Joseph Smith - Cinq qualités d’un dirigeant
William E. Berrett
Historien,
auteur de The Restored Church, Salt Lake City, 1961
Peu après la Deuxième Guerre mondiale, je me trouvais à Washington et je ramassais par hasard un journal de New York. En première page, dans un petit encadré, était rapportée une interview avec un historien qui avait passé un an aux États-Unis et était sur le point de retourner dans son pays natal. J'ai oublié son nom, mais je n'ai pas oublié les questions que, d'après l'article, on lui posa. Le reporter dit : « Voici un an que vous êtes aux États-Unis à étudier notre histoire et notre peuple. Dites-moi : Quel est de tous les Américains celui que vous considérez comme le plus grand ? »
L'historien répondit : « Vous n'avez eu qu'un seul grand Américain : Joseph Smith, le prophète mormon ». Pour justifier ce choix il dit : « Il n'y a qu'un seul Américain qui se soit montré partisan d'un mode de vie et qui ait énoncé des idées qui changeraient la société tout entière si on les suivait ».
Lorsque l'on approfondit la vie et les enseignements du prophète Joseph Smith, on découvre un trésor d'idées si révolutionnaires que, si on les adoptait, elles pourraient changer le cours de l'histoire.
Nous ne nous rendons pas compte à quel point Joseph Smith différait de son époque dans ses idées.
Il donna une nouvelle perspective de Dieu, un rétablissement si vous voulez, mais une perspective différant de la perspective traditionnelle. Il proclama que notre Père était une personne ayant un corps - une personne qui pouvait parler et parlait à l'homme - une personne qui entendait les prières et y répondait.
Il fournit des preuves nouvelles de ce que Jésus-Christ était le Fils de Dieu, un Être ressuscité qui non seulement était apparu de nos jours, mais avait rétabli son Église et la dirigeait. Il éleva l'homme à une position nouvelle en tant que fils littéral de Dieu et Dieu en embryon, qui non seulement vécut avant d'apparaître dans la chair, mais vivrait de nouveau après la mort et auquel il serait possible de devenir un Dieu.
Il dit que l'homme était de la même espèce que Dieu.
Il déclara que notre terre avait été créée dans le seul but d'assurer le bien-être et la vie éternelle de l'homme : que le but de notre vie était d'avoir de la joie.
Il enseigna que le salut serait universel, que toute l'humanité se lèverait du tombeau et pourrait recevoir le pardon de ses péchés en se repentant.
Il annonça que les milliards d'êtres humains qui étaient morts pourraient entendre l'Évangile de Jésus-Christ et, s'ils l'acceptaient, voir accomplies pour eux sur la terre toutes les ordonnances nécessaires qui mènent au salut.
Ces idées et d'autres,
innombrables, sont révolutionnaires. Ce sont des idées
que nous proclamons toujours au monde et qui pourraient changer la
foi de tous les hommes s'ils les acceptaient.
Cinq qualités d'un dirigeant
Joseph Smith possédait des
qualités qui permirent à Dieu de l'utiliser et qui
permettraient à Dieu de nous utiliser, vous et moi, si nous
les possédions. Car la grandeur n'est pas quelque chose que
l'on tend à l'homme sur un plateau, et personne ne peut
devenir un instrument entre les mains de Dieu s'il ne possède
les qualités qui sont inhérentes à un dirigeant.
L'intelligence
Tout d'abord il y a la qualité de l'intelligence. Quoique n'ayant pratiquement jamais été à l'école, le prophète s'intéressait à presque tous les sujets. En 1836, il fit venir à Kirtland (Ohio), où se trouvait le siège de l'Église, un certain professeur Seixas, savant hébreu. Le prophète croyait que les dirigeants de l'Église devaient bien connaître cette langue. Mais à quel point pourrait-on apprendre l'hébreu en quatorze semaines en n'ayant cours que deux ou trois soirs par semaine ? Il n'y eut que deux étudiants qui purent lire plus ou moins couramment l'hébreu après cela : Joseph Smith et Orson Pratt. Il semble aussi que le prophète ait été le seul qui ait commenté divers passages de la Bible en partant du texte hébreu.
Nous calculons souvent l'intelligence d'une personne en fonction de la capacité qu'ont les idées exprimées de son vivant de résister à la critique dans les années qui suivent. Il est intéressant de se rappeler de nos jours certaines des idées politiques du prophète Joseph :
Il se montra partisan d'un système bancaire fédéral, un type de système de réserve qui ne fut établi aux États-Unis qu'en 1917.
Il recommanda au Congrès d'installer des écluses sur le Mississipi dans l'intérêt de la navigation. Son espérance ne se réalisa pas de son vivant, mais aujourd'hui le barrage et les écluses de Keokuk, qui permettent à de grands navires de se déplacer sur le fleuve, ont été construits à l'endroit même recommandé par le prophète.
Il proposa un système de réforme des prisons qu'on commence à peine à réaliser maintenant. Joseph prétendait que nos prisons devaient devenir des séminaires d’enseignement si nous voulions rééduquer ceux qui ont violé les lois de notre société.
Ce n'est pas parce que Joseph Smith a
été partisan de ces mesures qu'elles ont finalement
été adoptées. Mais cela montre bien que ses
idées, dans beaucoup de domaines, en plus de la religion, se
sont révélées être réalistes et en
avance sur son temps.
Du zèle pour l'instruction
Il y aune deuxième qualité du prophète Joseph Smith, une qualité que nous devons avoir, vous et moi, si nous voulons devenir des dirigeants. C'est le zèle pour l'instruction.
Vous vous souviendrez sans doute de l'histoire, dans le Nouveau Testament, de ce jeune étudiant. Il se rendit avec ses parents, Joseph et Marie, à la fête de la Pâque. Nous ne savons pas pourquoi le groupe avec lequel il se rendait à Jérusalem partit avant la fin de la fête, mais c'est ce qui arriva apparemment ; il avait déjà parcouru une certaine distance lorsque Joseph et Marie constatèrent que leur fils n'était pas avec eux. Ils firent demi-tour et le trouvèrent assis ou debout devant quelques-uns des grands docteurs juifs de la loi. À douze ans Jésus-Christ avait du zèle pour l'instruction.
Joseph Smith était du même genre. À quatorze ans il cherchait la vraie Église. Il ne voulut pas abandonner tant qu'il n'avait pas reçu la réponse. Pendant toute sa vie une de ses grandes qualités fut le zèle pour apprendre.
Cette qualité de l'esprit, on
la retrouve dans le fait qu'il étudia de nombreuses langues.
Il avait une connaissance pratique de l'hébreu et étudiait
souvent la Bible en allemand. Il apprit aussi à déchiffrer
l'égyptien. Dans un discours aux saints, il fit la liste d'une
douzaine de langues et dit : « Si je vis assez
longtemps, je les apprendrai toutes ».
La foi en un Dieu vivant
Ce zèle pour l'instruction pourrait paraître moins important et ne l'aurait sans doute pas amené à la grandeur s'il n'y avait eu une troisième qualification, car nous avons effectivement eu des hommes et des femmes intelligents dans ce monde qui ont aussi eu un grand désir de connaissance et que nous admirons, mais auxquels a souvent manqué la troisième qualité : la foi en un Dieu vivant.
Quel rapport avec l'instruction ? Joseph Smith disait que bien souvent, quand il se débattait avec un problème et ne pouvait y trouver de réponse, il s'adressait au Seigneur dans la prière. S'il priait avec foi, « la réponse, disait-il, me venait à l'esprit avec autant de clarté et dans un ordre d'idées tellement précis que je savais qu'elle venait de Dieu et je dictais la réponse à mon secrétaire ».
Aussi intelligents que nous soyons, aussi désireux que nous soyons d'apprendre, sans la foi en Dieu beaucoup de domaines nous seront fermés. Mais ils ne l'étaient pas pour Joseph Smith.
Je pense qu'un exemple frappant de sa foi, c'est celui de son expérience avec le livre de la Genèse dans la Bible. Tout lecteur de ce livre rencontre des problèmes, Par exemple, la Bible dit qu'Adam et Ève eurent trois fils : Caïn, Abel et Seth. Caïn tua Abel, ce qui laissait à Caïn et à Seth le soin de perpétuer le genre humain. Quiconque lit la Bible sait que c'est impossible.
Joseph Smith pria le Seigneur avec
une grande foi pour qu'il lui révélât le contexte
original de ce livre de Moïse. Les écrits originels
avaient disparu, mais Joseph pria le Seigneur pour qu'il les lui
révélât. Ce texte révélé que
nous avons aujourd'hui est le Livre de Moïse dans la Perle de
Grand Prix. Il constitue une des plus grandes ajoutes à
l'érudition biblique qui aient jamais été
données au monde.
Le pouvoir d'introspection
Joseph possédait une quatrième qualité qui est importante pour nous tous. C'est le pouvoir d'introspection, le pouvoir de regarder au-dedans de soi et de voir le genre de personne qu’on est.
Chaque matin nous nous regardons tous dans un miroir pour examiner notre aspect physique : coiffure, maquillage, santé en général. Avez-vous jamais pensé comme ce serait bien de pouvoir regarder au-dedans de vous-même, de vous rencontrer dans la rue et de vous demander quel genre de personne vous êtes, de vous interroger ? Connaissez-vous vos défauts ou vos points forts ?
Il y a là une qualité intéressante du prophète Joseph. Il connaissait ses faiblesses et ses points forts. Il dit : « J'étais une pierre brute jusqu’au moment où le Seigneur me prit en main » (History of the Church, 5:423).
La plupart d’entre nous cachent leurs faiblesses. Lorsque nous lisons Doctrine et Alliances, sections 3, 6, 10 et 24, nous voyons que le Seigneur réprimandait souvent le prophète Joseph parce qu'il ne suivait pas pleinement les directives qui lui étaient données. Un homme plus petit que lui n'aurait pas enregistré ces réprimandes, mais le prophète ne s'épargnait jamais. Il reconnaissait ses erreurs et les corrigeait.
Quand il traduisait le Livre de Mormon, Joseph était conscient de sa faiblesse en langue anglaise, car il avait fait peu d'études. Il étudia la langue, et lorsque la deuxième édition du Livre de Mormon sortit de presse, il avait personnellement corrigé les fautes de grammaire de la première édition. Si vous voulez le voir sous son meilleur jour littéraire, relisez les sections 121, 122 et 123 de Doctrine et Alliances. Cet écrit admirable est un exemple parfait de la capacité d'un homme de s'élever.
Le prophète voyait beaucoup de faiblesses en lui-même, mais il se mit en devoir de les surmonter. Il écrivit qu'un jour un homme entra furieux chez lui et le traita de tous les noms. Le prophète écrivit qu'il était si irrité qu'il chassa l'homme de chez lui et le poursuivit jusqu'à la grille d'entrée. Il retourna alors à son bureau et écrivit dans son journal à quel point sa conduite avait été inconvenante pour un prophète. Il ne perdit plus jamais le contrôle de lui-même.
Lorsqu'il fut emprisonné dans la prison de Liberty pendant ce dur hiver de 1838-1839, sans feu ni nourriture convenable, Joseph entendit les histoires horribles des gardes racontant que son peuple avait été chassé et massacré et les femmes violées. Il supplia le Seigneur : « O Dieu, où es-tu ? Et où est le pavillon qui couvre ta cachette ?
Combien de temps retiendras-tu ta main ? » (D&A121:1-2).
C'était une lamentation. Mais quand le Seigneur y répondit, il lui dit : « Tu n'es pas encore comme Job, tes amis ne luttent pas contre toi et ne t'accusent pas de transgression comme ils l'ont fait avec Job » (D&A 121:10). Il lui rappela que le Fils de l'Homme était descendu plus bas que tout cela : « Es-tu plus grand que lui ? »
Joseph Smith ne se plaignit plus.
L'amour des gens
Je voudrais maintenant parler d'une cinquième caractéristique de cet homme : l'amour des gens. Nul ne peut être grand dans ce monde s'il n'a pas l'amour de son prochain. Emma disait de Joseph qu'il ne mangeait même pas un repas seul, qu'il lui fallait inviter quelqu'un qui passait dans la rue pour le partager avec lui (voir History of the Church, 6:166). Dans les récits que nous avons, nombreux sont les exemples où on le voit prendre la défense de quelqu'un. Sa propre histoire est pleine de situations dans lesquelles il réprimande les saints parce qu'ils se critiquent mutuellement.
La preuve suprême de son amour fut donnée en juin 1844 lorsque, le Seigneur lui ayant révélé que ses ennemis cherchaient à lui ôter la vie, il envisagea de se rendre dans l'Ouest et de trouver un lieu pour les saints où ils pourraient être en sécurité. Il avait déjà traversé le Mississipi lorsque sa femme, Emma, lui fit dire : « Les saints pensent que tu es un lâche. Ils t'accusent de t'enfuir ». Joseph prononça alors ces paroles célèbres : « Si ma vie n'a pas de valeur pour mes amis, elle n'en a pas pour moi. Hyrum, nous faisons demi-tour » (Voir Essentials in Church History, p. 374).
Lorsqu'il quitta Nauvoo pour aller à Carthage se rendre au shérif, il se tourna sur sa selle et, jetant les regards derrière lui sur la ville de Nauvoo, dit : « Que ne puis-je encore parler une fois à mon peuple bien-aimé ». Sur la grand-route il rencontra Steven Markham, qui lui dit : « Joseph, où allez-vous ? » Il répondit : « Je vais comme un agneau à l'abattoir, mais je suis calme comme un matin d'été. J'ai la conscience libre de toute offense envers Dieu et envers tous les hommes » (Essentials in Church History, p. 376).
Tel est le prophète Joseph Smith. Il possédait ces cinq grandes qualités : l'intelligence, le zèle pour l'instruction, la foi en un Dieu vivant, la capacité de regarder en lui-même et de corriger ses défauts, et l'amour des gens. Ces cinq qualités possédées ensemble contribuèrent à faire de Joseph Smith un digne instrument entre les mains de Dieu pour être prophète pour cette dispensation. Ces mêmes qualités nous aideront considérablement dans nos responsabilités dans l’Église, si nous en prenons conscience et les cultivons.
Sources :
• New Era, juin 1977, p. 41
• L’Étoile, janvier 1978, p. 23-26