L’Évangile
et la science à
propos de la création de la terre
F.
Kent Nielsen
Professeur
d'histoire des sciences
à
l'université Brigham Young
Un
déluge si catastrophique qu’on l'appela simplement le
déluge est l’une des histoires impressionnantes de la
Bible.
La
submersion totale de la terre par les eaux du temps de Noé a
été prise comme un jalon historique par les juifs et
les chrétiens pendant des milliers d’années ; des
traditions semblables apparaissent chez les Grecs, chez les
Mésopotamiens et chez certaines tribus indiennes d'Amérique.
Cependant cette histoire est considérée avec
scepticisme à l'heure actuelle dans notre monde laïque.
La plupart des textes géologiques actuels ignorent le déluge,
le ridiculisent ou s’en servent d’exemple de superstition
préscientifique. C'est pourquoi les saints des derniers
jours et d’autres chrétiens trouvent parfois que le
conflit apparent entre leur foi aux Écritures et leur
éducation est embarrassant.
Le
récit du déluge de Noé est une illustration
caractéristique des différences qui se trouvent entre
les renseignements fournis par les Écritures et les
enseignements laïcs modernes concernant l’histoire
du monde.
Quel
est le point de vue scientifique de l'origine de notre monde qui
prévaut tant à notre époque ? Comment
a-t-il été créé ? Où semblent
apparaître des difficultés pour quelqu’un qui
aime et qui croit les Écritures rapportant des événements
de cette origine du monde ? Afin de mieux orienter la discussion
et de nous permettre d'aider les autres et nos enfants, il peut
s’avérer utile d’examiner certains aspects du
développement de la pensée scientifique. Nous
considérerons aussi les autres connaissances qui sont à
notre disposition grâce à la révélation
moderne et au contexte de l’Évangile.
Histoire
de la science
Nos
commentaires commenceront par une définition de la science.
Beaucoup d’entre nous pensent qu’il s’agit d’une
liste de matières comme la chimie, la géologie, la
physique etc. Mais pour la plupart des hommes de science, c’est
avant tout une méthode de recherche de la vérité
et non pas les sujets étudiés à l’aide de
cette méthode.
La
plupart d’entre nous ont appris que cette méthode à
trois étapes : (1) Imaginer comment quelque chose peut
être ; (2) prédire ce que vous pourriez observer si
le postulat était vrai ; et (3) vérifier ce qui se
passe vraiment au moyen d’expériences ou d’autres
méthodes. Quand les prédictions à propos du
postulat sont en accord avec les preuves expérimentales, alors
nous avons une loi ou une théorie qui est bonne et qui est
considérée comme vraie : non pas vraie dans
l’absolu, mais comme une explication qui sera valable jusqu’à
ce que d’autres explications fassent leur apparition et ne
soient plus en conformité avec le postulat, ou jusqu’à
ce qu’une nouvelle théorie qui rend mieux compte du même
phénomène voie le jour.
Bien
que des changements mineurs surviennent constamment, une théorie
scientifique ne change pas ou n’est pas abandonnée très
souvent. Mais des changements radicaux ont lieu. C’est cette
méthode qui empêche la science de devenir un jeu de
réponses rigides et vieillies et qui en font une activité
en perpétuelle mutation. Chaque homme de science a dû
rêver de fournir de nouvelles données qui renverseront
une vieille théorie en place. Isaac Newton (1642-1727) et
Albert Einstein (1879-1955) sont respectés à juste
titre parce que c’est ce qu’ils ont fait. En considérant
l’univers d’une nouvelle manière, chacun nous a
donné une nouvelle théorie et un ensemble de lois sur
le déplacement et la gravitation.
Cependant,
pour beaucoup, la science en est arrivée à signifier,
non pas un mode de compréhension du fonctionnement réel
de la nature, mais une philosophie particulière sur le
fonctionnement que doit adopter la nature. Cette philosophie est
devenue une sorte de superstructure, et toutes les théories ou
les observations proposées qui ne cadrent pas avec la
philosophie en cours sont automatiquement mises à
l’écart. L’acceptation de la philosophie rigide,
connue depuis la fin du dix-huitième siècle sous le nom
de naturalisme, avait conduit beaucoup de monde à rejeter
l'histoire du déluge et d’autres événements
rapportés dans la Genèse.
D’où
est issu le naturalisme ? Il commença avec les Grecs,
mais nous pouvons le trouver au dix-septième siècle où
l'antique discussion sur les relations de Dieu avec l’ordre de
la nature prit un nouvel aspect. Dans la tradition culturelle
occidentale, la pensée scientifique et la religion se sont
toujours accordées à dire qu’il existe un ordre
dans la nature et que ce n’est pas le hasard qui préside
aux événements. Ainsi, science et religion se sont posé
certaines questions : Dieu est-il responsable de la création
de cet ordre ? Est-il responsable de le maintenir ? Est-ce
qu’il peut interférer à cet ordre en causant des
miracles, et le fait-il ?
La
croyance traditionnelle de notre culture occidentale fondée
sur la Bible fut toujours que l’ordre de la nature est
assujetti à Dieu. Mais au dix-septième siècle,
la philosophie mécaniste considéra la nature comme
une vaste et parfaite machine créée par Dieu mais
fonctionnant maintenant par elle-même. À partir de cette
philosophie, il était facile d’adopter l’étape
suivante au dix-neuvième siècle pour arriver à
la version actuelle du naturalisme scientifique, qui prétend
que les lois scientifiques existant indépendamment sont en
elles-mêmes les causes de cet ordre, et pas Dieu. Cette
philosophie se pose rarement la question de savoir pourquoi ce sont
ces lois particulières qui existent plutôt que
d’autres ; elle se contente de poser le principe que
c’est ainsi qu’il se trouve que l’univers est, a
toujours été et sera toujours. Ce point de vue laïc
prétend que Dieu n’a aucune relation directe dans la
nature. Dans cette perspective, s’il existe un Dieu, comme
l’homme, il existe et agit au sein de la nature. Cette
philosophie mécaniste prétend que les miracles
n’existent pas et ne peuvent pas exister, et que la nature
elle-même n’a pas d’intelligence, de volonté
ni d’objectif.
Le
naturalisme a eu une forte influence sur le développement
de l’astronomie, de la géologie et de la biologie. Le
marquis Pierre Simon de Laplace (1749-1827) fut une figure importante
dans le changement de philosophie de l’astronomie. Il
prétendit qu’il était inutile de recourir à
des explications de caractère surnaturel (Dieu) pour rendre
compte des origines de l’univers et à une explication
naturaliste (lois scientifiques) pour son fonctionnement. Il proposa
plutôt qu’une répartition fortuite de matière
dans des nuages mis en mouvement selon les lois de Newton sur la
gravitation et le mouvement, avec suffisamment de temps, produit
quelque chose comme le système solaire. Ainsi, proposa-t-il,
l’organisation apparente de la nature n’exigeait
plus de Dieu comme partie essentielle de l’explication
scientifique ; elle pouvait s’expliquer maintenant par le
mélange du hasard inconscient et dénué
d’objectif et de la nécessité. Le divorce entre
la science et la religion, jadis si étroitement liées,
était en cours d’accomplissement.
Nous
pouvons remonter le même cheminement en géologie et en
biologie. Vers les années 1820, les théories les plus
communément acceptées exigeaient encore Dieu en
leur sein. L’étude attentive des roches fossilifères
par George Cuvier (1769-1832) avait établi que la plupart des
fossiles représentaient des formes de vie maintenant en
extinction, que les formes fossiles trouvées dans une couche
ne se trouvaient généralement pas dans d’autres
couches et qu’aucun fossile n’existait dans les couches
les plus profondes. Cuvier en conclut que la terre était
passée par une série d’ères géologiques,
chacune caractérisée par des formes de vie
uniques. Mais qu’était-il arrivé aux formes les
plus anciennes et d’où venaient les plus récentes ?
Il prétendit que chaque ère devait s’être
terminée par une vaste catastrophe qui détruisait tout
ou la plupart des êtres vivants et qui était suivie
d’une nouvelle création. Cette suite de catastrophes et
de nouvelles créations réclamait bien sûr un
Créateur.
Le
rapport avec la Genèse était clair pour ceux qui
soutenaient ce point de vue. Le déluge était
précisément un cataclysme de ce genre (les
catastrophistes n’acceptaient cependant pas toute la
Genèse. Ils n’acceptaient pas l’idée d’une
« chute » après une vie sans mort ni
mortalité, par exemple, puisque les créatures qui
ne sont pas mortelles ne laissent pas de fossiles. Et la Genèse
ne parle que d’une seule création et pas d’une
série de créations).
Malgré
tout, le catastrophisme posa le fondement de la plupart des
réconciliations entre science et religion au dix-neuvième
siècle. Puis Charles Lyell (1797-1875), fondateur réel
de la géologie moderne, proposa une autre théorie
dans les années 1830 qui soutenait mieux le naturalisme.
Appuyant ses théories en partie sur les premiers écrits
de James Hutton et de John Plaufair, Lyell parla en faveur de
l’uniformisme, idée selon laquelle les changements
géologiques actuels sont la clé pour comprendre
toutes celles du passé : pas de catastrophes, pas de
créations, pas d’interventions divines. Le
processus géologique de cette théorie inclut la
sédimentation (formation de couches rocheuses
fossilifères au fond des mers profondes), l’émersion
(soulèvement des couches au-dessus de la mer), l’érosion
graduelle de ces couches et le retour de couches non érodées
sous le niveau de la mer où la sédimentation a
repris. Cette théorie prétend que des changements
brusques dans les couches rocheuses s’expliquent non par
des catastrophes, mais par de longues périodes de temps
où aucune autre roche ne s’est formée. Comme
l’astronomie de Laplace, la géologie de Lyell présentait
une théorie naturaliste qui ne requérait plus Dieu
comme élément de l’hypothèse.
Les
conséquences de tout cela pour le récit biblique
étaient évidentes. Le processus géologique
est si lent que ces explications demandent un temps énorme
(Thomas Chrowder Chamberlin, cité par Joe Burchfield, Lord
Kelvin and the Age of the Earth, New
York, Science History Publications, 1975, p. 11). Les
six mille ans de l’histoire terrestre dont parle la Bible ne
convenaient pas aux géologues uniformistes. Ainsi ils se
délestèrent de la création, ainsi que du déluge,
de la chute, des miracles, des ères enregistrées par
les patriarches et de tous les événements non uniformistes.
Il ne restait plus à Darwin et
à ses successeurs qu’à produire une théorie
naturaliste sur les origines des animaux et des humains, et tout le
récit de la Genèse fut alors considéré
comme un mythe et non pas comme de l’histoire. Et pour eux, si
Adam et la chute n’avaient pas existé, la résurrection
et la rédemption offertes par le Christ ne pouvaient être
considérées que comme aussi peu historiques puisque
ces événements n’étaient pas considérés
comme des choses naturalistes et uniformes, pas plus, à leur
avis, que les événements des derniers jours prédits
dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament
ou que les prophéties et la révélation,
puisqu’elles impliquent toutes l'intervention surnaturelle
de Dieu dans l’ordre naturel des modes d’éducation
de l’homme. Il en résulta que l’on mit tout à
fait de côté l’impact de Dieu dans la vie et les
affaires de la terre et de ses habitants.
Ces
conclusions sont très troublantes pour ceux qui croient en la
Bible dans les civilisations occidentales ; elles ont été
renforcées par le criticisme, une école du dix-neuvième
siècle d’étude biblique qui trouva des
explications naturalistes pour les Écritures, rejetant les
explications impliquant la révélation, les
prophéties ou les miracles. Et les théories
naturalistes pour les origines des sociétés et des
institutions humaines, y compris les religions elles-mêmes,
suivirent rapidement.
Le
naturalisme scientifique semble avoir balayé tout devant lui.
Et dans son sillage, la plupart des hommes de science et des
théologiens qui s’étaient longtemps fiés
à un soutien mutuel, furent terriblement troublés. Il
fallait trouver une place, pensaient-ils, pour la foi en Dieu qui
était passée si rapidement de la position d’élément
indispensable au monde scientifique à celle d’être
non seulement inutile, mais même gênant. Des théologies
et des points de vue scientifiques furent ainsi mis au point qui
considéraient encore Dieu comme le Créateur et
l’horloger de l’ordre naturel, et l’évolutionnisme
comme la manière dont Dieu opérait. Ces points de vue
pouvaient soutenir l’idée de Dieu partout où cela
ne faisait pas de différence, c’est-à-dire, tant
qu’il ne gênait pas le fonctionnement réel de
la nature.
Mais
ces arrangements laissaient un reste de gêne. Les générations
suivantes sentirent souvent que c’était plus honnête
de rejeter le point de vue de la Bible comme une survivance
anachronique issue d’un passé plus ignorant.
Le
message de Joseph Smith
C’est ainsi qu’au milieu
de ces tensions montantes et de ces différences non
conciliées, l’Évangile de Jésus-Christ fut
rétabli au dix-neuvième siècle. Sous
l’inspiration des vérités révélées
de nouveau par le prophète
Joseph Smith, les prophètes modernes renversèrent avec
puissance la question antique : puisque Dieu avait accompli des
miracles et appelé des prophètes, pourquoi se serait-il
arrêté ? Le témoignage de l’Église
de Jésus-Christ des saints des derniers jours, c’était
et c’est maintenant que Dieu appelle vraiment des
prophètes, qu'il donne vraiment des révélations
et qu’il accomplit des miracles en faveur de ceux qui croient
actuellement, tout comme jadis. C’est le message des prophètes
modernes qu’en résultat de la révélation
moderne et par le témoignage du Saint-Esprit, les réalités
des anciennes révélations peuvent se vérifier.
Les
révélations données par l’intermédiaire
des prophètes modernes confirment en réalité
les vérités de la Genèse et des autres
Écritures: il y a eut une création, une chute, un
déluge, et un sacrifice était nécessaire. Il a
été à nouveau révélé
que les prophètes qui enregistrèrent les anciennes
Écritures pouvaient voir au-delà de leur époque
et enregistrer les événements à venir.
L’Évangile rétabli enseigne que Dieu est
intimement associé à la nature en tant que son Créateur
et en tant que son « Horloger ». Et les
miracles sont la manifestation de son pouvoir sur l’ordre
naturel.
Le
prophète Joseph Smith a enseigné attentivement aux
anciens de Kirtland que « la foi est... le principe... de
puissance » par lequel « les mondes furent
organisés par la parole de Dieu » (Lectures on Faith, 1:13, 14). C’est par l’intermédiaire
de la foi que « toute la création visible »
fut non seulement organisée, mais c’est par elle qu’elle
continue « également sous sa forme organisée
et par laquelle les planètes roulent dans leur gloire »
(7:5). C’est pourquoi, « quiconque en a vu un, ou le
moindre d’entre eux [les royaumes], a vu Dieu se mouvant dans
sa majesté et son pouvoir », bien qu’il
puisse ne pas reconnaître comment l’ordre de l’univers
se maintient car « la lumière luit dans les
ténèbres, et les ténèbres ne la
comprennent pas » (D&A 88:47,49). C’est par ce
pouvoir que toutes choses « existent, c’est par lui
qu'elles sont soutenues, c’est par lui qu’elles sont
changées ou par lui qu’elles restent, agréables
selon la volonté de Dieu » (Lectures on Faith,
1:24).
En
d’autres termes, le point de vue enseigné par les
prophètes modernes montre que l'ordre de la nature n'est pas
simplement un don, comme les naturalistes scientifiques le
prétendent. Il explique plutôt que cet ordre existe en
raison de certaines lois que Dieu a établies et qu’il
soutient : « Il a donné une loi à
toutes choses, par laquelle elles se meuvent » (D&A
88:42). Sa puissance, ou la lumière du Christ, « sort
de la présence de Dieu pour remplir l’immensité
de l’espace » et elle « est la loi par
laquelle tout est gouverné » car « il
n’est point d’espace dans lequel il n’y »
ait pas de royaume et « tous les royaumes ont reçu
une loi » (D&A 88:12, 13, 36, 37). Les lois qui
maintiennent l’ordre naturel constituent « la
vérité », qui est « indépendante »
seulement « dans la sphère dans laquelle Dieu
l’a placée » (D&A 93:30). Ainsi, en tant
que saints des derniers jours, nous comprenons que la science peut
découvrir des vérités sur notre ordre
actuel. Autrement dit, en tant que saints des derniers jours, nous
reconnaissons qu’il existe des limites à la portée
de l’uniformité dans notre ordre mortel actuel de
la nature.
La
première limitation est que le même ordre ou jeu de lois
ne s'étend pas nécessairement à d’autres
« sphères ». Un monde sanctifié,
millénaire ou un monde céleste glorifié, ou un
monde paradisiaque avant la chute fonctionne évidemment
sous un ordre différent de nature. Son ordre, « parfaitement
naturel » dans son cadre ne semblerait « pas
naturel » pour notre monde mortel. Imaginez, par exemple,
la biologie d’un monde où il n’y aurait pas de
mort. Ou essayez de faire entrer la deuxième loi de
thermodynamique (qui dit que tous les processus énergétiques
de l’univers s’épuisent) dans un monde de
progression éternelle. En clair, Dieu nous a mis dans une
seule « sphère », mais il est possible
qu’il y ait n’importe quel autre genre de « sphères »
pour que nous apprenions à les connaître par la suite.
La seconde limitation que met
l’Évangile au concept d’uniformité est
que ce même Dieu qui « maintient notre monde dans
son orbite et qui soutient tous les mondes et toutes choses par son
pouvoir » peut accomplir des miracles, faire ce qui
nous paraît comme des exceptions temporaires à l'ordre
naturel tel que nous le comprenons si c’est sa volonté
de le faire (Enseignements du prophète Joseph Smith, p.
279). Ces miracles sont cependant peut-être le résultat
de lois supérieures pour notre « sphère »
et que nous ne comprenons pas. Ainsi, puisque Dieu a promis qu’il
exercera vraiment son pouvoir si nous le recherchons avec foi, il
nous encourage à rechercher son aide. Mormon reprit le peuple
de son temps parce qu’il pensait que les miracles avaient
cessé. Il écrivit : « Le Christ a dit :
Si vous avez foi en moi, vous aurez le pouvoir de faire tout ce qu’il
est expédient de faire pour moi. Car c’est par la foi
que se font les miracles… C’est pourquoi, si ces choses
ont cessé, malheur aux enfants des hommes, car c’est à
cause de l’incrédulité » (Moroni
7:33, 37). Son fils, Moroni, renforça le message en demandant
à ses futurs lecteurs : « Et maintenant, ô
vous tous, qui vous êtes imaginé un Dieu qui ne peut
faire de miracles, je vous demande : Est-ce que toutes les
choses dont je vous ai parlé se sont accomplies ? La fin
est-elle déjà venue ? Voici, je vous dis que
non ; et Dieu n’a pas cessé d’être un
Dieu de miracles » (Mormon 9:15).
Pour
les saints des derniers jours, l’image de Dieu en tant que
« grand horloger » mettant au point un ordre
naturel inaltérable, contredit la connaissance que l’on
a de lui en tant que Père plein d’amour qui veut que ses
enfants le recherchent avec prière et avec foi pour que
s’accomplissent, même par un miracle, leurs justes
désirs.
La troisième explication que
donne l’Évangile est un rappel que le temps changera
l’ordre naturel, même dans notre monde mortel actuel.
Quand la terre était « nouvelle », avant
la chute, elle était dans un état paradisiaque et « si
Adam n’avait pas transgressé… toutes les
choses qui ont été créées auraient dû…
demeurer toujours et ne pas avoir de fin » (2 Néphi
2:22). L’homme et les animaux mangeaient d’autres plantes
(voir Genèse 1:29,30). Adam et Ève n’auraient pas
eu d’enfants (voir 2 Néphi 2:23). Il semble qu’alors
la terre ne produisait pas de chardons ni de broussailles (voir
Genèse 3:18) pour contrarier l’homme. Il n’y a que
trois différences entre cet état de la terre et notre
état actuel. En raison de la chute, « jusqu’à
ce jour, la création entière soupire et souffre les
douleurs de l’enfantement », en attendant « avec
un ardent désir » d’être « libérée
de la servitude de la corruption » quand la rédemption
amènera la fin de son état actuel (Romains 8:22, 19,
21).
L’état
présent de la terre prendra fin quand le Christ viendra régner
en personne sur la terre et lui rendre sa gloire paradisiaque (voir
10e
Article de foi). Car « de même que Dieu fit le monde
en six jours et, le septième jour, termina son œuvre, la
sanctifia... de même, au commencement du septième
millénaire, le Seigneur Dieu sanctifiera la terre »
(D&A 77:12). Cette future sanctification de notre sphère
ne sera pas le résultat de notre ordre naturel actuel
continuant uniformément dans son cours. Au lieu de cela,
l’ordre changera beaucoup en raison de l’intervention
directe de son Créateur et Horloger. Toutes les choses
vivantes et même les éléments de la terre, « tout
deviendra neuf afin que ma connaissance et ma gloire demeurent sur
toute la terre » (D&A 101:24, 25).
Les prophètes, anciens et
modernes nous ont donné un aperçu de l’ampleur de
ces changements. Le mont des Oliviers « se fendra en
deux, la terre tremblera et chancellera » (D&A
45:48). La voix du Seigneur « renversera les montagnes, et
on ne retrouvera point les vallées. Il commandera au grand
abîme, et celui-ci sera repoussé dans les pays du nord,
et les îles deviendront une seule terre… et la terre
sera telle qu’elle était à l’époque
où elle n’était pas encore divisée. Et le
Seigneur, à savoir le Sauveur, se tiendra au milieu de son
peuple. » (D&A 133:22-25).
La
véritable paix viendra alors que « l’inimitié
de toute chair cessera de devant ma face » (D&A
101:26). La mort et le chagrin prendront fin tous les deux. Les
enfants vivront « comme l’âge d’un
arbre» et à la mort, chacun « sera changé
en un clin d’œil » (D&A 101:30, 31). La
mortalité continuera pendant mille ans sur la terre dans ces
conditions très changées et de nouveaux esprits
continueront à recevoir des corps de chair en naissant,
tandis que les parents justes auront la merveilleuse promesse que
« leurs enfants grandiront sans péché au
salut » (D&A 45:58).
Cependant
même les conditions du millénium sont sujettes à
changement selon le plan et la volonté de Dieu. À la
fin de la période de mille ans, la terre subira un changement
encore plus grand, « mourant » pour mettre
fin à son existence temporelle et étant « revivifiée »
pour devenir un monde céleste afin de demeurer pour toujours
dans les conditions de cette gloire par laquelle elle sera
vivifiée. Elle deviendra ainsi l’héritage des
justes qui ont aussi été vivifiés par une
plénitude de gloire céleste. Le Christ, ayant
réalisé le salut de cette terre et de ses
habitants, la présentera immaculée au Père.
Les
conditions du nouvel ordre naturel de la terre seront alors si
différentes que bien que certains prophètes aient
essayé de le décrire, il nous est simplement dit que
« l’œil n’a pas vu, l’oreille n’a
pas entendu et n’est pas monté au cœur de l’homme
tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment »
(1 Corinthiens 2:9, traduction littérale de la version du
roi Jacques).
En
résumé, les conditions ultimes de l’uniformité
que nous observons dans la nature dans notre sphère actuelle
sont sévèrement limitées. La durée qui
s’écoule de la chute jusqu’à la fin du
millénium doit être, dit-on, de sept mille ans (voir D&A
77:6). Et bien que sept mille ans soient longs en regard d’une
vie humaine, dans l’optique de l’éternité
(et aussi dans l’optique des théories modernes de
l’astronomie et de la géologie), c’est
extrêmement court. En sept mille ans, aucune étoile
ni aucune planète ni aucune espèce biologique ne
change assez, d’après les principes naturalistes, pour
avoir un sens.
Il est donc utile de se rappeler,
lorsqu’on médite le million d’années
que les sécularistes proposent pour expliquer la formation de
la terre, que tous les processus actuels de datation géologique
sont fondés sur le postulat que l’ordre actuel de la
nature nous a précédé uniformément et
continuera uniformément après nous. Cette vision
séculariste prétend aussi que Dieu, s’il existe,
n’est jamais intervenu et ne le fera jamais. Cependant, les
révélations qu’ont les saints des derniers jours
à propos de la terre et des relations de Dieu avec elle ne
nous permettent simplement pas de poser de tels postulats. En tant
que saints des derniers jours, nous ne rejetons pas l’histoire
de la Genèse, comme l’ont fait tant
de sécularistes, et nous ne considérons pas les
efforts honnêtes des hommes de science pour apprendre la vérité
comme l’œuvre de l’adversaire (bien que
l’adversaire utilise, bien sûr, ces visions pour arriver
à ses fins). Au lieu de cela, nous ferions mieux d’attendre
patiemment, ayant foi dans les Écritures, que le Seigneur
accomplisse sa promesse de révéler, au début du
millénium, « ce qui est passé… les
choses de la terre par lesquelles elle fut faite » qui,
nous est-il assuré, feront encore partie de « ce
qui est caché et que nul ne connaissait » (D&A
101:32, 33). Quand on connaîtra la vérité,
tous les conflits qui proviennent de vérités partielles
disparaîtront. En attendant, les hommes de science (y
compris beaucoup de saints des derniers jours) peuvent continuer à
nous apporter des connaissances utiles sur notre sphère
mortelle actuelle ou même des idées sur la manière
dont les choses auraient pu survenir dans le passé si les
processus considérés étaient réellement
uniformes sur toute la durée concernée.
Il
vaut également la peine de remarquer que malgré
les limites mentionnées que la révélation
moderne fixe à l’uniformité, il existe
encore une grande uniformité supérieure impliquée
dans tout ce que les révélations nous ont dit à
propos de notre terre et des mondes similaires. Il semble qu’il
y ait un ordre divin par lequel les mondes et leurs habitants
progressent.
Comme l’a enseigné
Brigham Young, « il n’y a jamais eu un temps où
il n’existait aucun monde comme celui-ci et... il n’y
aura jamais de temps où il n’existera aucun monde
organisé et préparé pour que des êtres
intelligents l’habitent » (Journal of Discourses,
8:81). « Et ils sont continuellement créés
et passent par la même expérience que celle que nous
traversons... et chaque terre et les peuples qui l’habitent, à
leur tour et en leur temps, reçoivent tout ce que nous
recevons et traversent toutes les épreuves que nous
traversons » (Journal of Discourses, 14:71-72).
C’est
peut-être ainsi que le problème de l’uniformité
telle que les hommes de science la connaissent ne vient que du fait
de généraliser trop tôt, à partir d’un
échantillonnage trop réduit. Si, au lieu de prendre en
compte une période de quelques centaines d’années,
la période de base était de suffisamment de millénaires
pour inclure tout le cycle d’un monde comme le nôtre, de
la création à la glorification, laissant la place aux
manifestations de la puissance de Dieu pour apporter les
changements tout au long de cette période, alors le principe
d’uniformité pourrait être considéré
comme parfaitement sain, au moins dans la mesure où cela
nous apparaît à partir des révélations
modernes.
Dans
cette vision élargie d’une uniformité
céleste, le déluge universel du temps de Noé, si
gênant pour une vision séculière restreinte,
cadre facilement. C’est le baptême de la terre. Brigham
Young a montré que la terre « respecte les lois de
sa création, a été baptisée d’eau,
sera baptisée de feu et du Saint-Esprit et bientôt
préparée pour que les fidèles y habitent »
(Journal of Discourses, 8:83).
La
loi pour un monde comme le nôtre est en parallèle étroit
avec la loi pour ses habitants. Comme chacun d’entre nous, la
terre a existé un temps en présence de Dieu dans un
état prémortel, non corrompu. Comme chacun d’entre
nous, elle est entrée dans un état déchu et
mortel. Comme nous, elle doit être sanctifiée en
renaissant de nouveau, d’abord d’eau puis d’Esprit.
La terre a été purifiée par l’eau du
baptême, et sa purification par le feu associée aux
derniers jours permettra au Saint-Esprit de demeurer dans la terre
pendant le millénium quand la terre, pas encore glorifiée,
sera sanctifiée. Pour la terre, comme pour nous, ce n’est
que par la mort que peut s’accomplir l’œuvre du
salut. Cette mort l’établira sur des principes
célestes afin qu’elle puisse demeurer à jamais
dans cette gloire.
Comme
l’a exprimé Orson Pratt : « Qui,
regardant la terre monter dans l’échelle de l’univers,
ne souhaite pas conserver la même allure ?... Ô
homme, souviens-toi de la destinée et de la gloire futures de
la terre et préserve ton héritage éternel sur la
terre afin que quand elle sera glorieuse, tu sois glorieux toi
aussi » (Journal of Discourses, 1:333-34).
Source :
L'Étoile,
novembre 1983,
p. 49-61