Existe-t-il d'autres sources que la Genèse sur l'histoire de la tour de Babel ?


Lee Donaldson, V. Dan Rogers et David Rolph Seely


Le chapitre 10 de la Genèse décrit la dispersion des fils de Noé et de leurs descendants après le Déluge. Les versets 9 et 10 nous disent que Nimrod a fondé le royaume de Babel, ou Babylone comme il a été nommé par la suite, dans le pays de Shinar. Le chapitre 11 commence par : « Toute la terre avait une seule langue et les mêmes mots… Ils dirent encore : Allons ! Bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet touche au ciel, et faisons-nous un nom, afin que nous ne soyons pas dispersés sur la face de toute la terre » (versets 1, 4). L’Éternel descendit pour voir la ville. Il décida de confondre le langage et de disperser le peuple (voir versets 5-9).

Les anciennes traditions juives et chrétiennes rapportent que Nimrod bâtit la tour de Babel en référence à un temple païen, dans le but de toucher le ciel. Parmi les Juifs, le nom Nimrod a toujours été le symbole de la rébellion contre Dieu et de l’autorité usurpée : « Il a établi une fausse prêtrise et un faux royaume sur la terre pour imiter les lois de Dieu et a fait ‘pécher tous les hommes’ » (Hugh Nibley, Lehi in the Desert and the World of the Jaredites, volume 5 de The Collected Works of Hugh Nibley, 1980, p. 156).

Josèphe, historien antique juif, a donné des informations supplémentaires. Il a noté que Nimrod avait essayé de prendre le pouvoir sur les hommes. Nimrod pensait certainement que cette imitation de temple augmenterait son contrôle sur le peuple (voir Antiquités judaïques, livre 1, chapitre 4, paragraphe 2).

La construction de la tour commença lorsque le peuple découvrit une importante et nouvelle technologie : la cuisson des briques dans un four. Les briques de boue ordinaires, séchées au soleil pouvaient seulement être utilisées pour une hauteur limitée sinon elles s’écroulaient sous leur poids. Mais les briques cuites dans un four pouvaient être empilées sur une hauteur considérable ; Les tours du temple de Babylone faisaient 91 mètres de hauteur. Dans la Bible, les briques sont mentionnées seulement pour la construction de cette tour, des constructions de Pharaon et des autels idolâtres (voir Genèse 11:3 ; Exode 1:14 ; 5:7, 14, 16 ; Ésaie 65:3). Cette utilisation suggère des sentiments de rébellion du peuple contre le Seigneur dans la société qui s’était développée depuis le Déluge.

Les récits de Genèse nous donnent des informations supplémentaires sur la signification de la construction de la tour. Tout d’abord, la raison de cette tour était de se donner un nom (voir Genèse 11:4). En d’autres termes, Nimrod proposait de construire un temple pour recevoir le nom de Dieu sans faire d’alliances éternelles. Ensuite, il voulait construire cette tour-temple pour qu’ils ne soient pas « dispersés » (Genèse 11:4). La révélation des derniers jours associe le pouvoir de scellement et la protection de la terre pour quelle ne soit pas dévastée lors de la seconde venue (voir D&A 2:3). L’un des sens du mot dévastée à l’époque de Joseph Smith était « détruite par dissémination » (Webster’s Dictionary, [1828]). Finalement, le terme Babel signifie en hébreu « confusion », mais en babylonien, cela signifiait « porte de Dieu ». Nimrod et son peuple construisaient leur temple personnel, leur porte pour rentrer au ciel sans l’accord divin et sans les clés de la prêtrise.

Les Babyloniens, peuple apostat, connaissaient quelque peu les ordonnances du temple et le but des temples. Ils ont donc construit un édifice qui symbolisait selon eux leur lien avec Dieu. En utilisant leurs propres cérémonies pour imiter les ordonnances des vrais temples, ils essayaient de reproduire le processus de la préparation à l’au-delà.

Le terme Babel existe aussi, en hébreu, le même mot qui est traduit partout par « Babylone » dans l’Ancien Testament. Donc, en termes bibliques, le peuple de cette histoire construisit Babylone, cité qui représente aujourd’hui le monde ou les choses de ce monde (voir D&A 1:16).

L’histoire de la tour de Babel doit être lue dans le contexte du livre de la Genèse. Après la Chute, l’Évangile fut enseigné aux descendants d’Adam. Certains acceptèrent les enseignements de l’Évangile, mais beaucoup les rejetèrent. Des combinaisons secrètes, en commençant par celle de Caïn, amenèrent l’apostasie dans le monde. En même temps, Hénoc rassembla les justes en Sion et ils furent enlevés au ciel. Puis, le Seigneur envoya le Déluge qui détruisit ceux qui ne s’étaient pas repentis. Après le Déluge, il fit alliance avec Noé et avec sa descendance de rétablir l’enseignement du plan de salut sur la terre (voir Genèse 9:11 ; Traduction de Joseph Smith, Genèse 9:17).

La ville d’Hénoc avait été enlevée (voir Genèse 5:23-24 ; Moïse 7:21, 69) avant le Déluge, mais à l’époque d’Abraham (l’époque de la tour de Babel), Melchisédek avait aussi créé une ville dont le peuple était digne de Sion et désirait rejoindre la ville d’Hénoc pour aller aux cieux (voir Traduction de Joseph Smith, Genèse 14:33-34). Après le traumatisme qu’avait créé le Déluge (voir Genèse 6-8), le désir de construire une tour jusqu’au ciel, avec des matériaux insubmersibles était aussi peut-être une tentative de survivre à un autre déluge, au cas où Dieu essayerait à nouveau de détruire les habitants de la terre.

Leur tour-temple était donc prévue pour remplir de nombreuses fonctions, ce qui la rendait plus importante à leurs yeux. Cependant, leur tentative d’échapper au jugement de Dieu était fondée sur leur ingéniosité humaine plutôt que sur leur repentir. La réponse du Seigneur fut d’amener ce peuple à l’humilité.

La construction de la tour de Babel marqua la transition entre la dispensation de Noé et celle d’Abraham. Juste après la dispersion du peuple, le Seigneur intervint pour établir son alliance avec Abraham et pour l’amener vers la terre promise (voir Genèse 12). Le Seigneur conclut l’alliance avec Abraham comme base pour l’édification de Sion, et cette alliance est fondée sur notre acceptation et sur notre dépendance du sang purificateur de l’Expiation.

Le récit qui commence dans la Genèse se termine à 2 Rois 25. Les enfants d’Israël, postérité d’Abraham, se retrouvèrent à Babylone où l’histoire avait commencé, parce qu’ils brisèrent l’alliance. C’est pourquoi ils partirent de Jérusalem (Sion) en exil à Babylone. Pourtant le Seigneur eut le pouvoir et la miséricorde nécessaires pour les ramener, grâce à leur repentir et au renouvellement de l’alliance. Plus tard, Israël fut libéré de Babylone par Cyrus puis par Darius. Zorobabel, et plus tard Esdras et Néhémie, menèrent le peuple, et certains retournèrent dans leur pays et renouvelèrent l’alliance.

Dans les derniers jours, le Seigneur nous a à nouveau appelés à sortir du monde. Nous avons reçu le commandement suivant : « Sortez de Babylone, du milieu de l’iniquité, qui est la Babylone spirituelle » (D&A 133:14) pour construire Sion.

(L'Étoile, mars 1998)