Comment comprendre l'expression « Rachetez le temps »
mentionnée dans Éphésiens 5:16 et Colossiens 4:5-6 ?



La rédaction




Rachetez le temps, car les jours sont mauvais. (Éphésiens 5:16)

Conduisez-vous avec sagesse envers ceux du dehors, et rachetez le temps. (Colossiens 4:5)

Le
verbe signifie racheter, mettre à profit ou saisir. Le complément du verbe a essentiellement trois significations : 1. temps, moment présent ; 2. moment opportun, temps favorable, occasion ; 3. temps fixé, époque déterminée.

ÉPHÉSIENS 5:16

Traductions :

■ « Rachetez le temps, car les jours sont mauvais.
» (Segond).

■ « qui mettent à profit le temps, car les jours sont mauvais. » (TOB)

■ « Faites un bon usage de toute occasion qui se présente à vous, car les jours que nous vivons sont mauvais. » (FC)

Commentaires :

Voici trois commentaires d'éxégètes antérieurs au Rétablissement. Le premier est français, les deux autres anglais, souvent cités par les dirigeants de l'Église :

Augustin Calmet :

« On achète le temps lorsqu'on sacrifie son repos, sa commodité, ses biens, ses plaisirs, pour se procurer le loisir de vaquer à son salut, à l'unique nécessaire en ce monde. C'est une métaphore tirée de ce que nous voyons pratiquer par les gens de trafic [les commerçants, ndlr], qui sont attentifs à toutes les occasions qui se présentent de faire un bon marché et d'acheter quelque chose de précieux. Ils ne négligent ni soins, ni travaux, ni veilles, ni voyages pourvu qu'ils achètent et qu'ils vendent à profit. Il en est de même par proportion de ceux qui sont bien convaincus de l'importance du salut et de la nécessité d'y travailler pendant les jours si courts, et si mauvais de cette vie. Tout conspire à nous dérober ce temps si précieux : nos amis, nos ennemis, le soin du corps, celui des biens, nos emplois, nos affaires. Nous sommes exposés à mille dangers, mille tentations, mille scandales. Notre grande affaire donc doit être de rachetter, de conserver, de gagner ce temps si précieux qui coule si vite. Le temps de cette vie n'est pas à vous. Vous n'êtes ici que comme des étrangers : usez-en avec sagesse, ménagez-le, rachetez-le au dépens de toutes choses. Voilà la maniére la plus ordinaire d'expliquer ce passage.

« Mais en considérant l'intention de l'apôtre en cet endroit, qui est d'inspirer aux fidèles l'esprit de paix et de prudence, pour se mettre à couvert des persécutions et des violences des païens et des Juifs, il paraît qu'il veut dire : Gagnez du temps, achetez la paix, souffrez plûtôt quelque chose dans le silence que de vous attirer une persécution déclarée par votre indiscrétion. C'est ainsi que dans Daniel (2:8) il est dit que les mages gagnent du temps, ou qu'ils rachètent le temps… Saint Paul veut donc en cet endroit que les Éphésiens usent de ménagement et de discrétion envers tout le monde et qu'ils ne publient pas imprudemment les vérités de la Religion, qu'ils ne déclament pas mal-à-propos contre les abus du paganisme et contre les désordres du siècle ; en un mot, qu'ils ne se déclarent pas sans nécessité : mais qu'ils gagnent du temps et qu'ils demeurent dans le silence, parce que les jours sont mauvais et qu'ils vivent sous un prince déréglé et violent qui ne garde aucune mesure et qui pourrait faire un très grand tort à la Religion, s'il portait les choses aux extrémités et à une persécution générale. Il semble que l'expression dont il se sert soit tirée de la coutume des pauvres débiteurs, qui rachètent le temps du paiement et qui obtiennent quelque délai par quelques nouveaux intérêts auxquels ils s'engagent envers leur créancier. C'est dans le même esprit que le Sauveur défend à ses apôtres de jeter les perles devant les pourceaux (Matthieu 7:6). »
(Augustin Calmet, Commentaire, Épitres de Saint Paul, tome 2, p. 147-148, Éphésiens 5:16)

Adam Clarke :

« Racheter le temps : Acheter ces moments que d'autres semblent jeter ; l'amélioration constante de chaque moment présent, afin que vous puissiez, dans une certaine mesure, regagner le temps que vous avez perdu. Certains pensent qu'il y a ici une allusion au cas des débiteurs, qui, en accordant une précieuse considération à leurs créanciers, obtiennent plus de temps pour payer leurs dettes. » (Clarke, Bible Commentary, vol. 3, p. 483, Ephesians 5:16)

Thomas Scott :

« Racheter notre temps de la paresse, du sommeil ou des loisirs inutiles et des visites impertinentes, à des fins utiles et importantes ; parce que la vie, la santé, la liberté et l'utilisation de nos sens et de notre compréhension sont en tout temps incertaines. Le monde est également plein de misère et d'iniquité ; et il n'y a 'ni travail ni conseil... dans la tombe, où nous allons' ». (Scott, Practical Observations on the New Testament, p. 393-394, Ephesians 5:16)


COLOSSIENS 4:5

Traductions :

« Trouvez la juste attitude à l'égard des non-chrétiens ; saisissez l'occasion. » (TOB)

« Conduisez-vous avec sagesse envers les non-chrétiens, en profitant de toute occasion qui se présente à vous. » (Français courant)

« Conduisez-vous avec sagesse envers ceux du dehors, et rachetez le temps. » (Louis Segond)

« Marchez dans la sagesse envers ceux qui sont sans*, rachetant le moment. » (King James)

* Voir plus bas le
commentaire d'Adam Clarke

Note : La Traduction de Joseph Smith n'apporte pas de modification à la traduction anglaise du roi Jacques.

Commentaires :

Augustin Calmet (1672-1757) :

« On a déjà vu cette expression dans l'épître aux Éphésiens [5:16, ndlr]. Le temps présent n'est point à nous. Dieu nous en a laissé l'usage, pour l'employer à la gloire et à notre salut. C'est à nous à nous le rendre propre, en l'achetant par la pratique des bonnes œuvres. Nous le perdons si nous l'employons mal ; si nous en abusons, nous en rendrons un compte rigoureux à la justice du Seigneur. La circonstance où l'apôtre emploie cette expression ici et dans l'épître aux Éphésiens me persuade qu'il veut principalement marquer l'attention pleine de prudence que les fidèles doivent apporter pour se tirer des temps fâcheux, et pour éviter les persécutions. » (
Augustin Calmet, Commentaire, Épitres de Saint Paul, tome 2, p. 166, Colossiens 4:5)

Adam Clarke (1762-1832) :

« Verset 5. L'Église du Christ était considérée comme une enceinte ; un champ ou un vignoble, bien couvert ou clos. Ceux qui n’en faisaient pas partie étaient considérés comme sans, c’est-à-dire, sans cette protection et cette défense qu'avaient les véritables disciples du Christ.

« Verset 6. Que toutes vos conversations soient telles qu'elles tendent à illustrer et à recommander le christianisme ; qu'il soit non seulement saint, mais sage, gracieux et intelligent. Le sel, de son utilisation pour préserver les aliments de la corruption et les rendre à la fois savoureux et sains, a toujours été l'emblème de la sagesse. Afin que votre discours soit géré si judicieusement que vous puissiez discerner comment traiter les préjugés et répondre aux objections des Juifs et des Gentils. » (Clarke, Commentary, p. 511, Colossians 4:5-6)

Thomas Scott (1747-1821) :

« Ainsi les Colossiens doivent 'racheter leur temps', en acquérant et en exerçant cette sagesse céleste, à l'honneur de Dieu et au bien de l'humanité afin que leur conversation soit non seulement inoffensive, mais 'toujours avec grâce' [v. 6], soit le langage authentique de la piété, de la pureté, de la sagesse et de l'amour. Les choses célestes se savourent comme la viande est conservée et savourée en étant assaisonnée avec du sel [v. 6] (voir Matthieu 5:13). En tenant compte de ces règles, ils sauraient comment ils doivent répondre à chaque homme [v. 6], s'il demande une raison de leur espérance [1 P. 3:15] et s'il s'enquiert sérieusement de la nature du christianisme ; ou s'il désirait une solution de quelque doute ou difficulté ; ou s'il était disposé à objecter, à critiquer, à contester ou à insulter ; car la douceur de la sagesse céleste dicterait une réponse pertinente à chaque occasion, et les préserverait des disputes honteuses. (Scott, Practical Observations on the New Testament, p. 410)

■ Cecil :

« Le sel : Chez les Grecs, le sel attique désignait l'esprit, l'intelligence, l'ingéniosité audacieuse souvent accompagnée d'illusions polluantes ou profanes qui étaient coutumières et admirées. Probablement l'apôtre y fait-il allusion, mais il montre à ses lecteurs une manière bien plus excellente.
» (Cecil, dans Matthew Henry, A Comprehensive Commentary on the Holy Bible: Acts – Revelation, p. 436)

Sidney B. Sperry (1895-1977) :

« Les Colossiens doivent être prudents et discrets dans leurs relations avec les étrangers, en tirant le meilleur parti des occasions qui se présentent. Leur discours doit être gracieux et si bien raisonné qu'ils peuvent savoir comment donner à chaque homme une réponse appropriée. » (Sidney B. Sperry, Paul's Life and Letters, The Epistle to the Colossians)

Clyde J. Williams :

« Le dernier conseil que Paul donne concerne les responsabilités missionnaires de ceux qui possèdent le mystère du Christ. Nous devons utiliser la sagesse en guettant les occasions de faire part de l'Évangile avec les non-membres (voir Colossiens 4:3-5), et si nous montrons un exemple approprié, d'autres verront l'avantage d'avoir l'Évangile dans leur vie. Il nous est également conseillé d'étudier et de nous préparer afin de savoir comment répondre aux investigateurs sans leur donner une doctrine avancée lorsqu'ils ne sont préparés qu'aux principes de base (voir Colossiens 4:6). Ce principe était important pour les Colossiens, car ils recevaient une doctrine bien avancée dans cette lettre de Paul. Cela ne devait pas être partagé sans discernement avec ceux qui n'avaient aucun fondement dans l'Évangile. Faire cela placerait probablement des pierres d'achoppement sur le chemin des investigateurs. » (Clyde J. Williams, dans Millet et Jackson, Studies in Scripture, vol. 6, Colossians)

Manuel de l'étudiant du Séminaire, 2000, Nouveau Testament, p. 139 :

« Colossiens 4:6 : Le sel = la sagesse »