Nos relations avec les autres chrétiens


Richard P. Linsay


L’Église n’a jamais existé dans l’isolement par rapport aux autres confessions chrétiennes. Ses racines et son contenu sont et restent dans l’héritage chrétien. Mais son affirmation que les cieux se sont à nouveau ouverts, que le rétablissement du rayonnement et du pouvoir perdus de l’Évangile complet de Jésus-Christ est en cours à l’initiative divine et son rejet de nombreuses traditions séculaires ont causé des malentendus et de la malveillance. Dans la première génération aux États-Unis, la solidarité des saints des derniers jours a été considérée comme opposée au pluralisme et a en même temps suscité la colère des tenants des autres confessions. Les efforts missionnaires par le contact personnel plutôt que par le recours aux médias et à la création d’une image de marque ont parfois aggravé le problème. À certaines époques et dans certaines circonstances, il n’y a eu aucune volonté ou du moins aucune résolution durable de part et d’autre de tendre la main et de coopérer.

Ces tensions sont en train de se réduire de trois manières :

1. Du point de vue institutionnel. Les dirigeants de l’Église participent maintenant avec les dirigeants d’autres confessions à des échanges chrétiens. Les dirigeants de l’Église de plusieurs pays sont accueillis aux réunions spirituelles interconfessionnelles avec leurs homologues protestants, catholiques et orthodoxes. Ceci est en accord avec les préceptes et l’exemple des premières autorités de l’Église (voir Tolérance). À des fins de soutien mutuel, ils se réunissent et s’organisent dans toutes sortes de domaines, par exemple, les aumôneries de beaucoup de nations du monde libre, le mouvement des boy-scouts, le Conseil national des chrétiens et des juifs et les clubs locaux et internationaux de service s’occupant des questions sociales, éthiques et morales.

2. Du point de vue éducatif. L’Église patronne le plus vaste programme d’enseignement pour adultes du monde. Beaucoup de ces cours se rattachent à la Bible et certains se concentrent sur l’histoire et les institutions chrétiennes. Pour les étudiants en âge de lycée et d’université, qui dépassent maintenant le demi-million, l’Église dispense des cours semblables dans ses séminaires et ses instituts voisins des lycées et des grandes universités. Les instructeurs du Département d’Éducation de l’Église reçoivent des suppléments financiers pour visiter la Terre sainte, étudier les origines des trois grandes religions monothéistes, se familiariser avec le vocabulaire et les conceptions philosophiques des autres institutions chrétiennes et comprendre et reconnaître les points communs dans la vie des jeunes qu’ils instruisent. Les savants mormons de beaucoup de disciplines sont de plus en plus impliqués dans les programmes d’études religieuses d’organisations académiques et professionnelles.

L’Église a ouvert ses importantes installations audiovisuelles aux programmations représentatives de tout l’éventail des groupes chrétiens (voir Bonneville International Corporation ; Radio KSL). Elle a aussi été une participante importante aux émissions religieuses du VISN Religious Interfaith Cable Television Network, qui représente la plupart des grandes confessions des États-Unis.

Pour créer des échanges bilatéraux, la Chaire de Compréhension chrétienne Richard L. Evans a été créée à l’université Brigham Young. Financée et conseillée par divers groupes chrétiens (le premier à s’engager a été un presbytérien), cette Dotation patronne des colloques d’études religieuses, des conférences, des forums, des programmes d’échange et des professorats associés. Elle patronne aussi des réunions interconfessionnelles où des questions théologiques communes aussi bien que controversées sont présentées par les représentants de chaque tradition et où des ateliers aident à résoudre les tensions dans une atmosphère de bonne volonté.

Le Religious Studies Center à l’université Brigham Young publie des ouvrages éminents utilisant les savants de diverses confessions qui représentent des spécialisations interdisciplinaires et comparatives. Bien qu’il y ait toujours une littérature de dénigrement venant tant de la gauche que de la droite (voir Publications antimormones), les dirigeants de l’Église rappellent continuellement aux membres que quoi que l’on puisse dire de ceux qui se font une religion de l’antimormonisme, leur répondre sur le même ton n’est ni sage ni chrétien.

3. De manière pratique dans l’humanitaire chrétien. La manière de vivre des saints, que ce soit au niveau institutionnel ou individuel, n’a jamais été d’exiger des droits mais de les mériter, jamais de réclamer l’intégration et la bonne volonté mais de les manifester et de donner de l’énergie et du temps par-delà la rhétorique. Dans un discours important aux dirigeants régionaux de l’Église, l’ancien président Spencer W. Kimball a donné le ton :

« Nous invitons les membres à faire leur devoir civique et à assumer leurs responsabilités de citoyens dans la recherche des solutions aux problèmes qui assaillent nos villes et nos communautés.

« Avec notre vaste mission en ce qui concerne l’humanité, les membres de l’Église ne peuvent pas ignorer les nombreux problèmes pratiques qui réclament une solution si nous voulons que nos familles vivent dans un environnement qui favorise la spiritualité.

« Quand les solutions à ces problèmes pratiques nécessitent une action coopérative avec ceux qui ne sont pas de notre religion, les membres ne doivent pas être réticents à faire leur part en se joignant à ces efforts où ils peuvent apporter une contribution individuelle aux causes qui sont conformes aux principes de l’Église » [Kimball, Ensign 8, mai 1978, p. 100].

Les exemples de projets récents encouragés par l’Église qui collaborent avec différentes affiliations sont l’aide coopérative de secours d’urgence, le soutien pour les foyers pour sans abris dans beaucoup de villes et un lien avec le travail de l’Armée du salut. À BYU, des étudiants d’autres cultes sont souvent élus à des offices estudiantins et divers clubs de service luttent contre l’intolérance et l’esprit de clan. Dans le même esprit, l’Église a été parmi les premiers à octroyer de l’aide, avec d’autres groupes chrétiens, aux victimes de catastrophes naturelles dans des endroits tels que la Chine, le Salvador, le Nicaragua, Los Angeles, le Pérou, l’Arménie, le Japon, l’Iran, le Chili et la Grèce. Grâce à deux jeûnes spéciaux, l’Église a levé $11 millions pour les populations frappées de famine en Afrique et en Éthiopie et a utilisé les services catholiques comme système de livraison (voir Service humanitaire).

Parce qu’il y a tant de choses dans la société contemporaine qui sont dissonantes, centrifuges et facteurs de discorde, la compréhension et la réciprocité interconfessionnelles semblent indispensables. L’histoire des saints montre que ce qui semble être des affrontements politiques, sociaux et économiques insurmontables est souvent, à la base, religieux. Surmonter les divisions inutiles et guérir les blessures de la vie moderne, notamment la vie religieuse, n’est pas simplement la mission des saints des derniers jours mais celle de tous ceux qui prennent au sérieux le message et le ministère de Jésus-Christ. S’il n’y a pas chez certains un souci chrétien pour tous, il y a peu d’espoir pour qui que ce soit.

Bibliographie

Arrington, Leonard. "Historical Development of International Mormonism." Université d’Alberta, Religious Studies and Theology 7 (1) janvier. 1987.

Keller, Roger R. Reformed Christians and Mormon Christians : Let’s Talk. Ann Arbor, Mich., 1986.

Madsen, Truman G. "Are Christians Mormon ?" BYU Studies 15, automne 1974, p. 73-94.

(Article tiré de l'Encyclopédie du mormonisme (Macmillan Publishing Company, 1992), traduction : Marcel Kahne, source : www.idumea.org, avec autorisation)