. En réalité, personne ne le peut, même le meilleur d’entre nous.

Le frère de Jared. Regardez par exemple dans Éther 3:2 dans le Livre de Mormon. L’orateur est le frère de Jared, l’un des plus grands prophètes qui n’aient jamais vécu. Sa foi était si grande qu’il put, comme il est dit dans ce chapitre, percer le voile et voir Dieu. Mais considérez la façon dont cet homme généreux et fidèle se présenta à Dieu : « Or, voici, ô Seigneur, ne sois pas en colère contre ton serviteur à cause de sa faiblesse devant toi ; car nous savons que tu es saint et que tu demeures dans les cieux, et que nous sommes indignes devant toi. » Vous en rendez vous compte ! Voilà l’un des plus grands prophètes de tous les temps qui commence sa prière en s’excusant de sa faiblesse et de son indignité. Il est-certain qu’il ne se faisait pas la moindre illusion quant à sa perfection.

Il continue en disant : « Notre nature est devenue continuellement mauvaise. » Cela veut dire que suite à la chute d’Adam, les êtres humains sont assujettis aux conditions de la mortalité. Tant que nous serons dans la chair, nous devrons lutter avec elle, avec notre nature charnelle et occasionnellement, la chair aura le dessus. Il est toujours mauvais d’être battu, et nous devrons rendre des comptes, mais ces échecs arriveront de temps en temps.

Cette lutte durera toute notre vie. Nous avons tous connu cette opposition dans notre chair d’une façon ou d’une autre. Ainsi de temps en temps je dis à mon corps : « Aujourd’hui, nous allons jeûner ! » Ce à quoi mon corps me répond systématiquement un truc de ce genre : « Tu peux courir, mec ! » Et il commence à psalmodier sur un ton monotone : « J’ai faim ! J’ai faim ! J’ai faim ! » Cette opposition de la chair ne peut être vaincue en une seule fois au cours de la vie mortelle. Pour paraphraser le frère de Jared, tant que nous serons dans cette situation, notre nature charnelle sera portée à faire le mal. À mon avis, l’opposition de la chair n’existera plus dans la résurrection. Dans la vie mortelle, l’esprit et le corps sont deux entités séparées forcées de coexister dans la même personne. Leur association dans la mortalité est temporaire, et ne date pas de longtemps, c’est pourquoi ils ont la bougeotte. Mais dans la résurrection, le corps et l’esprit deviendront une seule entité. Ils seront inséparablement unis, fondus en un seul corps, et ils parleront d’une seule voix : la voix du moi uni, la voix de l’âme dans le sens strict du terme (Voir D&A 88:15). Mais, jusque là, nous devons lutter contre notre moi charnel, et séparé. De tempsen temps, même le meilleur d’entre nous, comme le frère de Jared, perdra une bataille.

Dans Éther 3:2 le point important se trouve à la fin du verset : « Néanmoins, Ô Seigneur, tu nous as donné le commandement de t’invoquer, afin de recevoir de toi selon notre désir. » Il importe peu qu’à long terme, le frère de Jared soit indigne selon le point de vue céleste. À cet égard, il n’est pas différent de tous les autres humains. L’important est que Dieu nous a commandé, tout indignes que nous sommes, de le prier toujours, parce qu’il nous a préparé la voie afin de recevoir selon nos désirs en dépit de notre imperfection. Remarquez qu’il dit : « selon notre désir et non pas « selon notre mérite ni « selon nos œuvres » ni aucune autre éventualité à laquelle nous pourrions nous attendre (voir D&A 137:9).

Il est important que par le sacrifice expiatoire de Jésus-Christ nous recevions selon nos désirs, mais seulement si c’est-ce que nous désirons, et ce, en dépit de notre indignité. Alors qu’est-ce que vous voulez ? Que désirez vous vraiment ? Dans Matthieu 5:6, le Seigneur dit : « Heureux ceux qui ont faim et soif de justice, car ils seront rassasiés  !  » On interprète souvent cette écriture à tort en comprenant : « Bénis sont les justes. » Mais ça ne veut pas du tout dire cela. Quand avons-nousfaim ? Quand avons-nous soif ? Après le dîner de Thanksgiving et tous ses accompagnements ? Non ! Nous avons faim quand nous n’avons pas mangé ; nous avons soif quand nous n’avons pas bu, lorsque nous ne jouissons pas de l’objet de notre désir.

Les Béatitudes s’adressent à des gens comme vous et moi qui aspirons au bien, qui avons faim et soif de justice, de cette justice divine immaculée et parfaite et de cette innocence totale que l’on trouve dans le royaume céleste. Bénis sont ceux qui désirent de tout leur cœur être justes comme le Christ, être parfaits comme lui, qui le désirent ardemment et le recherchent, et qui, même s’ils n’ont rien, sont prêts à tout donner. Quelle est leur récompense ? Ils goûteront à ces Béatitudes grâce au sacrifice expiatoire du Christ, et les recevront selon leurs plus profonds désirs ! Selon les paroles des Béatitudes, « ils seront rassasiés. »

L’exemple de Néphi. Prenons un autre exemple de prophète dans le Livre de Mormon. Dans 2 Néphi 4:17 19, voici ce que dit Néphi : « Ô misérable que je suis ! Oui, mon cœur est dans l’affliction à cause de ma chair ; mon âme est dans la désolation à cause de mes iniquités. Je suis encerclé par les tentations et les péchés qui m’enveloppent si facilement. Et lorsque je désire me réjouir, mon cœur gémit à cause de mes péchés. » Attendez une minute. Iniquités ? Tentations ? Péchés ? Il doit y avoir une erreur là. Cette écriture doit concerner Laman ou Lemuel, les fils indignes, mais sûrement pas Néphi. Lui, c’était le bon fils.

Non, évidemment il n’y a pas d’erreur. Il s’agit bien de Néphi un des plus grands prophètes qui aient jamais vécu. Et ce n’est même pas Néphi dans sa jeunesse. L’Écriture est extraite de 2 Néphi, lorsque toute la famille se trouvait déjà dans le Nouveau Monde. Néphi parle alors qu’il est adulte, c’est le Néphi qui a de l’expérience et de la sagesse, qui nous permet de sonder son cœur. Néphi, comme le frère de Jared ou comme l’apôtre Paul (voir 1 Timothée 1:15), ne se faisait aucune illusion quant à sa perfection. Néphi savait, et il le regrettait, qu’il avait quelques fois perdu des batailles contre la chair, qu’il était facilement tenté, et qu’il péchait. Mais encore une fois, le fait que Néphi fut imparfait, qu’il ne se soit pas qualifié par ses efforts et ses mérites pour entrer dans le royaume de Dieu, et que parfois il ait carrément cafouillé n’est pas le problème. Aucun humain, à l’exception de Jésus-Christ, n’a réussi à garder tous les commandements tout le temps. On peut chuter à des degrés différents, mais tout le monde chute. C’est pourquoi nous avons besoin d’aide, nous avons tous besoin du Sauveur. Cette nécessité de requérir l’aide du Sauveur n’est pas une honte. C’est précisément ce que veut dire Néphi à ce moment : « Néanmoins, je sais en qui j’ai mis ma confiance… Il m’a rempli de son amour, oui, jusqu’à ce que ma chair en soit consumée. » (2 Néphi 4:19, 21)

Même si Néphi était découragé et déprimé en constatant son incapacité à vivre la perfection, il avait confiance dans le Sauveur pour l’amener au royaume. Il s’était confié dans le Sauveur et avait foi dans son amour. Pour paraphraser ces trois versets, Néphi dit : « Non, je ne suis pas parfait. Oui, mes fautes me causent des soucis, et j’aurais aimé faire mieux. Néanmoins, j’ai foi en JésusChrist, je lui fais confiance. Il dit qu’il peut m’amener au royaume en dépit des mes imperfections, et je le crois. Je sais qu’il m’aime, et je lui fais confiance pour qu’il continue à me protéger de mes ennemis. »

Malheureusement, à l’inverse de Néphi, beaucoup parmi nous ne font pas confiance au Sauveur. Nous croyons en lui, mais nous ne lui faisons pas confiance. Nous sommes tellement, intimidés, effrayés, horrifiés par nos imperfections, que nous ne voyons pas comment il lui serait possible de nous sortir de là et nous perdons foi. Mais si ces grands prophètes avaient une conscience si claire de leurs péchés et de leurs défauts, et que cela ne les empêchait pas de continuer à croire que leur place était réservée dans le royaume de Dieu, ne pourrionsnous pas profiter, nous aussi, de leurs exemples de foi et de confiance ?

Hormis nos défauts, il existe d’autres raisons pour lesquelles nous ne faisons pas confiance au Sauveur : beaucoup craignent qu’en se consacrant à lui pour vivre l’Évangile loyalement et fidèlement, ils risquent de rater des choses importantes du monde. On craint souvent qu’un engagement complet envers le Christ et son Église ne se traduise par le sentiment d’être exploité, ou de se croire insatisfait émotionnellement, intellectuellement, ou physiquement. Il existe des gens qui veulent que l’Église fasse partie de leur vie, mais ont peur d’y être impliqués à cent pour cent. La limite pour tous ces gens est toujours la même : même s’ils peuvent croire en lui, ils ne lui font pas confiance. Ils n’ont pas encore une foi sincère en Christ.

Comment arriver à la perfection?

La bonne nouvelle de l’Évangile nous apprend que la perfection vient, pour qui le désire, par l’expiation du Christ et non par nos efforts. Nous pouvons bénéficier de la perfection du Christ lorsque nous devenons un avec lui dans l’alliance de l’Évangile. C’est comme lorsque deux personnes qui ont des comptes séparés se marient et créent un compte joint. Lorsque Janet et moi nous sommes mariés, mon compte était dans le rouge, alors que Janet avait de l’argent. Après notre mariage, nous sommes allés à la banque et nous avons fusionné nos deux comptes en un seul compte joint. Au regard de la banque, je n’étais plus simplement Stephen Robinson et elle n’était plus seulement Janet Bowen. À ce moment là, nous sommes devenus Stephen et Janet Robinson. Nous avions créé un nouveau partenariat qui se composait de l’actif et du passif des deux parties. Et comme Janet avait plus de crédits que je n’avais de passif, le nouveau compte avait un solde positif. C’était quasiment un miracle ! Rien qu’en entrant dans les liens du mariage et en m’unissant avec Janet, j’avais une base financière ferme pour la première fois depuis plusieurs mois.

Cette situation est une excellente analogie de ce qui se passe lorsque nous entrons dans l’alliance de l’Évangile. Le Sauveur, qui jouit d’un crédit infini, propose à l’homme une fusion. À ce moment celui ci dispose d’une responsabilité limitée. J’utilise le mot « propose » à dessein, car la relation en question est souvent comparée dans les Écritures à un mariage, et cette proposition est-certainement aussi intime et présente autant d’obligations que le mariage. C'est pourquoi le Christ est souvent appelé l’Époux (voir Matt. 25:1 13 ; Jean 3:29) et l’Église (ou Israël) la Nouvelle Mariée (voir Osée 2:19 ; Apoc. 21:2 ; D&A 109:74).

Le mari et la femme deviennent une seule entité par les liens du mariage, il en est de même pour le Sauveur et la personne sauvée : ils deviennent un par l’alliance de l’Évangile (voir 1 Cor. 6:15-17). Tout comme la nouvelle mariée se détourne de toute autre loyauté et prend sur elle le nom de son mari, celui qui entre dans l’alliance du Christ se consacre entièrement à lui, le met en premier dans sa vie, et prend son nom sur lui. Nos désirs et notre fidélité se basent sur cette union. Il nous apporte sa perfection. Dans l’alliance, ce qui m’appartient lui appartient, et ce qui est à lui est à moi. Mes péchés deviennent les siens comme paiement, et sa justice devient mienne comme justification.

Lorsque nous devenons un en Christ, son crédit et le nôtre fusionnent. Nous créons, spirituellement, un partenariat bénéficiant d’un compte joint. Puisqu’il a plus de crédits que nous n’avons de débits (en fait il dispose d'un océan illimité de crédits), le nouveau compte possède un solde positif dés sa création, et le partenariat est justifié, même si ses partenaires minoritaires (vous et moi) ne peuvent avoir ce solde positif. L’apôtre Paul faisait référence à cette situation quand il parle « d’être en Christ » (1 Cor. 1:1) et c’est-ce que Moroni appelle être « parfait en Christ » (Moro. 10:32).

Considérés solidairement, le Christ et moi formons une nouvelle créature. L’ancien moi qui était imparfait, cesse d’exister, et une nouvellecréature glorieuse, un partenariat parfait, le remplace. Considérés solidairement, comme une entité unique, nous deux, le Christ et moi sommes parfaits. Je ne dis pas (et ceci est absolument crucial !) que nous ne pouvons devenir parfaits plus tard. Je dis qu’à partir du moment où le partenariat est formé de bonne foi, à partir du moment où nous avons une foi sincère en Christ, et que nous nous repentons véritablement de nos péchés, que nous recevons le baptême et le don du Saint-Esprit, alors ce partenariat est de nature céleste. Les mérites du Partenaire majoritaire permettent cet état de fait. Il est vrai qu’il ne s’agit pas ici de la perfection individuelle, qui arrivera plus tard (beaucoup plus tard), c’est plutôt la "perfection en Christ" (voir Moro. 10:32-33), par laquelle nous recevons les bénéfices des mérites de notre partenaire. Néanmoins, à compter de ce moment, le royaume est à nous, pourvu que nous conservions ce partenariat en respectant l’alliance de l’Évangile (voir 3 Né. 27:16, 19-21).

À ce point du raisonnement, on pourrait m’objecter que j’ai encore des défauts et des limites, et j’admets que si je devais être jugé seul, c’est vrai. Mais dans le cadre de l’alliance, je ne suis pas jugé séparément, mais comme étant un en Christ. Faites le calcul : Si le Christ est infini et illimité et moi je suis fini et limité et que nous devenions un, combien font le Christ et moi si on nous ajoute ? Quelle est la somme d’une quantité infinie et positive avec une quantité négative et limitée (+x) ? Eh bien, l’infini évidemment ! Et si, moi (la partie finie) j’ai comme valeur positive dix, cinq ou un, si je suis prophète, président de pieu ou simple membre empêtré dans ses difficultés, le résultat est toujours le même. L’infini plus tout autre valeur, positive ou négative égale l’infini.

Ce qui compte ce n’est pas la valeur que nous apportons dans l’équation, mais que nous puissions écrire l’équation en entrant dans l’alliance avec le Christ infini, quelle que soit la valeur que nous pensons avoir de nous mêmes. Deux individus unis dans l’alliance sont parfaits tant que l’un d’eux est le Christ.

Dans D&A 76:68-69, Joseph Smith décrit les habitants du royaume célestes en ces termes : « Ce sont ceux dont le nom est écrit dans le ciel, où Dieu et le Christ sont les juges de tous. Ce sont les justes parvenus à la perfection par l’intermédiaire de Jésus, le médiateur de la nouvelle alliance, qui accomplit cette expiation parfaite par l’effusion de son sang. « Ceux qui héritent du royaume céleste sont les hommes et les femmes justes3, c'est àdire ceux qui ont faim et soif et veulent la justice. Ce sont de bons voisins et font du mieux qu’ils peuvent. Ce qui les qualifie pour être des justes, de braves gens. Ces bonnes gens sont donc rendus parfaits par l’intermédiaire du sacrifice expiatoire parfait du Christ parfait.

Vous voyez, vous pouvez devenir justes au sens du monde. Vos efforts suffiront à faire de vous une bonne personne, même si ce n’est qu’une personne juste au plan humain. On n’a certes pas besoin de l’Évangile pour être un brave homme dans sa vie personnelle (en fait, on peut même être hostile à l’Évangile tout en étant relativement bon). On peut, par ses efforts personnels, devenir une personne honorable et se qualifier pour obtenir une gloire terrestre (voir D&A 76:75).

Mais vous ne pouvez pas vous rendre parfait par vous même. Vous ne pouvez vous débarrasser de vos péchés pour vous rendre digne d’entrer en présence de Dieu le Père. Vous ne pouvez vous transformer en être céleste, même si vous essayez très dur, parce que vous avez déjà péché, et que le processus de purification du péché exige, non seulement un accomplissement parfait à l’avenir, mais aussi un accomplissement parfait dans le passé. Sinon, vous n’êtes pas sans péché, vous êtes juste un pécheur qui a cessé de pécher récemment. Tous les étudiants ont appris la triste vérité qu’une fois que l’on a une mauvaise note, aucune meilleure ne pourra rétablir à l’avenir la moyenne à 20. L’innocence exige le pardon et la purification. Elle exige que le texte soit effacé et réécrit, afin que tous les actes pécheurs du passé ne soient plus pris en compte, et tout ceci ne peut venir que par l’expiation du Christ. Vous pouvez arriver à être juste et atteindre un niveau terrestre par vos efforts personnels et en faisant de votre mieux, mais seul. Le mot ‘juste’ est le même en grec et en hébreu. Ils ont deux acceptions dans les Écritures : a) les justes parfaits au sens céleste du terme (voir Actes 7:52 ou Rom. 3:10) ou b) relativement justes comparés au reste du monde (voir Matt. 5:45). Dans ce cas, il s’agit de la dernière acception : le Christ peut vous rendre parfait et vous amener au niveau céleste.

L’analogie de la firme

Certains de mes étudiants en économie préfèrent l’analogie suivante : Si deux sociétés, l’une en faillite totale et l’autre qui présente un bénéfice incroyable fusionne pour créer une nouvelle société, que va-til arriver en ce qui concerne les dettes de la société en faillite ? Elles sont remboursées grâce au profit de la plus forte, et la nouvelle société, la combinaison des deux, va être jugée financièrement saine. Tant que l’une produira plus que l’autre ne perdra, la société sera bénéficiaire. Elle est financièrement justifiée.

Il en est de même sur le plan spirituel. Lorsque nous entrons dans l’alliance de l’Évangile et que nous devenons un avec le Christ, nous créons une nouvelle société, un partenariat, qui présente immédiatement du profit et qui est immédiatement justifiée par les mérites infinis du Sauveur (qui représente la seule entreprise véritablement bénéficiaire). Tant que nous ne terminons pas ce partenariat, nous sommes justifiés par ses mérites grâce à cette relation unique. En tant qu’individu, je n’ai aucun espoir, mais en tant qu’actionnaire minoritaire dans une société dirigée par le Christ, je suis assuré d’avoir le succès.

L’analogie des sportifs

Certains de mes élèves sont plus à l’aise si l’on prend des exemples ou des illustrations dans le domaine du sport plutôt que celui des affaires ou des finances, c'est pourquoi je compare quelques fois la relation dans l’alliance à une équipe sportive. Dans les sports en équipe, il importe peu quel joueur, marque les points. Quand l’un d’eux marque, c’est toute l’équipe qui marque. Si l’avant-centre marque un but du milieu du terrain, peu importe que les arrières n’aient pas eu l’occasion de toucher la balle, ou qu’un des joueurs soit sur le banc de touche. Peu importe que certains joueurs aient commis des maladresses ou aient raté la balle. Lorsqu’un des joueurs marque, c’est toute l’équipe qui marque. Concernant la victoire, peu importe que l’on soit en défense ou en attaque. C’est toute l’équipe qui gagne, et pas seulement le joueur qui vient de marquer un but.

En contractant l’alliance de l’Évangile, nous intégrons une équipe dont le capitaine est Jésus-Christ, un vainqueur du style de Zinedine Zidane qui marque à tous les coups. Si nous faisons partie de son équipe, nous ne serons jamais vaincus. Même si je rate le but, de temps en temps, même s’il me dit de rester sur le banc de touche la plupart du temps, tant qu’il sera le capitaine, nous gagnerons. Mais je dois être dans son équipe, ne pas jouer seul ni être dans une autre équipe.

La course de fond

On pourrait aussi comparer l’alliance de l’Évangile à une course de fond. Normalement, on considère qu’il n’y a qu’un gagnant dans une course, mais dans celle de l’Évangile, tous ceux qui finissent gagnent. De plus, on ne tient pas compte des différences dans les temps d’arrivée. Certains auront fait un bon temps et d’autres non, mais les seuls perdants sont ceux qui auront abandonné avant d’arriver au but. Dans la course de l’Évangile, il n’y a pas de perdants. Il n’y a que des gens qui abandonnent. Tous ceux qui passent en courant la ligne d’arrivée en quelques minutes, tous ceux qui la passent en marchant en mettant des heures ou tous ceux qui la passeront en rampant en y mettant des jours, tous ceux là gagneront le prix. Car ils auront enduré jusqu’à la fin, selon leurs talents et leurs capacités, en ayant les yeux fixés sur le Sauveur. Paul a utilisé cette analogie lorsqu’il écrit : « Courons avec persévérance dans la carrière qui nous est ouverte, les yeux fixés sur Jésus qui est l’auteur et le consommateur de la foi « (Héb. 12:1-2). Beaucoup parmi nous usent leur précieuse énergie à se soucier du peu de temps qu’ils ont au lieu d’avoir les yeux fixés sur le but, tout en plaçant un pied devant l’autre et à endurer jusqu’à la fin.

La parabole de la bicyclette

Alors que nous discutions pendant cette sombre nuit, il me semblait que rien ne s’arrangeait pour elle. Alors je me souvins d’un évènement et que maintenant nous appelons dans notre famille : la parabole de la bicyclette.

Une fin d’après midi, après le travail, notre fille aînée, Sarah, alors âgée de sept ans vint me voir alors que je lisais le journal pour me dire  : « Papa, est-ce que je peux avoir un vélo ? Je suis la seule dans le quartier à ne pas avoir de vélo.» Je marmonnais un truc vague qui n’engageait à rien, mais Sarah souleva le journal, me regarda dans les yeux et me demanda : « Combien et quand ? »

À cette époque, il nous était difficile financièrement de lui acheter une bicyclette, alors j’essayais de la coincer. « Je vais te dire, Sarah « lui dis-je,tu économises tous tes sous, et bientôt tu auras assez pour t’acheter un vélo. »

« D’accord, répondit-elle » et elle s’en alla. Je m’étais débarrassé du problème. Quelques semaines s’écoulèrent, et j’étais une nouvelle fois dans mon fauteuil à lire le journal. Cette fois je savais que Sarah faisait quelques corvées pour sa mère et qu’elle était payée. C’est alors qu’elle rentra dans sa chambre et j’entendis un bruit qui faisait « clic, clic».

« Sarah, qu’est-ce que tu fais ? » lui demandais-je. Elle sortit de sa chambre avec une boîte de conserve à la main. Cela avait été autrefois un pot de confiture de cerise au marasquin, qu’elle avait nettoyé et dans lequel elle avait découpé une fente. Dans le pot il y avait un paquet de pièces de monnaie. Sarah me montra la boîte de conserve et dit : « Tu m’as promis que si j’économisais tous mes sous, bientôt, j’en aurais suffisamment pour m’acheter un vélo. Alors, voilà, papa, j’ai économisé jusqu’au moindre centime ! »

C’est ma fille et je l’aime. En fait je ne lui ai jamais menti. Si elle économisait tous ses sous, à la fin elle aurait suffisamment pour s’acheter un vélo. Mais au rythme où elle allait, je crois que c’est plutôt une voiture qu’elle préférera. Entre temps, ma gentille petite Sarah faisait tout ce qui était en son pouvoir pour suivre mes instructions, mais ses besoins étaient loin d’être satisfaits. Je craquais. « OK, Sarah « lui disje, partons en ville pour voir des vélos. »

Nous allâmes dans tous les magasins de Williamsport. Finalement, nous le trouvâmes dans un des grands magasins discount : La Bicyclette parfaite (sans doute celle qu’elle avait connue dans la vie pré mortelle). À peine arrivée au milieu du magasin, elle savait que c’était La Bicyclette. Elle se précipita sur le vélo et dit : « Papa, c’est-celle là. C’est celle-là que je veux. » Elle était tout excitée.

Puis elle remarqua l’étiquette qui pendait sur le guidon, et en souriant elle se baissa pour la retourner. Sur le coup, elle la regarda et son sourire disparut. Sa figure s’assombrit, et elle commença à pleurer. « Oh ! Papa dit-elle désespérée, je n’aurais jamais assez d’argent pour me payer un vélo. » C’était sa première dose amère de la réalité des adultes.

Le vélo, pour autant que je me souvienne, coûtait plus de cent dollars. C’était vraiment au delà de ses moyens. Mais comme Sarah est ma fille et que je l’aime, je voulais qu’elle soit heureuse. Alors je lui demandais : « Sarah, combien as-tu d’argent ? »

« Soixante et un cents », répondit-elle désespérée. « Bon, voilà ce que nous allons faire, ma chérie. Nous allons modifier nos accords. Tu vas me donner tout ce que tu as, les soixante et un cents, tu me feras un gros baiser, et ce vélo sera à toi. »

Il faut dire qu’elle n’a jamais été sotte. Elle a sauté dans mes bras, m’a fait un gros bisou et m’a donné ses soixante et un cents. J’ai dû revenir à la maison en roulant très doucement parce qu’elle n’a jamais voulu se séparer du vélo. Elle le ramena à la maison sur le trottoir (c’était à quelques pâtés de maisons), et je conduisais à côté d’elle. Pendant que je conduisais, il me vint à l’esprit que tout ceci était une parabole sur l’expiation du Christ.

Vous voyez, nous voulons tous désespérément quelque chose, mais ce n’est pas une bicyclette. Nous voulons le royaume de Dieu. Nous voulons revenir dignes et purs en présence de nos parents célestes. Mais le prix terrifiant c’est une performance parfaite, ce qui est absolument au delà de nos moyens. À un certain moment dans notre progression spirituelle, nous réalisons pleinement le prix de l’entrée dans ce royaume, et nous réalisons aussi que nous ne pouvons pas payer. Alors nous sombrons dans le désespoir. Janet en était à ce point là cette nuit alors que nous discutions, désespérée par la gigantesque différence entre la performance parfaite et ce qu’il lui semblait qu’elle pouvait faire.

Mais c’est seulement à ce moment là, lorsque nous réalisons finalement notre incapacité à nous perfectionner et à nous sauver nousmêmes, lorsque nous nous rendons compte de notre situation véritablement désespérée ici bas et de la nécessité d’être sauvés grâce à une intervention extérieure, que nous apprécions pleinement celui qui est venu pour sauver.

À ce moment, le Sauveur entre et dit : « Bon, tu as fait tout ce que tu pouvais, mais c’est insuffisant. Ne désespère pas. Bon, voilà ce que nous allons faire. Nous allons faire un arrangement différent. Combien as-tu ? Combien peux-tu donner honnêtement de toi-même ? Tu me donnes tout cela (les soixante et un cents), tu fais tout ce que tu peux, et je fournirais le complément. Tu me donnes tout ce que tu as, tu me prends dans tes bras et tu me donnes un baiser (c’est-à-dire nous créons une relation personnelle), et le royaume est à toi ! La perfection restera notre but ultime, mais jusqu’à ce que tu puisses jouir de la tienne, tu utiliseras la mienne. Qu’en dis tu ? Tu fais tout ce que tu peux, et je fais tout ce que tu ne peux pas encore faire. À tous les deux, nous aurons tout fait. Tu seras justifié à cent pour cent.

Au fur et à mesure que nous discutions, Janet et moi cette nuit, pour une raison indéterminée, cette illustration particulière l’atteignit. À partir du moment où elle considéra l’Expiation et l’alliance de l’Évangile de cette façon, elle vit comment cela fonctionnait, et il se fit en elle une transformation remarquable. C’est comme si elle s’était épanouie. Je me souviens qu’elle a dit entre ses pleurs, quelque chose comme cela : « J’ai toujours eu le témoignage du Sauveur et j’ai toujours cru qu’il est le fils de Dieu. J’ai toujours cru qu’il avait souffert et qu’il était mort pour moi. Mais maintenant, je sais qu’il peut me sauver, qu’il peut me sauver de moi même, de mes péchés, de mes faiblesses et de mon manque de talent. « Depuis ce jour, l’expérience de Janet en a aidé d’autres dans l’Église et à l’extérieur. L’expérience a montré qu’elle n’était pas la seule, qu’il y en a beaucoup qui veulent servir Dieu et garder ses commandements, qui ont faim et soif de justice, mais qui, à cause de la sublimation même de leurs nobles désirs, désespèrent de réaliser la perfection. À tous ceux là, nous déclarons : « Le Christ est la réponse. Il présente le pont entre la mortalité et la perfection. Il est la solution au Grand Dilemme. »

« Demandez et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on ouvrira. Car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et l’on ouvrira à celui qui frappe. » (Matt. 7:7,8)

Ça, c’est vraiment la bonne nouvelle.


CHAPITRE TROIS : L’ALLIANCE

Une alliance est un contrat qui précise les termes et les obligations des deux parties. Celles ci doivent signer le contrat pour qu’il soit validé et applicable au regard de la loi. Autrefois on versait le sang d’un animal lors d’un sacrifice pour conclure une alliance et lier les deux parties. C’est pourquoi « faire alliance » se dit en hébreu « couper une alliance. Le sang de la victime étai appelé le sang de l’alliance et une fois celui ci versé on considérait que les termes du contrat étaient validés et liaient les deux parties contractantes. On trouve dans l’Ancien Testament un exemple où Dieu fait alliance au Sinaï avec son peuple par l’intermédiaire de Moïse. Le contrat fut conclu en sacrifiant des bœufs. Le sang des animaux sacrifiés fut répandu sur le peuple (Ex. 24:3-8) une fois les termes de l’alliance acceptés.

Par définition, une alliance est une obligation contractuelle. Une alliance unilatérale cela n’existe pas,. Il n’y a pas de notion d’alliance dans une obligation unilatérale, c’est simplement une dette, ou de l’esclavage. Un vœu peut être unilatéral, mais une alliance doit comprendre des obligations réciproques. « Si tu fais ceci, je fais cela. » À l’époque de l’Ancien Testament, l’alliance entre Dieu et son peuple contenait toujours des termes précis, et tant que le peuple élu respectait ses obligations, Dieu respectait les siennes. A contrario lorsque le peuple brisait l’alliance, Dieu n’était plus lié. Par exemple, dans 2 Rois 18:12, Dieu n’a pas respecté l’obligation précisée dans l’alliance de sauver Israël de ses ennemis parce que celui ci n’avait pas honoré son contrat en désobéissant aux commandements qu’il avait reçus tel que décrit dans Exode 24:3 8. Dieu s’oblige à respecter les termes de ses alliances tant que nous respectons les nôtres (D&A 82:10 ; 84:39-40).

Dans l’Ancien Testament, le Seigneur dit à Israël qu’il existerait un jour une nouvelle alliance, une nouvelle relation entre Dieu et son peuple élu, supérieure à celle décrite dans la loi de Moïse (Jér. 31:31, 33). Cette promesse fut accomplie quand l’alliance de l’Évangile remplaça celle du Sinaï après la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Tout comme dans l’ancienne, cette nouvelle alliance éternelle nécessite aussi une victime pour le sacrifice : c’est Jésus-Christ lui même, « l’Agneau de Dieu » (Jean 1:29), « l’Agneau qui a été immolé » (Apoc. 5:6, 9,12). Le sang de Jésus-Christ qui a été versé à Gethsémané et sur la croix, est-celui de la nouvelle alliance. Au moment où il a été versé, il a validé l’accord (Luc 22:20 ; 1 Cor. 11:25). De la même façon que Moïse a versé le sang de l’ancienne alliance sur le peuple élu dans Exode 24:8 pour montrer qu’il acceptait le contrat, les personnes qui acceptent la nouvelle alliance doivent prendre sur elles le sacrifice expiatoire du Christ. Lorsque nous prenons le sang du Christ sur nous, lorsque nous nous purifions dans « le sang de l’Agneau « (Apoc. 7:17), nous sommes liés par la nouvelle alliance de la même façon que les enfants d’Israël l’étaient avec l’ancienne. Lorsque le sang du Christ a été versé, le nouveau contrat entre Dieu et les hommes, l’alliance de l’Évangile, a été validé et ratifié par tous ceux qui en ont accepté les termes.

Justification

Lorsque les hommes respectent leurs alliances, et qu’ils vivent selon les accords passés avec Dieu, on dit qu’ils sont justifiés. Être justifié, signifie être reconnu innocent, lavé de toute accusation de mauvaise conduite, et se trouver sans faute au regard de la loi. La justification est très importante dans un tribunal, car elle permet de déclarer que l’accusé est non coupable.

Être justifié, c’est donc être reconnu non coupable par Dieu, c’est être lavé de toutes souillures pécheresses et libéré de toutes obligations envers lui. Ce qui permet d’entrer dignement dans le royaume en sa présence.

Se sentir justifié est une noble aspiration et une condition nécessaire à l’exaltation dans le royaume de Dieu. L’ancienne alliance de la loi de Moïse et la nouvelle alliance de l’Évangile ont toutes les deux pour objectif de justifier la personne qui l’a contractée et qui la respecte.

Mais dans la loi de Moïse, la justification s’appuyait sur la justice (justification par la loi), alors que l’alliance de l’Évangile s’appuie sur la loi de la miséricorde (justification par la foi).

Justification par la loi

Théoriquement, un moyen d’être justifié, et d’être déclaré non coupable au regard de la divinité consisterait à garder tous les commandements tout le temps ; à ne jamais commettre le moindre péché de sorte qu’on ne serait jamais coupable. C’est ce qu’on appelle la justification par la loi (en la gardant) ou la justification par les œuvres. Le système qui définirait la justice sur des critères exclusivement dus au mérite ou aux efforts que l’on déploierait pour garder un ensemble de règles particulières serait un système basé sur la justification par les œuvres ou par la loi. Ce système attend de l’individu qu’il fasse son chemin vers le royaume de Dieu en s’abstenant tout d’abord de pécher. Cette sympathique solution au problème du péché supprime la nécessité du pardon, du repentir ou de l’expiation. En conséquence, il n’est nul besoin non plus d’un sauveur. L’apôtre Paul, dans les écrits du Nouveau Testament, définit l’ancienne alliance mosaïque comme un système de justification par la loi ou par les œuvres.

Les termes de l’ancienne alliance, la loi de Moïse, précisaient essentiellement que si les enfants d’Israël « gardaient les commandements » c’est à dire, s’ils observaient les six cent treize commandements et interdictions de la loi mosaïque, Dieu les protégerait de leurs ennemis et leur donnerait la terre promise et une postérité. Si les deux parties respectaient leur part du contrat, Israël serait le peuple élu de Dieu ; il serait leur Dieu. Cette alliance était conditionnée par l’obéissance stricte et par la loi de justice.

Dans la pratique, les rabbins savaient que personne ne garde toutes les règles tout le temps, mais ils avaient foi dans la miséricorde de Dieu qui rachèterait les fautes d’une façon ou d’une autre. Cependant, il n’y a rien dans les Écritures pour justifier une telle attente. Il est dit clairement dans Deutéronome 27:26 que si l’on garde la loi à cent pour cent, on est juste, mais si l’on brise une seule de ses dispositions, on est pécheur, on devient transgresseur et maudit par la loi (voir Jacques
2:10). De plus, selon les termes de l’ancienne alliance mosaïque, les personnes pouvaient théoriquement se rendre dignes par leurs efforts personnels et leurs mérites en gardant toutes les règles tout le temps.

Techniquement, il n’y avait rien de faux dans l’ancienne alliance et dans la loi. C’était la parole de Dieu. Elle était juste. Si le peuple avait respecté les termes du contrat, il aurait été justifié par la loi. Après tout, selon l’esprit de la définition même, est juste celui qui exécute absolument tout ce que Dieu lui commande.

Malheureusement, il apparaît que personne n’en est capable. C’est comme le fait de dire à ma fille Sarah qu’économiser tous ses sous pour s’acheter un vélo peut être plausible en théorie, mais absolument inapplicable dans la réalité. Il en est de même pour la justification par la loi, bienque ce soit valable enthéorie, ça ne marche pas dans la pratique si nous voulons résoudre ici bas nos besoins dans la situation difficile où nous nous trouvons. Du fait de notre faiblesse humaine et de notre nature déchue, les conditions de la loi mosaïque, l’ancienne alliance, sont tout simplement hors de notre portée et ne peuvent nous justifier. Théoriquement, c’est possible, mais dans la pratique c’est impossible. Obtenir la justification en obéissant à la loi ou par les œuvres est une impossibilité parce que tous les hommes sauf un ont désobéi au moins une fois dans leur vie. Et on ne peut prétendre à la justification par l’obéissance si on désobéit de temps en temps.

Comme le montre Paul, il y a loin entre essayer de garder les commandements et les garder véritablement. Selon lui, le premier imbécile venu qui se croit suffisamment fort pour garder toutes les règles rend le sacrifice du Christ inefficace pour ce qui le concerne (Gal. 5:4). De plus, celui qui voudrait se fier entièrement à sa justice a besoin qu’on lui rappelle que la justice obtenue par le respect de la loi exige un sans faute absolu : « En effet tous ceux qui s’appuient sur les œuvres de la Loi sont sous la malédiction ; car il est écrit :’maudit quiconque n’est pas constant à observer tout ce qui est écrit dans le livre de la Loi’. Or que par la Loi nul ne soit justifié devant Dieu, cela est manifeste, puisque le ‘juste vivra par la foi.’ or la Loi ne procède pas de la foi ; mais elle dit : ‘Celui qui accomplira ces commandements vivra en eux. « Le Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi » (Gal.3:10-13).

Paul montre ici que toute prétention à la justice basée sur des efforts personnels à garder les commandements exige un sans faute absolu. Un petit écart et on n’est plus parfait, on est devenu pécheur, et dans ce sens nous sommes tous pécheurs. « Car nous venons de prouver que tous, Juifs et Grecs, sont sous le péché, selon qu’il est écrit : Il n’y a point de juste, pas même un seul… En effet, nul homme ne sera justifié devant lui par les œuvres de la loi, car la loi ne fait que donner la connaissance du péché. » (Rom. 3:9, 10, 20)

En d’autres termes, personne ne peut prétendre être juste puisque tout le monde a brisé la loi. Et ce qui est pire, c’est que la loi elle même prononce une malédiction sur tous ceux qui ne gardent pas les commandements à la perfection. (Deut. 27:26), mais à cause de sa nature déchue, il était carrément impossible à l’homme de garder tous les commandements de l’ancienne alliance. C’est pourquoi au moins selon le point de vue de Paul à partir du premier siècle, Dieu, dans sa miséricorde, a proposé une nouvelle alliance, un contrat dont nous pouvons respecter les termes. Jésus-Christ est le seul qui nous rachète de la malédiction de cette loi qui exige que nous accomplissions un parcours sans faute. Il nous offre un nouveau moyen pour être justifié, non par la loi (qui consiste à garder les commandements tout le temps), mais par la foi en Christ. Certains tentent naïvement de se justifier par les œuvres, mais c’est de l’auto justification ; ce genre de tentative débouche sur une fausse piste. La Bible et le Livre de Mormon disent tous les deux que l’on ne peut être justifié de cette façon.

« Cependant sachant que l’homme est justifié, non par les œuvres de la Loi, mais par la foi dans le Christ Jésus, nous aussi nous avons cru au Christ Jésus, afin d’être justifiés par la foi en lui et non par les œuvres de la Loi ; car nul homme ne sera justifié par les œuvres de la loi. » (Gal. 2:16)

Et les hommes sont suffisamment instruits pour distinguer le bien du mal. Et la loi est donnée aux hommes. Par la loi, aucune chair n’est justifiée ; ou, par la loi les hommes sont retranchés… il n’y a aucune chair qui puisse demeurer en la présence de Dieu, si ce n’est par les mérites, et la miséricorde et la grâce du saint Messie ». (2 Né. 2:5-8)

Bref, nous ne pouvons arriver à la justification de notre propre chef. Nous ne pouvons pas gagner le droit d’entrer dans le royaume céleste en gardant tous les commandements. Nous pourrions en théorie, mais pas en pratique, parce que ni vous ni moi ni personne n’a jamais gardé tous les commandements. C’est tellement évident et pourtant il y en a qui ne le voit pas. Réfléchissez un peu. Nous avons déjà un jour ou l’autre brisé certains commandements, c’est pourquoi nous ne pouvons être justifiés en prétendant garder les commandements. Nous sommes déjà disqualifiés ! Hormis le Sauveur en existe-t-il un qui garde les commandements tout le temps ? Si notre seul espoir d’hériter du royaume céleste réside dans le fait de garder toutes les règles, d’obéir à tous les commandements et à vivre tous les principes à la perfection, alors, vous et moi avons déjà brûlé nos dernières cartouches il y a longtemps. Il est exact que l’Évangile propose le repentir, le pardon, et l’expiation, mais ce sont des remèdes à la désobéissance plutôt que des récompenses pour notre obéissance.

De nombreux membres de l’Église confondent l’objectif à long terme visant la perfection individuelle avec la nécessité à court terme d’être « parfait en Christ concluant à tort qu’ils doivent se perfectionner par leurs efforts personnels avant de pouvoir espérer entrer dans le royaume de Dieu. Elder Bruce R. McConkie a parlé de cette opinion comme d’une hérésie mortelle que l’on trouve entre autres dans l’Église d’aujourd’hui. S’il nous était possible de nous perfectionner tout seuls, de nous rendre dignes du royaume de Dieu grâce à nos efforts personnels, nous n’aurions absolument pas besoin de Jésus-Christ : « Je ne rejette pas la grâce de Dieu ; car si la justice s’obtient par la loi, le Christ est donc mort pour rien » (Gal. 2:21). Si nous pouvions être justifiés par nos efforts personnels, alors nous n’aurions pas besoin du Sauveur et le sacrifice infini du Christ aurait été accompli en vain.

La justification par la foi en Christ

La seule voie possible pour être justifiés, et être déclarés non coupables devant Dieu, consiste tout d’abord à admettre nos imperfections, et notre impossibilité d’arriver à la perfection seuls ou à nous sauver par nos efforts personnels et ensuite à nous confier dans le Christ notre Sauveur. Nous devons accepter son aide pour nous permettre d’entrer totalement dans la nouvelle alliance, dans laquelle ses efforts contrebalanceront nos déficiences. C’est-ce qu’on appelle la justification en Christ.

L’innocence parfaite est toujours exigée dans la nouvelle alliance de la foi, mais cette innocence est requise de la part de l’équipe, ou du partenariat, composé du « Christ et moi et non de moi seul. Du fait que le Christ et moi sommes un dans l’alliance de l’Évangile, Dieu nous accepte dans notre dignité combinée, car le Christ et moi sommes parfaitement dignes. Il en résulte que le Christ et moi sommes purs et dignes. Mon parcours individuel vers la perfection restera un but à long terme et constituera le résultat final de notre relation dans l’alliance, mais ne sera pas une condition sine qua non pour être justifiés dans l’immédiat dans la foi au Christ. « Et nous savons que tous les hommes doivent se repentir, croire au nom de Jésus-Christ, adorer le Père en son nom, et persévérer jusqu’à la fin dans la foi en son nom, sinon ils ne peuvent être sauvés dans le royaume de Dieu. Et nous savons que la justice par la grâce de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ est juste et véritable. » (D&A 20:29-30). La loi et la foi, ces deux moyens pour atteindre la justification, sont présentées dans le Nouveau Testament comme des fardeaux ou des jougs distincts. L’obligation faite par la loi d’une obéissance parfaite était comparée à un lourd « joug de servitude » (Gal. 5:1 ; Actes 15:10), alors que les obligations de l’alliance de l’Évangile que sont le repentir, le pardon, et l’expiation sont qualifiées de « douces » et de « légères ». « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai. Prenez sur vous mon joug, et recevez mes leçons, car je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez le repos dans vos âmes. Car mon joug est doux, et mon fardeau léger. » (Mat. 11:28-30)

Il n’existe pas de joug plus lourd que l’exigence de cette perfection qui apporte la malédiction de la loi. Et de nombreux Saints ploient encore sous son fardeau . Mais la bonne nouvelle, c’est que nous sommes libérés en Christ de ce fardeau écrasant. Il s’en est chargé à notre place et ce qu’il a accompli dans sa perfection nous libère d’avoir à souffrir la même chose. Dans l’alliance de l’Évangile, nous substituons le poids du péché à l’obligation de l’aimer et de s’aimer les uns les autres et de faire au mieux de nos capacités.

Garder les commandements

Mais ne nous est-il pas commandé de garder les commandements ? La réponse est : oui et non. Lorsque je demande à mes élèves s’il est nécessaire de garder les commandements pour entrer dans le royaume céleste, tous me répondent affirmativement avec une absolue certitude. Ils savent que c’est vrai parce qu’ils ont entendu les autorités de l’Église et leurs instructeurs leur dire cela pendant toute leur vie. Mais quand je leur demande s’ils ont déjà violé un commandement, ou si actuellement ils ne vivent pas les commandements, la plupart d’entre eux répondent par l’affirmative. Ils ne voient généralement pas le problème important qu’impliquent ces deux réponses.

Les Saints de derniers jours utilisent habituellement l’expression« garder les commandements » dans un sens différent historiquement et techniquement de celui qui est employé en-dehors de l’Église. Ce n’est pas faux, mais il est différent, et pour cette raison « garder les commandements » est quelquefois une expression ambiguë et gênante pour eux, surtout lorsqu’ils parlent à des personnes hors de l’Église. En général, nous disons « garder les commandements « alors que pour nous cela veut dire « essayer très fortement de garder les commandements et y arriver la plupart du temps ». Définie ainsi, cette expression décrit nos tentativesà obéir, que la nouvelle alliance exige comme gage de notre « bonne foi ». Dans cette acception, « garder les commandements « est possible et nécessaire ; c’est à dire, essayer de garder les commandements, faire du mieux que nous pouvons, c’est une exigence de l’alliance de l’Évangile, alors que le fait de réussir tout, tout juste et maintenant en gardant tous les commandements n’en est pas une. C’est pourquoi l’alliance de l’Évangile propose le repentir et l’Expiation du Christ en sus des commandements.

Cependant, sur le plan technique, cet usage dans l’Église est incorrect. Si nous insistons sur les points cruciaux, « garder les commandements » signifie ne pas les violer, aucun d’entre eux, et jamais. En réalité, personne ne les garde à la perfection. Techniquement, vous ne pouvez prétendre les garder en ce sens dans la mesure où vous en briserez toujours un. C’est-ce que Jacques dit dans Jac. 2:10 : « Car quiconque aura observé toute la loi, s’il vient à faillir en un seul point, est coupable de tous. En effet, celui qui a dit :’tu ne commettras point d’adultère’ a dit aussi :’ tu ne tueras point’. Si donc tu tues, quoique tu ne commettes point d’adultère, tu es transgresseur de la loi. »

L’ambiguïté entre l’acception traditionnelle et l’usage que font les membres de l’Église de l’expression « garder les commandements « a suscité dans le passé des discussions entre des membres de l’Église et d’autres chrétiens et a eu pour conséquence que des gens qui ne comprennent pas notre vocabulaire théologique disent que nous croyons dans le salut par les œuvres. Il s’en est suivi que des membres de l’Église ont conclu à tort qu’il était exigé d’eux une performance parfaite dans le cadre de l’alliance de l’Évangile, alors que l’objectif est d’atteindre des buts appropriés et de faire tout ce que nous pouvons pour les accomplir. Le but ultime de l’expiation du Christ est de montrer la voie à ceux qui n’ont pas gardé, qui ne gardent pas et qui probablement ne garderont pas tous les commandements tout le temps puissent encore être exaltés dans le royaume céleste divin. Ils continueront à y progresser dans l’éternité jusqu’à la perfection dans la mesure où ils manifesteront leur soif et leur faim de justice.

Dans le Nouveau Testament, lorsque Paul parle de garder les commandements ou d’être justifiés par les œuvres, il veut dire qu’il faut obéir à tous les commandements, tout le temps. C’est pourquoi il en conclut que personne, dans cette acception, ne peut « garder les commandements que notre incapacité à les garder nous condamne sûrement, et que nous devons chercher une autre voie de salut. À strictement parler, il importe peu de savoir si on les suit ou pas ; si on ne les respecte pas tous, on est transgresseur et coupable. En s’appuyant sur cette définition, il est clair que quiconque voudrait prétendre à la justice en les respectant se doit de les garder tous, tout le temps. Bonne chance à lui.

Les termes de la Nouvelle alliance

Les conditions de l’ancienne alliance, la Loi mosaïque, exigeaient l’obéissance parfaite aux règles. En retour on se trouvait justifié aux yeux de Dieu, on était sauvé de ses ennemis, et on héritait de la terre promise. Les termes de la nouvelle alliance sont : 1) avoir foi au Seigneur Jésus-Christ, croire continuellement au Sauveur et montrer son engagement envers lui ; 2) se repentir, ce qui représente un processus continuel consistant à rejeter ses fautes et à repartir d’un bon pied ; 3) le baptême, ordonnance symbolique au cours de laquelle le poids des péchés est enlevé. Lorsque l’on a accompli toutes ces choses, on est digne de 4) recevoir le don du Saint-Esprit.

L’alliance est entérinée par la réception du don du Saint-Esprit, et certifie que l’on a été purifié de ses péchés passés, et que l’on est maintenant digne de la compagnie du troisième membre de la Divinité (3 Né. 27:19-21). Lorsque l’on respecte la nouvelle alliance, on est justifié au regard de Dieu, on est sauvé de ses ennemis (qui sont le péché et la mort), et on hérite de la terre promise (qui est le royaume de Dieu). Ainsi la nouvelle alliance réalise selon des conditions acceptables toutes les promesses annoncées dans l’ancienne, et qui autrement auraient été inaccessibles.

Nous avons là une façon de comprendre l’alliance de l’Évangile, cette proposition du Sauveur à ses bien aimés. L’alliance est un accord de partenariat entre nous et le Sauveur. Nous devons croire au Christ et à la justification par la foi en lui. Nous devons nous engager envers le Christ et admettre la justification par la foi. Sachant que nous ne pouvons faire tout ce que la loi exige de nous, nous acceptons de faire tout ce que nous pouvons dans le cadre de l’alliance de l’Évangile. Nous acceptons de faire du mieux que nous pouvons pour le Sauveur et nous lui donnons tout ce que nous avons. Nous admettons que la perfection est notre but ultime et que nous voulons œuvrer en ce sens de concert avec lui. C’est ainsi que l’idée de « garder les commandements « est toujours une part importante de l’arrangement, mais que « garder les commandements à la perfection » n’en fait pas partie, tout au moins dans l’immédiat.

En retour de cette concession magnifique, nous acceptons de nous repentir à chaque fois que nous ne respectons pas les commandements à la perfection et nous recommençons aussi souvent que nécessaire, et nous ne cessons jamais de nous repentir pour essayer d’être comme lui.

En retour, le Sauveur accepte de couvrir nos fautes au cours de notre apprentissage et de nos progrès. Bien que notre perfection individuelle ne se manifestera que plus tard, bien longtemps après que cette vie sera finie, notre perfection conjointe, notre perfection en Christ, elle, est opérationnelle immédiatement. À partir du moment où nous entrons dans l’alliance avec lui, il couvre nos fautes, nous sommes parfaits en lui, pourvu que nous continuions dans l’alliance, que nous « endurions jusqu’à la fin ». Une fois redevenus innocents, purs et dignes par la foi, la repentance et le baptême, nous recevons le don du Saint-Esprit, que Dieu nous accorde comme « arrhes de notre héritage » (Éph. 1:14 ; 2 Cor. 1:22 ; 5:5), une sorte de garantie et de paiement comptant des bénédictions merveilleuses dont nous hériterons. Par le don du SaintEsprit, le Christ donne aussi à ses partenaires minoritaires un compas pour leur permettre de mieux naviguer spirituellement, avec le réconfort d’un témoignage et l’assurance qu’ils ont été vraiment justifiés par son alliance.

Tout comme la dîme, les termes de cette alliance sont dans un sens les mêmes pour tous, mais ils sont différents pour chacun selon ses capacités personnelles. Les conditions de la loi de la dîme sont universelles  : un dixième de notre revenu annuel (D&A 119:4). Mais cette formule donne des résultats différents pour chacun d’entre nous. Il en est de même dans l’alliance de l’Évangile. Le Sauveur exige un pourcentage précis : tout ce que nous avons, c’est à dire cent pour cent. Mais les cent pour cent de l’un seront différents de l’autre, car ils sont fonction de la connaissance spirituelle et de la maturité de l’individu. Quelle merveilleuse flexibilité ! Il n’exige jamais plus que ce que je suis capable de donner, et ce qu’il requiert de moi est toujours adapté à ma connaissance et aux circonstances.

C’est pourquoi je ne dois pas me décourager si je ne progresse pas autant que frère X ou sœur Y. Mes obligations consistent à donner tout ce que, moi, j’ai, et non pas tout ce qu’a quelqu’un d’autre, à être aussi bon que je puis l’être, et non aussi bon que n’importe qui d’autre. Dans les Doctrine et Alliances 10:4, le Seigneur avertit qu’il convient même d’éviter de courir plus que l’on a de force :

« Ne cours pas plus vite et ne travaille pas au delà des forces et des moyens qui te sont donnés… » Ayez foi en Christ ; faites du mieux que vous pouvez ; n’essayez pas de faire plus que vous pouvez.

Les apôtres et les prophètes sont justifiés par la foi en Christ selon les mêmes conditions que moi. Mais lorsque j’aurais atteint leur degré de progression et de maturité dans l’Évangile, il sera requis de moi que j’atteigne leur niveau de performances, mais on ne me le demandera pas avant. C’est pourquoi je ne dois pas désespérer parce que je n’ai pas l’impression de faire aussi bien que les autres, ou que je ne paie pas la même dîme que d’autres. Ce que Dieu exige dans les deux cas est juste et adapté à chaque personne.

Cependant l’inverse est vrai. Tout comme je ne dois pas déprimer du fait que d’autres font mieux que moi, je ne dois pas regarder ceux qui ne font pas aussi bien que moi. Car les termes du contrat sont les mêmes pour eux que pour moi : « Donnez-moi tout ce que vous avez, que ce soit beaucoup ou peu, et je ferais le reste pendant que vous apprendrez comment faire. » Peu importe que l’on ait soixante et un cents, un dollar et demi, ou deux cents, le marché est toujours le même : « Donnez moi tout ce quevous avez, et je ferais le reste. » Du fait que nous ne pouvons satisfaire à nos besoins, même s’ils sont tous différents, nous sommes tous dans le même bateau et nous avons tous besoin du même salut. C’est pourquoi l’alliance offerte par le Sauveur est la même pour tous.

Attitude

Il est évident que la meilleure façon de déterminer si notre alliance est validée ne repose pas nécessairement sur notre performance relative ou même sur notre « bonté » telle que nous, humains, considérons la bonté, mais plutôt sur notre attitude, les désirs de notre cœur. Les Écritures le disent clairement : « C’est pourquoi la rédemption vient dans et par l’intermédiaire du saint Messie ; car il est plein de grâce et de vérité. Voici, il s’offre en sacrifice pour le péché, pour satisfaire aux exigences de la loi, pour tous ceux qui ont le cœur brisé et l’esprit contrit, et il ne peut être satisfait aux exigences de la loi pour personne d’autre. » (2 Né. 2:6-7)

L’attitude, la condition de notre cœur, est tout. Il importe peu que nous soyons fiers de notre capacité relative à garder les commandements, tant que notre attitude n’est pas correcte, que notre cœur n’est pas brisé, et que notre esprit n’est pas contrit, notre bonté relative ne nous sert pas à grand’ chose. Mais aussi impressionnante que soit la performance relative d’un individu, sans le Sauveur celle-ci est insuffisante pour obtenir le salut ; elle ne suffit pas pour satisfaire à la perfection exigée pour entrer en présence de Dieu.

D’un autre côté, dès que notre attitude est correcte, c’est à dire dès que notre cœur est brisé et notre esprit contrit, notre faiblesse relative est de peu d’importance, du moment que nous entrons dans l’alliance et que nous continuons à la respecter. Lorsque le coût de la bicyclette s’élève à plus de cent euros, quelle différence cela peut-il faire sur le long terme qu’il me manque cent euros et qu’il vous manque à vous quatre vingt dix neuf euros ? Nous sommes tous des mendiants aux yeux de Dieu. C’est pourquoi je ne ressens aucune supériorité par rapport au plus humble des membres. Je peux seulement ressentir de l’empathie pour celui qui partage la même situation que moi devant Dieu.

La Sainte-Cène

La conversion et le repentir ne sont pas des événements qui arrivent une seule fois. De plus nous ne pouvons garder tous les commandements tout le temps, c’est pourquoi nous devons renouveler nos alliances régulièrement. En tant qu’êtres déchus nous avons besoin de nous rappeler l’alliance que nous avons faite et l’engagement que nous avons pris lors du baptême. Nous avons besoin d’occasions qui nous permettent de nous corriger fréquemment. Cela peut sembler curieux au regard de nombreuses confessions de prendre la Sainte Céne toutes les semaines. Mais les saints des derniers jours savent que des êtres imparfaits doivent redéfinir régulièrement leur but visant à la perfection, ce qui leur permet entre temps d’être justifiés par le sacrifice expiatoire du Christ.

C’est pourquoi nous venons toutes les semaines devant le Seigneur pour nous préparer à la Sainte-Cène et dire en substance : « Père céleste, je n’ai pas été parfait cette semaine, mais je me repens de mes péchés et réaffirme mon engagement à garder tous les commandements. Je promets de revenir pour essayer de nouveau de tout mon cœur, tout mon pouvoir, toute ma pensée et toute ma force. J’ai toujours besoin de la purification qui vient de la foi, du repentir et du baptême. Veuille perpétuer mon contrat, mon alliance du baptême et accorde moi les bénédictions continuelles de l’Expiation et la compagnie du Saint-Esprit. »

Doctrine et Alliances 20:77 doit être l’Écriture la plus familière des saints des derniers jours. Nous faisons cette prière à chaque fois que nous renouvelons nos alliances avec Dieu : « Ô Dieu, Père éternel, nous te demandons au nom de ton Fils, Jésus-Christ, de bénir et de sanctifier ce pain pour les âmes de tous ceux qui en prennent, afin qu’ils le mangent en souvenir du corps de ton Fils, et te témoigner, Ô Dieu, Père éternel… »

Quand nous prenons la Sainte-Cène, nous renouvelons l’alliance de l’Évangile, et nous le faisons en souvenir du Fils qui est l’auteur de cette alliance. Lorsque nous pensons au Sauveur et à son sacrifice, nous témoignons de certaines choses. Témoigner c’est jurer ou affirmer solennellement. C’est pourquoi ‘et te témoigner’ introduit la déclaration légale de la prière : « et te témoigner, ô Dieu, Père éternel, qu’ils veulent prendre sur eux le nom de ton Fils, et garder toujours les commandements qu’il leur a donnés. »

Pourquoi est-il nécessaire de trouver ces mots : « veulent prendre » ? Sont-ils importants ? Cela ferait-il une différence si on les enlevait et qu'on lisait seulement : « …et te témoigne, ô Dieu Père éternel, qu’ils prennent sur eux le nom de ton fils, et qu’ils se souviennent toujours de lui afin qu’ils gardent les commandements qu’il leur a donnés » ? Oui, cela ferait une différence. Cela en ferait une, car je ne peux faire ce qui vient d’être dit. Je ne peux témoigner, affirmer ou jurer que je peux toujours me souvenir de lui et garder ses commandements. Je mentirais, et je le sais ; je veux faire ce qui est juste, mais parfois je ne peux pas. C’est précisément là qu’est le problème : L’expiation du Christ et l’alliance de l’Évangile me sont nécessaires en tout premier lieu ; je ne peux garder tous les commandements tout le temps quels que soient les efforts que j’y consacre. C’est pourquoi je ne peux témoigner honnêtement devant Dieu que je garderais tous les commandements quand je sais que dans une mesure plus ou moins grande je ne le ferais pas.

Cependant, je peux en toute honnêteté affirmer que je suis disposé à le faire. Je peux jurer que c’est là le désir de mon cœur. Je peux affirmer que j’ai faim et soif de ces choses, et que je veux faire tout ce qui est en mon pouvoir pour y obéir. Ainsi Dieu me fait connaître grâce aux termes techniques contenus dans la prière de renouvellement de l’alliance que l’engagement honnête de mon cœur et mes efforts sincères suffisent pour que l’alliance soit renouvelée, et la foi suffit, par la grâce du Christ, pour me justifier aux yeux de Dieu.

Un cœur dévoué

Par dessus tout, c’est notre cœur que Dieu veut. Les performances imparfaites peuvent être corrigées, les péchés pardonnés, les fautes oubliées, mais Dieu ne peut rien contre un cœur rebelle et mal disposé tant qu’il ne se repent pas. On peut être sauvé de la faiblesse, mais pas de la rébellion. « Voici, le Seigneur exige un cœur et un esprit bien disposés. » (D&A 64:34)

Doctrine et Alliances 46:9 montre que Dieu accepte notre bonne volonté sincère et notre désir honnête quand bien même nous ne sommes pas des plus performants. Cette écriture parle des dons de l’Esprit accordés aux saints : « Ils sont donnés pour le profit de ceux qui m’aiment et gardent tous mes commandements… » Les dons de l’Esprit sont pour ceux qui aiment Dieu et qui gardent tous les commandements ? Oh, non, pas tous les commandements : Jamais je ne serais qualifié ! Mais attendez, il y a une virgule « … et de celui qui cherche à faire ainsi ». Merci Seigneur, pour ce qui vient après la virgule ! Même ceux qui ne sont pas parfaits peuvent jouir des dons et des bénédictions de l’Esprit, tant que l’on cherche à garder les commandements au mieux de nos capacités.

La Perle de grand prix dit aussi comment le Saint-Esprit a confirmé à Adam que : « …de même que tu es tombé, tu puisses être racheté, ainsi que toute l’humanité, tous ceux qui le veulent » (Moïse 5:9). Remarquez qu’il n’est pas dit : « tous ceux qui sont parfaits » ; Adam est imparfait et déchu (comme vous et moi). La promesse s’adresse à tous ceux qui le veulent, c’est à dire à tous ceux qui désirent véritablement la rédemption de leur imperfection. Un autre aspect des promesses de la nouvelle alliance montre que tous ceux qui le désirent réellement et qui y travaillent de toutes leurs forces peuvent entrer dans le royaume de Dieu, quelle que soit l’énergie qu’ils déploient, et qu’ils hériteront du royaume.
Et ça c’est la bonne nouvelle.


CHAPITRE QUATRE : LE SALUT PAR LA GRÂCE

Je pose souvent cette question à mes étudiants : « Quand vous serez à la barre de Dieu au jour du Jugement dernier, combien parmi vous aimeraient avoir l’assurance que Dieu sera absolument juste avec vous  ?  » En général, toutes les mains se lèvent. C’est à ce moment que je leur tire le tapis sous les pieds. « Vous auriez intérêt à bien réfléchir. Être juste consiste à être jugé selon les lois de la justice et recevoir ce que l’on mérite. Mais des êtres déchus et imparfaits tels que nous ne cherchent pas à avoir ce qu’ils méritent. Ils cherchent mieux. Ils ne veulent pas que Dieu les juge justement, ils veulent qu’il soit miséricordieux. L’expiation du Christ fournit un moyen pour que Dieu soit en même temps juste et miséricordieux. Comme le Christ et moi sommes un dans l’alliance de l’Évangile, et que dans un partenariat, il importe peu de savoir qui fait quoi, le Christ peut satisfaire aux exigences de la justice en ma faveur, et je peux alors recevoir les bénéfices de la miséricorde de Dieu. Voilà un arrangement qui satisfait la justice et la miséricorde.

Il se trouve qu’il y a toujours des gens qui sont si « dépendants » de la loi de la justice qu’ils ont des difficultés à intégrer la loi de la miséricorde ou de la grâce. Certains aspects de l’Évangile et de la miséricorde les agacent et leur semblent injustes (en d’autres mots, miséricorde plutôt que justice) par exemple, ce n’est pas très juste qu’une personne doive souffrir pour les péchés d’autrui. Il n’est pas juste que des gens commettent des crimes horribles et soient ensuite complètement pardonnés et purifiés sans avoir à en souffrir. Il n’est pas juste que celui qui travaille seulement une heure reçoive la même récompense que celui qui travaille toute la journée. (Voir Matt. 20:1-16)

Non, l’Évangile, parfois, n’est pas juste, mais c’est en fait une partie de la bonne nouvelle. Elle n’est pas juste, elle est miséricordieuse, et grâce à Dieu, il en est ainsi, car nul homme ne peut être acquitté vu les exigences de la justice absolue. Du point de vue des êtres imparfaits et mortels que nous sommes, se trouver jugés exclusivement par la justice est notre pire cauchemar. Il n’en reste pas moins que certains d’entre nous ne veulent pas abandonner la loi de la justice. De nombreuses personnes m’ont dit : « Oui, ce que vous dites sur la miséricorde et la justice serait merveilleux si c’était la réalité, mais pour moi, il y a quelque chose qui ne va pas. C’est trop facile, cela ne semble pas juste. » En d’autres termes « Je n’accepte pas la miséricorde parce que ça n’est pas la justice. » Mais c’est justement cela la bonne nouvelle. L’Évangile offre la miséricorde à ceux qui seraient autrement damnés par la justice. Que disent les Écritures :

« Oh !La grandeur de la miséricorde de notre Dieu, le Saint d’Israël ! Car il délivre ses saints de ce monstre affreux, le diable, et de la mort, et de l’enfer, et de l’étang de feu et de soufre, qui est le tourment sans fin ». (2 Né. 9:19)

Maintenant, ce n’est pas un sort injuste que les Saints soient délivrés de l’enfer. Il n’y a rien de mal à ce que les gens aillent en enfer, ils le méritent. Après tout, ils ont des péchés à payer et il n’est que juste qu’ils les assument : « Mais malheur à celui à qui la loi est donnée, oui, qui a tous les commandements de Dieu, comme nous, et qui les transgresse, et qui prodigue les jours de son épreuve, car affreux est son état ! » (2 Né. 9:27). Dans la situation décrite dans ces deux Écritures, le diable, la mort, et l’enfer reçoivent un pouvoir sur les individus limité dans le temps et en intensité permettant de rembourser la dette du péché. L’enfer n’est pas une invention satanique. Il fait partie du plan de Dieu, et cette notion est parfaitement juste. Il est vrai que c’est Satan qui y règne, mais seulement dans la limite permise par Dieu. La menace de l’enfer représente la menace de la justice, et la peur de recevoir ce que l’on mérite et d’avoir à payer ce que l’on doit sans que la miséricorde n’interfère.

D’un autre côté, l’expiation du Christ offre un moyen d’obtenir la miséricorde plutôt que la justice et d’éviter ainsi un juste châtiment en enfer. Mais si on rejette la miséricorde qu’offre le Christ, alors il est juste de souffrir pour ses péchés. La justice ne pourra jamais intervenir pour nous sauver d’un châtiment mérité, seule la miséricorde peut le faire. « Et tandis que le bras de sa miséricorde est étendu vers vous à la lumière du jour, ne vous endurcissez pas le cœur… (Autrement) selon le pouvoir de la justice, car la justice ne peut se voir opposer un refus, vous devrez vous en aller dans l’étang de feu et de soufre, dont les flammes ne s’éteignent pas, et dont la fumée monte pour toujours et à jamais, étang de feu et de soufre qui est le tourment sans fin. » (Jacob 6:5, 10)

Dans cette vie, il n’y a que deux maîtres et deux possibilités. Nous devons choisir à qui nous appartenons : à l’un ou à l’autre. Si nous ne choisissons pas l’un, c’est l’autre que nous aurons par défaut. Il n’y a pas de terrain neutre, pas de troisième choix. La vie est réglée par défaut comme les ordinateurs. Les conditions s’appliquent automatiquement à moins de prendre une décision consciente pour les modifier. Ainsi, si nous refusons que le Christ soit notre Seigneur en remplissant toutes les conditions pour entrer dans son alliance, Satan devient notre seigneur par défaut. C’est le Christ par choix ou Satan par défaut. Il n’y a pas d’autres options.

Le Christ « apportera le salut à tous ceux qui croiront en son nom ; ceci étant le but de ce dernier sacrifice : réaliser les entrailles de miséricorde, ce qui l’emporte sur la justice et fournit aux hommes le moyen d’avoir la foi qui produit le repentir. Et ainsi la miséricorde peut satisfaire aux exigences de la justice et les enserre dans les bras de la sécurité… » (Alma 34:15-16) Le choix qui se présente à nous est la miséricorde ou la justice. On peut se tourner vers l’un de ces deux choix, et l’un et l’autre sont en accord avec la nature et le plan de Dieu. Mais hormis Dieu et Satan, il n’existe pas de troisième voie. De nouveau, la vie a des réglages par défaut, et ces réglages sont définis sur la justice. Nous pouvons choisir la miséricorde offerte par l’alliance de l’Évangile, mais si nous la refusons, c’est la justice que nous subirons.

Cependant, la miséricorde a ceci d’original : par définition elle ne s’obtient qu’à condition de ne pas la mériter. Car si nous méritons quelque chose, alors il est juste que nous la recevions. Et cela cesse d’être la miséricorde. C’est pourquoi dans ce sens, tout au moins, accorder ou bénéficier de la miséricorde a toujours un côté injuste. Mais un des aspects merveilleux de l’Évangile, une des bonnes nouvelles parmi d’autres est que Jésus-Christ ne se soucie pas de cette injustice. Il a la volonté de souffrir injustement et de compenser lui même la justice en payant de sa personne afin d’étendre la miséricorde à des êtres faibles comme nous. Cette volonté qui est la sienne de payer plus que son dû et de porter plus que ce qu’il devrait afin d’accorder la miséricorde à autrui représente la grâce du Christ.

La grâce

Dans la Bible, le mot grâce a plusieurs significations. Les mots hébreux ou grecs habituellement traduits par « grâce » (respectivement hen ou charis) sont aussi traduits par faveur, plaisir, remerciements, gracieuseté ou bienveillance. On utilise aussi le terme pour désigner un cadeau, un bénéfice, ou un geste symbolique. Dans la société contemporaine, le pourboire ou la gratuité (de la même racine latine que grâce) représente la même idée. Un client paie sa note, c’est la justice qui l’exige, mais le pourboire est laissé à la libre appréciation. Il n’y a aucune obligation. La grâce peut aussi signifier la beauté (Jacques 1:11) ou elle peut désigner la faveur ou la situation particulière que l’on accorde à une tierce personne en retour d’un service rendu (voir Gen. 33:8), pour un avantage spirituel (voir 1 Sam. 2:18), ou même pour décrire la beauté physique (voir Esther 2:15-17).

Dans le Nouveau Testament, le mot « grâce » se rapporte plus souvent à la grâce ou à la faveur divine, et l’on comprend habituellement ce terme comme désignant l’attitude bienveillante qui prédispose Dieu à agir positivement envers les êtres humains. Le mot clé ici est ‘prédispose’. En d’autres termes, avant d’avoir fait quoi que soit, avant d’être beau et intelligent ou charmant ou même juste, avant d’avoir pu gagner quelque récompense ou mériter quelques bénédictions, avant tout ceci, Dieu est déjà prédisposé à mon égard. La grâce en ce sens n’est pas une chose que je peux susciter, manipuler, gagner, mériter, ou contrôler, car c’est un aspect préexistant de l’attitude de Dieu à mon égard. Avant que j’aie même pu lui répondre, il m’aimait déjà, il voulait déjà m’aider et il voulait déjà me voir réussir (Cf. 1 Jn 4:19) Par cette prédisposition à mon égard, Dieu m’accorde aussi des dons de temps en temps pour m’aider à réussir. Dans les Écritures ces dons sont quelquefois présentés comme étant la grâce de Dieu, puisque ce sont des symboles de sa prédisposition positive à mon égard.

Tout comme notre Père céleste, la plupart des parents sont prédisposés favorablement envers leurs enfants avant même qu’ils aient fait quoi que ce soit de méritant. Même lorsque tout ce que peut faire un enfant, c’est pleurer et mouiller ses couches, même dans ces circonstances, on peut être sûr que ses parents disposent d’un vaste réservoir d’amour et de soins et qu’ils se soucient de lui. Bien que les enfants consomment plus qu’ils ne produisent, la plupart des parents sont prédisposés à les traiter favorablement, ou en d’autres termes à leur accorder la grâce. C’est pourquoi ils font des choses pour leurs enfants qu’ils ne feraient pas pour des étrangers.

Quand il grandit, le « s’il te plaît » de l’enfant est un appel à la bienveillance et à la grâce de maman et papa. « S’il te plaît » n’est pas un argument, il n’avance aucune preuve que ce qui est demandé est juste ou mérité. Cela n’implique pas que l’objet en question ait été gagné. Il signifie simplement : « Faites le parce que vous m’aimez et que vous êtes prédisposés en ma faveur, ou faites le simplement parce que je le veux ou que j’en ai besoin, et que vous vous souciez de mes besoins et de mes désirs. Faites le en signe de votre grâce, pour exprimer votre affection envers moi. Faites le parce que je suis à vous et que vous êtes à moi ». L’expression espagnole « por favor » qui signifie « s’il te plaît » se traduit littéralement « par grâce » ou « par faveur » et exprime la véritable signification de la supplique « s’il te plaît ».

Théologiquement, la grâce de Dieu représente sa bienveillance à notre égard, sa prédisposition à agir au mieux de nos intérêts avant même d’avoir gagné ou mérité sa considération. Les saints des derniers jours comprennent que Dieu a exprimé de nombreuses façons sa grâce inconditionnelle envers ses enfants. Par exemple, Dieu a fait de nous ses enfants d’esprits dans la vie pré mortelle. Ce fut pour nous une grande bénédiction, alors que nous ne l’avions pas demandé, et qu’il n’y avait aucun moyen de mériter ou de gagner par avance le droit à devenir ses enfants. Dieu l’a fait parce qu’il avait le pouvoir de le faire et nous nous en sommes trouvés mieux après qu’il l’ait eu fait.

Notre naissance en tant qu’enfants d’esprits fut l’expression gratuite de la bienveillance du Père, de son souci et de son amour délibéré et sans exclusive à notre égard. C’est-cela la grâce pure. De plus, tout comme les parents aiment leurs petits enfants avant même qu’ils puissent le leur rendre, Dieu nous aime avant même que nous puissions l’aimer en retour, et encore moins « gagner » cet amour par notre bon comportement.

La grâce divine touche aussi et réclame les enfants morts avant l’âge de responsabilité (voir D&A 29:46 ; 137:10). Tout comme elle réclame les malades handicapés (voir D&A 29:50) et ceux qui sont véritablement ignorants des commandements de Dieu dans la mesure de leur ignorance (voir 2 Né. 9:25-26). Dans tous ces cas, Dieu est prédisposé à agir unilatéralement en leur faveur sans qu’il leur soit nécessaire de se qualifier pour mériter son attention. Ils sont sauvés par la grâce. Les saints des derniers jours croient aussi que c’est par la grâce divine que la postérité d’Adam ne supporte pas le poids du péché d’Adam (le péché originel) et que c’est là un acte unilatéral qui montre la bienveillance de Dieu (voir Moro. 8: 8) Ainsi, tous les hommes ressusciteront par la grâce de Dieu. Ces aspects de la grâce divine sont des dons que nous ne pouvons maîtriser ni mériter.

Néanmoins, on utilise quelques fois le terme de grâce dans un sens différent pour décrire une qualité remarquable et qui concerne le comportement. Quand on en parle dans ce sens, la faveur ou la grâce divine n’est pas une donnée préexistante, mais une chose que l’on doit rechercher, qui peut augmenter ou diminuer, ou même être complètement perdue en raison du comportement de l’individu. Ainsi, Pierre soutient dans 1 Pierre 5:5 que Dieu accorde sa grâce aux humbles (par opposition à ceux qui manquent d’humilité). Il exhorte aussi les croyants à « croître dans la grâce » (voir 2 Pierre 3:18) (Cf. Luc 2:52). Jean explique que les croyants reçoivent grâce sur grâce, ou en d’autres termes, ils reçoivent davantage de faveurs de la part de Dieu à chaque fois qu’ils réagissent positivement (gracieusement) aux grâces déjà obtenues (voir Jean 1:16 ; D&A 93:12, 19-20). Paul avertit même les Galates du danger à se laisser détourner de la grâce de JésusChrist à cause de leur folie (voir Gal. 1:6 ; 5:4).

Cette grâce qui vient en retour peut se développer (1 Pierre 1:2). Elle « abonde » en certaines circonstances, ou elle peut être reçue en « vain » (2 Cor. 6:11). On l’emploie dans le sens d’une récompense dans Luc 6:32, 34 (… quel gré vous en saura-t-on ?) et des remerciements que les hommes doivent à Dieu. Encore aujourd’hui, « dire les grâces » signifie offrir les remerciements dus à Dieu pour ses bénédictions. Ce genre de grâce sensible constitue aussi la nuance qui se trouve derrière la plupart des Écritures dans lesquelles on parle de trouver « grâce aux yeux » d’autrui (voir Gen. 19:19 ; 1 Sam. 20:3). Quand on emploie le terme « grâce » dans ce sens, en tant que grâce sensible, on voit comment on peut dire que quelqu’un a grandi de grâce en grâce pour arriver enfin à une « plénitude de grâce » (D&A 93:12, 19-20).

Nous voyons donc que certains aspects de la faveur ou de la grâce divine sont unilatéraux et sans condition préalable. Ces choses nous ont été accordées par Dieu sans tenir compte de notre comportement personnel. Ce sont des dons totalement désintéressés accordés à tous les humains à cause de son amour préexistant. Cependant, d’autres aspects de la faveur ou de la grâce divine sont soumis à conditions et sont susceptibles d’augmenter ou de diminuer, et même de disparaître totalement de nos vies en fonction de la façon dont nous les recevons. Néanmoins, dans les deux cas, l’amour et la grâce de Dieu sont déversés sur l’homme. L’amour et la grâce proviennent de lui, car c’est sa nature, et il fait le premier pas. Dieu nous aime, non pas parce que nous sommes si aimables qu’il ne peut s’empêcher de nous aimer, il nous aime parce que c’est dans sa nature d’aimer, parce que Dieu est amour (voir 1 Jean 4:8).

Sauvé par la grâce

La plus grande expression de l’amour et la grâce unilatérale et sans condition manifestée par Dieu se manifeste dans le don du Sauveur en faveur des pécheurs. « Car Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que tous ceux qui croient ne périssent pas, mais qu’ils aient la vie éternelle » (Jean 3:16). L’expiation du Christ et le don de sa miséricorde sont pour nous, que nous soyons justes ou pas, que nous les méritions ou pas. Elles sont offertes tant pour le juste que pour le méchant (religieusement parlant). Tout le monde est invité à le recevoir. Cette solution pour résoudre tous les problèmes de l’humanité est offerte gratis (gracieusement). La justice n’exigeait pas que le Père fournisse un Sauveur, non plus que Jésus-Christ s’offre pour être ce Sauveur et souffre à notre place pour nous sauver. Lorsqu’il a vu notre faiblesse, le danger que nous courions, et la nécessité dans laquelle nous étions, son amour et sa compassion l’ont poussé à offrir son intervention, à se porter volontaire.

L’alliance de l’Évangile repose sur la grâce, l’expression de la bienveillance divine. Dieu n’était pas tenu de nous proposer cette nouvelle alliance, et le Christ n’était pas obligé de se porter volontaire. En tant qu’humains, nous n’avons pas mérité nigagné l’offre de la nouvelle alliance. C’est plutôt le contraire : l’alliance de l’Évangile était nécessaire en premier lieu à cause de notre désobéissance et de notre incapacité à garder les commandements. Nous ne l’avons pas gagné, nous en avions besoin. Pas de grâce, pas de volontaire, pas de volontaire, pas de sauveur, pas de sauveur, pas de salut. La conclusion est inévitable : nous sommes sauvés par la grâce.

Pour certaines raisons, les saints des derniers jours ne sont pas à l’aise avec la doctrine de la grâce. Je crois que c’est parce qu’ils ont été trop rebutés par les interprétations provenant de certaines confessions chrétiennes et ils en sont arrivés à rejeter le terme même ; ils ont jeté le bébé avec l’eau du bain. Cependant, étant donné le nombre d’Écritures des livres canoniques qui enseignent la grâce, nous ne pouvons nier la place centrale qu’elle occupe dans l’Évangile. Ainsi, voici ce que dit le Livre de Mormon : « …réconciliez vous avec la volonté de Dieu, et non avec la volonté du diable et de la chair ; et souvenez vous, lorsque vous serez réconciliés avec Dieu, que ce n’est que dans et par la grâce de Dieu que vous êtes sauvés. (2 Né. 10:24)

Car nous travaillons diligemment à écrire ; pour persuader nos enfants, et aussi nos frères, de croire au Christ et d’être réconciliés avec Dieu ; car nous savons que c’est par la grâce que nous sommes sauvés, après tout ce que nous pouvons faire. (2 Né. 25:23)

«Et si les hommes viennent à moi, je leur montrerai leur faiblesse. Je donne aux hommes de la faiblesse afin qu’ils soient humbles ; et ma grâce suffit à tous les hommes qui s’humilient devant moi ; car s’ils s ’humilient devant moi, et ont foi en moi, alors je rendrai fortes pour eux les choses qui sont faibles. » (Éther 12:27)

« Oui, venez au Christ et soyez rendus parfaits en lui, et refusez vous toute impiété ; et si vous vous refusez toute impiété et aimez Dieu de tout votre pouvoir,de toute votre pensée et de toute votre force, alors sa grâce vous suffit, afin que par sa grâce vous soyez parfaits dans le Christ ; et si, par la grâce de Dieu, vous êtes parfaits dans le Christ, vous ne pouvez en aucune façon nier le pouvoir de Dieu.

« Et en outre, si, par la grâce de Dieu, vous êtes parfaits dans le Christ et ne niez pas son pouvoir, alors vous êtes sanctifiés dans le Christ, par la grâce de Dieu, grâce à son effusion du sang du Christ, qui est dans l’alliance du père pour le pardon de vos péchés, afin que vous deveniez saints, sans taches. » (Moro. 10:32-33)

Pour les saints des derniers jours, la doctrine de la grâce n’implique pas que le salut ne vienne que d’elle seule, c’est à dire, sans participation dans une certaine mesure au processus, et cela ne signifie pas que le salut soit octroyé sans aucune condition. S’il en était ainsi, celui ci se résumerait à une chose qui nous tomberait du ciel, comme si l’on était frappé par un éclair ou si l’on gagnait à la loterie. Les saints des derniers jours ne croient pas que la grâce soit accordée d’une façon aléatoire ni qu’elle soit irrésistible, ou que le salut soit accordé unilatéralement de la part de Dieu (prédestination). Dieu peut être prédisposé en notre faveur, il peut placer à notre portée ce qui ne l’était pas, et il peut ôter tous les obstacles obstruant le chemin du salut, mais il ne nous obligera pas, une fois déblayé ,à prendre celui-ci, et il ne nous sauvera pas contre notre gré. L’alliance de l’Évangile est proposée gracieusement, mais c’est par choix librement consenti qu’on l’accepte.

Certains théologiens soutiennent que la grâce soumise à conditions verrait disparaître sa qualité en tant que grâce, mais je ne suis pas d’accord. Supposez qu’un être cher vous ait offert un voyage tous frais payé à Hawaii, et ce gratis (c’est à dire gracieusement) et qu’il vous ait demandé de répondre à l’invitation avant une certaine date. est-ce que la condition consistant à répondre affirmativement avant une certaine date diminue en quoi que ce soit la valeur de cet acte de gentillesse et sa gratuité motivé par l’amour ? Prétendriez vous qu’à partir du moment où vous auriez répondu affirmativement, votre parent vous devrait ce voyage, et que vous l’auriez en fait gagné en remplissant la seule condition exigée : accepter l’offre dans le délai prescrit ? Le fait que l’on admette qu’il s’agisse d’un cadeau et affirmer que l’on veut le recevoir transforme-t-il celui-ci en dû ?

Évidemment non, et de la même façon, Dieu, notre riche Parent céleste, nous offre son royaume gracieusement, en faisant à notre place ce que nous ne pouvons faire pour nous mêmes. Mais il exige aussi que nous reconnaissions et que nous acceptions l’offre par la foi en Christ, le repentir, le baptême, et la réception du Saint-Esprit. Alors, tant que nous gardons l’alliance de l’Évangile, la grâce de Jésus-Christ est suffisante « pour (lui) appartenir, pour (nous) sauver, et pour (nous) justifier ». Les Écritures sont claires : tant que nous respectons l’alliance,la grâce du Christ n’est pas simplement nécessaire, elle est suffisante pour notre salut (Voir Éther 12:27 ; Moro. 10:32-33).

Mais nous devons accepter cet accord. Lorsque nous acceptons le Christ et que nous faisons alliance avec lui, les exigences de la justice, qui représentent les exigences de la perfection dont nous ne jouissons pas, sont satisfaites par la grâce de Dieu, et nous sommes sauvés. C’est ainsi que les principes du salut de l’alliance évangélique nous sont offerts par faveur, gracieusement et avec bienveillance. Mais on peut toujours refuser la grâce. On peut résister à l’amour de Dieu et rejeter son alliance. Le Christ se tient à la porte et il frappe, mais il ne donne jamais de coups de pied dedans. C’est nous qui devons ouvrir la porte.

La foi ou les oeuvres ?

Pendant des siècles les théologiens ont discuté à perte de vue pour savoir si l’on était sauvé par la foi ou par les œuvres. On peut les renvoyer dos à dos, car ni la foi seule (considérée comme une simple croyance passive) ni les œuvres seules ne peuvent nous sauver. Le salut n’est viable que par l’alliance dans laquelle la foi et les œuvres jouent chacune leur rôle. Soutenir que le salut ne vient que par les œuvres seules, que nous pouvons être sauvés sans la grâce divine, insulte à la miséricorde de Dieu et est une moquerie envers le sacrifice que Jésus-Christ a subi en notre faveur. D’un autre côté, soutenir que le salut ne vient que de la croyance seule et que Dieu ne place aucune autre obligation sur le croyant, insulte à la justice divine et fait du Christ le serviteur du péché.

La conception de l’alliance dans les Écritures, accord entre les hommes et Dieu qui établit des obligations pour les deux parties et qui satisfait en même temps la justice et la miséricorde, élimine l’opposition entre la foi et les œuvres. En résumé, voici en quoi consiste l’accord : nous faisons ce que nous pouvons, et Jésus-Christ, l’objet de notre foi, fait ce que nous sommes incapables de faire grâce à son amour, sa miséricorde et sa grâce. Et nous devons croire qu’il le peut, nous devons croire le Christ.

Dans la parabole des talents, il importe peu de savoir que celui qui a cinq talents en a gagné cinq autres, alors que celui qui en a deux n’en gagne que deux de plus. Les efforts de l’un et de l’autre sont acceptés, bien que l’un ait plus de talents et ait donné plus de résultats que l’autre. En fait, celui qui n’avait qu’un talent aurait été accepté si seulement il avait fait ce qu’il avait pu, mais il n’a pas choisi d’essayer.

On trouve en de nombreux endroits dans les Écritures le terme de foi défini en tant qu’« engagement », incluant ainsi dans le seul mot de foi le sens de croyance et de comportement. Dans cette acception, on peut dire que nous sommes sauvés par la foi seule (c’est à dire grâce à un engagement total de notre croyance et de notre comportement)

Il est vrai que nos œuvres ne peuvent nous sauver, mais nous pouvons contribuer dans une certaine mesure aux efforts conjoints de notre partenaire. Nous devons faire quelque chose pour participer au partenariat, pour être dans l’alliance. Même si tous les efforts que nous faisons sont insuffisants pour nous sauver par nous mêmes, ils suffisent comme symbole de notre bonne foi à établir l’alliance avec notre Sauveur. Cette relation a pour finalité de lui appartenir, de (nous) sauver, et de (nous) justifier, cependant Dieu exige encore de nous notre participation. Sans notre accord et notre participation, le salut ne se résumerait qu’à de la prédestination et rien de plus, un accident aléatoire qui surviendrait arbitrairement à certains et pas aux autres.

Non, nous devons participer à notre salut dans la mesure de nos capacités. Après tout, il s’agit d’un partenariat, et l’associé minoritaire se doit de contribuer dans la mesure de ses moyens. Refuser cette participation revient à refuser l’idée même du partenariat. Deux personnes sur un tandem, peuvent ne pas faire les mêmes efforts, mais si le plus faible utilise cela comme excuse pour lever le pied et cesser de pédaler, alors l’arrangement cesse d’être un partenariat et cela devient de l’exploitation. Dans le langage de l’Évangile, cela s’appelle violer l’Alliance.

Essayer de faire de notre mieux pour garder les commandements et être semblables au Christ font partie de nos obligations dans le cadre de l’alliance, non parce que nous pouvons y arriver dans cette vie, mais parce que l’essai, notre engagement à essayer, démontre notre sincérité et notre fidélité envers l’alliance, c’est la déclaration de nos buts et de nos désirs. Nos essais courageux montrent que nous avons véritablement faim et soif de justice, même si nous n’y arrivons pas toujours. La foi consiste à vouloir toujours essayer, encore et toujours. Alors que la réussite ne fait pas partie des exigences de l’alliance de la foi, mes essais les plus sincères, eux, en font partie. L’alliance de l’Évangile exige cet effort de « bonne foi ».

Ainsi le vieux débat entre la foi et les œuvres représente une dichotomie et une alternative fausses. Quel que soit le bord que l’on choisisse, la foi seule ou les œuvres seules, le concept de l’alliance, du partenariat entre l’individu et Dieu est supprimé.

Résister à la grâce

Trop nombreux parmi nous se disent : « Quand j’y serai arrivé, quand je me serai perfectionné moi même, quand j’aurais réussi à devenir complètement juste ; alors je serai digne de l’Expiation. Alors le Christ pourra faire son œuvre et m’exalter. » Mais ceci n’arrivera jamais, car c’est mettre la charrue avant les bœufs. C’est comme si on disait : « Quand ma tumeur sera partie, j’appellerai le médecin. Je serai prêt à le recevoir à ce moment. » Ce n’est pas comme cela que ça marche en médecine ou dans l’Évangile. « Ce ne sont pas ceux qui sont en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais ceux qui sont malades » (Matt. 9:12)

Même un prophète aussi grand que Moïse apprit qu’il ne pouvait résister au pouvoir de Satan ni le rejeter tant qu’il ne fit pas appel au pouvoir de Dieu par le nom du Fils unique (voir Moïse 1:20,21). De même, Jean vit que ceux qui recevront le salut, la force et le royaume vainquent Satan par le sang de l’Agneau plus que par leurs efforts personnels (voir Apoc. 12:10).

J’ai la ferme conviction que dans la plupart des cas la croyance selon laquelle nous devons nous sauver nous mêmes grâce à nos bonnes œuvres n’est pas seulement de la mauvaise information, mais c’est mal. C’est mal tout d’abord parce que ce faisant on charge les gens d’un fardeau impossible à porter, le fardeau de la nécessité d’être parfait. À terme, ils vont se désespérer et vont abandonner. Ensuite, c’est mal parce que cela empêche les gens d’admettre qu’ils ont besoin d’un Sauveur et qu’il leur faut accepter les mérites et la miséricorde du saint Messie. Cela les empêche d’appréhender Jésus-Christ dans son rôle de Sauveur. Finalement, c’est mal parce que certaines personnes sont tout simplement trop arrogantes pour admettre leurs imperfections. Ils refusent de s’accepter comme pécheurs ou d’admettre qu’il existe des choses qu’ils ne peuvent faire tous seuls ; de tels cœurs ne seront jamais brisés, ils sont trop orgueilleux. Ces gens considèrent le Christ et son expiation comme de simples outils pratiques que l’on utilise pour se sauver soi même, comme le menuisier emploierait un marteau et des clés pour construire une maison. Ces sauveteurs amateurs s’attribuent tout le mérite de leur salut alors que c’est le Christ qui devrait en bénéficier. Le menuisier ne remercie pas le marteau.

Celui qui croit travailler à son propre salut n’a pas l’humilité nécessaire pour recevoir la purification par l’expiation du Christ :

« Il s’offre en sacrifice pour le péché, pour satisfaire aux exigences de la loi, pour tous ceux qui ont le cœur brisé et l’esprit contrit ; et il ne peut être satisfait aux exigences de la loi pour personne d’autre. » (2 Né. 2:7).

C’est précisément le point que le Sauveur souligne dans la parabole du pharisien et du péager (voir Luc 18:9-14). Le pharisien faisait partie de ces personnes qui « se persuadaient par elles mêmes d’être justes » (verset 9). Le péager, quant à lui, ne gardait pas les commandements de Dieu aussi bien que le pharisien, mais il le savait, et il en avait le cœur brisé. Beaucoup de personnes qui lisent cette parabole voudraient voir un hypocrite dans le pharisien, mais le texte ne suggère rien de cela. Le pharisien faisait véritablement tout ce qu'il devait faire, il en était fier et en retirait un sentiment de supériorité, alors que le péager n’était pas dans ce cas. Mais là n’est pas le point important.

Cette parabole ne traite pas de l’hypocrisie, elle traite de l’orgueil ; selon des normes humaines objectives, en terme de nombre et de fréquence de règles respectées, le pharisien était vraiment le plus juste des deux. Dans Philippiens 2:12 (« travaillez à votre salut avec crainte et tremblement ») Paul n’a pas enseigné que l’on pouvait se sauver soi-même. Lui plus que tout autre connaissait plus sur ce point. Il veut dire plutôt, comme le verset suivant l’explique clairement, que pendant que nous accomplissons l’œuvre, Dieu est-celui qui opère en nous, avec nous, et par nous pour désirer et accomplir le but commun de notre salut. Nos œuvres et la grâce divine sont également nécessaires ! Cependant, selon le Sauveur : « Je vous le dis, celui ci [le péager] descendit dans sa maison, justifié, plutôt que l’autre [le pharisien] » (verset 14).

Je crains que, tout comme le pharisien de la parabole, certains parmi nous relativement bons à garder les règles ne se persuadent de leur justice. Ces gens sont exagérément fiers de leur propre bonté ; ils s’exaltent eux mêmes. Mais quand nous nous enorgueillissons de notre bonté au lieu de nous humilier devant notre imperfection (cf. 2 Né. 4:17-19), notre cœur n’est pas brisé, et notre esprit n’est pas contrit.

Je me souviens d’un missionnaire que nous avons connu dans l’est des États Unis qui ne pouvait simplement pas être enseigné sur ce sujet. Il a dit une fois : « Il est évident que je peux me rendre parfait. C’est la différence entre les saints des derniers jours et les autres chrétiens. Ils croient qu’ils sont sauvés par la grâce, que Dieu leur présente tout sur un plateau d’argent, et nous, nous savons que nous devons le faire nous mêmes. Je suis déjà très bon dans ce que je fais actuellement, et j’ai confiance que je serais arrivé à la perfection aux environs de trente ans. » Il doit avoir dans les trente ans maintenant. Je me suis souvent demandé comment il allait.

Quel mérite nous permet d’entrer dans le royaume ? Quelles bonnes œuvres nous rendent parfaits ? Ces Écritures propres aux saints des derniers jours sont claires à ce sujet. :

« Et puisque l’homme était déchu, il ne pouvait rien mériter par lui même ; mais les souffrances et la mort du Christ expient ses péchés, par la foi et le repentir, et ainsi de suite. (Alma 22:14)

« Et je remercie aussi mon Dieu, oui, mon grand Dieu, de ce qu’il nous a accordé de nous en repentir, et aussi de ce qu’il nous a pardonné les nombreux péchés et meurtres que nous avons commis, et a ôté la culpabilité de notre cœur par les mérites de son Fils. » (Alma 24:10) « …se reposant uniquement sur les mérites du Christ, qui était l’auteur et le consommateur de leur foi (Moro. 6:4)… « pour qu’ils connaissent les promesses du Seigneur, qu’ils croient en l’Évangile, placent leur confiance dans les mérites de Jésus-Christ, soient glorifiés par la foi en son nom, et sauvés par leur repentir ». (D&A 3:20)

Ceux qui envisagent d’entrer dans le royaume de Dieu par leurs propres mérites ne comprennent pas encore comment on arrive à la perfection et à qui doivent être attribués les mérites. Ils se glorifient de leurs efforts et s’attribuent le rôle de sauveur. Le prophète Zenock nous avertit dans le Livre de Mormon que nous risquons d’encourir la colère de Dieu si nous n’apprécions pas sa grâce et sa miséricorde : « …tu es en colère, ô Seigneur, contre ce peuple, parce qu’il ne veut pas comprendre la miséricorde que tu lui as accordée à cause de ton Fils. » (Alma 33:16)

L’archétype de ceux qui veulent s’exalter et s’accorder tous les mérites pour ce que seul le Sauveur peut accomplir est évidemment Satan. Dans Moïse 4:1 on nous dit que Satan insista : « je le ferais certainement ; c’est pourquoi donne-moi ton honneur ». J’oserais dire que ceux qui ne se rendent pas compte de leur totale dépendance envers le Sauveur et qui insistent à vouloir travailler à leur propre salut sont coupables de cette même attitude satanique. Il vaut mieux être le péager pécheur qui se repose humblement sur la miséricorde de Dieu que d’être le pharisien qui se persuadait de sa justice en s’appuyant sur ses bonnes œuvres pour se sauver, car le précédent a au moins appris qu’il a besoin du Sauveur et qu’il est prêt à l’accepter et à se repentir, alors que le dernier ne l’est pas (évidemment, une autre possibilité serait de combiner le cœur brisé et l’humilité du péager avec l’obéissance du pharisien).

« Mon joug est léger »

Certains rejettent l’idée de la grâce parce qu’elle leur semble trop facile. Ils veulent que le salut soit plus difficile. Il existe un certain confort à se dire : « Le salut est si difficile à atteindre que je ne peux vraiment pas y arriver, alors je n’ai pas vraiment besoin d’essayer. » Cette attitude fournit une excuse facile pour ne pas essayer du tout. Cela me rappelle un peu cette jeune femme qui refusait systématiquement les demandes de rendez vous d’un homme qui tout aussi systématiquement lui démolissait ses excuses les unes après les autres. Finalement, elle fut forcée d’admettre la vérité : « Ecoute, je suis à bout d’argument, alors je vais te le dire carrément. Je ne veux pas sortir avec toi. »

Certains d’entre nous utilisent de semblables tactiques évasives avec le Seigneur lorsqu’il nous invite à entrer dans son royaume. Nous présentons une excuse après l’autre pour expliquer pourquoi nous ne pouvons entrer dans le royaume. Mais la grâce divine, qui a ôté tous les obstacles et déblayé le chemin, élimine toutes nos excuses. Par sa grâce, tous les problèmes peuvent être surmontés, toutes les circonstances peuvent être réglées, tout le monde peut être sauvé, à la seule condition que nous désirions véritablement le royaume. Nous disons :

« Je voudrais vraiment venir avec toi, mais je ne peux observer tel ou tel commandement tout le temps,’ et lui nous répond : « Peux-tu le garder quatre-vingt-dix pour cent du temps (ou quatre-vingts ou soixante-dix) ? Alors, commence à ce niveau, et nous y travaillerons ensemble  !  » Finalement, face à tout ce que Dieu a fait et veut faire pour nous, après avoirdéblayé tous les obstacles et que nous soyons face à une porte ouverte, soit nous disons : « Oui, je veux venir avec toi » ou « Écoute, je suis à bout d’arguments, alors je vais te le dire carrément. Je ne veux pas sortir avec toi. » Personne ne peut se défiler en disant : » je voudrais bien venir, mais je ne peux pas ». La grâce a supprimé toutes les excuses sauf une : » je ne veux simplement pas venir, je préfère mes péchés au royaume ».

Quand j’entends quelqu’un se plaindre que la doctrine de la grâce rend les choses trop faciles, je pense à l’occasion où le Seigneur a essayé de montrer sa grâce, son mérite, et sa miséricorde envers Isra ël lorsque celui ci a péché dans le désert : « Et il les a corrigés dans le désert avec sa verge, parce qu’ils s’endurcissaient le cœur comme vous ;et le Seigneur les a corrigés à cause de leur iniquité. Il a envoyé parmi eux des serpents brûlants qui volaient ; et lorsqu’ils ont été mordus, il a préparé un moyen pour qu’ils soient guéris ; et tout l’effort qu’ils avaient à faire était de regarder ; et à cause de la simplicité du moyen, ou de sa facilité, il y en a eu beaucoup qui ont péri. » (1 Né. 17:41 ; cf. Nom. 21:4 9 ; Alma 33:20)

J’ai peur qu’aujourd’hui dans l’Église nous en ayons de semblables qui vont périr plutôt que d’accepter la grâce de Dieu parce que cela leur semble trop facile. Ils ne vont pas croire le Christ. Mais comme le disait Alma à son fils Helaman : « Ô mon fils, ne soyons pas paresseux à cause de la facilité du chemin ; car il en fut ainsi pour nos pères ; car il était préparé pour eux de telle sorte que, s’ils regardaient, ils pourraient vivre ; de même en est-il pour nous. Le chemin est préparé, et si nous regardons, nous pouvons vivre à jamais. » (Alma 37:46)

L’histoire de Naaman le lépreux dans l’Ancien Testament nous prévient aussi d’éviter de mépriser la simple miséricorde divine. Naaman s’en alla voir le prophète Élisée, voulant être guéri et il s’attendait à ce que les soins fussent difficiles et coûteux. Lorsqu’Élisée lui dit d’aller se baigner dans le Jourdain sept fois, « il s’en retourna en colère » (2 Rois 5:12), se sentant insulté, rejeté et dégoûté par une prescription aussi simple. Heureusement ses serviteurs purent le convaincre d’essayer ce remède « trop facile ». « …Si le prophète t’eût demandé quelque chose de difficile, ne l’aurais tu pas fait ? Combien plus doistu faire ce qu’il t’a dit : lave-toi et tu seras pur. » (2 Rois 5:1-3)

Naaman s’humilia, fit la chose simple qu’on lui demandait et fut guéri. Naaman dans sa colère était-il si différent de ceux qui de nos jours pensent que les eaux du baptême et la grâce de Dieu sont trop faciles pour nous purifier de nos péchés ? Lorsque Pierre a dit : « Éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur, ô, Seigneur », il disait probablement la vérité. Mais apparemment, Jésus lui a trouvé quelque utilité.

Mon collègue Léon Hartshorn raconte cette histoire poignante sur la façon dont la croyance de son père en Christ a évolué :

Mon père était un brave homme. Il s’était bien occupé de ma mère pendant des années alors qu’elle était malade avant de décéder. Il enseigna à ses enfants à être honnêtes et justes. Il a toujours payé sa dîme, mais il n’allait pas à l’Église. Mon père avait travaillé à la mine pendant une grande partie de sa vie, dans un environnement qui n’invitait en général pas l’Esprit de Dieu, et c’est peut être pour cette raison qu’il pensait qu’il n’aurait pas pu être pleinement pratiquant et jouir de toutes les bénédictions d’une vie active dans l’Évangile.

J’étais marié depuis deux ou trois ans lorsque je retournai le voir chez lui. Alors que nous étions assis ensemble, il me dit : « Fils, j’ai fait un rêve. J’ai rêvé que je me tenais au bord d’une falaise, et que le Sauveur s’approchait de moi à cheval. Il avait une corde attachée à la selle et enroulée autour du pommeau de la selle. Il m’a tendu la corde et m’a dit : « Bob, je veux que tu me descendes avec mon cheval le long de la falaise ». Je lui répondis que c’était impossible ; qu’il était impossible pour un homme de descendre un cheval et son cavalier le long d’une falaise. Il répondit « Bob, descends- moi avec mon cheval le long de la falaise ». Alors, j’ai pris le bout de la corde et je les ai descendus au bas de la falaise. À ma grande surprise, ce n’était pas du tout difficile. Lorsque le cheval et son cavalier furent arrivés au bas de la falaise, il regarda vers le haut et dit : « Bob, envoie la corde. » Je la laissai tomber, et il la réenroula autour du pommeau de la selle. Alors, me regardant du bas de la falaise, il me dit simplement : « Bob, c’est aussi simple que cela de vivre mes commandements si tu veux essayer. » C’était une leçon que mon père pouvait comprendre, une leçon enseignée dans son vocabulaire de chevaux, de cavaliers, de selles et de cordes. À la suite de cela il essaya de faire tout ce qu’on lui demanda dans l’Église et fut très pratiquant durant les vingtcinq dernières années de sa vie.

Les fruits de la grâce

La grâce du Christ a le pouvoir de convertir les cœurs contrits si l’on reconnaît humblement que l’on dépend d’elle et de la miséricorde. J’ai connu un membre de l’Église dont le sens de la justice était si fort qu’il était dans l’incapacité d’accepter l’expiation du Christ, encore qu’il ne s’en rendait pas compte à l’époque. C‘était un homme vraiment très dur, avec sa femme, ses enfants, dur avec ses amis et ses voisins, et surtout dur avec lui même. Il n’était jamais véritablement injuste, mais il ne pardonnait jamais et n’oubliait jamais. Il luttait pour obtenir la perfection absolue dans tout ce qu’il faisait, et il ne tolérait absolument aucun échec de qui que ce soit. À ses yeux, ‘une honnête tentative’ ou ‘un effort courageux’ n’était que des euphémismes pour le mot échec, et que le ciel vienne en aide à sa femme ou à ses enfants s’ils ne satisfaisaient pas ses attentes ! Il faut dire honnêtement que cet homme n’avait jamais demandé qu’on lui fasse une fleur, et il n’en avait jamais fait lui non plus. Pour lui, l’idée selon laquelle on peut être pardonné de nos péchés à cause de ce que le Christ a fait et par conséquent, échapper totalement au châtiment d’une juste punition lui semblait trop facile. Il définissait sarcastiquement la doctrine du terme de « grâce facile » parce qu’il avait l’impression que celle-ci permettait aux gens qui méritaient d’être punis de se libérer de l’hameçon.

Après plusieurs années d’amitié, je découvris que cet homme cachait un grand secret, un terrible péché qui datait de loin pour lequel il n’arrivait pas à se pardonner. Dans son esprit, ce péché était si horrible que la justice l’empêcherait d’entrer dans le royaume de Dieu pour l’éternité. Il était totalement désespéré, et dans sa résignation absolue envers ce qu’il considérait un juste sort, il était devenu dur, froid et mort. La haine et la rage qu’il ressentait envers son imperfection montaient en spirale pour aspirer tous ceux qu’il connaissait susceptibles de montrer des signes d’imperfection.

Nous parlions un jour de la loi de la justice et je fus d’accord pour admettre qu’il avait sans doute raison : qu’elle lui claquerait probablement la porte du royaume à la figure. Mais je lui fis remarquer que la miséricorde pouvait ouvrir des portes là où la justice en était incapable. C’est alors que je fis un pari et que je lui dis que je ne croyais pas que sa fixation sur la justice fut motivée par la douleur et la culpabilité, comme il le prétendait, mais plutôt par l’orgueil. Il ne pouvait tolérer l’idée qu’il était comme les autres hommes. Il ne pouvait tolérer l’idée qu’il avait besoin d’aide, et qu’il ne pouvait s’abaisser pour en demander. Il était prêt à admettre le fait que d’autres pouvaient être spirituellement en décalage, mais qu’il ne put se sauver lui même, qu’il eut besoin de l’aide d’autrui, c’était tout simplement monstrueux, trop grotesque à considérer. Son orgueil ne pouvait se le permettre.. C’est pourquoi il rejetait la miséricorde, même si il ne pouvait satisfaire la justice. En conséquence, son cœur ne s’était pas brisé sous le poids du péché, il s’était endurci. Il aurait préféré être damné par la justice plutôt que de faire appel à la miséricorde divine.

Au début, il fut scandalisé par ce que je lui dis, et pendant un temps notre amitié fut ébranlée. Mais petit à petit il se rendit compte que son rejet du concept de la miséricorde revenait à rejeter le Christ. Finalement, il me dit un jour : « C’est vraiment cela. Je suis tout simplement trop orgueilleux pour admettre ma faiblesse et demander de l’aide. Je ne veux pas admettre mon imperfection, même à moi même, encore moins à l’évêque ou à Dieu. Mon orgueil me pousserait plutôt à aller en enfer pour m’acquitter de la totalité de la punition plutôt que de m’humilier et de rechercher la miséricorde divine. » Il se décida finalement à aller voir son évêque et, avec un courage immense, confessa un péché soigneusement caché pendant des décennies. Et alors qu’il s’humiliait et recherchait la miséricorde au lieu de la justice, une chose merveilleuse se passa. Quand il vit qu’il était pardonné par la grâce d’une tierce personne, et qu’il réalisa ce qui avait été fait pour lui gratuitement, quand il se rendit compte du soulagement incroyable qu’il lui avait été octroyé gratis, il commença à se comporter avec patience, miséricorde et pardon avec ceux qui l’entouraient. Ce n’était plus un homme dur.

Mais pourquoi ferais-tu cela pour moi ?
Parce que je t’aime.
Mais ce n’est pas juste.
C’est vrai, ce n’est pas juste du tout, c’est miséricordieux. Après tout, c’est un cadeau.
Mais comment est-il possible de mériter un tel cadeau ?
Ne sois pas sot.Tu ne peux le mériter. Tu ne le mérites pas. Je te fais ce don parce que je t’aime et que je veux t’aider, et non parce que je te le dois.
Mais,comment pourrais-je te rembourser ?
Ça recommence. Tu ne comprends toujours pas ? Tu ne peux me rembourser, ni toi ni toutes les multitudes de tes semblables. Des dons de cette grandeur ne peuvent être remboursés. Tu ne peux que m’aimer en retour de ce que j’ai fait par amour pour toi, et chercher à devenir ce que je suis : un dispensateur de dons généreux.

Et ça, c’est la bonne nouvelle.

CHAPITRE CINQ : INCOMPRÉHENSION DE LA DOCTRINE DE LA GRÂCE

On peut mal interpréter la doctrine de la grâce et même la déformer de multiples façons. Une des plus graves altérations consiste à prétendre que je n’ai plus besoin de travailler aussi dur puisque le Christ va accomplir tout ce que je ne peux faire dans le cadre de l’alliance. Je peux me détendre et laisser Jésus faire tout pour moi ; je peux me contenter de faire un effort symbolique, continuer à jouir de mes péchés favoris, tout en espérant être « sauvé par la grâce ».

L’apôtre Paul se trouva confronté dans l’Église primitive à ceux qui pensaient que la grâce devait être une autorisation ou une protection permettant de continuer à pécher : « Quoi donc ! Pécherions nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ? Certes non ! Ne savez-vous pas que si vous vous livrez à quelqu’un comme esclaves pour lui obéir, vous êtes esclaves de celui à qui vous obéissez, soit du péché qui conduit à la mort, soit de l’obéissance qui conduit à la justice ? » (Rom. 6:15-16)

Cette fausse doctrine du salut par la grâce sans engagement ni loyauté viole les termes de l’alliance évangélique en demandant à Jésus de faire pour moi ce que je pourrais très bien faire tout seul, mais que je ne suis pas disposé à faire. N’importe qui peut affirmer qu’il fait de son mieux et prétendre qu’il est justifié par la foi en Christ et qu’il jouit de la compagnie du Saint-Esprit, alors qu’en fait il reste obstinément engoncé dans ses péchés. Seul Dieu sait qu’il ment. Je voudrais pouvoir proposer un test pour faire la différence entre les honnêtes gens qui font ce qu’ils peuvent et ceux qui voudraient qu’on les porte quand ils pourraient marcher, mais je ne sais pas comment faire. Je suis heureux que Dieu puisse le faire.

Il est sûr que ceux qui disent : « Je fais du mieux que je peux mais qui violent sciemment les commandements ont besoin d’apprendre la différence entre vouloir la justice et souhaiter vouloir la justice. Bien que Dieu accepte les intentions et les désirs justes en lieu et place d’une performance parfaite, il ne veut pas être payé en monnaie de singe. Il n’acceptera pas de simples vœux à la place d’intentions et de désirs justes. Cette attitude n’est pas de l’engagement. Ce n’est pas de la fidélité. Elle ne satisfait pas aux obligations de l’alliance évangélique et ne suscite aucune promesse. Dans ces cas, ces individus n’ont pas réellement faim et soif de justice, mais ils ont faim et soif de péché, et ils s’attendent à ce que Jésus tolère ce comportement ou même éventuellement qu’il le soutienne. Ils ont brisé leur alliance. Doctrine et Alliance 50:7-8 dit : « Voici, en vérité, je vous le dis, il y a parmi vous des hypocrites, et certains ont été trompés par eux… mais les hypocrites seront démasqués et retranchés, soit dans la vie, soit dans la mort, comme je le veux. »

Ceux qui commettent l’erreur doctrinale et morale de ne pas vouloir faire ce qu’ils peuvent cherchent à être sauvés dans leurs péchés plutôt que de leurs péchés. Cela ne se peut. Il y a une grande différence entre considérer mes péchés comme des ennemis desquels j’essaie avec difficulté de m’échapper et les considérer comme de vieux amis sympas que j’ai répugnance à abandonner. Il y a une différence entre être incapable de vaincre mes péchés tout de suite, auquel cas l’alliance me promet de l’espoir, et ne pas vouloir même essayer, auquel cas je reste soumis à la justice. L’alliance offre la grâce et le pardon si l’on montre une attitude de repentance continuelle aussi bien à ceux qui essaient et réussissent qu’à ceux qui essaient, mais faillissent et essaient de nouveau. Mais, il n’y aura pas de pardon pour ceux qui ne veulent pas essayer, ou qui abandonnent après une ou deux tentatives.

La grâce « facile »

Un jour je faisais un discours sur un sujet sur la grâce dans une petite ville du Nevada. J’expliquais que la perfection n’était pas requise de nous immédiatement, mais que nous étions dans l’obligation de faire tout ce que nous pouvions et que le Sauveur avait promis de faire le reste. Après le discours, on est venu me voir pour me dire : « Dr Robinson, savez vous ce que cela signifie ? Cela signifie que je n’ai pas à mettre mes pêches en conserve cette année ! » À ce moment, un rire général éclata, mais quand il se calma, je répondis : « Oh non, mon ami, vous m’avez mal compris. Ce n’est pas du tout ce que cela veut dire. Si vous croyez vraiment que Dieu attend de vous que vous mettiez vos pêches en conserve (et c’est une proposition que l’on peut discuter), alors vous devez faire le maximum qui est en votre pouvoir. Cette doctrine signifie simplement que vous n’avez pas à vous sentir coupable ou vous faire du souci pour les pêches que vous ne pouvez mettre en conserve. »

Ce n’est pas la doctrine de la grâce « facile ». On ne peut concevoir d’abandonner ou de renoncer à une vertu quelconque que l’on possédait avant d’entrer dans l’alliance sans violer celle-ci. L’alliance évangélique n’est pas une excuse pour travailler en deçà de nos capacités. L’alliance exige plus que simplement souhaiter être meilleur ; nous devons véritablement faire tout ce qui est en notre pouvoir. Bien que la perfection ne soit pas requise de nous dans l’immédiat, il est requis que nous fassions tout ce que nous pouvons. La bonne nouvelle c’est que Dieu n’exigera pas de nous plus que ce que nous pouvons faire au mieux de nos compétences ; la mauvaise nouvelle c’est qu’il n’en acceptera pas moins.

En fait, la grâce « facile » n’existe pas parce que le partenariat avec le Christ n’est pas facile, il fait appel au meilleur de nous-mêmes. Il exige notre loyauté, que nous servions Dieu de tout notre cœur, de tout notre pouvoir, de toute notre pensée et de toute notre force. Il exige que nous nous repentions continuellement et que nous soyons toujours engagés. De plus il n’offre aucune preuve ni aucune garantie en dehors du témoignage personnel de l’Esprit qu’il peut faire ce qu’il promet. Au contraire, il nous demande de lui faire confiance, d’accepter ce qu’il dit par la foi.

La loi actuelle du salut temporel (le programme d’entraide) fonctionne selon les mêmes termes que sa contrepartie spirituelle. Il est exigé de ceux qui ont besoin d’aide matérielle qu’ils contribuent selon leurs moyens. Il leur est demandé d’utiliser toutes leurs ressources, importantes ou non. Alors, par l’intermédiaire de l’Église et de ses membres, le Seigneur ajoute tout ce qui est nécessaire. Lorsqu’il est bien géré, le programme d’entraide est un partenariat qui répond aux besoins honnêtes de l’individu tout en lui demandant de faire du mieux qu’il peut. De plus, ce programme prévoit que des progrès soient accomplis, et il vise à terme à ce que l’individu devienne autosuffisant.

Le principe du bien être spirituel n’est pas différent. En démontrant notre bonne foi en faisant tout ce que nous pouvons et en consacrant toutes nos ressources au bien commun, la grâce divine et l’expiation du Christ suffisent à combler tous nos besoins, mais l’alliance exige que nous déployions tous nos efforts, suppose que des progrès soient accomplis, et vise à terme, en ce qui concerne la justice, à ce que nous devenions autosuffisants.

Les superlatifs de l’Évangile

Une autre distorsion de la doctrine de la grâce, peut être moins grave que la grâce « facile » mais, je pense, plus répandue dans l’Église, est de considérer que le Sauveur nous accorde sa grâce seulement après que nous ayons fait tout ce que nous pouvions faire. Il s’en suit qu’étant donné que personne ne fait en réalité tout ce qui, théoriquement, est possible, personne ne peut être véritablement digne de la grâce non plus. Voici comment fonctionne cette fausse logique :

1. La grâce et la miséricorde ne sont accordées qu’à ceux qui en sont dignes, et seulement après avoir prouvé leur dignité.

2. Seuls ceux qui gardent continuellement tous les commandements divins sont véritablement dignes.

3. Comme je ne peux garder continuellement tous les commandements, donc, je ne suis pas véritablement digne et je ne peux m’attendre à recevoir la grâce et la miséricorde.

Ce genre de raisonnement est simplement l’ancienne exigence d’une perfection totale qui essaie de se glisser par la porte de service de l’Église sous un déguisement évangélique, et qui méprise l’expiation du Christ en insistant sur le fait que nous devons nous perfectionner et nous sauver avant que le Christ puisse le faire, que nous devons d’abord nous guérir avant d’appeler le médecin. Cette logique interdit au Christ de ne jamais sauver personne. Malheureusement, quelques fois, même les personnes versées dans les Écritures veulent limiter leur conception de la grâce à ce niveau sans se rendre compte que, sur le long terme, celle-ci transforme la doctrine de la grâce en doctrine du salut par les œuvres. Tout comme la miséricorde n’est pas la miséricorde si elle est méritée, la grâce n’est pas la grâce si nous la gagnons.

Il existe un grand nombre de superlatifs dans les Écritures et l’Église exhorte les saints et décrit leurs obligations : de tout notre cœur, notre plus profond désir, nos efforts les plus sincères, après tout ce que nous pouvons faire, toujours, tous, jamais, etc. Nous devons nous souvenir que ces termes appliqués à des mortels ne sont que des ambitions, c’est à dire, qu’ils définissent nos désirs et déterminent nos buts, que dans chaque cas, les circonstances dans lesquelles se trouve l’individu déterminent ce que « tout » le meilleur ou « le plus grand » signifie et que « jamais» tous ou « toujours » ne sont que des objectifs à atteindre avec l’aide du Christ et par son expiation. « Après tout ce que nous pouvons faire ».

À mon avis, une partie du blâme quant à notre mauvaise application des superlatifs évangéliques et autres raisonnements obsédants vient de la mauvaise compréhension de 2 Néphi 25:23 : « Car nous travaillons diligemment à écrire, pour persuader nos enfants, et aussi nos frères, de croire au Christ et d’être réconciliés avec Dieu ; car nous savons que c’est par la grâce que nous sommes sauvés après tout ce que nous pouvons faire. »

À première vue, on pourrait penser que la grâce nous est accordée chronologiquement après avoir accompli tout ce que nous pouvons faire, mais on peut démontrer que c’est faux, car nous avons déjà reçu de nombreuses manifestations de la grâce de Dieu bien avant que nous en soyons à ce point. C’est par sa grâce que nous respirons. C’est par sa grâce que nos parents célestes nous ont spirituellement engendrés et que nous jouissons d’une espérance divine. C’est par la grâce qu’un plan fut préparé et qu’un Sauveur fut désigné pour racheter l’humanité suite à la chute d’Adam et Ève. C’est par la grâce que la bonne nouvelle de l’Évangile nous est donnée pour nous montrer nos possibilités éternelles. C’est par la grâce que nous avons le libre arbitre qui nous permet d’accepter l’Évangile lorsque nous l’entendons. C’est par la grâce qui vient de la foi en Christ que nous commençons le processus du repentir, et c’est par la grâce que nous sommes justifiés et que nous appartenons au royaume de Dieu bien que ce processus ne soit pas terminé. La grâce de Dieu a fait partie de notre progression spirituelle dès le début et le sera jusqu’à la fin.

C’est pourquoi considérer la grâce divine comme une cerise sur le gâteau qu’on placerait au dernier moment ou comme la simple touche finale à tout ce que nous avons déjà accompli de nous-mêmes sans l’aide de Dieu la déprécierait. Il serait plus juste de considérer l’inverse  : nos efforts sont la cerise sur le gâteau que Dieu nous a déjà donné.

En fait, je considère que la préposition « après » dans 2 Néphi 25:23 est une préposition de séparation plutôt qu’une préposition de temps. Elle indique une séparation logique plutôt qu’une séquence dans le temps. Nous sommes sauvés par la grâce « en dehors de ce que nous pouvons faire » ou « nonobstant tout ce que nous pouvons faire ou encore « sans tenir compte de ce que nous pouvons faire ». Une autre paraphrase de ce verset pourrait être celle-ci : « Ce n’est que par la grâce que nous sommes sauvés, après que tout soit dit et accompli ».

De plus, même l’expression « tout ce que nous pouvons faire » est susceptible d’avoir une interprétation négative qui désignerait toute bonne action isolée que nous aurions pu éventuellement accomplir. C’est absurde. Si la grâce ne fonctionnait que dans ces cas, personne ne pourrait être sauvé, pas même le meilleur d’entre nous. C’est précisément parce que nous ne faisons pas toujours tout ce que nous pourrions faire que nous avons tout d’abord besoin d’un sauveur, et qu’il est évident que nous ne pouvons pas considérer tout ce que nous avons accompli comme une condition suffisante pour obtenir la grâce et être sauvés ! Je crois que nous devons insister dans 2 Néphi 25:23 sur « tout ce que nous pouvons faire » en opposition avec tout ce que lui peut faire ». De plus, « tout ce que nous pouvons faire » ici doit probablement être compris dans le sens de « quoi que nous fassions ».

Ainsi, le sens correct de 2 Néphi 25:23 serait que quels que soient nos efforts, en fin de compte c’est par la grâce que nous serons sauvés. La grâce n’est pas simplement une touche décorative, la finition du couronnement de nos efforts personnels, c’est la participation de Dieu dans le processus de notre salut du début à la fin. Bien que je doive être intimement engagé dans le processus de mon salut, à terme, le succès de cette aventure dépend totalement de la grâce du Christ.

Mais quand en aurai-je fait assez ?

J’ai un ami qui se pose toujours la question à ce propos : « Mais quand est-ce que j’en aurai fait assez ? Comment saurais-je que j’ai réussi ? » Il pose la mauvaise question, ce qui montre qu’il ne comprend pas la doctrine de la grâce. La bonne question c’est : « Quand mon offrande est-elle acceptable aux yeux du Seigneur ? À quel moment mes efforts sont-ils acceptés ? » Voyez-vous, la réponse à la question précédente : « Quand est-ce que j’en aurais fait assez » est : « Jamais dans cette vie ». Puisque la perfection est l’objectif, le Seigneur ne peut jamais approuver sans condition une performance imparfaite. Peu importe ce que nous faisons ici-bas, peu importe la qualité de notre performance, l’exigence pour faire mieux, la pression pour s’améliorer ne cessera jamais. On n’est pas encore arrivé.

Nous ne sommes pas des serviteurs rentables ici bas, ou pour employer un terme plus moderne, nous sommes de mauvais investissements (voir, par exemple, Luc 17:10 ; Mosiah 2:21). Du point de vue du Sauveur, même le plus juste d’entre nous coûte plus cher à sauver et à maintenir en vie que ce qu’il peut rapporter en retour. Alors si nous cherchons à ce que le Seigneur nous dise : « OK, tu en as fait assez, tu as rempli ton contrat, tu as réussi, tu peux te détendre ». Nous risquons d’être déçus. Même si nous déployons tous nos efforts, nous devons accepter le fait que jamais dans cette vie, nous n’atteindrons le point d’équilibre. Nous sommes tous des serviteurs non rentables portés sur le dos du Sauveur parce qu’il le veut bien, par sa grâce.

Cependant, le Seigneur nous dit : « Étant donné les circonstances présentes et ton degré de maturité actuel, tu fais un travail acceptable convenable. Évidemment ce n’est pas parfait, mais tes efforts sont acceptables pour le moment. Je suis satisfait de ce que tu as fait. » Nous pouvons ne pas être des serviteurs rentables au sens strict du terme, mais nous pouvons encore être de bons et fidèles serviteurs dans cette acception limitée. Aussi si nous faisons ce qui peut être raisonnablement attendu d’un disciple loyal dans les circonstances du moment, alors nous pouvons avoir foi que notre offrande est acceptée par la grâce de Dieu. Il est clair que nous ne sommes pas rentables, personne d’entre nous. Mais dans le cadre de l’alliance, nos essais sincères sont acceptables pour le moment.

En fait, il existe une façon de savoir si nos efforts sont acceptables, que notre alliance est reconnue et validée aux yeux de Dieu. Si nous utilisons les dons de l’Esprit ou l’influence du Saint-Esprit, nous pouvons savoir que nous sommes dans le cadre de l’alliance, car les dons et la compagnie du Saint-Esprit sont donnés à nul autre. C’est une des raisons pour lesquelles le Saint-Esprit est donné : comme symbole et garantie de notre statut dans l’alliance et comme paiement comptant des bénédictions et de la gloire à venir si nous sommes fidèles. L’apôtre Paul parle du Saint-Esprit comme « une arrhe de notre héritage » (Éph. 1:14) une référence à « l’acompte » qui, bien que considéré comme symbolique, conclut une affaire lorsque l’argent change de mains. Ainsi « l’arrhe de l’Esprit dans nos cœurs » (2 Cor. 1:22 ; 5:5) nous assure de la validité et de l’efficacité de notre transaction, de notre alliance, avec Dieu.

Ressentez vous l’influence du Saint-Esprit dans votre vie ? Jouissez vous des dons de l’Esprit ? Alors vous pouvez savoir que Dieu accepte votre foi, votre repentir, et votre baptême et qu’il est d’accord « pour que vous ayez toujours son Esprit avec vous » (D&A 20:77). C’est peut-être pour cette raison que le Saint-Esprit est appelé le Consolateur, car si nous prenons plaisir avec ce don, nous savons que nos efforts sont acceptables, dans l’immédiat, et que nous sommes justifiés devant Dieu par notre foi en Christ. Et c’est vraiment consolant.

Tout lui donner

Que signifie tout lui donner ? Certains ont plus de capacités, plus de talents que d’autres. Cependant, selon la parabole, il n’est pas attendu de ceux qui ne possèdent qu’un ou deux talents qu’ils en gagnent cinq. Seul celui qui a cinq talents se doit d’en gagner cinq.

Permettez-moi d’illustrer ceci par un exemple. Il y a de nombreuses années, j’ai connu une femme qui était, tout au moins au début, une des personnes les plus rudes que j’ai jamais connues. Violée dans son enfance, elle s’était enfuie de chez elle et avait vécu dans la rue pendant des années. Jeune fille, elle circulait à travers le pays avec un gang à motos. À l’âge mûr, sa beauté fanée, elle passait la grande partie de son temps au bar, où des missionnaires la rencontrèrent alors qu’ils étaient entrés là pour faire de la monnaie pour téléphoner à l’extérieur. Quand elle fut baptisée, beaucoup de membres doutaient que sa conversion tienne longtemps, et il y avait de bonnes raisons pour le penser.

Longtemps après son baptême, cette sœur jurait comme un palefrenier, même dans l’Église, et ne vécut jamais la Parole de Sagesse à cent pour cent. Une fois, lors de sa première année dans l’Église, elle perdit son sang froid et boxa une des sœurs. Son ex-mari est alcoolique et ses enfants ont tous fait un séjour en prison.

Maintenant la question est de savoir si une personne comme elle peut sérieusement s’attendre à être sauvée. Que peut espérer une personne comme elle, avec tous ses défauts et toutes ses faiblesses ? Avec tout ce qu’elle avait vécu et tous ses problèmes, pourquoi s’embêter à venir à l’Église ?

« Si vos péchés sont comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige, s’ils sont rouges comme de la pourpre, ils deviendront comme de la laine ». Dieu ne ment pas. Quiconque veut venir, le peut. Chacun est invité, nul n’est exclu. Même si cette sœur devait revenir de plus loin, la même alliance lui était offerte :

« Fais ce que tu peux. Je ferais le reste pendant que tu apprendras comment. » Et elle fut aussi fidèle qu’elle le put dans ces circonstances. Elle n’a jamais dit : « Non, je ne veux pas » ou « Lâchez-moi » ou «  Pourquoi vous adressez-vous à moi ? Voyez plutôt celui-là qui a commencé ». Elle disait toujours : « Je sais, je suis désolée, j’essaierai de faire mieux ». Et elle essayait de faire mieux. Elle échouait souvent, mais petit à petit au fil des années, elle fit de grands progrès. Elle abandonna le thé, le café, l’alcool. Ensuite elle s’arrêta de jurer. Plus tard elle s’arrêta de fumer et commença à se calmer plus ou moins. Finalement, après avoir été dans l’Église pendant de nombreuses années, elle fut prête à aller au temple. Une personne de cet acabit peut-elle vraiment espérer hériter du royaume de Dieu ? Évidemment oui.

Question plus difficile : à quel moment cette sœur est-elle devenue candidate pour entrer dans le royaume ? Est-ce lorsqu’elle a abandonné la cigarette, ou lorsqu’elle a maîtrisé son langage et son caractère ? Ou est-ce lorsqu’elle s’est finalement qualifiée pour obtenir une recommandation pour le temple ? Non. À aucun de ces moments, bien qu’ils aient tous été des points de repères importants dans sa progression. Elle a été justifiée par sa foi en Jésus-Christ le jour où elle s’est repentie de ses péchés, qu’elle s’est fait baptiser, et qu’elle a reçu le don du Saint-Esprit, car elle est entrée dans cette alliance de bonne foi et en toute sincérité. Elle a cru en Christ, et elle a cru le Christ. Comme la veuve avec son sou, elle a donné tout ce qu’elle avait sans rien retenir. Ce n’était peut être pas beaucoup, mais c’était tout ce qu’elle avait.

Toutes les semaines elle prenait la Sainte-Cène, elle se repentait de ses erreurs et décidait de nouveau de les éliminer. Certaines choses ont pris des années pour être surmontées. D’autres restent encore à faire, mais elle essaie toujours, et elle n’abandonnera pas. Et tant qu’elle n’abandonne pas et endure jusqu’à la fin sous le joug de l’Évangile, en tirant en direction du royaume, sa récompense est assurée. Dieu connaît les circonstances dans lesquelles nous évoluons, et il nous juge en conséquence. Il sait qui est dans un trou et qui est dans un fauteuil, il ne jauge pas seulement la hauteur, il juge aussi la progression.

Chacun d’entre nous fonctionne à des degrés différents de performances dans le cadre de l’alliance. Les pourcentages varient d’une personne à l’autre et même pour une même personne sur une période de temps donnée. Dans mon cas, mes efforts peuvent m’amener à vingt pour cent sur le chemin de la perfection. Le Sauveur couvre les quatre vingts pour cent restants. Dans votre cas, vos efforts peuvent représenter cinquante pour cent, ou deux pour cent, du chemin. Le Sauveur couvre là aussi la différence. Dans tous les cas, la somme de l’effort conjoint est la même : Quel que soit les efforts de chacun, qu’ils soient faibles ou importants additionnés à l’expiation du Christ équivaudront à cent pour cent de ce qui est exigé pour entrer dans le royaume de Dieu.

La fausse perfection

Alors que signifie être parfait ? Et pourquoi nous commande-t-on dans les Écrituresd’être parfaits ?(Voir Matt.5:48 ; 3 Né. 12:48) En fait, je n’aime pas le mot parfait parce qu’il est souvent mal employé. Je tique souvent quand on l’utilise dans les discours ou les leçons, parce qu’on l’emploie le plus souvent dans son sens philosophique qui signifie « qui ne peut être amélioré » et ce n’est presque jamais dans cette acception qu’on le trouve dans les Écritures. Les saints des derniers jours croient à la progression éternelle. Personne ne sera jamais « imperfectible » au sens absolu du terme. La perfection ici-bas consiste plutôt à accepter l’alliance de l’Évangile pour devenir parfait en Christ.

Jusque là, j’ai employé le mot « parfait » pour dire : « sans erreur », « sans faute » ou « sans tache » mais même ce sens est différent du sens scripturaire habituel. Dans le Nouveau Testament le mot grec traduit pour « parfait » est « teleios ». Cela signifie mûr, mature, prêt, complet, tout, etc. Une pomme sur un arbre peut être qualifiée de teleios quand elle est mûre et prête à être cueillie, mais cela ne signifie pas qu’on ne peut pas l’améliorer. Elle contient peut être un vers à l’intérieur.

Voici un autre grand secret : être parfait signifie faire du mieux qu’on peut en fonction des circonstances présentes. Comme Brigham Young l’expliquait :

« Nous occupons tous des places différentes dans le monde et le royaume de Dieu. Sont parfaits ceux qui agissent justement, et recherchent la gloire du Père céleste, que leur connaissance soit grande ou petite, qu’ils accomplissent de grandes choses ou des modestes, et s’ils font au mieux de leurs capacités… « Soyez parfaits autant que vous le pouvez car c’est tout ce que l’on peut faire bien qu’il soit écrit : « Soyez parfaits comme votre Père qui est dans les cieux ». Être aussi parfaits qu’il est possible de l’être, selon notre connaissance, c’est être aussi parfait que notre Père dans les cieux. Il ne peut pas être plus parfait que ce que lui permet sa connaissance, tout comme nous. Lorsque nous agissons selon notre connaissance dans la sphère et la position que nous occupons, alors nous sommes justifiés ».

Brigham Young dit que faire au mieux de notre connaissance c’est être parfait parce que nous accomplissons notre part de l’alliance, et ce faisant, Jésus-Christ accomplit la sienne et nous rend parfaits grâce à son mérite et à sa miséricorde. La perfection dont nous jouissons est une perfection en Christ. C’est aussi la perfection qui nous permet d’entrer dans le royaume céleste. L’autre perfection, la vraie, la personnelle, le genre « je ne fais jamais d’erreur » viendra plus tard, beaucoup plus tard.

On dit qu’un jour quelqu’un a remis en question l’œuvre de Mère Thérésa, cette sainte femme qui sert les plus malheureux à Calcutta aux Indes, au motif qu’elle ne réussira jamais à faire ce qu’elle essaie. Peu importe les efforts qu’elle pouvait faire, disait son contradicteur, il y aurait plus de pauvres et de malades demain qu’il n’y en a aujourd’hui, et tous ses efforts ne pourraient même pas commencer à résoudre le problème. Puisqu’elle ne pourrait jamais espérer réussir, pourquoi gaspillait-elle ses forces dans une cause perdue ? La réponse de Mère Thérésa était un classique : « Dieu n’exige pas que je réussisse disait-elle, « seulement que je fasse ce que je peux ». Et ça, c’est une vérité de l’Évangile.

Pourquoi exiger davantage ?

Malheureusement, on demande fréquemment dans l’Église d’en faire plus que ce que l’on peut réellement. Je me souviens d’un dimanche à la réunion de prêtrise à Durham en Caroline du Nord, qu’on a demandé aux anciens de faire don d’un samedi de ce mois pour chacun des six projets utiles, mais différents. Le problème c’est qu’il n’y a que quatre samedis dans le mois. En résumé, accomplir les six tâches était impossible pour personne, et quand on le fit remarquer, aucune des obligations ne fut annulée. Chacun se devait de faire « du mieux qu’il pouvait ».

Il y a plusieurs années, alors que je lisais dans un cours du Nouveau Testament, Matthieu 11:28-30, qui parle du joug de Jésus qui est doux et son fardeau léger, une étudiante au fond de la classe m’interrompit avec un bruyant « Ah ! ». Lorsque je l’invitai à s’expliquer sur ce que signifiait cette exclamation, elle dit : « Son joug est doux ? Son fardeau léger ? Celui qui croit cela dans l’Église est soit un nouveau converti soit un abruti ».

Cette sœur était divorcée avec plusieurs enfants et elle avait repris ses études pour essayer d’améliorer sa vie et celle de sa famille. Elle continua : « J’ai essayé de faire et d’être tout ce que l’Église voulait, mais finalement j’ai dû abandonner. On me demandait toujours plus que ce que j’avais. Je n’y peux rien si je suis fauchée ou que je suis mère célibataire avec deux jobs et que j’essaie d’aller à l’école à plein temps. Je ne peux faire ce que font les autres membres, et on me demande toujours plus, plus de temps, plus de talents, plus d’argent, plus d’engagement, et je n’ai rien de plus à donner. Les demandes de l’Église dépassent mes ressources.

Pourquoi est-ce que l’Église semble quelquefois exiger plus de moi que ce que je peux donner ? Pourquoi cette pression continuelle que je ressens pour être, pour accomplir et pour donner plus ?» Tout d’abord, nous devons nous souvenir que la perfection est le but à atteindre, un but réel, et nous nous devons d’y travailler en déployant tous nos efforts. Nous devons juste nous souvenir en même temps que notre salut n’est pas en jeu.

Par exemple, lorsque j’étais au lycée, je pratiquais l’haltérophilie. À cette époque, un assistant se tenait toujours prés du banc pour se saisir des haltères en cas de problèmes. Mais invariablement, il y avait un petit échange rituel, familier à ceux qui ont fait de la gymnastique qui se déroulait ainsi : après avoir soulevé les haltères autant que je le pouvais, au bord de l’évanouissement, je disais à l’assistant : « Enlève ! mais il me disait toujours : Non, encore une ! En général, après l’avoir baissée, je réussissais à la remonter et je disais : OK, enlève ! De nouveau l’assistant me disait : Non, encore une. Quelque soit le nombre de levées que par un effort surhumain je réussissai, , encore une, disait le surveillant allez, encore une ! » Et cela continuait jusqu’à ce que mes muscles lâchent vraiment, alors l’assistant saisissait la barre.

À cette époque je n’étais pas naïf au point de dire : « Je suis humilié, embarrassé et offensé. Tu m’as demandé une levée de plus et je n’y suis pas arrivé. Tu exiges trop de moi, tu veux toujours plus que ce que je peux donner. Je ne peux satisfaire tes demandes. Je rentre à la maison pour ne plus revenir. » Je n’étais pas dans ces sentiments parce que dans une salle de gym, celui qui lève et celui qui aide comprennent que la véritable force s’acquiert à la dernière levée, à l’extrême limite entre ce que l’on peut faire et ce que l’on ne peut pas. En m’encourageant à travailler à la limite de mes capacités, l’assistant m’aidait à développer la puissance que je recherchais. Il n’y avait jamais aucune gêne à ce que je ne puisse faire cette dernière levée, et personne ne s’attendait sérieusement à ce qu’il y en ait, mais j’avais la satisfaction de savoir que j’avais travaillé au delà des limites de mes forces et que cela m’avait rendu plus fort.

Je crois qu’on peut appliquer le même principe aux exigences apparemment importantes de l’Église. Un des buts de l’Église est de perfectionner les saints. Puisque nous accomplissons les plus grands progrès en allant aux limites de nos capacités, alors peu importe la quantité ou la qualité de nos actes, le Seigneur, comme l’assistant à la gym, nous demandera toujours plus, cherchera toujours à ce que nous nous améliorions, et nous poussera toujours vers la perfection. Puisque le but même que nous visons est la perfection, les exigences de l’Assistant sont tournées vers l’infini et dépasserons les capacités de chacun. Nous devons seulement nous rappeler que notre salut n’est pas en jeu, car cette question est déjà réglée si nous continuons à garder nos alliances. Nous ne devrions pas être gênés quand nous atteignons nos limites ni nous sentir humiliés quand nous ne faisons pas tout ce qui nous est demandé. Nous devrions plutôt éprouver de la satisfaction en arrivant aux limites de nos capacités (car c’est à ce point que l’on fait de vrais progrès) et laisser Dieu se soucier du reste. Lorsque nous sommes soumis à la pression des exigences de perfection, nous devons nous rappeler que nos efforts les meilleurs seront acceptés comme paiement comptant, au moins maintenant.

La « douceur » du joug du Sauveur ne signifie pas que nous puissions nous attendre à être exemptés des dures tâches de la vie et d’être à l’abri des dures réalités de l’existence (demandez à Job ou aux pionniers mormons). Ce joug est doux (a) parce qu’il rend possible ce qui était impossible auparavant et (b) parce qu’il octroie des bénédictions et des grâces compensatrices pour nous soutenir dans les difficultés. Le joug de la loi de Moïse ne pouvait même pas être soulevé , alors que celui du Christ le peut et il peut aussi être porté parce que son poids est adapté individuellement à nos capacités et à notre force. Dans ce sens « doux » ne veut pas dire « totalement sans effort » mais plutôt « totalement dans les limites de notre capacité ». Mais même en dehors de cette définition, ceux qui supportent son joug en obéissant humblement et lui consacrent leurs efforts apprennent vite qu’une main invisible allège le fardeau dans les moments difficiles et déversent des bénédictions hors de proportion avec les sacrifices demandés.

La perfection personnelle

Mais est-ce que je serais un jour parfait dans le sens d’être sans erreur, sans faute, sans tache ? Je parle de moi, en tant qu’individu, en dehors de ma perfection en Christ dans l’alliance ? Je pense que la réponse est oui. Par exemple, j’imagine une scène dans environ un million d’années, après être resté dans le royaume céleste très, très longtemps. Je m’approcherai du Seigneur et je lui dirai une chose de ce genre : « OK. J’y suis arrivé. J’ai réussi à manger des fruits hors saison (ou n’importe quoi d’autre). Maintenant qu’est-ce que je fais ? » Il me regardera et dira : « Hé ! Ça y est ! Félicitations ! C’était la dernière épreuve. Tu as finalement appris à garder tous les commandements tout le temps ! » Et je suppose que nous inviterons le voisinage à un barbecue en mon honneur.

Mais ce sera dans un million d’années, et bien après la résurrection des justes. Entre temps, mon seul espoir est que le Christ me portera sur ses épaules. Entre temps, mon seul espoir de perfection résidera dans la perfection en Christ, qu’il partage avec ceux qui sont dans l’alliance de l’Évangile, car c’est-cette seule perfection et rien d’autre qui me permettra d’entrer dans le royaume céleste au jour du jugement dernier.

Le réconfort de la connaissance

Il y a longtemps Janet et moi avions une amie que ne comprenait pas comment fonctionnait la grâce et qui disait : « Bon, je pense que je suis à la moitié de mon existence, et je suis à mi-chemin du royaume céleste, donc je suis dans les temps. » Un jour je lui ai demandé : « Judy, qu’est-ce qui arriverait si tu mourais demain, où serais tu dans l’éternité ? » Apparemment, cette pensée ne lui était jamais venue à l’esprit. Elle réfléchit pendant un moment, puis dit : « Voyons voir, à mi-chemin du royaume céleste c’est… mi-terrestre ! Ce n’est pas très bon, n’est-ce pas ? »

Non, ce n’est pas très bon. Ce n’est pas non plus l’Évangile. Nous devons savoir que dans cette alliance passée avec le Sauveur, si nous mourons demain, nous pouvons espérer entrer au royaume céleste. Cet espoir est une des bénédictions promises dans l’alliance : « …faisons de bon gré tout ce qui est en notre pouvoir, alors nous pourrons nous tenir là avec la plus grande assurance pour voir le salut de Dieu, et voir son bras se révéler. » (D&A 123:17, voir aussi D&A 106:8 ; Éph. 3:12).

Quand nous aurons fait ce qui est en notre pouvoir, nous aurons « la plus grande assurance » du salut de Dieu. Une partie du réconfort qui vient du Saint-Esprit c’est de savoir que bien qu’imparfait, si je meurs dans l’alliance, j’hériterai quand même du royaume de Dieu. En fait cela ne peut en être autrement, puisque tout le monde meurt encore imparfait.

Une bonne nouvelle entre toutes c’est que le Christ nous promet que nous ne serons pas tenus comptables de nos erreurs si nous restons dans l’alliance pendant toute notre vie. Celui qui ne ment pas promet que nous recevrons le royaume de Dieu ; « Et il arrivera que quiconque se repent et est baptisé en mon nom sera rassasié ; et s’il persévère jusqu’à la fin, voici, je le tiendrai pour innocent devant mon Père en ce jour où je me tiendrai pour juger le monde. » (3 Né. 27:16) Néphi s’en est aussi porté garant. Il a entendu la voix du Père qui disait : « Oui, les paroles de mon Bien aimé sont vraies et dignes de foi. Celui qui persévère jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé » (2 Né. 31:15).

Le Père et le Fils mentent-ils ? Évidemment non. Si nous avons foi au Christ et que nous nous repentons de nos péchés, si nous sommes baptisés et recevons le don du Saint-Esprit, si nous sommes plein de bonne volonté et respectons nos alliances, alors comment pouvons nous douter que, par le sacrifice expiatoire du Christ, nous hériterons du royaume de Dieu ? Devant de telles promesses, qui oserait douter de cette vérité ?

Lorsque le prophète Énos a entendu la voix du Christ lui déclarer :

« Tes péchés te sont pardonnés, et tu seras béni », il répondit : « Moi, Énos, je savais que Dieu ne pouvait mentir ; c’est pourquoi ma culpabilité était balayée. » (Énos 1:5-6) Il est fréquent que lorsqu’on lutte spirituellement, on souhaite voir les résultats avant de croire que quelque chose est arrivée. On met la charrue avant les bœufs. On veut avoir une confirmation, recevoir les bénédictions de la foi, avant de croire. Remarquez qu’Énos n’a pas « ressenti » subjectivement que sa culpabilité s’évanouissait et qu’ensuite il a cru ; c’est tout le contraire. Il savait que sa culpabilité était effacée parce que le Christ le lui avait dit, et il a cru le Christ.

De plus, « persévérer jusqu’à la fin » ne veut pas dire « persévérer dans la perfection ». Cela signifie persévérer dans l’alliance de la foi et du repentir. C’est ainsi que nous constatons que la foi en Christ, le repentir, et la purification par l’Expiation ne peuvent être des évènements d’un moment dans notre vie. Bien que ceux ci puissent commencer à un moment précis, ils font partie d’un processus continuel nous amenant à rejeter nos fautes, à réaffirmer nos désirs et nos buts, et à recentrer nos vies sur le Christ à chaque fois que nous nous éloignons.

Ayez confiance en moi

Quand nos filles jumelles étaient petites, Janet et moi sommes allés en famille à la piscine pour unesoirée familiale.Nous avions l’intention d’apprendre aux filles à nager. Après nous être installés, j’ai pris Rebekah et nous avons commencé à entrer dans le petit bain de la piscine.Tout en rentrant dansl’eau, je me disais :

« Qu’est-ce que je suis bien comme père. On passe une soirée familiale formidable. » Mais ses pensées à elle en entrant dans l’eau étaient : «  Mon papa va me noyer, je vais mourir. » L’eau était profonde d’un mètre vingt, mais Rebekah mesurait seulement un mètre. Elle était si terrifiée de ce qui était, dans son esprit, de l’eau profonde qu’elle se mit à trépigner à griffer et à hurler. Paniquée comme elle était, on ne pouvait rien lui dire.

Finalement, j’en fus réduit à la prendre et à la serrer dans mes bras et à lui dire : « Becky, tu te calmes ! Je suis ton père, et je t’aime. Je ne vais pas permettre qu’il t’arrive quoi que ce soit. Tu es en sécurité. Maintenant tu te calmes et tu me fais confiance ! » Grâce à Dieu, elle cessa de lutter, se calma et me fit confiance. Ce n’est qu’à ce moment, que j’ai pu placer mes mains sous elle pour la soutenir hors de l’eau. « OK, maintenant, agite tes jambes. Très bien. Allez, accélère. » C’est ainsi qu’elle commença à apprendre à nager.

C’est un peu comme cela que ça se passe avec nous dans le domaine spirituel. Nous sommes tellement paralysés par la peur de nos péchés, que nous ne pouvons apprendre à les surmonter. Nous nous inquiétons tellement de savoir si nous allons vivre ou mourir, ou si nous sommes arrivés dans le royaume, que nous ne faisons pas de réels progrès spirituels. Notre manque de foi en Christ fait que nous nous soucions de notre situation spirituelle et que nous doutons des promesses divines. Je connais des gens qui se flagellent journellement : « Est-ce que j’ai été suffisamment bon aujourd’hui ? est-ce que mes bonnes actions ont surpassé mes péchés ? Est-ce que j’ai passé la barrière ? Suis je dans le royaume, ou non ? » Comme pour l’expérience de Becky avec la nage, leur peur les empêche d’apprendre et de progresser. La panique spirituelle les handicape. À ce moment, lorsque la panique survient et nous paralyse, nous devons croire au Christ. Nous devons écouter sa voix, « Stephen, calme toi ! Je suis ton Père, et je t’aime. Je ne vais pas permettre que quelque chose puisse t’arriver. Je te tiens ! Tu es en sécurité. Maintenant détend-toi et fais moi confiance, je vais t’enseigner ce que tu as besoin de savoir. » Alors il nous prend dans ses bras et nous dit : « OK. Maintenant, paie ta dîme. C’est assez bien. Maintenant, paie une dîme entière. » Et c’est ainsi que l’on commence à apprendre la perfection. « Ainsi la miséricorde satisfait aux exigences de la justice, et les enserre dans les bras de la sécurité. » (Alma 34:16).

« Dans les bras de la sécurité » est mon expression favorite dans le Livre de Mormon. Dans l’alliance de l’Évangile, nous sommes enserrés dans les bras de la sécurité, ses bras. « Tout va bien. Tu vas y arriver. Fais moi confiance. »

Et ça, c’est une bonne nouvelle.

CHAPITRE SIX : « SEIGNEUR  ? COMMENT EST-CE POSSIBLE ? »

Jusqu’à maintenant, nous avons examiné l’Expiation du point de vue des bénéficiaires. Nous avons étudié les questions pratiques de leur signification pour nous et comment nos vies pouvaient en être transformées. Maintenant il nous faut examiner celles-ci du point de vue de celui qui a payé, celui du Sauveur et non du sauvé. Comment le Christ peut-il utiliser ce vaste océan de mérite et de miséricorde en ma faveur ? Qu’est-ce qui lui donne le pouvoir de sauver ? Qui était-il exactement, qu’a-t-il fait pour moi, pourquoi l’a-t-il fait et qu’est-ce que cela lui a coûté ?

La divinité du Christ

Tout d’abord, Jésus était Dieu, non seulement le Fils de Dieu ou le Frère aîné, mais Dieu de plein droit. Avant de prendre la chair et le sang, il était connu et adoré en tant que Jéhovah ; le Dieu Tout Puissant, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu d’Israël. L’apôtre Paul explique que Jésus-Christ est le créateur de toutes choses et qu’il est le pouvoir qui tient toutes choses assemblées dans leur état créé : « Car en lui, tout a été créé dans les cieux et sur la terre, ce qui est visible et ce qui est invisible, trône, souverainetés, principautés, pouvoirs. Tout a été créé par lui et pour lui. Il est avant toutes choses, et tout subsiste en lui » (Col. 1:16) L’apôtre Jean dit pratiquement la même chose, bien qu’il insiste sur le fait que Jésus-Christ est la source de la vie et de la lumière : « Tout a été fait par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes » (Jean 1:3-4).

Les prophètes du Livre de Mormon témoignent aussi de la divinité de Jésus-Christ. Ainsi, Néphi déclare : « Et le Dieu de nos pères qui furent emmenés hors d’Égypte, hors de servitude, et furent aussi préservés dans le désert par lui, oui, le Dieu d’Abraham et d’Isaac, et le Dieu de Jacob se livre en tant qu’homme, selon les paroles de l’ange, entre les mains des méchants, pour être élevé, selon les paroles de Zénock, et pour être crucifié, selon les paroles de Néum, et pour être enseveli dans un sépulcre, selon les paroles de Zénos… » (1 Né. 19:10)

Pendant son expiation, Dieu, dans la personne de Dieu le Fils, Jésus-Christ, assuma la responsabilité morale de toutes choses négatives, les souffrances, les douleurs et la mort, qui sont une partie nécessaire du plan de Dieu. Ce plan, défendu et soutenu par Jésus avant que le monde fut, exige que nous vivions dans un monde déchu et imparfait. De temps en temps, il nous demande de souffrir, il demande à certains parmi nous de souffrir horriblement. C’est pourquoi il est juste que le Dieu qui a élaboré un tel plan et qui nous demande de l’appliquer accepte de souffrir conformément à ses dispositions plus que n’importe lequel d’entre nous. Et c’est-ce qu’il fit à Gethsémané et au Calvaire. C’est là que Jésus-Christ a gagné le droit de nous demander de souffrir pour lui, car il a accepté de souffrir, de répandre son sang, et de mourir pour nous. Dans l’Évangile de Jésus-Christ, personne n’est berné. Personne ne se fait avoir par ce que Dieu a dit, car c’est lui qui a proposé le plan et il en a souffert le plus. Cela lui donne le droit de dire : « c’est un bon plan ; c’est-ce qu’il faut faire ».

Il y a des critiques qui disent que le Christianisme est une religion basée sur le sacrifice humain. On pourrait éventuellement le dire si Jésus-Christ n’était pas Dieu, s’il n’était qu’un être humain parmi d’autres. Après tout, si l’Expiation se résume à une exigence de Dieu réclamant le sang d’une victime afin d’être réconcilié avec l’humanité pour nous pardonner, en quoi est-ce tellement différent dans le principe que d’attraper une pauvre vierge et de la précipiter dans un volcan pour épargner le village, ou de brûler des enfants sur un autel dédié à Moloch pour gagner ses faveurs ? La différence capitale se trouve dans le fait que dans ces cas là, ce sont des êtres humains qui souffrent pour réconcilier Dieu avec l’humanité, alors que dans le Christianisme c’est Dieu lui même, Jésus-Christ, qui souffre et meurt pour réconcilier l’humanité avec lui même et son Père. Nous n’essayons pas d’atteindre Dieu pour toucher son cœur par nos sacrifices, mais c’est Dieu qui essaie de nous atteindre pour toucher le nôtre par son sacrifice infini. L’Agneau de Dieu sacrifié qui est mort sur le Calvaire était Dieu.

L’humanité du Christ

Selon les Écritures, Jésus n’était pas seulement divin, il était véritablement et pleinement humain : « La Parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité, et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme celle du Fils unique venu du Père » (Jean 1:14). « Aussi devait-il devenir, en tout, semblable à ses frères, afin d’être un grand prêtre miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour faire l’expiation des péchés du peuple. Car du fait qu’il a souffert lui même de la tentation, il peut secourir ceux qui sont tentés. » (Héb. 2:17-18)

Doctrine remarquable que celle qui est enseignée ici. Ce même JésusChrist qui est Dieu est aussi l’un de nous. Il était homme en tout point (« en tout ») jusqu’à être tenté comme les autres hommes. Et du fait qu’il a été tenté personnellement, le Christ peut comprendre ce qu’est la tentation. En s’appuyant sur son expérience dans la condition humaine, il comprend ce que nous subissons ici, et il peut se mettre à notre place pour nous aider à surmonter la tentation comme il l’a fait.

Mais se peut-il que Jésus-Christ, le fils divin, ait été véritablement tenté ? Soyons plus précis : est-ce que Jésus-Christ avait une nature et des pulsions charnelles ? est-ce qu’il a senti sa chair dire « oui ! » et devoir dire « non ! » ? Est-ce qu’il n’a jamais ressenti l’attirance, l’appel charnel du péché ?

Beaucoup de chrétiens ont tendance à répondre : « Non, le Christ était trop saint pour ressentir des tentations réelles ». Mais je crois que la bonne réponse, celle que donne les Écritures est oui. Jésus était humain tout comme nous. Une partie de ce que le Livre de Mormon appelle la grande condescendance de Dieu consiste dans le fait que le Christ a accepté de prendre un corps mortel qui l’a assujetti aux tentations physiques (voir 1 Né. 11:13-32). Ce n’est pas que le Christ n’a jamais eu à faire face à l’attirance charnelle, mais c’est plutôt sa sainteté et son obéissance parfaite qui lui permirent d’ignorer constamment celle-ci. La justice de Jésus réside dans le fait qu’il a rencontré les mêmes expériences, les mêmes pulsions charnelles, les mêmes distractions et oppositions de la chair et de l’esprit que nous dans la mortalité, mais il les a rejetées immédiatement à chaque occasion : « Il subit les tentations, mais n’y prêta pas attention ». (D&A 20:22)

Pensez-y. Si le Christ n’avait pas été comme nous, sujet à la tentation, s’il avait été un être d’une espèce différente subissant des expériences qualitativement différentes, comment aurait-il pu prétendre se poser en exemple à suivre ? Comment sa personne ou ses actions auraient-elles pu nous être applicables ? Peu importe la patience que pourrait me montrer un oiseau pour m’apprendre à voler, ou un poisson pour m’apprendre à respirer sous l’eau. Je n’ai pas d’ailes et je n’ai pas de nageoires. Ils ne peuvent pas m’enseigner par l’exemple parce que nous ne sommes pas de la même espèce. De même, si Jésus n’était pas véritablement humain, ou si sa justice et son obéissance étaient le résultat d’un don particulier que je ne partage pas avec lui, alors il ne peut m’enseigner par l’exemple comment lui être semblable.

Autrefois existait une hérésie du nom de docétisme, qui enseignait que Jésus n’était pas réellement humain, qu’il n’avait que l’apparence de l’homme. Influencés par la pensée helléniste, les docétistes soutenaient que la nature humaine était parfaitement incompatible avec la nature divine. Se sentant obligés de choisir entre l’humanité de Jésus et sa divinité, ils en conclurent que Jésus était divin et non humain, en dépit du témoignage des Écritures, ils déclarèrent que son humanité n’était qu’une illusion.

Si l’on prétend que l’expérience mortelle de Jésus était de nature différente de celle du reste de l’humanité, ou que sa justice et sa perfection s’appuyaient sur des causes dont nous ne pouvons bénéficier, alors cette façon de voir est dans une certaine mesure une forme moderne de docétisme. Jésus-Christ en tant que mortel était le meilleur d’entre nous, mais il était l’un d’entre nous, et la tentation fait partie de la nature humaine. Sa chair était humaine et son expérience était humaine. C’est pourquoi l’auteur des Hébreux insiste sur le fait « qu’il a souffert lui même de la tentation » (Héb. 2:18).

Il faut dire aussi que la tentation même subie intensément sur une longue période n’est pas en soi un péché. Nous choisissons rarement l’objet de nos tentations, non plus que leur intensité ni leurs fréquences. Mais, tant que nous y résistons, nous restons innocents. Ainsi, quand les Écritures affirment « qu’il a souffert luimême des tentations » ce n’est pas une insulte à son encontre ou une atteinte à sa perfection morale.

Comprenez-moi bien. Je ne suis pas en train de suggérer que Jésus ait pu se laisser aller, d'une manière ou d'une autre, à avoir des pensées impures, car cela aurait été pécher, et il ne s’est jamais abandonné au péché. Je ne crois pas qu’il ait « lutté » ou « combattu » les tentations. Je veux simplement souligner qu’il était aussi vulnérable aux suggestions et aux pulsions surgissant à son esprit du fait de sa nature mortelle, nature héritée de sa mère mortelle, tout comme nous. Il ne prêtait tout simplement pas attention à ces suggestions, et il les rejetait immédiatement de son esprit. La capacité de la chair à suggérer, à séduire, était la même pour lui que pour nous, mais à l’inverse de nous, il n’y a jamais réagi. Il n’a jamais pensé, réfléchi, ou nourri des options pécheresses même comme éventualités théoriques, « il n’y attachait aucune importance ».

« Mais nous n’avons pas un grand prêtre incapable de compatir à nos faiblesses ; mais il a été tenté comme nous à tous égards, sans commettre le péché »(Héb.4:15). Parce qu’il « a été tenté comme nous à tous égards », notre Sauveur comprend notre situation, sait par expérience personnelle ce contre qui nous luttons, et il peut se solidariser avec nous et avoir compassion. Ainsi, quand je suis tenté, je n’ai pas besoin de faire appel à quelque entité lointaine qui ne s’est jamais trouvée à ma place. Je peux présenter mes problèmes à un grand prêtre, Jésus, qui peut « compatir à [mes] faiblesses » parce qu’il est passé par où je suis en ce moment. Je peux faire part de mes problèmes à un Dieu compatissant qui sait par expérience de quoi je parle et comprend ce que j’endure. Il existe certains aspects de sa nature que nous ne pouvons pleinement comprendre, mais il n’y a aucun domaine de la nature humaine qui lui soit étranger. Et ça, c’est une bonne nouvelle.

Souffrance par procuration

Certains sont toujours ennuyés par la fin d’Hébreux 4:15 : « sans commettre de péché ». Au fond, tous les hommes ne sont pas seulement tentés de pécher, ils pèchent. Il m’est arrivé à l’occasion de succomber à la tentation et de ce fait je suis devenu coupable, mais cela n’est jamais arrivé à Jésus, alors comment peut-il comprendre le pécheur ? Comment notre Sauveur peut-il prétendre être pleinement humain et nous comprendre s’il n’a jamais souffert du péché et de la culpabilité ? Comment un être parfait et sans péché peut-il comprendre la souffrance que j’endure dans mon indignité ? Sait-il ce que c’est que de se regarder dans un miroir et mépriser ce qu’il nous renvoie ? Sait-il ce que c’est que d’errer dans les ruines d’une vie détruite à cause de ses propres choix ? Les hommes sont inévitablement les incendiaires de leur bonheur. Qu’est-ce que le doux Jésus sans péché peut-il connaître du côté obscur de la nature humaine ?

Selon les Écritures, il en sait plus du côté obscur que n’importe qui d’entre nous. En fait, il en sait plus sur la douleur, le chagrin, la solitude, la contradiction, la honte, le rejet, la trahison, l’angoisse, la dépression, et la culpabilité que nous tous réunis. Car dans le Jardin de Gethsémané et au Calvaire, Jésus a pris sur lui les péchés et les souffrances du monde entier. « Cependant, ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé ; et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu et humilié. Mais il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. » (Ésaïe 53:4,5)

Je souhaiterais attirer l’attention sur certains aspects de la souffrance par procuration du Sauveur qui nous échappent souvent, mais qui sont importants pour comprendre notre relation avec lui. Tout d’abord, Jésus-Christ n’a pas seulement pris sur lui la punition pour nos péchés, il a pris aussi la culpabilité. Le péché, l’expérience elle même avec toutes ses conséquences et ses ramifications négatives, en plus de la punition, devinrent siens. C’est une distinction importante. Dans l’Expiation, Jésus ne se borne pas à endurer la punition à notre place, il devient le sujet coupable à notre place, il devient coupable pour nous et prend sur lui notre culpabilité : « Celui qui n’a pas connu le péché, il l’a fait (devenir) péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu. » (2 Cor. 5:21)

Il y a un véritable transfert en Christ de la culpabilité vers l’innocence. Par l’unicité de notre relation dans l’alliance, ma culpabilité devient celle du Christ, qu’il a ressentie et pour laquelle il a souffert. En même temps, son innocence et sa perfection deviennent miennes, et je suis purifié et rendu digne. En Christ, nos péchés cessent de nous appartenir, en ce qui concerne la justice divine, c’est comme si nous ne les avons jamais commis. Par l’Expiation, nous ne sommes pas simplement pardonnés, nous redevenons innocents.

Si Jésus n’avait pris sur lui que le châtiment de nos péchés, et non les péchés eux mêmes, alors au moment de la rétribution, nous aurions été seulement « coupables, mais pardonnés au lieu d’être sanctifiés par l’expiation du Sauveur, rendus parfaits en Christ, innocents et dignes d’entrer dans le royaume de Dieu en présence du Père. Une partie de la bonne nouvelle concernant l’expiation du Christ est que celle-ci nous redonne l’impeccabilité, l’innocence, la perfection et la gloire céleste, chose qui ne pourrait se faire si nous nous entêtions à vouloir souffrir pour nos péchés. Dans cette éventualité, bien que nos péchés puissent éventuellement être payés, ils resteraient nôtres, comme des chèques annulés. Sans l’expiation du Christ qui ôte la culpabilité et paye en même temps son dû, nous ne pourrions jamais retrouver l’innocence nécessaire pour vivre en présence de Dieu (cf. D&A 1:31 ; 19:4-19).

En subissant notre punition et en vivant notre culpabilité, Jésus a appris par procuration au travers de l’Expiation ce qu’il aurait ressenti s’il avait commis les péchés qu’il n’a jamais commis. C’est pourquoi dans un sens il est correct de dire que bien que Jésus n’ait commis aucun péché, il est coupable de tous et sait intimement et personnellement leur poids affreux. Par nous, en portant nos péchés, celui qui est sans péché a connu l’horreur totale de la culpabilité humaine, pas seulement les péchés d’une vie, mais ceux de toutes les vies, les péchés du monde. Ainsi, par son expiation par procuration, Jésus en sait plus que quiconque sur le côté obscur de l’être humain. Même dans ce domaine, il nous est supérieur.

À un moment lors de son agonie, Jésus s’est écrié : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as tu abandonné ? » (Matt. 27:46). Est-il possible que le Père céleste l’ait réellement abandonné ? Dieu l’a-t-il abandonné en cette heure sacrée et terrible ? Oui. Car le Christ était devenu coupable des péchés du monde, coupable à notre place. Que nous arrive t-il quand nous sommes coupables de péchés ? L’Esprit de Dieu se retire de nous, les cieux deviennent comme du plomb, et nous sommes laissés seuls à mariner dans notre culpabilité jusqu’à ce que nous nous repentions. À Gethsémané le meilleur parmi nous est devenu par procuration le pire d’entre nous et a enduré les souffrances des profondeurs de l’enfer. Et comme un coupable, le Sauveur a subi pour la première fois de sa vie la perte de l’Esprit de Dieu et de la communion avec son Père.

Il n’y avait pour lui aucun soutien, aucune aide, ni de la part de ses amis qui dormaient pendant son agonie, ni de l’Esprit de Dieu qui s’était retiré de lui. Personne n’a jamais été aussi seul que le Christ dans le Jardin. C’est ce que dit Ésaïe 63:3 « J’ai été seul à fouler au pressoir » (voir aussi D&A 73:107).

En hébreu le mot Geth (gath) signifie « pressoir » et semani (shemen) signifie « huile » ou « richesse ». Gethsémané signifie donc : « le pressoir à huile » ou le pressoir de la richesse ». Cette expression fait allusion aux grands pressoirs pour les olives ou pour le raisin que l’on utilisait pour extraire l’huile ou le vin et c’est ce genre d’appareil que l’on s’attend à trouver dans un jardin d’oliviers comme Gethsémané. Les olives ou les grappes de raisin étaient placées dans les pressoirs pour en extraire leur jus.

C’est vraiment un nom approprié pour le Jardin où Jésus a pris sur lui le poids infini des péchés et des peines du monde pour être pressé par ce fardeau formidable jusqu’à ce que le sang exsude de sa peau (voir Luc 22:44 ; D&A 19:18). Tout comme les olives et le raisin sont foulés au pressoir, Jésus, le vrai cep (voir Jean 15:1), fut pressé à Gethsémané, « le pressoir jusqu’à ce que sa richesse, son jus, son huile, son sang fussent versés pour l’humanité. Il n’est pas étonnant que le vin de la Dernière Cène et celui de la cérémonie chrétienne soit ce symbole si approprié pour représenter le sang du Christ : ils sont obtenus par le même procédé.

Plus bas que tout cela

Même si nous essayons de comprendre l’expérience de Gethsémané, nous sommes condamnés à la sous estimer. Un jour alors que Joseph Smith se plaignait au Seigneur de ses épreuves et de ses souffrances, le Seigneur lui répondit en disant : « Le Fils de l’homme est descendu plus bas que tout cela, es tu plus grand que lui ? » (D&A 122:8) Ailleurs dans les Écritures, on dit que le Christ est descendu plus bas que tout : « lui qui est monté là haut, de même qu’il est descendu au dessous de tout, en sorte qu’il a compris toutes choses, afin d’être en tout et à travers tout, la lumière de la vérité. » (D&A 88:6 ; voir aussi Éph. 4:8-10).

À Gethsémané et au Calvaire, dans sa souffrance horrible et sa mort, le Christ est descendu plus bas que tout, de même que dans sa résurrection, il est monté au delà de toutes choses. Entre ces deux évènements, Jésus-Christ a fait le tour soit personnellement soit par procuration de tous les genres possibles d’expériences que connaît l’homme, les pires circonstances comme les meilleures. Il a été le plus humble d’entre nous et le plus exalté de tous, de sorte « qu’il comprend toutes choses ». Que ce soit sur le plan matériel comme pour la lumière de la création ou par expérience en tant que victime expiatoire, le Christ remplit toutes choses, est en toutes choses et est la cause de tout. Il est omniprésent.

Nous nous fourvoyons tout simplement et nous sous-estimons grossièrement l’étendue de l’Expiation quand nous sommes tentés de penser que nos péchés ne permettent pas à Dieu de nous comprendre ou de nous atteindre. Aussi bas que nous soyons tombés, notre Rédempteur a déjà eu lieu ; et il y est allé dans le seul but de nous retrouver et de ramener la brebis perdue au bercail. J’entends quelques fois des gens dire : « Comment puis-je revenir à l’Église, ou prier, ou m’approcher de Dieu après ce que j’ai fait. Je suis tombé trop bas ; je suis trop loin pour qu’il puisse m’atteindre. Je suis trop méprisable pour être sauvé ». À ceux-ci, le Sauveur répond essentiellement : « Je sais où tu es. J’y suis déjà passé, et c’était pire que ça. Je sais ce que tu ressens, car je l’ai vécu. Je me souviens de mes souffrances quand je les ai endurées, et mon cœur saigne pour toi. Mais je veux que tu reviennes. Je suis même prêt à te porter si tu me le permets. » Peu importe à quel point nous sommes perdus, Jésus-Christ, la voie du retour, la porte du foyer, est toujours à notre portée.

L’Expiation infinie

Les souffrances de Jésus-Christ au Jardin et sur la croix ont dépassé l’ensemble des souffrances de tous les êtres humains. La souffrance de Jésus n’était pas une simple douleur un peu rude et une mauvaise mort, ce n’était pas juste la plus douloureuse de toutes les expériences et de toutes les morts. La souffrance du Christ était exponentielle, elle était infinie. Lorsque le Christ est descendu au dessous de toutes choses, il a franchi la frontière entre le fini, ce qui peut être mesuré, et l’infini. Comme sa souffrance a été infinie, sa gloire maintenant est infinie, et de même sa capacité à sauver est infinie. « C’est pourquoi il doit nécessairement y avoir une expiation infinie ; si ce n’était pas une expiation infinie, cette corruption ne pourrait revêtir l’incorruptibilité » (2 Né. 9:7). « C’est pourquoi rien moins qu’une expiation infinie suffit pour les péchés du monde » (Alma 34:12 ; voir aussi 2 Né. 25:16 ; Alma 34:10 ; D&A 19:10-19).

La nature humaine fait que nous souhaiterions quantifier, mesurer l’expiation du Christ, mais son épreuve est au delà de toute mesure ; elle est au delà de notre compréhension. Jésus n’a pas seulement porté les péchés du monde, mais aussi les chagrins, les douleurs, et les maladies du monde entier : « Et il ira, subissant des souffrances, et des afflictions, et des tentations de toute espèce ; et cela, afin que s’accomplisse la parole qui dit qu’il prendra sur lui les souffrances et les maladies de son peuple. Et il prendra sur lui la mort, afin de détacher les liens de la mort qui lient son peuple ; et il prendra sur lui ses infirmités, afin que ses entrailles soient remplies de miséricorde, selon la chair, afin qu’il sache, selon la chair, comment secourir son peuple selon ses infirmités » (Alma 7:11-12).

Combien de gens ont souffert quelle somme de souffrance ici bas rien qu’aujourd’hui ? Combien de gens dans combien d’hôpitaux actuellement dans le monde supplient pour avoir une autre piqûre afin d’apaiser leurs souffrances ? Rien qu’aujourd’hui ? Pourtant les souffrances de Jésus-Christ dans le Jardin et sur la croix ont dépassé les souffrances cumulées de toute l’humanité de nos premiers parents jusqu’au Dernier Jour, pour ce monde et pour tous les mondes qu’il a créés par son pouvoir.

Jésus-Christ a pris sur lui tous les aspects négatifs de l’existence humaine provoqués par la Chute. Il a souffert par procuration à Gethsémané toutes les douleurs intimes, toutes les douleurs de cœur, toutes les douleurs physiques et tous les handicaps, tous les fardeaux émotionnels et toutes les dépressions de la famille humaine. Il connaît la solitude de ceux qui ne sont pas acceptés, qui ne sont pas beaux. Il sait ce que c’est que de voir composer les équipes et d’être le dernier choisi. Il connaît l’angoisse des parents dont les enfants tournent mal. Il connaît l’enfer intime de l’enfant ou du conjoint violé. Il connaît toutes ces choses intimement et personnellement parce qu’il les a vécues à Gethsémané. Après avoir vécu une vie parfaite, il a alors choisi de vivre nos vies imparfaites. Dans ce Gethsémané infini, le méridien des temps, le centre de l’éternité, il a vécu des milliards de milliards de vies de péchés, de douleurs, de maladies et de chagrin.

Dieu n’utilise pas de baguette magique pour effacer les mauvaises choses de l’existence. Les péchés qu’il remet, il les remet en faisant en sorte qu’ils deviennent siens et qu’il souffre à cause d’eux. Les souffrances et les chagrins d’amour dont il nous soulage, il le fait en les endurant lui même. Ces choses peuvent être partagées ou transférées, mais on ne peut s’en débarrasser d’un revers de main. Quelqu’un doit les endurer. Ainsi nous ne lui devons pas seulement notre purification spirituelle du péché, mais aussi notre guérison physique, mentale, et émotionnelle, car il a porté ces infirmités pour nous aussi. Tout ce que la Chute a eu de négatif, le Sauveur l’a rectifié. Tout ceci fait partie de son sacrifice infini, de son don infini.

C’est pour cette raison que pour pouvoir supporter le poids infini de l’agonie, Jésus avait besoin d’avoir un Père divin, infini. De Marie, il a hérité la capacité de mourir, mais de son Père il a hérité la capacité de vivre s’il le choisissait. C’est pourquoi sa vie ne pouvait lui être ôté s’il ne le voulait pas, il avait pouvoir sur la mort (voir Jean 10:17-18). Si vous ou moi avions été au pressoir de Gethsémané et que nous avions dû supporter le poids des péchés et de la douleur, nous aurions été écrasés comme des insectes, disparus immédiatement. Mais parce qu’il était le Fils de Dieu, et qu’il avait pouvoir sur la mort, sa vie ne pouvait lui être ôtée tant qu’il ne le décidait pas de lui même.

Dans le Jardin et sur la croix, il a dit en substance : « Je souffrirai cette agonie, J’irai jusqu’au bout ; j’endurerai pour eux et je tiendrai jusqu’à ce qu’ils soient sauvés ». Comme l’a dit frère Neal A. Maxwell : « Le fardeau accumulé de tous les péchés mortels, passés, présents, futurs, pesant sur cette âme sensible, sans péché et parfaite ! Toutes nos infirmités et toutes nos maladies faisaient, aussi, d’une certaine façon, parties de l’arithmétique terrible de l’expiation… Sa Souffrance, telle qu’elle était, l’énormité multipliée par l’infini, évoquait son dernier cri sur la croix venu du tréfonds de l’âme, traduisant un sentiment d’abandon. »

A-t-il été tenté à cause de son agonie infinie à donner sa vie pour mettre fin à ses souffrances avant que le prix ne soit complètement payé ? La plus grande tentation à laquelle il a dû faire face n’a-t-elle pas été d’abandonner ses frères et ses sœurs plus faibles en mourant prématurément afin d’être délivré de la douleur infinie ? Peut être. Tout ce qu’il avait à faire était de se laisser aller et la douleur se serait arrêtée, mais vous et moi aurions été perdus. Alors seconde après seconde, heure après heure, il a subi son agonie ; il ne pouvait se reposer, mais il ne voulait pas mourir, pas avant que ce soit fini, pas avant que nous fussions sauvés avec lui. Ainsi, lorsque le Vainqueur reviendra sur terre revêtu de pouvoir et de gloire, les anges déclareront sa victoire infinie et éternelle : « C’est fini, c’est fini ! L’Agneau de Dieu a vaincu et foulé seul au pressoir, oui, au pressoir de l’ardeur de la colère du Dieu tout-puissant. » (D&A 88:106)

La divine victime a satisfait aux exigences de la justice dans le Jardin du Pressoir et sur le Calvaire, elle l’a fait seule, et elle l’a fait pour vous et moi. Ceci lui donne le droit de réclamer ceux qui acceptent son alliance, pour les placer chacun sous son aile en disant : « J’ai payé pour celui-ci, il est à moi. ». « Père, vois les souffrances et la mort de celui qui n’a commis aucun péché, en qui tu te complaisais. Vois le sang de ton Fils qui a été versé, le sang de celui que tu as donné afin que toi même, tu sois glorifié ; c’est pourquoi, Père, épargne ceux-ci, mes frères, qui croient en moi, afin qu’ils viennent à moi et qu’ils aient la vie éternelle. » (D&A 45:4-5)

Et ça, c’est la meilleure nouvelle.