Les
papyrus de
Joseph Smith
Jay M. Todd
L’expression
« papyrus de Joseph Smith » désigne très
exactement douze morceaux existants du papyrus égyptien que le
prophète Joseph Smith a acheté en juillet 1835 à
Michael H. Chandler. Situés dans les archives de l’Église,
ces fragments ont une taille qui va de 18,5 x 31 cm à 16 x 11
cm. Le fac-similé n° 1 du livre d’Abraham vient d’un
de ces fragments. Au sens large, l’expression désigne
aussi les fac-similés 2 et 3 du même livre et les
papiers et tous les documents égyptiens de la période
de Kirtland de l’histoire de l’Église contenant de
petites sections de texte copiées des papyrus. La découverte
et la transmission des momies et des papyrus sont traitées
dans Livre d’Abraham : origine.
L’origine des
écrits antiques est passionnante à retrouver. En 1798,
la conquête de l’Égypte par Napoléon
réveilla l’intérêt de l’Europe pour
les trésors de l’Égypte. Antonio Lebolo, un
collectionneur italien, fit des fouilles en Égypte entre 1817
et 1821. En 1820 il travailla à Thèbes, près
d’El Gourna ; Chandler dit que les momies de Lebolo
venaient de là (Todd, p. 45, 130). Vers 1822, Lebolo retourna
en Italie où il mourut le 19 février 1830. En 1831, son
fils, Pietro, fit une enquête pour savoir pourquoi Albano
Oblasser, le marchand transporteur ne l’avait pas remboursé
pour onze momies. En 1833, son fils Pietro autorisa Francesco
Bertola, à Philadelphie, à vendre onze momies
qu’Oblasser avait envoyées à un associé à
New York (Peterson, p. 145-147).
On ne sait pas comment
Chandler s’est procuré ses possessions. On sait que les
momies et les papyrus de Lebolo furent exposés à
Philadelphie (avril-mai 1833) et à Baltimore. Au mois de
septembre 1833, six avaient été montrées à
Harrisburg et une avait été publiquement disséquée
à Philadelphie. En juin 1835, quatre momies et papyrus furent
exposés à Cleveland, à trente kilomètres
au sud-ouest de Kirtland (Todd, p. 108-143).
Au début de
juillet 1835, Chandler visita Kirtland où il rencontra Joseph
Smith à qui il demanda « s’il avait un
pouvoir par lequel il pouvait traduire l’égyptien
ancien. M. Smith répondit que oui » (P. Pratt,
Millennial Star, juillet 1842). Chandler lui montra quelques
hiéroglyphes que d’autres avaient prétendument
interprétés. Joseph Smith s’en alla et revint
avec une traduction écrite en anglais correspondant à
l’interprétation que Chandler avait déjà
reçue. Le prophète manifesta de l’intérêt
pour les papyrus, mais Chandler ne voulait pas dépareiller son
exposition. Peu après, des membres de l’Église
achetèrent pour $2.400 « quatre formes humaines…
avec deux rouleaux de papyrus ou davantage » (HC 2:235).
Oliver Cowdery se rappela plus tard que c’étaient « deux
rouleaux… [avec] deux ou trois autres petits morceaux »,
le texte écrit « à l’encre ou avec de
la peinture noire et une petite partie à l’encre rouge »
(Messenger and Advocate, 31 déc. 1835). En trois jours, Joseph
Smith traduisit « quelques hiéroglyphes et, à
notre grande joie, constata qu’un des rouleaux contenait les
écrits d’Abraham et un autre, les écrits de
Joseph d’Égypte ». Joseph Smith travailla du
17 au 31 juillet à « continuellement…
traduire un alphabet… et arranger une grammaire »
de l’égyptien (HC 2:236-238). Le 1er octobre, alors
qu’il travaillait sur l’alphabet, « les
principes de l’astronomie tels qu’ Abraham les
comprenait… furent dévoilés » (HC
2:286). Le 17 novembre, il « montra l’alphabet »
(HC 2:316). Il écrit qu’il traduisit « les
documents égyptiens » le 7 octobre, les 19 et 20
novembre (le 20: « J’ai avancé rapidement »)
et du 24 au 26 novembre (HC 2:289, 318, 320). Les archives de
l’Église contiennent les textes du livre d’Abraham
(Abr. 1:1-2:18) de cette période.
En 1837, un visiteur
écrivit : « Ces documents étaient
déchirés… certaines parties entièrement
perdues, mais Smith doit traduire le tout par l’inspiration
divine et ce qui est perdu, comme le songe de Nebucadnetsar, peut
être interprété aussi bien que ce qui est
préservé. » Joseph Smith fit transférer
les momies et les papyrus dans des localités voisines et, en
1836, ils étaient dans le temple de Kirtland. Malgré
les soins, les papyrus avaient été endommagés.
En conséquence, ils furent coupés en morceaux et
certains furent collés sur du papier pour les conserver. Le 4
janvier 1838, il y avait au moins « deux tiers non
divisés ». Pendant la période 1838-1839, les
papyrus et les momies passèrent l’hiver à Quincy
(Illinois), où ils furent exposés, pratique qui
continua jusqu’en 1856 (Todd, p. 197-203).
En 1842, Joseph Smith
s’occupa de préparer les fac-similés pour la
publication et écrivit vraisemblablement ses « Explications »,
qui sont imprimées avec eux ; le 23 février, il
donna des instructions à l’imprimeur sur la façon
de faire la plaque pour le fac-similé n° 1, qui fut, avec
son « explication », imprimé dans le
numéro du 1er mars du Times and Seasons avec Abraham 1:1-2:18.
Le 4 mars, il donna des instructions à l’imprimeur sur
les fac-similés n° 2 et 3 ; les 8 et 9 mars, il fit
de la « traduction » et de la « révision »
(HC 4:518, 543-548). La partie finale du livre d’Abraham
(2:19-5:21) et le fac-similé n° 2 avec son « explication »
furent imprimés dans le numéro du 15 mars ; le
fac-similé n° 3 et son « explication »
furent imprimés le 16 mai.
Bien que les rouleaux de
papyrus aient été raccourcis, un visiteur vit en
février 1843 « un long rouleau de manuscrit, [et on
lui dit que] c’était « l’écrit
d’Abraham » et on lui montra « un autre
rouleau » (Todd, p. 245). Après la mort de Joseph
Smith, les objets égyptiens furent tenus principalement par sa
mère et puis par Emma Smith après la mort de Lucy, le
14 mai 1856. Le 25 mai 1856, Emma vendit « quatre momies
égyptiennes avec les documents qui les accompagnaient »
à M. Abel Combs (IE, janv. 1968, p. 12-16). (Les pionniers
transportèrent un fragment dans l’Ouest.) Combs vendit
ensuite deux momies avec quelques papyrus, qui furent envoyés
au musée de St-Louis (1856) ; ils finirent au musée
de Chicago (1863) où ils brûlèrent apparemment en
1871. Le sort des deux autres momies et papyrus de Combs est inconnu,
mais certains papyrus restèrent car, en 1918, Mme. Alice
Heusser, de Brooklyn, une fille de la femme de charge de Combs, alla
trouver le musée métropolitain d’art de New York
avec des papyrus ayant appartenu à Joseph Smith. En 1947, le
musée acheta les papyrus à son mari devenu veuf. En mai
1966, Aziz S. Atiya, de l’université d’Utah, vit
onze fragments de Heusser au musée. Il en informa les
dirigeants de l’Église et, le 27 novembre 1967, l’Église
acheta les fragments ; l’un d’eux est le fac-similé
n° 1.
Les égyptologues
qui ont étudié les fragments ces dernières
années les identifient généralement comme étant
des textes religieux, certains du Livre des Morts, datant de 500-300
av. J.-C., d’autres du Livre des Respirations, datant d’environ
100 apr. J.-C. Depuis la redécouverte des fragments, les
chercheurs ont cherché à apprendre si l’un
d’entre eux, autre que le fac-similé n° 1, est lié
au livre d’Abraham.
Bibliographie
Nibley,
Hugh. The Message of the Joseph Smith Papyri. Salt Lake City, 1975.
Peterson,
H. Donl. “Sacred Writings from the Tombs of Egypt”. Dans
The Pearl of Great Price : Revelations from God, dir. de publ.
D. Peterson et C. Tate, Provo, Utah, 1989.
Article tiré de l'Encyclopédie du mormonisme, Macmillan Publishing Company, 1992, traduction Marcel Kahne, source www.idumea.org, avec autorisation