QUESTION : Lorsque je me trouve dans un pays où il y a beaucoup de pauvres, je suis souvent sollicité par des gens qui me demandent l'aumône. Je me sens tiraillé entre les enseignements du Christ qui nous disent de donner aux pauvres et la pensée que cela peut leur faire plus de mal que de bien. Quand faut-il donner aux mendiants ?



RÉPONSE
de John F. O'Donnal, président du temple de Guatémala, au Guatémala :

Ayant vécu et ayant voyagé pendant de nombreuses années dans des pays où il y avait beaucoup de pauvreté, j'ai, moi aussi, souvent médité les enseignements des Écritures qui nous disent de donner aux pauvres et aux nécessiteux.

Certains mendiants sont vraiment nécessiteux : pauvres, malades ou démunis. D'autres, par contre, appartiennent à des groupes organisés ; certains paient même le droit de mendier à des endroits lucratifs.

Pour certaines de ces personnes, mendier est un mode de vie ; elles gagnent de l'argent en tirant parti de la sensibilité des touristes ou des nouveaux venus dans la région. Donner à ces gens-là, c'est les encourager à continuer leur activité, qui, dans bien des cas, peut mener à la délinquance, et qui ne les encourage absolument pas à devenir autonomes.

En donnant aux mendiants, il n'est pas certain que nous les aidions. La façon du Seigneur est, au contraire, de leur apprendre à se prendre en charge et de les aider à apprendre à devenir autonomes.

Comment alors concilier l'idée d'apprendre aux gens à se prendre en charge et le conseil du Sauveur au jeune homme riche : « Vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel » (Marc 10:21 ; Luc 18:22) et sa déclaration : « Dans la mesure où vous avez fait cela à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait » (Matthieu 25:40) ?

Il s'agit là d'une question importante, qui finira par se poser à nous avec acuité, avec l'augmentation de la population du globe, la dégradation de l'économie des pays et l'accroissement du nombre des mendiants. L'Ancien Testament nous dit : «Il ne manquera pas de pauvres au milieu du pays » (Deutéronome 15:11).

À travers les âges, l'Église a beaucoup fait pour soulager les pauvres et les nécessiteux. À l'époque de l'Ancien Testament, il fut donné un conseil aux Israélites : « S'il y a chez toi quelque pauvre parmi tes frères qui réside avec toi, dans le pays que l'Éternel, ton Dieu, te donne, tu n'endurciras pas ton cœur et tu ne fermeras pas ta main devant ton frère pauvre, mais tu lui ouvriras ta main et tu lui prêteras sur gage de quoi pourvoir à ses besoins » (Deutéronome 15:7-8). La Perle de grand prix nous dit que dans la cité d'Énoch, « il n'y avait pas de pauvres parmi eux » (Moïse 7:18).

Dans le Livre de Mormon, on lit les paroles du roi Benjamin à son peuple : « Vous donnerez de vos biens à ceux qui n'en ont point, et vous ne laisserez point le mendiant vous supplier en vain, et ne le renverrez pas pour qu'il périsse » (Mosiah 4:16). Le roi Benjamin nous dit que nous devons nous abstenir de juger ceux qui peuvent avoir besoin de notre aide : « Tu diras peut-être : L'homme s'est attiré sa propre misère ; c'est pourquoi je retiendrai ma main, et je ne donnerai ni ma nourriture ni ma substance pour qu'il ne souffre pas, car son châtiment est mérité – Mais je te dis, ô homme, que quiconque agira ainsi, a grand sujet de se repentir… Je souhaiterais que vous donniez de vos biens aux pauvres, chacun selon ce qu'il a, de manière à nourrir ceux qui ont faim, vêtir ceux qui sont nus, visiter et soulager les malades tant spirituellement que temporellement, selon leurs besoins. » (Mosiah 4:17-18, 26)

Dans notre dispensation, peu après le rétablissement de l'Église, le Seigneur a commandé au prophète Joseph Smith : « Tu te souviendras des pauvres et tu consacreras à leur entretien… cette partie de tes biens que tu peux leur donner. Et lorsque tu donnes une partie de ta substance aux pauvres, c'est à moi que tu la donneras » (D&A 42:30-31). Le Seigneur a commandé aux saints de déposer les biens devant l'évêque de l'Église et ses conseillers, deux des anciens ou des grands-prêtres qu'il nommera (voir D&A 42:31). Le Seigneur a également commandé au prophète Joseph de « visiter les pauvres et les affligés et (de) les soulager » (D&A 44:6).

À notre époque, le programme d'entraide de l'Église et les dons de jeûne ont été instaurés pour aider sous une forme organisée les membres et, dans certains cas, les non-membres, dans le besoin, en incapacité physique ou au chômage. De fait, nous « soulageons » les pauvres en faisant des dons de jeûne généreux et en travaillant bénévolement au sein du programme d'entraide.

En tant qu'organisation, l'Église fait beaucoup pour aider les nécessiteux. Mais comment réagir quand quelqu'un nous sollicite ? Comment distinguer les vrais nécessiteux des mendiants professionnels ?

Beaucoup de collectes inutiles se font également dans beaucoup d'endroits du monde. En m'appuyant sur les Écritures et sur mes expériences personnelles, j'ai conclu que c'est à chacun de décider s'il doit donner. Ce qui rend la décision si difficile, c'est le fait que nous ne pouvons pas aider tous les nécessiteux que nous rencontrons. La plupart des gens qui voyagent se sont retrouvés un jour entourés de tant de mendiants qu'il aurait été impossible de donner même un petit quelque chose à chacun d'eux. Dans de telles situations, le fait de prier chaque jour pour agir avec sagesse en tout, peut nous aider à savoir dans notre cœur par les inspirations de l'Esprit quand et à qui nous pouvons donner.

En suivant les inspirations de l'Esprit, nous pouvons être certains que lorsque nous donnons, nous le faisons comme l'apôtre Paul l'a conseillé : « sans tristesse ni contrainte ; car Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Corinthiens 9:7).

(L'Étoile, novembre 1988, p. 36-37)