Joseph Fielding Smith
Nous pouvons être assurés que le jeûne est une coutume religieuse qui nous vient du commencement des temps et est toujours associé à la prière. Il y a de nombreuses coutumes et pratiques qui ont été données autrefois dont la connaissance est devenue si courante que leur origine s'est perdue dans l'Antiquité. Nous ne pouvons par conséquent pas indiquer le temps ou le lieu où le premier commandement sur le jeûne a été donné. Il était courant dans les temps les plus anciens, et le Nouveau Testament rapporte de nombreux incidents montrant qu'il était bien établi non seulement parmi les véritables adorateurs de la Divinité, mais aussi parmi les nations païennes. Tout ceci indique l'antiquité du jeûne dont nous pouvons être assurés qu'il a été révélé à Adam.
Nous pouvons déduire des écrits d'Ésaïe que la prière et le jeûne furent commandés par le Seigneur. Ésaïe réprimande Israël pour avoir perverti cette doctrine et s'efforce de le ramener sur le chemin de l'obéissance fidèle (voir Ésaïe 58:1-7).
Ésaïe définit clairement le but du jeûne. On l'observait avec un esprit contrit, un cœur humble devant le Seigneur. Il fallait abandonner le mal, prier, faire des supplications et faire l'alliance de nourrir les affamés, de vêtir ceux qui étaient nus et de libérer l'opprimé.
Si on le faisait, alors, dit le Seigneur, « Ta lumière poindra comme l'aurore, et ta guérison germera promptement ; ta justice marchera devant toi, et la gloire de l'Éternel t'accompagnera » (Ésaïe 58:8). Mais Israël avait perverti le jeûne et méritait ainsi la réprimande d'Ésaïe et du Seigneur.
Tout au long de l'Ancien Testament, nous trouvons des signes de l'observance du jeûne et de la prière. Deux des meilleurs exemples valent d'être cités ici. Le premier, c'est l'histoire du Livre d'Esther. En bref, Raman, l'ennemi des Juifs, obligea le roi à publier un décret selon lequel tous les Juifs du royaume seraient mis à mort. La loi était telle qu'elle ne pouvait être révoquée. Esther, la reine, envoya un message disant :
« Va, rassemble tous les Juifs qui se trouvent à Suse et jeûnez pour moi, sans manger ni boire pendant trois jours, ni la nuit, ni le jour. Moi aussi, je jeûnerai de même avec mes servantes, puis j'entrerai chez le roi, malgré la loi ; et si je dois périr, je périrai. » (Esther 4:16)
Un autre exemple frappant est rapporté dans le Livre de Daniel. Lorsque les fourbes complotèrent contre Daniel et le firent jeter dans la fosse aux lions selon la loi immuable et lorsque le roi souhaita le délivrer, les comploteurs dirent : « Sache, ô roi, que la loi des Mèdes et des Perses exige que toute défense ou tout décret confirmé par le roi soit irrévocable » (Daniel 6:15). Alors le roi alla au palais et passa la nuit à jeûner : « Il ne fit point venir de concubine auprès de lui, et il ne put se livrer au sommeil » (Daniel 6:18). Daniel invoqua aussi le Seigneur dans le jeûne et la prière quand il désirait sa faveur (voir Daniel 10:1-3).
Il y a aussi dans le Nouveau Testament de nombreuses allusions au jeûne et à la prière quand il était nécessaire de recevoir des bénédictions du Seigneur. Dans ce cas, il suffit de citer le commandement de notre Sauveur enseigné dans le grand sermon sur la montagne, et de la guérison du jeune garçon possédé d'un esprit mauvais.
Sur la montagne, le Sauveur dit : « Lorsque vous jeûnez, ne prenez pas un air triste, comme les hypocrites, qui se rendent le visage tout défait, pour montrer aux hommes qu'ils jeûnent. Je vous dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. Mais quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage, afin de ne pas montrer aux hommes que tu jeûnes, mais à ton Père qui est dans le lieu secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » (Matthieu 6:16-18)
L'autre incident est l'exorcisme du jeune homme que les disciples ne pouvaient guérir. Les disciples demandèrent au Seigneur pourquoi ils avaient échoué. Il leur dit que c'était à cause de leur manque de foi, car s'ils avaient la foi, il leur serait possible même de déplacer les montagnes ; ensuite, il ajouta : « Mais cette sorte de démon ne sort que par la prière et par le jeûne. » (Matthieu 17:21)
Le jeûne et la prière dans la dispensation actuelle nous sont parvenus depuis les premiers temps. Depuis l'organisation de l'Église, le principe du jeûne dans l'esprit de la prière a été un commandement du Seigneur (voir D&A 59:8-13 ; 88:76, 119). Pour ce qui est du choix d'un jour fixe du mois, nous avons ce témoignage qui vient du président Brigham Young dans un discours prononcé le 8 décembre 1867 dans l'ancien Tabernacle de Salt Lake City :
« Vous savez que le premier jeudi de chaque mois nous faisons jour de jeûne. Combien y en a-t-il ici qui connaissent l'origine de ce jour ? Avant qu'on ne paie la dîme, les pauvres étaient soutenus par les dons. Ils venaient trouver Joseph et demandaient de l'aide, à Kirtland, et il dit qu'il devrait y avoir un jour de jeûne, ce qui fut décidé. Il devait avoir lieu une fois par mois, tout comme maintenant, et tout ce qui aurait été mangé ce jour-là en fait de farine, de viande, de beurre, de fruits ou de n'importe quoi d'autre, devait être apporté à la réunion de jeûne et mis entre les mains d'une personne choisie dans le but de s'occuper des pauvres… Qu'il soit annoncé au peuple que le premier jeudi de chaque mois, jour de jeûne, tout ce qui aurait été mangé par les maris, les femmes, les enfants et les servantes soit mis entre les mains de l'évêque pour le soutien des pauvres… Les évêques devraient, par l'intermédiaire de leurs instructeurs, veiller à ce que toutes les familles de leur paroisse qui en sont capables donnent aux pauvres ce qu'elles mangeraient normalement le jour de jeûne. » (Journal of Discourses, vol. 12, p. 115)
Cette coutume de tenir des réunions de jeûne le jeudi fut poursuivie à Nauvoo et aussi après l'arrivée des membres de l'Église dans les Montagnes Rocheuses. Je peux me souvenir du temps où certaines maisons d'affaires fermaient leur porte chaque jour de jeûne et inscrivaient sur les portes : « Fermé pour réunion de jeûne ».
Le passage du premier jeudi au premier dimanche du mois se produisit de cette manière : Hyrum M. Smith (1872-1918) qui devint plus tard membre du Collège des Douze, était missionnaire à Newcastle (Angleterre) en 1896. Le jeudi de la réunion de jeûne, les membres de l'Église de ce pays devaient demander un congé sans solde.
Certains d'entre eux travaillaient dans les mines à charbon. Quand ils revenaient des mines, ils devaient rentrer chez eux, prendre un bain et changer de vêtements. Ceci était une perte à la fois de temps et d'argent. Hyrum écrivit à son père, le président Joseph F. Smith et demanda pourquoi, dans de telles circonstances, le jour de jeûne devait être un jeudi et non un dimanche. Le président Smith apporta la lettre à la réunion de la Première Présidence et des apôtres et l'y présenta. Voici un extrait du procès-verbal de la réunion qui se tint le 5 novembre 1896 :
« Le président Joseph F. Smith présenta le sujet de la réunion de jeûne, suggérant qu'un changement de la date du premier jeudi au premier dimanche de chaque mois serait probablement profitable. Ceci fut ratifié par le président George Q. Cannon et lorsque d'autres frères se furent exprimés sur ce sujet, il fut décidé que… le premier dimanche de chaque mois… les saints… se réuniraient dans leur église… pour observer le jour de jeûne. »
(Improvement Era de 1953 à 1970, rubrique « Votre question »)