Jérusalem
et les saints des derniers jours

David Galbraith, Kelly Ogden et Andrew Skinner




1904 : Missionnaires de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours à Jérusalem




La Jérusalem ottomane et l'Église
Jérusalem, les Juifs et l'Église
Jérusalem, les musulmans et l'Église




1. La Jérusalem ottomane et l'Église

Restauration et Rédemption

En 1831, une puissante rébellion ébranle l’Empire ottoman, dirigée par le brillant vice-roi d’Égypte, Muhammad Ali. Il déplace sa puissante armée en Syrie-Palestine après avoir été méprisé par le gouvernement d’Istanbul. Pendant neuf ans (1831-1840), la Palestine est gouvernée par le beau-fils d'Ali, Ibrahim Pacha, et la fortune de Jérusalem s'améliore considérablement. L'agriculture fiscale est abolie, un système administratif centralisé supervise les améliorations matérielles de la ville et les chrétiens comme les juifs bénéficient de plus de liberté. Les chrétiens sont autorisés à se présenter aux élections au conseil municipal de Jérusalem. Les Juifs peuvent prier au Mur Occidental sans autorisation gouvernementale et réparer leurs synagogues, en particulier les quatre synagogues séfarades construites dans le quartier juif et connues collectivement sous le nom de synagogue Jochanan ben Zakkai (voir Bahat, Carta's Historical Atlas of Jerusalem, p. 66). Pour la première fois depuis des siècles, les droits à la vie et à la propriété sont garantis à tous les habitants de la région. (Idinopulos, Jerusalem Blessed, Jerusalem Cursed, p. 267-268)

Ces développements sont observé par trois groupes de personnes avec ressentiment, peur ou appréhension. Les musulmans sont furieux que les chrétiens soient mis au même niveau qu'eux. Le gouvernement ottoman d'Istanbul craint d'être renversé par Muhammad Ali. Et les puissances européennes craignent que si les Ottomans sont remplacés, le bouleversement de l'équilibre des pouvoirs qui en résulterait aurait des conséquences désastreuses sur la stabilité mondiale. En 1840, une coalition dirigé par la Grande-Bretagne force les dirigeants Égyptiens à se retirer de la région, mais c'est une Palestine et une Jérusalem très différentes que les Égyptiens quittent par rapport à celles qu'ils ont conquises en 1831. La prospérité et la sécurité économiques, l'immigration juive, l'activité missionnaire chrétienne, les voyages, les pèlerinages, le tourisme et l'égalité politique sont tous en augmentation. Le gouvernement ottoman est contraint de jeter un nouveau regard sur un pays ancien et longtemps négligé, en particulier sur sa ville la plus sainte, Jérusalem. (voir Idinopulos, Jerusalem Blessed, Jerusalem Cursed, p. 271)

Ce n'est pas une simple coïncidence si, au moment même où Jérusalem est transformée de l'intérieur, le Seigneur entreprend de la transformer de l'extérieur. Après des siècles de déclin spirituel, sa véritable Église et la plénitude de la Prêrise, qui comprend les clés du rassemblement d'Israël, ont été rétablies par l'intermédiaire de Joseph Smith, le prophète. L'année même où Muhammad Ali et son beau-fils placent la Palestine sous leur emprise et commencent à restaurer Jérusalem par le pouvoir politique, Dieu commence à enseigner et à réaliser la restauration de Jérusalem par son pouvoir divin. En 1831, le Seigneur, s'exprimant par l'intermédiaire de Joseph Smith, le prophète, exhorte : « Que ceux qui sont parmi les Gentils fuient en Sion. Et que ceux qui sont de Juda s'enfuient à Jérusalem, à la montagne de la maison du Seigneur » (D&A 133:12-13). Non seulement les réformes de Muhammad Ali rendent possible le retour de Juda à Jérusalem, mais Jérusalem commence alors à être sous son contrôle.

L'importance de Jérusalem comme point de départ du rassemblement d'Israël est présente à l'esprit de Joseph Smith dès l'organisation de l'Église en 1830, juste après qu'il a pleinement découvert cette doctrine en traduisant le Livre de Mormon. Lorsqu'Orson Hyde, vingt-six ans, est confirmé membre de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours par le prophète en 1831, il reçoit une bénédiction qui dit : « Au temps voulu, tu iras à Jérusalem, le pays de tes pères, et seras la sentinelle de la maison d'Israël ; et par tes mains le Très-Haut fera un grand ouvrage qui préparera le chemin et facilitera grandement le rassemblement de ce peuple. » (Barrett, Joseph Smith and the Restoration, p. 469)

Quelques années plus tard, à Kirtland, Ohio, Joseph Smith souligne l'importance que l'Église attache à la doctrine du rassemblement d'Israël sur les terres de son héritage, à commencer par Jérusalem. Il écrit en 1836 : « Un des points les plus importants de la foi de l’Église des saints des derniers jours… est le rassemblement d’Israël… ce beau moment où Jacob montera à la Maison du Seigneur pour l’adorer en esprit et en vérité, pour vivre dans la sainteté, lorsque… on dira… : l’Éternel est vivant… lui qui a fait monter les enfants d’Israël du pays du septentrion et de tous les pays où il les avait chassés. Ce jour-là est d’importance capitale pour tous les hommes. » (Smith, History of the Church, volume 2, p. 357) Plus tard la même année, le 27 mars, lors de la consécration du temple de Kirtland, le prophète inclut dans sa prière de consécration une supplication « afin que Jérusalem  commence dès cette heure à être rachetée » (D&A 109:62).

Selon Joseph Smith, ce qu’il dit dans cette prière de consécration lui a été donné pour la première fois par révélation (voir la note générale de D&A 109). En fait, la requête de Joseph commence à se réaliser très rapidement. Une semaine plus tard, le 3 avril 1836, le Seigneur, avec l'ancien prophète Moïse, apparaît à Joseph Smith et à Oliver Cowdery et remet « les clefs pour rassembler Israël des quatre coins de la terre » (D&A 110:11). Et en 1836, la population juive de Jérusalem commence à augmenter de manière significative, de sorte qu'en 1837, les Juifs deviennent le groupe ethnique le plus important de la Ville sainte pour la première fois depuis dix-huit siècles. Spencer J. Condie, sociologue saint des derniers jours, a montré qu’un certain nombre d’événements intéressants ont convergé pour provoquer cela. (Condie, Pivotal Year. Sa thèse est confirmée par Tal, Whose Jerusalem?, p. 94)

En 1836, alors que Jérusalem est sous le contrôle d'Ibrahim Pacha, les biens du quartier juif sont finalement rachetés des créanciers. Une fois que cette partie de la ville est financièrement en sécurité, sa population augmente plus rapidement. Également en 1836, le rabbin Abraham Zoref se rend en Égypte pour rencontrer le vice-roi Muhammad Ali et demande l'autorisation de construire une autre synagogue dans la Ville sainte. À titre d'exception à la politique, une autorisation est accordée. En 1837, un tremblement de terre en Galilée pousse de nombreux Juifs à fuir vers Jérusalem. « Bien qu'il y ait eu une croissance absolue bien plus importante dans les décennies qui ont suivi 1840, la croissance de la population juive entre 1835 et 1840 représente le plus grand taux de croissance proportionnelle [à Jérusalem] au cours d'une période quinquennale de l'histoire moderne » (Condie, Pivotal Year). II semble qu'en plus de Joseph Smith, Muhammad Ali et Ibrahim Pacha aient également été les partenaires de Dieu pour contribuer à l'accomplissement de la prophétie. Leur gouvernance efficace ainsi que leur bienveillance doivent être prises en considération.

Orson Hyde et la restauration de Jérusalem

En avril 1840, la bénédiction et la prophétie prononcées sur Orson Hyde neuf ans plus tôt à propos d'un pèlerinage à Jérusalem s'accomplit quand Orson, maintenant membre du Collège des douze apôtres, quitte sa famille et ses amis à Nauvoo, dans l'Illinois, pour une « mission tout à fait particulière et extraordinaire » à Jérusalem (extrait de l'introduction de Parley P. Pratt à Hyde, Voice from Jerusalem, p. 2). Au cours de la conférence de l'Église d'avril 1840 à Nauvoo, frère Hyde est chargé de se rendre à Jérusalem et de consacrer la terre de Palestine au retour de Juda et de la maison d'Israël. Des lettres de créance lui sont remises précisant sa mission :

« Qu'il soit connu que nous, les autorités constituées de l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, réunis en conférence à Nauvoo, dans le comté de Hancock, dans l'État de l'Illinois, le sixième jour du mois d'avril de l'année mille huit cent quarante de notre Seigneur, considérant un événement important à venir, un événement impliquant l'intérêt et le sort des nations païennes à travers le monde – d'après les signes des temps et les déclarations contenues dans les oracles de Dieu, nous sommes obligés d'en arriver à cette conclusion. Les nations juives ont été dispersées parmi les Gentils pendant une longue période ; et à notre avis, le moment du début de leur retour en Terre sainte est déjà arrivé.... [Nous] avons, par le conseil du Saint-Esprit, nommé Elder Orson Hyde, ... pour être notre agent et représentant. » (Smith, History of the Church, volume 4, p. 112-113)

En avril 1840 Orson Hyde n'est pas surpris par sa nouvelle mission, car au début du mois de mars de la même année, alors qu'il pensait à ses futurs travaux dans le royaume, une « vision du Seigneur, comme des nuages ​​de lumière, apparut à [sa] vue », et il vit les détails de sa mission en Terre sainte (Smith, History of the Church, volume 4, p. 375). Il dit :

« Les villes de Londres, Amsterdam, Constantinople et Jérusalem se sont toutes présentées successivement devant moi, et l'Esprit m'a dit : « Voici plusieurs des enfants de Abraham que je rassemblerai dans le pays que j'ai donné à leurs pères ; et voici aussi le champ de tes travaux… Va dans les villes qui t'ont été montrées et déclare ces paroles à Juda, et dis : Sonnez de la trompette dans le pays ; criez, rassemblez-vous, et dites : rassemblez-vous, et entrons dans les villes défendues. Mettez-vous en route pour Sion – retirez-vous, ne restez pas, car je ferai venir du nord le mal et une grande destruction. Le lion est sorti de son fourré, et le destructeur des païens est en route, il est sorti de chez lui pour rendre votre pays désolé, et vos villes seront dévastées, sans habitant. Parle agréablement à Jérusalem et crie-lui que son combat est accompli, que son iniquité est pardonnée, car elle a reçu doublement de la main du Seigneur pour tous ses péchés. Que ta voix d'avertissement se fasse entendre parmi les païens pendant ton passage ; et sollicite-les en mon nom pour obtenir aide et assistance. Pour toi, peu importe que ce soit peu ou beaucoup ; mais il m'appartient de témoigner de la faveur à ceux qui te témoignent de la faveur. » (Smith, History of the Church, volume 4, p. 376)

Relevons plusieurs points significatifs. Dans sa vision, il est demandé à frère Hyde d'obtenir l'aide des Gentils pour l'aider dans sa mission au profit de Jérusalem, c'est-à-dire qu'il doit rechercher un soutien matériel des non-juifs pour son voyage visant à inaugurer le retour de Juda dans leur demeure ancestrale. Cela rappelle immédiatement la promesse de l’aide des Gentils lors du rassemblement d’Israël, comme enregistré dans le Livre de Mormon (voir 2 Néphi 10:8-10).

Orson Hyde ne se lance dans un pèlerinage personnel en Terre sainte pour revenir sur les traces de Jésus, pour rechercher un épanouissement personnel ou pour « se retrouver », bien que son odyssée soit devenue une expérience extrêmement personnelle. Orson Hyde est plutôt envoyé comme avocat officiel du Seigneur pour la postérité d'Abraham. Il exerce son ministère sous la direction de son prophète-dirigeant, sachant que son voyage est soutenu par l'autorité divine. Dans ses écrits et ses discours il reviendra à maintes reprises sur son mandat ; sans la sanction divine, son voyage à Jérusalem aurait été vide de sens (Smith, History of the Church, volume 4, p. 372-379).

Son raisonnement est très différent de celui des autres pèlerins, colons, voyageurs, missionnaires et érudits américains et européens du XIXe siècle qui se rendent à Jérusalem. Par exemple, l'érudit et explorateur américain Edward Robinson s'est rendu en Terre sainte pour découvrir la vérité sur le passé d'Israël et corriger les erreurs de lecture des Écritures. Philip Schaff, éminent théologien germano-américain et historien chrétien, s'est rendu en Terre sainte pour chercher du réconfort dans une crise personnelle. D’autres sont allés chercher l’illumination spirituelle ou simplement marcher sur les pas de Jésus. L’éminent millénariste Horatius Bonar a parlé du pouvoir magnétique que possède la Terre sainte. William Jowett, Pline Fisk, Jonas King et d’autres missionnaires chrétiens se sont rendus en Palestine croyant en la restauration d’une Terre sainte juive, mais leur programme incluait le prosélytisme envers les Juifs, qui sont ensuite entrés dans le nouvel Israël par le baptême chrétien (voir le résumé dans Epperson, Mormons and Jewish, p. 158-163)


Orson Hyde est envoyé à Jérusalem avec un message de paix, de pardon et d'inquiétude sans insister sur la nécessité immédiate pour les juifs et les musulmans de se convertir au christianisme. C’est certainement étonnant, sinon unique, parmi les expériences religieuses chrétiennes en Terre sainte du début du XIXe siècle. Le message qu'il apporte du Seigneur à Israël, en particulier aux Juifs, est de se rassembler pour échapper à la destruction des Gentils : « Rassemblez-vous… Retirez-vous [dans vos villes défendues]… ne restez pas… Le lion est sorti de son fourré, et le destructeur des païens est en route ; il est sorti de son lieu pour rendre votre pays désolé, et vos villes seront dévastées, sans habitant. » Pourtant, au même moment où doit avertir Juda, il est demandé à frère Hyde de la réconforter : « Parle agréablement à Jérusalem et crie-lui… que son iniquité est pardonnée. » (Hyde, Voice from Jerusalem, p. 2-3)

La destruction qui sera décidée par les Gentils pourrait-elle inclure les horreurs vécues par les Juifs au XXe siècle ? Orson Hyde, envoyé à Jérusalem avec les clés du rassemblement, de la restauration et de la rédemption, aurait-il pu dire que les horreurs et les luttes à venir pourraient être évitées si les Juifs tenaient compte de la voix d’avertissement prophétique et commençaient immédiatement à se rassembler à Jérusalem ? La dévastation et les atrocités des décennies suivantes auraient-elles pu être évitées si Israël avait immédiatement appliqué la voix prophétique ? Étant donné que le Seigneur a toujours averti ses enfants d’une destruction imminente (voir 2 Néphi 25:9), une telle hypothèse n'est pas improbable.

John E. Page était l'apôtre chargé d'accompagner Orson Hyde lors de sa mission à Jérusalem, mais il rentrera chez lui avant même de quitter les États-Unis, malgré les encouragements de Joseph Smith, le prophète, qui leur dit à tous les deux à propos de leur entreprise :

« C'est une mission grande et importante... Vous venez tout juste de commencer à en réaliser la grandeur, l'étendue et la gloire. S'il y a quelque chose de propre à intéresser l'esprit des saints, à éveiller en eux les sensibilités les plus fines et à les inciter à l'entreprise et à l'effort, ce sont sûrement les grandes et précieuses promesses faites par notre Père céleste aux enfants d'Abraham ; et ceux qui sont engagés dans la recherche des exclus d'Israël et des dispersés de Juda ne peuvent manquer de jouir de l'Esprit du Seigneur et de recevoir sur eux les plus belles bénédictions du ciel sous forme d'effusions abondantes. » (Smith, Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 130 de l'édition française de 1981)

Hyde part pour Liverpool ; Page reste sur place même s'il est financièrement le mieux loti des deux. Un autre apôtre de l'Église, George A. Smith, tente bien de persuader Page de ne pas laisser Hyde se rendre seul à Jérusalem, mais Page rejette la proposition (Smith, History of the Church, volume 4, p. 372). Un jeune missionnaire nommé George J. Adams accompagne Hyde en Angleterre où il devient un fervent partisan du rassemblement des Juifs et de la chute de l'ordre politique contemporain. Après un certain temps, Adams retourne aux États-Unis. Il quittera l'Église et deviendra le dirigeant de l'Église du Messie et de l'Association d'émigration palestinienne, dans l'espoir de se rendre en Terre sainte pour être témoin de première main des événements imminents et glorieux du retour du Christ. En 1866, Adams escorte un groupe en Palestine, mais après les avoir installés à Jaffa, il s'enfuit avec leur argent et les laisse se débrouiller seuls. (Holmes, Forerunners, 27-36)

Frère Hyde recherche et reçoit l'aide de bienfaiteurs non-juifs, tout comme sa vision de mars 1841 l'a prévu. À Philadelphie (Angleterre) il s'adresse à un groupe de personnes et parle de la situation financière difficile dans laquelle il se trouve et de la nature de la mission pour laquelle il est envoyé. Alors qu'il lui serre la main à la fin de son discours, un étranger lui glisse une bourse pleine d'argent, avec une seule demande : que frère Hyde se souvienne de lui dans la prière qu'il fera lorsqu'il se tiendra sur le mont des Oliviers (Barrett, Joseph Smith and the Restoration, p. 471). C'est ce que l'apôtre fera ; dans sa prière de consécration, il dira : « Bénis l'étranger de Philadelphie… que les bénédictions viennent sur lui d'une façon inattendue, et que son panier soit rempli et que son entrepôt regorge d'abondance. » En plus des richesses terrestres, frère Hyde demandera au Seigneur de bénir l’étranger en lui accordant aussi les richesses de l’éternité. (Smith, History of the Church, volume 4, p. 458)

Le voyage d'Orson Hyde de Francfort à Jérusalem est ponctué de nombreuses épreuves et souffrances. Il est exposé au danger, à la faim et à la maladie. Alors qu'il se trouve à Beyrouth, une bataille a lieu à proximité de la ville et environ huit cents personnes sont tuées. Les ministres et missionnaires américains sont informés par les responsables ottomans qu'ils ne bénéficient d'aucune protection et qu'ils doivent quitter le pays. Dans une lettre adressée à Parley P. Pratt, frère Hyde conclut ainsi : « Vous aurez de nouveau de mes nouvelles à la première occasion, si les Arabes ne me tuent pas. » Pendant des jours, il se nourrit exclusivement d’escargots, n'ayant rien d’autre à manger. (voir dans Barrett, Joseph Smith and the Restoration, p. 472)

Alors qu'il se rend en bateau de Beyrouth à Jaffa, vers 1 heure du matin, frère Hyde et d'autres voient une épée brillante avec une belle poignée gravée dans le ciel, saisie par un bras et une main tendus. Cette vue fait dresser les cheveux sur la tête d'Orson et sa chair picote ; les Arabes à bord tombent sur le pont en criant haut et fort : « Allah ! Allah ! Allah ! ». Il prend cela pour l'un des signes qui lui ont été promis. (Hyde, Sketch, p. 24)

Hyde débarque à Jaffa, voyage par voie terrestre jusqu'à Jérusalem et entre dans Jérusalem par la porte de Jaffa, à l'ouest, comme le font la plupart des pèlerins au début du XIXe siècle (Hyde, Voice from Jerusalem, p. 7). Une fois dans la , il visite les sites à l'intérieur et autour de la ville, et ses méditations sur les scènes de l'histoire de la ville provoquent une telle montée d'émotions profondes qu'elles « ne se passèrent que dans une pluie abondante de larmes. » À Jérusalem il loge au « Couvent latin », probablement le couvent franciscain de Saint-Pierre, pour vivre au plus près de l'existence du Sauveur. (Epperson, Mormons and Jews, p. 169)

Un an et six mois après avoir quitté Nauvoo, un dimanche matin, le 24 octobre 1841, avant l'aube, Orson Hyde quitte la ville de Jérusalem à pied vers l'est, traverse la vallée du Cédron et gravit le mont des Oliviers. Dans le silence solennel de l'heure matinale, il s'assoit et écrit sa prière de consécration. Puis il la prononce à haute voix. Frère Hyde demande au Seigneur de remplacer la stérilité du pays en laissant des sources d'eau vive irriguer le sol assoiffé. Il prie pour le retour des Juifs et le soutien des rois et des reines pour les aider (encore une allusion aux enseignements de l'Ancien Testament et du Livre de Mormon). Enfin, l'apôtre rappelle au Seigneur qu'il a rempli la mission qui lui a été assignée et il attribue honneur et gloire pour toujours à Dieu et à l'Agneau (pour le texte complet, voir Smith, History of the Church, volume 4, p. 456-59). Puis il forme un monument en entassant des pierres, en témoignage de l'acte accompli ce jour-là.

Alors qu'il rentre en Angleterre, Orson Hyde écrit au rédacteur en chef du journal britannique de l'Église, Millennial Star, décrivant les détails de son voyage et prédisant le rôle futur de l'Angleterre pour aider à obtenir les résultats pour lesquels il a travaillé et prié pendant de nombreux mois. Ses lettres, ainsi que d'autres réflexions, seront publiées par l'Église d'Angleterre dans une brochure intitulée A Voice From Jerusalem. Il s'agit d'un récit des voyages et du ministère d'Orson Hyde.

L'accomplissement des prédictions d'Orson Hyde

L'engagement officiel britannique à Jérusalem a déjà commencé en 1838 avec l'établissement d'un consulat là-bas. D'autres nations emboîtent le pas : la France, la Prusse et la Sardaigne-Piémont établissent des consulats en 1843, l'Autriche en 1852, l'Espagne en 1854, les États-Unis et la Russie en 1858 et le Mexique en 1865. En fait, le premier bâtiment construit hors les murs de la vieille ville est la résidence d'été du consul britannique James Finn, au début des années 1850. Officieusement, le consulat britannique commence bientôt à jouer le rôle qu'on leur a depuis longtemps prédit, celui de « nourriciers » et de « nourrices » (Ésaïe 49:23 ; 2 Néphi 10:8-9). Étant exilés d'autres pays, les immigrants juifs détiennent généralement des passeports valables un an seulement ; après un an passé en Palestine, ils perdent la citoyenneté de leur pays d'origine et l'Empire ottoman refuse de leur accorder une nouvelle citoyenneté en Palestine. En 1839, le ministre britannique des Affaires étrangères Palmerston ordonne au consulat de Jérusalem « de protéger les Juifs en général » et de les servir en tant que « leur avocat ». (Blumberg, Zion Before Zionism, p. 113)

L'interaction engagée de la Grande-Bretagne en faveur des Juifs culmine le 2 novembre 1917 avec la publication de la Déclaration Balfour. Elle déclare que « le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un foyer national pour le peuple juif » (dans Regan, Israel and the Arabs, p. 11). Malheureusement, cette déclaration crée des problèmes car, un an auparavant, les dirigeants arabes ont eu l’impression qu’ils seraient récompensés par la direction d’une nation arabe indépendante en échange de leur aide à l’effort de guerre britannique. (Idinopulos, Jerusalem Blessed, Jerusalem Cursed, p. 273)

Après Orson Hyde

Après le retour d’Orson Hyde en Amérique, l’intérêt pour le rassemblement d’Israël, en particulier celui des Juifs, dans leur patrie se poursuit parmi les dirigeants de l’Église. En 1845, ce n’est plus seulement un principe de l'Église ; c'est un commandement pour les Juifs du monde entier et un avertissement pour les dirigeants des nations. En 1845, le Collège des douze apôtres publie une déclaration adressée « à tous les rois du monde » : « Nous témoignons en outre qu'il est ordonné aux Juifs de toutes les nations, au nom du Messie, de se préparer à retourner à Jérusalem en Palestine ; et de reconstruire cette ville et le temple au Seigneur  ; Et aussi d'organiser et d'établir leur propre gouvernement politique, avec leurs propres dirigeants, juges et gouverneurs. Et qu'ils sachent que nous détenons désormais les clés de la prêtrise et du royaume qui leur sera bientôt restitué. » (Clark, Messages of the First Presidency, volume 1, p. 254)

La suite de cette déclaration audacieuse continue à décrire, dans son anticipation formidable, les desseins de Dieu pour trois groupes de personnes : les Gentils, le reste d'Israël en Amérique, et les Juifs en Palestine, en particulier à Jérusalem :

« Une œuvre grande, glorieuse et puissante reste à accomplir pour répandre la vérité et le royaume parmi les Gentils, pour rétablir, organiser, instruire et établir les Juifs, pour rassembler, instruire, soulager, civiliser, éduquer et administrer le salut aux descendants d'Israël sur ce continent [l'Amérique, ndlr], pour la construction de Jérusalem en Palestine afin que toute l'Église des saints, tant les Gentils, les Juifs et Israël, puisse être préparée comme une épouse pour la venue du Seigneur. » (Clark, Messages of the First Presidency, volume1, p. 254)

Entre 1845 et 1872, les dirigeants de l'Église concentrent leur énergie sur la consolidation de la position de « l'Israël américain », c'est-à-dire sur le renforcement de l'Église après la mort de Joseph Smith et le grand voyage vers l'Utah. Néanmoins, ils expriment un profond intérêt à voir s'accomplir la volonté du Grand Elohim concernant le rassemblement des Juifs à Jérusalem. De nombreux Juifs émigrent vers la Ville sainte au cours de cette période. Cette évolution est observée avec ressentiment par les musulmans de Jérusalem. Leur consolation est que même s'ils sont en infériorité numérique, les notables musulmans dominent toujours le conseil municipal, qui n'a qu'un pouvoir symbolique de représentation des communautés juive et chrétienne. (Idinopulos, Jerusalem Blessed, Jerusalem Cursed, p. 270)

En 1860, le nombre de nouveaux arrivants à Jérusalem est tel que la ville doit s’étendre hors de ses murs. L'activité de construction s'intensifie considérablement à partir du début des années 1860 jusqu'au déclenchement de la Première Guerre mondiale et change radicalement l'apparence de la ville. Le premier quartier résidentiel construit hors des murs de la ville en 1860 est Mishkenot Sha'ananim, également appelé Yemin Moshe. Il est construit sur un terrain acheté par Moses Montefiore. En son centre se trouve un moulin à vent, destiné à assurer la subsistance des habitants. Il est encore visible aujourd'hui à l'ouest de la vieille ville et face au quartier arménien. Ce nouveau quartier résidentiel est un deuxième centre de la vie juive dans la « Nouvelle Ville » de Jérusalem. (Bahat, Illustrated Atlas of Jerusalem, p. 122-23)

Alors que l'Esprit du Seigneur agit sur la branche d'Israël de la postérité d'Abraham, la branche d'Ismaël est également touchée. La communauté musulmane de Jérusalem triple, passant d'environ quatre mille au début du XIXe siècle à environ douze mille vers la fin du siècle. Les musulmans s'étendent également hors des murs de Jérusalem, au nord de la porte de Damas et de la porte d'Hérode. Cela nous rappelle la maxime juive selon laquelle tous les justes, et pas seulement le peuple juif, ont une part dans le monde à venir. Tous les justes de la postérité d’Abraham auront-ils une part en Terre sainte ? On note la condition singulière imposée par l'Éternel à quiconque de la postérité d'Abraham pour recevoir un héritage du pays. C'est Abraham qui parle : « le Seigneur m’apparut et me dit : Lève-toi, et prends Lot avec toi ; car j’ai résolu de te faire sortir de Charan et de faire de toi un ministre qui portera mon nom dans un pays étranger que je donnerai en possession éternelle à tes descendants après toi, lorsqu’ils écouteront ma voix. » (Abraham 2:6)

De nombreux autres quartiers et colonies ont vu le jour à Jérusalem au cours des quatre dernières décennies du XIXe siècle. Le pavage de la route de Jérusalem-Jaffa, l'installation du premier télégraphe entre Jérusalem et Beyrouth (et de là vers toute l'Europe via Constantinople), l'ouverture du canal de Suez en 1869, l'amélioration des ports et transports maritimes, tout cela amène en plus grand nombre des Européens, juifs et chrétiens, à Jérusalem. En 1860, la Palestine Pravoslavic Society commence à construire un complexe comprenant une église, un hôpital et des auberges pour abriter des missions religieuses et consulaires. Aujourd’hui, il est connu sous le nom de complexe russe. En 1872, la colonie allemande est créée. En 1874 commence la construction de Mea Shearim, le quartier ultraorthodoxe ou hassidique de Jérusalem. Conçu par l'architecte Conrad Schick, il comporte des maisons mitoyennes construites autour du périmètre d'une cour. Il est achevé en 1881. (voir Bahat, Illustrated Atlas of Jerusalem, p. 122-23)

De nombreuses puissances chrétiennes étrangères s'empressent de construire des bâtiments comme symboles d'influence et de pouvoir dans la . Les enchères pour les sites deviennent très compétitives et les chrétiens européens sont ceux qui sont en mesure de payer les prix les plus élevés pour les sites les plus recherchés. Souvent, les sommets des collines sont choisis pour les vues magnifiques qu'ils offrent et pour rendre les bâtiments encore plus dominants dans le paysage de Jérusalem. L'Hospice Notre-Dame, un bâtiment massif, est commencé en 1884 en face de la Nouvelle Porte ; le sanatorium Augusta Victoria (aujourd'hui hôpital) est construit dans un style roman allemand lourd sur la crête du mont des Oliviers (à l'est du site actuel du Centre d'études du Proche-Orient) ; l'abbaye et l'église de la dormition sont construites sur le mont Sion. Ces institutions sont le résultat de la visite du Kaiser Guillaume II à Jérusalem en 1898 dans le cadre d'une campagne visant à encourager le sentiment nationaliste allemand. (voir Pullam, Great Building Race, p. 23)

Alors que la ville est dépourvue de certaines des installations les plus élémentaires, les Européens apportent des améliorations allant des soins médicaux aux timbres-poste. Les dirigeants ottomans ne sont pas pressés d'encourager un tel développement. Dans un livre écrit en 1878, le consul britannique James Finn cite un Arabe local, dont les sentiments reflètent probablement l'attitude des autres habitants de Jérusalem : « Maintenant, Jérusalem est le joyau dont tous les Européens sont avides ; pourquoi devrions-nous faciliter l'accès au prix qu'ils visent ? » (dans Pullam, Great Building Race, p. 21)

La présence de certains étrangers à Jérusalem dans la seconde moitié du XIXe siècle s'avère être une grande bénédiction pour les chercheurs intéressés par l'histoire ancienne et l'archéologie de la . L'investigation systématique des vestiges de l'ancienne Jérusalem date du début des années 1850 et comprend certains des plus grands noms associés à l'archéologie de la . Nous sommes aujourd'hui émerveillés par les rapports détaillés et les dessins exacts réalisés par des chercheurs tels que Charles Wilson, explorateur du Mont du Temple/Haram esh-Sharif de 1863 à 1868 et découvreur de l'Arche de Wilson ; Charles Warren, qui de 1867 à 1870 a étudié la source de Gihon, le tunnel d'Ézéchias et d'autres structures ; et Conrad Schick, particulièrement connu pour sa documentation sur les portes et les tombeaux. Ce ne sont là que trois des nombreux chercheurs qui ont profondément influencé l'étude physique de Jérusalem au fil des décennies (voir Geva, Ancient Jerusalem Revealed, p. 1 ; et la liste et le résumé du même auteur dans New Encyclopedia of Archaeological Excavations, volume 2, p. 801)

Une reconsécration apostolique

En octobre 1872, une autre mission apostolique est organisée par l'Église pour consacrer à nouveau la Terre sainte au retour de Juda, demander à nouveau au Seigneur des bénédictions pour la Terre sainte et le supplier d'y rassembler rapidement son ancien peuple de l'alliance. George A. Smith, premier conseiller du président Brigham Young, dirige la délégation. Il est assisté de deux membres du Collège des douze apôtres, Lorenzo Snow et Albert Carrington, ainsi que de Feramorz Little, Paul A. Schettler (un juif allemand converti à l'Église) et de Thomas W. Jennings. Le groupe comprend deux femmes, Eliza R. Snow et Clara Little. Les voyageurs reçoivent l'instruction suivante du président Brigham Young : « Lorsque vous irez en terre de Palestine, nous souhaitons que vous dédiiez et consacriez cette terre au Seigneur, afin qu'elle soit bénie de fécondité en préparation au retour des Juifs en accomplissement de la prophétie et des desseins de notre Père céleste. » (Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 18)

Le voyage du groupe vers la Terre sainte et retour dure huit mois. En chemin, ils visitent des sites en Europe et en Égypte. Après avoir appareillé pour l'Angleterre le 6 novembre 1872, le groupe arrive finalement à Jaffa le 23 février 1873, où ils sont conduits chez le douanier turc, qui « n'examina qu'un seul passeport et [les fit passer] », selon le récit de George A. Smith. À Jaffa, le groupe voit plusieurs personnes liées au projet raté de l'apostat George J. Adams. Le lundi 24 février, le groupe part à cheval vers Jérusalem. Dans l'après-midi du 25 février 1873, ils installent leur camp près de la porte de Jaffa. Le président Smith notera que c'est à la porte de Jaffa que « se faisait la plupart des affaires à Jérusalem ». (Smith, dans Journal of Discourses, volume 16, p. 92)

Le principal récit des voyages du groupe Smith contient des détails fascinants sur la culture de la Palestine et de Jérusalem au XIXe siècle, en particulier sur les pèlerinages, et le lecteur moderne peut constater que certaines choses n'ont pas sensiblement changé depuis plus de cent ans. Comme Orson Hyde avant eux, le petit groupe de pèlerins saints des derniers jours visite de nombreux lieux saints traditionnels et trouve des nuées de mendiants sur la plupart des sites visités. Ils notent également que « les voyageurs en Palestine souffrent beaucoup du soleil, mais c'était en début de saison, deux semaines plus tôt que les voyageurs qui partent généralement pour Jérusalem ». Le président Smith écrit que la région montagneuse autour de Jérusalem ressemble à « une immense carrière de calcaire ». À Bethléem, le groupe visite l'église grecque de la Nativité pour voir l'endroit où le Christ serait né, marquée par une désormais célèbre étoile d'argent. Malgré les nombreux mendiants et marchands ambulants qui s’imposent dans les lieux saints, les saints des derniers jours sont ravis de marcher là où Jésus a marché près de mille neuf cents ans auparavant. (Smith, dans Journal of Discourses, volume 16, p. 93-98)

Le point culminant du voyage du groupe Smith a lieu le dimanche 2 mars 1873, alors que le groupe se trouve sur le mont des Oliviers. Le président Smith y consacre de nouveau la Terre sainte au retour d’Israël. Voici son récit :

« Nuageux, venteux, frais. Notre interprète a emballé une tente, des tabourets, une table, etc. sur une mule, et nous sommes allés au mont des Oliviers, où la tente a été dressée et nous nous sommes tous rassemblés à l'intérieur entre 9 et 10 heures, à l'exception de sœur Claire S. Little, qui est restée à l'intérieur du camp. La réunion a été ouverte par la prière d'Albert Carrington, dans laquelle il a consacré le terrain, la tente et la terre d'Israël en général. Thomas W. Jennings a alors pris position comme gardien à l'extérieur, lui et frère Carrington n'ayant pas de robe avec eux. Moi, les frères Lorenzo Snow, Paul A. Schettler, Feramorz Little et sœur E. R. Snow, étant dûment préparés, frère Snow a fait une prière contenant les mêmes sentiments de consécration. Après les préliminaires requis, je fus le porte-parole pour rappeler l'intérêt général de Sion et consacrer cette terre, priant pour qu'elle devienne fertile, que les pluies de la première et de l'arrière-saison descendent sur elle, et que les prophéties et les promesses faites à Abraham et aux prophètes s'accomplissent ici, au temps fixé par le Seigneur. Ensuite frère Snow prit la parole pour rappeler les intérêts d'Israël, et je terminais par quelques mots avant de lever la réunion à 10h34. » (dans Pusey, Builders of the Kingdom, p. 120-121)

D'après le récit du président Smith, il ressort que la tente dans laquelle se trouve le groupe ce jour-là sert de temple ou de tabernacle, les protégeant des « regards profanes ». La Terre sainte et la  sont consacrées par ceux qui portent des robes spéciales. Pour George A. Smith et d’autres, la terre d’Israël est imprégnée d’une qualité particulière de sainteté. Pour Eliza R. Snow, la consécration de la Terre sainte est l'expérience spirituelle marquante de la tournée, « réalisant comme je l'ai fait que nous adorions au sommet d'un mont sacré ». (Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 30. Voir aussi Millennial Star, 35:200-201)

Muni d'une lettre d'introduction du rabbin de la Congrégation juive de San Francisco, George A. Smith rend visite à Abraham Askenasi, le grand rabbin de Jérusalem. Homme vénérable, grand, corpulent et portant une barbe flottante, il est satisfait de la visite du président Smith et lui montre la synagogue. Plus tard, le grand rabbin et plusieurs juifs rendent visite au président Smith. Celui-ci racontera cette expérience à Brigham Young en ces termes : « Le 4 mars, à 10 heures du matin, nous avons reçu la visite d'Abram Askenasi, grand rabbin de Jérusalem ; nous comprenons qu'il a été choisi par le sultan turc, et a reçu de lui quelques ordres titulaires. Ils [Askenasi et son parti] expriment une foi ferme dans la rédemption d'Israël et du retour des dix tribus... L'entretien fut très agréable et intéressant, et le rabbin et trois de leurs principaux hommes qui l'accompagnaient paraissent être des hommes intelligents. » (dans Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 24. Voir aussi Mormons' Kinship with the Jews, Jerusalem Post, 2 juillet 1975, p. 5)

Après avoir visité le jardin de Gethsémané et d'autres lieux rendus sacrés par la présence de Jésus des siècles plus tôt, le groupe part le 5 mars pour Damas et arrive à Beyrouth le 21 mars. George A. Smith est soulagé qu'un si long voyage à cheval se soit terminé sans incident pour un homme de son âge et de son poids. Au cours de leur séjour d’un mois, on leur demande souvent s’ils envisagent de s’installer en Terre sainte. Smith répond que non, mais qu'il pourrait prendre un millier de saints des derniers jours, construire un barrage sur le Jourdain et rendre plusieurs milliers d'hectares très productifs. (Smith, dans Journal of Discourses, 16:100)

De retour chez lui à Salt Lake City, le président Smith rend compte du voyage de son groupe devant une foule nombreuse rassemblée au Tabernacle le 22 juin 1873. Il exprime des sentiments similaires à ceux que son prédécesseur, Orson Hyde, a exprimés des années auparavant. Comme Orson Hyde, il était en mission pour le Seigneur, non pas en voyage personnel mais en « voyage officiel » accompagné d'un mandat et d'une autorité de Dieu. Il déclare qu'à son avis, très peu de choses sont attrayantes dans ce pays, mais que tous les membres du groupe ont la conviction que Sion va de l’avant et s’élève et qu’aucune puissance ne peut arrêter sa progression. Lorsqu'ils étaient sur le Mont des Oliviers, le visage incliné vers Jérusalem, ils sentaient que le jour n'était pas loin où Israël se rassemblerait et que ces terres regorgeraient d'un peuple qui adorerait Dieu et respecterait ses commandements, que les bontés et les bénédictions de l'éternité serait déversée en abondance sur cette terre déserte, et que toutes les prophéties concernant la restauration de la maison d'Israël s'accompliraient. (voir Smith, dans Journal of Discourses, volume 16, p. 101-102)

Après les prières de consécration faites par Orson Hyde et George A. Smith, Anthon H. Lund et Ferdinand F. Hintze (premier président de la Mission turque de l'Église) consacreront de nouveau la Terre sainte le 8 mai 1898 sur le mont des Oliviers. Entre 1841 et 1933, dix consécrations de la Terre sainte seront prononcées par neuf apôtres des derniers jours. Elles seront toujours au bénéfice de la postérité d'Abraham, du retour des Juifs et de la reconstruction de Jérusalem (pour plus d’informations sur ces consécrations, voir Berrett et Ogden, Discovering the World of the Bible, 43-44, p. 159)

Le sionisme

En 1873, presque tout est en place pour que les desseins du Seigneur se réalisent. La  et la Terre sainte ont été consacrées. Une déclaration ordonnant aux Juifs de revenir et de reconstruire Jérusalem a été publiée (1845). Jérusalem est en train d’être rachetée économiquement et intérieurement. Un autre événement majeur est le signe de l’intérêt croissant des Juifs pour Jérusalem. C'était la montée du sionisme.

Au cours du dernier quart du XIXe siècle, l’antisémitisme devient violent. Cinq millions de Juifs en Russie sont confinés dans une zone connue sous le nom de Zone de colonisation. Après l'assassinat du tsar Alexandre II en 1881, les dirigeants russes utilisent les Juifs impopulaires comme boucs émissaires des problèmes du pays. Les autorités locales et les ministres du tsar encouragent les pogroms sauvages et la destruction périodique des communautés juives. En France, dans les années 1890, les patriotes mènent une attaque populaire contre le capitaine de l’armée française, Alfred Dreyfus, qui est juif. D'autres Juifs, comme le journaliste viennois Theodor Herzl, réagissent avec force. Ils demandent : si l’antisémitisme peut se manifester dans les pays les plus civilisés et les plus sophistiqués, comment les Juifs pourraient-ils prospérer ailleurs que dans leur propre pays ?

En 1896, Herzl publie un livre intitulé L’État juif. L'année suivante, il organise une conférence de 206 délégués pour former l'Organisation sioniste mondiale. Le sionisme est officiellement né. Les sionistes se tournent vers le modèle de l’ancien Israël, lorsque le mont Sion était la forteresse de Jérusalem. Ils commencent à œuvrer pour rétablir Jérusalem comme capitale de leur propre nation libre et indépendante. Entre-temps, l’Empire ottoman avance en boitant comme « l’homme malade de l’Europe », jusqu’à ce qu’il soit déplacé en Palestine par la Grande-Bretagne à la fin de la Première Guerre mondiale.

Le 9 décembre 1917, une force britannique atteint les portes de Jérusalem. Deux jours plus tard, le chef du corps expéditionnaire britannique pour tout le Proche-Orient, Sir Edmund Allenby, arrive à Jérusalem pour prendre le commandement de la Ville sainte. En guise d'expression de respect pour la ville où Abraham, Jésus et Mahomet ont marché, le général Allenby descend de cheval et traverse à pied la porte de Jaffa. Au sommet de la citadelle d'Hérode, il encourage « chacun à poursuivre ses activités légitimes sans crainte d'être interrompu » (dans Gray, History of Jerusalem, p. 289). Allenby tient sa promesse de sécurité physique ; cependant, il ne peut pas prévoir les difficultés qui surgiront quelques années plus tard en raison des promesses apparemment contradictoires faites par son gouvernement aux Juifs et aux Arabes.

Les premiers missionnaires saints des derniers jours en Terre sainte

Avant 1886, les dirigeants de l’Église encouragent les initiatives missionnaires de ceux qui se rendent à Jérusalem pour consacrer la Terre sainte, mais cet encouragement est toujours en rapport avec les nations païennes que les représentants de l’Église rencontrent sur leur chemin vers ou depuis la Palestine. La mention du prosélytisme en Terre sainte elle-même ou parmi les Juifs soit soit absente, soit ambiguë.

Au printemps 1886, deux dirigeants de l’Église, Francis M. Lyman et Joseph Tanner, se rendent en Palestine depuis Constantinople. À Haïfa, ils visitent les colonies allemandes qui ont été établies vers 1870 par de fervents Templiers venus en Palestine pour attendre la seconde venue du Seigneur. Tanner, impressionné par l'économie et l'ordre des Allemands, écrit à Daniel H. Wells, président de la mission européenne, suggérant la possibilité de créer une branche de l'Église parmi les colons allemands. Il pense que ce serait un tremplin vers l'oeuvre missionnaire parmi les Arabes (voir Baldridge, Grafting In, p. 5 ; voir aussi Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 36). Il ne parle pas des Juifs.

Le président Wells approuve le transfert de Jacob Spori, de Constantinople, où il fait du prosélytisme depuis décembre 1884, jusqu'en Palestine. Il est choisi parce qu'il parle allemand et français, en raison de ses origines suisses. Joseph Tanner lui demande ce qu'il pense des difficultés qu'il va sûrement rencontrer. Spori raconte alors avec joie un rêve dans lequel on lui a dit de commencer son oeuvre à Haïfa. Il raconte avoir vu dans une forge un homme qui était prêt à le recevoir et le message qu'il devait transmettre. Spori dit que s'il revoyait l'homme, il le reconnaîtrait. (voir Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 36)

Frère Spori arrive à Haïfa peu de temps après et se dirige vers la rue qu'il a vue dans sa vision. Un forgeron avec une courte barbe noire comme du charbon sort de son atelier en courant et dit avec enthousiasme à Spori qu'il l'a vu dans un rêve la nuit précédente et qu'il veut entendre son message. Cet homme s'appelle Johan Georg Grau. Il écoute le message de l'Évangile et est baptisé le 29 août 1886 à Acre Bay. Un mois plus tard, Georg baptise sa femme, Magdalena, et tous deux deviennent des instructeurs enthousiastes de la foi des saints des derniers jours auprès de leurs amis et voisins. (voir Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 37)

Les conversions de Grau et de son épouse marquent le début d'une branche de l'Église qui grandit jusqu'à atteindre vingt-cinq convertis au cours des six années suivantes : dix-neuf Allemands, trois Arabes, deux Russes et un Autrichien. Au cours de l’été 1888, le dirigeant de l’Église Ferdinand F. Hintze se rend à Haïfa et trouve la branche en bon état, dirigée avec compétence par Georg Grau. Grau émigre en Utah quelques années après la mort de sa femme, mais retourne en Palestine à la fin des années 1890 en tant que missionnaire. À un moment donné, l’idée d’une colonie mormone près de Jérusalem sur le modèle des colonies allemandes et américaines est proposée, mais l’idée sera abandonnée. (Baldridge, Grafting In, p. 6)

Jacob Spori oeuvre en Palestine, prêchant principalement à des groupes allemands dans la région de Haïfa mais aussi à Jaffa et à Jérusalem. Les dirigeants allemands de Jérusalem écoutent son message avec patience, et la Société des Templers de la  le traite avec gentillesse et parle de George A. Smith avec estime. Après avoir bien servi l’Église, Spori est finalement relevé comme missionnaire. Il retourne à Constantinople en 1887 et aux États-Unis en mars 1888.


Joseph Tanner oeivre environ un an en Palestine et réussit à convertir quatorze personnes : neuf Allemands, quatre Russes et un Arabe. Trois de ces convertis vivent à Jaffa et les autres à Haïfa. Au cours des dernières années du XIXe siècle, Tanner est suivi par d'autres missionnaires qui poursuivirent l'œuvre de prosélytisme et de renforcement des membres de l'Église de Jaffa et de Haïfa. En 1903, en raison des troubles politiques dans la région, la branche de Haïfa, la seule unité de l'Église en Terre sainte, est fermée ; toute oeuvre missionnaire en Palestine cesse. Six ans plus tard, la mission turque est également fermée et, pendant environ douze ans, aucun représentant américain de l'Église n'oeuvre au Proche-Orient. (Barrett, Story of the Mormons in the Holy Land, p. 37 ; Baldridge, Grafting In, p. 6)

Les troubles politiques qui empêchent les missionnaires de l'Église d’entrer au Proche-Orient au début du XXe siècle marquent également la fin de l’Empire ottoman. En 1908, un groupe d’officiers militaires ottomans appelés les Jeunes Turcs force le sultan Abdul-Hamid II à rétablir une constitution garantissant un gouvernement parlementaire dans tout l’empire. Il a été adopté en 1876 mais a été suspendu au bout d'un an seulement. En 1922, un héros militaire turc nommé Mustafa Kemal (appelé plus tard Kemal Atatürk) dirige un mouvement nationaliste qui conduit à l'abolition de l'Empire ottoman et à l'établissement de la République de Turquie en 1923. Une fois le gouvernement ottoman dissous, le sort de Jérusalem est entre les mains des puissances occidentales. Mais comme les événements du XIXe siècle le démontrent, la Ville sainte est toujours sous l’œil vigilant de son véritable roi, le Seigneur.



2. Jérusalem, les Juifs et l'Église


La Jérusalem du passé est liée à la Jérusalem du présent et à celle du futur par la prophétie. En effet, le retour des Juifs dans leur ancienne patrie, dans cette ville et dans ce pays, accomplit la prophétie. Pourtant, les prophéties d’un rassemblement physique littéral ne se trouvent que dans l’Ancien Testament et dans les Écritures des saints des derniers jours, ce qui signifie que le concept de rassemblement n’est connu que parmi les juifs et les chrétiens. Et même parmi les chrétiens, il existe au moins trois écoles de pensée : premièrement, de telles prophéties se sont accomplies lors du retour des Juifs de l'exil babylonien ; deuxièmement, un tel rassemblement appartient à une époque millénaire lointaine ; et troisièmement, le rassemblement actuel de Juda implique une prophétie en train de s'accomplir (ce processus se poursuivant jusqu'au millénium).

James E. Talmage, du Collège des douze apôtres, a décrit les « derniers jours » dans lesquels nous vivons aujourd'hui comme une « dispensation de rassemblement » : « Le retour des tribus, après leur longue et grande dispersion, est représenté comme une oeuvre préliminaire à l'établissement du règne prédit de la justice, avec le Christ sur la terre comme Seigneur et Roi ; et son accomplissement est donné comme précurseur certain du millenium. Jérusalem doit être rétablie pour être la ville du grand Roi dans l'Ancien Monde, et Sion, ou la nouvelle Jérusalem, doit être bâtie dans le nouveau monde ; les tribus perdues doivent être ramenées du lieu de leur exil, dans le nord. » (Talmage, Articles de foi, p. 17 de la version anglaise)

Ezra Taft Benson aussi a déclaré : « Le rétablissement des Juifs en Palestine [est] l'un des événements qui précèdent la seconde venue du Maître. Ésaïe a dit qu'ils seront rassemblés, les dispersés de Juda, des quatre coins du monde, qu'ils s'établiront dans leur propre pays, qu' ils bâtiront les anciennes ruines et répareront les villes désertes (voir Ésaïe 11:11-12). » (Benson, Teachings of Ezra Taft Benson, p. 91)

Un rassemblement présent ou à venir ?

Il est vrai que le rassemblement d’Israël se poursuivra jusqu’au millénium, mais grands et glorieux sont les événements qui précéderont l’accomplissement des prophéties du rassemblement. Quelle dommage de ne regarder que l’accomplissement des prophéties et de ne pas reconnaître et apprécier le processus lui-même. Ce grand rassemblement de Juda est la volonté du Seigneur. Néphi en parle comme d’une « œuvre merveilleuse et un prodige » (2 Néphi 25:17). Ce rassemblement est une chose joyeuse et merveilleuse et prodigieuse telle qu’elle a été révélée et expliquée par les prophètes de toutes les dispensations. C’est un prélude nécessaire à de grandes bénédictions spirituelles pour ceux qui se rassemblent et pour ceux qui sont rassemblés. C'est un signe des temps, un signe des « derniers jours » dans lesquels nous vivons, une confirmation des prophètes et des prophéties, un signal de l'imminence d'événements cataclysmiques dans les cieux et sur la terre, et un avertissement à mettre notre vie et notre maison en ordre, signe de l'avènement imminent du Sauveur pour régner personnellement sur la terre pour toujours et à jamais.

Le rassemblement des Juifs : une partie du rétablissement des derniers jours

À notre époque, le Seigneur a annoncé pour la première fois en 1823 le rassemblement des Juifs par l’intermédiaire de l’ange Moroni qui est apparu à Joseph Smith, le prophète. Dans cette visite, Moroni a cité, entre autres Écritures, le chapitre entier d’Ésaïe 11, qui comprenait le verset suivant : « Il recueillera les dispersés de Juda, des quatre extrémités de la terre » (Ésaïe 11:12), et il a déclaré que le onzième chapitre d'Ésaïe était sur le point de s'accomplir (voir JSH 1:40). Cette mention de Juda lors d’une si brève rencontre entre le ciel et la terre donne au rassemblement des Juifs une position prioritaire dans le Rétablissement.

En 1831, le Seigneur, s'exprimant par l'intermédiaire de Joseph Smith, le prophète, a donné à Juda la directive de s'enfuir à Jérusalem (voir D&A 133:13). Premièrement, Jérusalem est désignée comme la destination ultime des Juifs, comme un lieu de refuge. Deuxièmement, la formulation « s’enfuient à Jérusalem » suggère la nécessité de se dépêcher et la probabilité d’un péril s’ils s’attardent.

En mars 1832, Joseph Smith demanda au Seigneur : « Que faut-il entendre par les deux témoins du chapitre onze de l’Apocalypse ? » En réponse, le Seigneur révéla ce qui suit : « Ce sont deux prophètes qui doivent être suscités dans les derniers jours à la nation juive au moment du rétablissement, et qui doivent prophétiser aux Juifs, lorsqu’ils seront rassemblés et auront bâti la ville de Jérusalem au pays de leurs pères. » (D&A 77:15). De cette révélation, Joseph Smith, le prophète, a appris un certain nombre de détails concernant les aspects physiques du rassemblement des Juifs :

Premièrement, le rassemblement des Juifs aurait lieu dans ces « derniers jours, au moment du rétablissement ». Cette déclaration confirmait le message de l'ange Moroni selon lequel le rassemblement était encore futur mais « sur le point de s'accomplir ».

Deuxièmement, dans ces derniers jours, une nation juive serait établie après une absence de près de deux mille ans. Le fait que le mot nation signifiait dans ce cas un État politique avec son propre territoire et son propre gouvernement a été expliqué de manière très détaillée dans des révélations ultérieures.

Troisièmement, le rassemblement des Juifs aurait lieu « au pays de leurs pères », ce rassemblement leur permettrait de reconstruire « la ville de Jérusalem ».

Quatrièmement, l'Église avait un rôle à jouer dans la mesure où deux prophètes seraient suscités « à la nation juive » et prophétiseraient aux Juifs « après » leur rassemblement.

Ainsi, dès mars 1832, le Prophète savait que le moment du rassemblement de Juda était arrivé, que leur lieu de rassemblement était dans les montagnes de Jérusalem, qu'une nation serait établie dans le pays de leurs pères et, plus important encore, que tout cela était la volonté du Seigneur.

Le 3 avril 1836, un événement singulier se produisit et marqua le point central de toutes les prophéties liées au rassemblement. Joseph Smith a rapporté que pendant que lui et Oliver Cowdery étaient en train de prier dans le temple de Kirtland, ils ont connu plusieurs manifestations divines, dont une dans laquelle « Moïse apparut… et nous remit les clefs pour rassembler Israël » (D&A 110:11). Une fois de plus, le Prophète fut instruit d'en haut concernant le rassemblement d'Israël dans les derniers jours, mais cette fois-ci, c'était par un prophète qui détenait autrefois les clés de l'autorité par lesquelles le Seigneur rétablirait les enfants d'Israël, dont les Juifs, à leur terre promise. C’était une partie importante du plan divin depuis le début.

Dans une lettre écrite en 1840, Joseph Smith mit fin à la controverse sur le moment précis où commencerait le processus de rassemblement des Juifs. Le Prophète a indiqué que les Juifs « ont a été dispersé parmi les Gentils pendant une longue période ; et selon notre estimation, le moment du début de leur retour en Terre sainte est déjà arrivé. » (Smith, History of the Church, volume 4, p. 112-113). Avec le rétablissement des clés, le grand rassemblement de Juda et du reste de la maison d’Israël était en cours. Les dirigeants des saints des derniers jours n’en parleraient plus jamais comme d’un événement futur.


Juda et Jerusalem

Le Sauveur, lors de sa visite dans les pays du Livre de Mormon, a expliqué que le rassemblement d’Israël aurait lieu en raison des alliances conclues avec leurs pères :

« Et je me souviendrai de l’alliance que j’ai faite avec mon peuple ; et j’ai fait alliance avec lui que je le rassemblerais lorsque je le jugerais bon, que je lui rendrais en héritage le pays de ses pères, qui est le pays de Jérusalem, qui est, pour lui, la terre promise à jamais, dit le Père… Alors cette alliance que le Père a faite avec son peuple sera accomplie ; et alors Jérusalem sera de nouveau habitée par mon peuple, et elle sera le pays de son héritage. » (3 Néphi 20:29, 46)

Grâce à l'ancienne alliance du Seigneur avec eux, Juda non seulement serait rassemblé au temps voulu, mais hériterait du pays de Jérusalem. De plus, la seconde venue du Sauveur serait précédée en partie par le rassemblement des Juifs, l'édification de Jérusalem et la construction d'un temple. En 1843, Joseph Smith, le prophète, a prophétisé sur les « derniers jours » et la « Seconde Venue » en des termes remarquables : « Juda doit revenir, Jérusalem doit être reconstruite et le temple… Il faudra un certain temps pour reconstruire les murs de la ville et du temple, etc., et tout cela doit être fait avant que le Fils de l'homme fasse son apparition. » (Smith, History of the Church, volume 5, p. 337)

Il n'y avait aucun doute dans l'esprit du Prophète concernant Juda et Jérusalem, même si à l'époque cela devait paraître improbable, voire impossible, car les paroles du Seigneur étaient impératives : Juda doit revenir, Jérusalem doit être reconstruite, un troisième temple doit être érigé. Vient ensuite un aperçu de la situation dans le temps : « Tout cela doit être fait avant que le Fils de l'homme fasse son apparition ». En d’autres termes, cela est destiné à se produire avant le millénium.

Cette déclaration prophétique regroupe trois questions centrales – le rassemblement des Juifs, la restauration de Jérusalem et la construction d’un temple – et les met en perspective. Les Juifs se rassemblent effectivement et Jérusalem est en train d’être reconstruite, mais qu’en est-il d’un temple à Jérusalem avant le millénium ? Une telle perspective soulève des problèmes graves, compte tenu des réalités religieuses et politiques de cette partie du monde.

Dans un discours prononcé le 11 juin 1843, le Prophète a parlé de ce rassemblement : « Quel était le but du rassemblement des Juifs ou du peuple de Dieu à n'importe quelle époque du monde ?Le but principal était d'édifier au Seigneur une maison par laquelle il révélerait à son peuple les ordonnances de sa maison et les gloires de son royaume et enseignerait au peuple le chemin du salut… Le dessein des conseils du ciel avant que le monde fût était que les principes et les lois de la prêtrise fussent basés sur le rassemblement du peuple à toutes les époques du monde. » (Smith, History of the Church, volume 5, p. 423)

La plupart des Juifs, et d’ailleurs la plupart des gens qui ne sont pas saints des derniers jours, ne comprennent pas pleinement l’importance d’un futur temple à Jérusalem. Mais le Prophète a clairement indiqué que le rassemblement en soi, qui a été largement considéré comme un mouvement politique, avec souvent des ramifications effrayantes, est destiné à un dessein plus céleste, à savoir l'établissement d'un temple. En effet, c’est la principale manière par laquelle un peuple – en l’occurrence les Juifs – peut être doté de bénédictions spirituelles d’en haut.

Ce n’est en aucun cas un hasard si « le rassemblement de Juda », « Jérusalem » et « le temple » apparaissent si souvent les trois ensemble dans les prophéties. L’existence de l’un de ces éléments semble dépendre des deux autres. Et tous trois nécessitent une présence physique. En d’autres termes, les références au rassemblement, à Jérusalem et au temple ne sont pas seulement métaphoriques ou spirituelles. Nous parlons d'un enchaînement temporel, physique et tangible qui doit être accompli non pas par des armées angéliques mais par des mortels. Cette vérité est confirmée dans les prophéties et soulignée dans la proclamation faite par le Collège des douze apôtres en 1845 : « Nous témoignons en outre qu'il est commandé par la présente aux Juifs de toutes les nations, au nom du Messie, de se préparer à retourner à Jérusalem en Palestine, à reconstruire cette ville et le temple au Seigneur, et à établir leur propre gouvernement politique, avec leurs propres dirigeants, juges et gouverneurs dans ce pays. Qu'ils sachent que nous détenons maintenant les clés de la prêtrise et du royaume qui leur seront bientôt restitués. » (Clark, Messages of the First Presidency, volume 1, p. 254)

Si en 1845 il y pouvait y avoir quelque part dans le monde des doutes concernant le rassemblement des Juifs dans le pays de leur héritage, il ne devait y en avoir aucun parmi les saints des derniers jours. Dans cette déclaration au monde, l'Église a ouvertement proclamé que le peuple juif se rassemblerait à Jérusalem, reconstruirait la ville, construirait un temple, établirait son propre gouvernement et recevrait la prêtrise et les clés du royaume de l'Église de Jésus-Christ de saints des derniers jours.

Le rassemblement physique des Juifs leur permit de racheter la terre. En d'autres termes, le rassemblement de Juda et du reste de la maison d'Israël est à la fois spirituel et physique, mais dans le cas de Juda, il semble y avoir un accent particulier sur le rôle de Juda dans la rédemption physique de la terre. En fait, dans toutes les Écritures, aucun peuple autre que Juda n’a la responsabilité de racheter le pays d’Abraham, d’Isaac et de Jacob.

Dans la parabole du noble et de l'olivier, ceux qui se rassemblent pour « racheter le pays » reçoivent le commandement suivant : « Allez directement dans la terre de ma vigne et rachetez ma vigne, car elle est à moi : je l’ai achetée à prix d’argent. C’est pourquoi, allez directement dans ma terre, renversez les murs de mes ennemis, abattez leur tour et dispersez leurs sentinelles. Et s’ils se rassemblent contre vous, vengez-moi de mes ennemis, afin que je puisse bientôt venir avec le reste de ma maison posséder le pays. » (D&A 101:56-58)

Dans 3 Néphi, le Sauveur parle d'une rédemption physique du pays : « Alors le Père rassemblera de nouveau [son peuple], et lui donnera Jérusalem comme pays de son héritage. Alors ils éclateront de joie : Éclatez ensemble en cris de joie, ruines de Jérusalem ; car le Père console son peuple, il rachète Jérusalem. » (3 Néphi 20:33-34)

Les preuves semblent concluantes : le Seigneur est en train de racheter Jérusalem en y rassemblant les Juifs et en la leur donnant comme terre de leur héritage. Les Juifs sont rassemblés chez eux, en partie, pour les raisons et objectifs suivants : Le Seigneur a fait des alliances solennelles, ou des promesses, pour rassembler Israël et Juda dans les derniers jours.

Lors du retour physique des Juifs, le pays serait racheté pour Juda et pour toutes les tribus d'Israël et Jérusalem et le pays seraient rétablis à leur gloire d'autrefois.

La seconde venue du Sauveur du monde, le Messie, doit être précédée par la reconstruction de Jérusalem et par la construction d'un temple qui ne peut être construit qu'à Jérusalem.

Les clés de la prêtrise et du royaume détenues par l’Église pourraient être rétablies parmi les Juifs et les autres membres de la maison d’Israël qui se seront rassemblés. Cet objectif divin ne pourrait pas être atteint dans leur état perdu et déchu.

Le Messie tant attendu apparaîtrait au reste juste de son peuple, conformément à la parole prophétique.

La vieille Jérusalem serait l’une des deux capitales de l’Église sur terre à partir de laquelle le Messie régnerait personnellement.

La mission d'Orson Hyde

Joseph Smith, le prophète, a chargé Orson Hyde de se rendre en Palestine pour consacrer cette terre au retour du peuple juif. Il posa les mains sur la tête de frère Hyde et promit que, par son intermédiaire, le Seigneur « accomplirait une grande œuvre qui préparerait le chemin et faciliterait grandement le rassemblement de ce peuple » (Smith, History of the Church, volume 4, p. xxxi). Orson Hyde fut donc appelé à sacrifier ses moyens personnels , le confort de son foyer et de sa famille, et même sa santé, pour voyager à l'autre bout du monde et consacrer une terre hostile, négligée et déchirée par la guerre, non pas à l'oeuvre missionnaire mais au rassemblement des Juifs. Le fait que Joseph Smith, le Prophète, ait été poussé à envoyer un émissaire pour une telle mission à cette époque est en soi une chose étonnante et indique clairement la place des Juifs dans l’œuvre glorieuse du Rétablissement.

Comme nous l'avons noté, le 24 octobre 1841, frère Hyde gravit le mont des Oliviers et y prononça une prière de consécration inspirante. Frère Hyde a expliqué que cette prière de consécration lui était parvenue par révélation et que, par conséquent, ni les paroles ni les prophéties n'étaient les siennes mais reflétaient plutôt la volonté du ciel.

Le but de la mission d'Orson Hyde en Terre sainte, comme le souligne le début de la prière, était de consacrer et de dédier cette terre à trois objectifs principaux : le rassemblement de Juda, la construction de Jérusalem et l'élévation d'un temple. Le reste de la prière était pour l’essentiel une supplication pour des bénédictions pour accomplir ces trois objectifs.

Le réveil d'un géant endormi

Ce n’est pas une coïncidence si les annales de la communauté juive mondiale désignent les années 1840 comme la période d’un réveil parmi les Juifs de toute la diaspora. De cette nouvelle aube jusqu'au tournant du siècle surgirent des hommes d’influence et de stature parmi les différentes communautés juives comme Moses Hess, Joseph Salvador, Moses Montefiore, Leo Pinsker, Theodor Herzl et d’autres. Ils avaient été touchés par l’esprit de rassemblement et, à leur tour, ils ont insufflé dans le cœur et l’esprit des Juifs du monde entier le désir de retourner dans leur patrie. Ce mouvement de retour des Juifs est devenu un mouvement religieux, politique, culturel et nationaliste à croissance rapide connu sous le nom de sionisme.

Conformément à un calendrier divin, l’Esprit du Seigneur a commencé à se déplacer à travers le monde, touchant d’innombrables vies. Des centaines de Juifs commencèrent à immigrer vers ce que certains appelaient la Palestine, même si les Juifs l'appelaient « la terre d'Israël ». Le nombre de rapatriés est passé de centaines à des milliers, puis à des dizaines de milliers, dans un torrent de ferveur et d’enthousiasme inexplicable. Ils sont arrivés en si grand nombre que les historiens ont qualifié ce phénomène de vagues d’immigration. En effet, en plusieurs vagues – comme celle juste avant la guerre du Golfe de 1991 – les Juifs sont arrivés par centaines de milliers, principalement en provenance de l’ex-Union soviétique. Jamais un tel rassemblement n’a eu lieu, pas même lors du retour de l’ancien Juda de la captivité babylonienne.

De nombreux Juifs dispersés dans la diaspora s’étaient assimilés au fil des années et n’avaient que vaguement conscience de leur judéité. Ils s’étaient fondus dans les communautés où ils avaient établi des racines vieilles de plusieurs siècles. Sans pouvoir expliquer pourquoi, beaucoup de ces Juifs soi-disant émancipés ont soudainement commencé à se sentir juifs ; ils ont commencé à se sentir agités et mécontents de leur sort. Beaucoup ont été saisis d’un désir irrésistible de quitter leur pays natal – sans vraiment savoir pourquoi. Une renaissance de l’idéal sioniste du retour s’est propagée à travers la communauté juive mondiale. Cela s’exprimait de différentes manières, mais le fil conducteur était le désir des Juifs de retourner à leurs racines dans leur ancienne patrie.

L'antisémitisme, les persécutions et les pogroms tsaristes, l'intolérance religieuse chrétienne et les guerres se déroulaient dès les premiers stades du rassemblement de Juda, mais ces facteurs en eux-mêmes n'étaient pas suffisants pour implanter dans l'esprit du peuple juif l'idée de retour. La persécution et les abus avaient été leur lot pendant des siècles et n'avaient servi qu'à disperser davantage les restes dispersés de Juda.

À sa manière et pour ses propres raisons, le Seigneur avait préservé Juda, à travers les siècles, d'une assimilation complète. Le moment était désormais venu, selon le plan divin, que les Juifs rentrent chez eux. Leur dispersion sur deux mille ans ne devait cependant pas être inversée du jour au lendemain. Le rassemblement prendrait des décennies et se déroulerait conformément à un calendrier divin bien défini se poursuivant pendant le millénium.

Le rôle de l'Église

Le rétablissement des clés du rassemblement ne pouvait s'accomplir que par l'intercession divine car les clés avaient été retirées de la terre. Avec leur rétablissement, le rassemblement commença véritablement. Dans un sens, il s’agit d’un processus complexe impliquant les membres de l’Église, mais il se déroule selon un calendrier strict. « Envoyez les anciens de mon Église aux nations qui sont au loin… Appelez toutes les nations, d’abord les Gentils, ensuite les Juifs. » (D&A 133:8 ; voir aussi 1 Néphi 13:42)

Brigham Young a déclaré : « Il nous incombe de veiller à ce que l'Évangile soit prêché à la maison d'Israël ; de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les rassembler dans le pays de leurs pères et pour rassembler la plénitude des Gentils avant que l'Évangile puisse être transmis avec succès aux Juifs. » (Journal of Discourses, 12:113) Finalement, l'Évangile sera enseigné aux Juifs car, selon le Livre de Mormon, leur relation avec l'Église influencera grandement le processus de rassemblement.

Néphi a prédit « que les Juifs qui sont dispersés commenceront aussi à croire au Christ ; et ils commenceront à se rassembler » (2 Néphi 30:7). Cette Écriture, comme d'autres passages du Livre de Mormon, indique une corrélation directe entre la croyance des Juifs au Christ et leur rassemblement.

« Et il arrivera que le moment vient où la plénitude de mon Évangile lui sera prêchée ; et il croira en moi, il croira que je suis Jésus-Christ, le Fils de Dieu, et priera le Père en mon nom… Alors le Père le rassemblera de nouveau, et lui donnera Jérusalem comme pays de son héritage… Alors cette alliance que le Père a faite avec son peuple sera accomplie ; et alors Jérusalem sera de nouveau habitée par mon peuple, et elle sera le pays de son héritage. » (3 Néphi 20:30-31, 33, 46)

Bien que, selon Wilford Woodruff, un certain nombre de Juifs « se rassemblent dans leur propre pays dans l’incrédulité » (Journal of Discourses, volume 15, p. 277-278), le Livre de Mormon indique clairement que la plus grande partie ne se rassemblera qu’après avoir cru en Jésus comme étant le Messie. Cela fait peser le fardeau directement sur les épaules des saints des derniers jours, qui seuls ont le pouvoir d’enseigner la plénitude de l’Évangile.

Le rassemblement avait besoin d'un catalyseur spirituel sous la forme du rétablissement des clés du rassemblement, et le processus actuel dépend également de l'Église de Jésus-Christ pour le soutenir. Ni le monde en général ni les Juifs en particulier ne sont conscients du rôle que l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours a joué dans le retour des Juifs sur les terres de leur héritage ; néanmoins, ce rassemblement dépend des clés, des pouvoirs et de la prêtrise de l’Église rétablie de Jésus-Christ.

Guerres et bruits de guerre

La prophétie indique qu’en ces derniers jours, nous nous dirigeons vers des temps troublés – pas seulement en Terre sainte mais partout. Certaines sont des prophéties catastrophiques spécifiques concernant Juda et Jérusalem. Mais le Seigneur, dans sa miséricorde, a décrété : « Aucun d'entre eux [les Juifs] n'a jamais été détruit sans que cela ne lui soit prédit par les prophètes du Seigneur. » (2 Néphi 25:9)

Zacharie, prophétisant sur les derniers jours, mettait explicitement en garde contre les événements catastrophiques précédant l’avènement du Messie :

« Je rassemblerai toutes les nations pour qu'elles attaquent Jérusalem ; La ville sera prise, les maisons seront pillées, et les femmes violées ; La moitié de la ville ira en captivité, Mais le reste du peuple ne sera pas exterminé de la ville. L'Éternel paraîtra, et il combattra ces nationsSes pieds se poseront en ce jour sur la montagne des oliviers… La montagne des oliviers se fendra par le milieu. » (Zacharie 14:2-4)

Wilford Woodruff a corroboré le témoignage de Zacharie :

Ô maison de Juda… Il est vrai qu'après votre retour, vous aurez rassemblé votre nation et reconstruit votre ville et votre temple, afin que les Gentils puissent rassembler leurs armées pour aller combattre contre vous… Mais quand cette affliction viendra, le Dieu vivant, qui a conduit Moïse à travers le désert, vous délivrera, et votre Silo viendra se tenir au milieu de vous et combattra vos batailles ; et vous le connaîtrez, et les afflictions des Juifs prendront fin, tandis que la destruction des Gentils sera si grande qu'il faudra à toute la maison d'Israël rassemblée autour de Jérusalem, sept mois pour enterrer les morts de leurs ennemis, et les armes de guerre leur dureront sept ans comme combustible, de sorte qu'ils n'auront pas besoin d'aller chercher du bois dans une forêt [voir Ézéchiel 39:7-14, ndlr]. Quelles paroles ! Qui peut les supporter ? Néanmoins, elles sont vraies et s'accompliront, selon les paroles d'Ézéchiel, de Zacharie et d'autres prophètes. Même si les cieux et la terre disparaissent, pas un seul détail ne restera inachevé. » (Cowley, Wilford Woodruff, p. 509-510 ; Benson, This Nation Shall Endure, p. 139)

La grande bénédiction pour Juda est qu’ils envisageaient la venue de Schilo [voir Genèse 49:10, ndlr], qui rassemblerait son peuple autour de lui. La prophétie concernant Shilo a fait l'objet de plusieurs interprétations rabbiniques et chrétiennes et a fait l'objet de controverses considérables. L’interprétation donnée à ce passage par les saints des derniers jours est basée sur la révélation aux prophètes modernes, et non sur un commentaire érudit. Il a été révélé à Joseph Smith que Shilo est le Messie (voir JST Genèse 50:24)

Les événements des derniers jours sont souvent déroutants, et à moins de rester proches des prophètes, nous saurons difficilement où placer notre allégeance et notre soutien. Une déclaration publiée par l'Église en 1845 dit ce qui suit :

« Aucun roi, dirigeant ou sujet – aucune communauté ou individu ne restera neutre. Tous seront finalement influencés par un esprit ou un autre, et prendront parti soit pour, soit contre le royaume de Dieu, et l'accomplissement des prophètes dans le grand retour et l'établissement de son peuple de l'alliance longtemps dispersé. Cette grande division finira par s'étendre jusqu'à l'extrême, au point que les nations du vieux monde s'uniront pour s'opposer à ces choses par la force militaire. Ils enverront une grande armée en Palestine contre les Juifs et assiégeront leur ville. » (Clark, Messages of the First Presidency, volume 1, p. 257)

Le Seigneur, par l’intermédiaire de Joseph Smith a averti, à propos de cette période :

« Car alors, en ces jours-là, la détresse sera grande sur les Juifs et sur les habitants de Jérusalem, telle que Dieu n’en avait encore jamais envoyée de pareille sur Israël depuis le commencement de leur royaume jusqu’à maintenant ; et qu’il n’y en aura jamais plus sur Israël.Toutes les choses qui leur sont arrivées ne sont que le commencement des douleurs qui s’abattront sur eux. Et, si ces jours n’étaient pas abrégés, personne de leur chair ne serait sauvé, mais à cause des élus, selon l’alliance, ces jours seront abrégés.Voici, c’est là ces choses que je vous ai dites au sujet des Juifs. » (JSM 1:18-21)

Zacharie détaille davantage la terrible destruction :

« Les deux tiers [des habitants de Jérusalem] seront exterminés, périront, et l'autre tiers restera. Je mettrai ce tiers dans le feu, et je le purifierai comme on purifie l'argent, je l'éprouverai comme on éprouve l'or. Ils invoqueront mon nom, et je les exaucerai ; Je dirai : C'est mon peuple ! Et il diront : L'Éternel est notre Dieu ! » (Zacharie 13:8-9)

La raison pour laquelle un tiers de la population survivra à cette guerre catastrophique est que, après avoir traversé le « feu du raffineur », ils se tourneront vers le Seigneur.

Néphi a également prophétisé concernant cette période difficile :

« Et voici, selon les paroles du prophète, le Messie se mettra pour la seconde fois en devoir de les recouvrer ; c’est pourquoi, il se manifestera à eux avec puissance et une grande gloire, pour la destruction de leurs ennemis, lorsque viendra le jour où ils croiront en lui, et il ne fera périr aucun de ceux qui croient en lui. Et ceux qui ne croient pas en lui seront détruits… Et ils sauront que le Seigneur est Dieu, le Saint d’Israël. » (2 Néphi 6:14-15)

Le Messie viendra au moment où Juda sera devant une défaite imminente face à ses ennemis. Alors il viendra, comme le disent les Écritures, avec puissance et une grande gloire et sauvera son peuple de l’anéantissement complet. Zacharie a écrit : « L'Éternel paraîtra, et il combattra ces nations, comme il combat au jour de la bataille » (Zacharie 14:3). Alors les gens qui survivront au feu du raffineur croiront au vrai Messie, Jésus-Christ.

Un changement de cœur

Après avoir examiné comment les Juifs de la diaspora apprendront l’Évangile, conformément au calendrier divin, tournons-nous vers ceux qui se sont rassemblés dans l’État moderne d’Israël dans l’incrédulité. Nous parlons des dizaines de milliers, peut-être des millions, qui, pour une raison ou une autre, ont grandi dans un vide spirituel et recherchent la vérité, « mais ne savent pas où la trouver » (D&A 123:12).

De nombreux Juifs sont profondément spirituels et trouvent leur épanouissement dans leur interprétation du judaïsme. Sans leur demander d'écarter les vérités trouvées dans leur riche héritage, nous pouvons ajouter à cet héritage en cherchant, selon les termes de Néphi, à « les convaincre du vrai Messie qui fut rejeté par eux, et de les convaincre qu’ils ne doivent plus attendre un Messie à venir, car s’il en venait un, ce ne serait qu’un faux Messie qui tromperait le peuple ; car il n’y a qu’un seul Messie dont parlent les prophètes, et ce Messie est celui qui sera rejeté par les Juifs… Son nom sera Jésus-Christ, le Fils de Dieu. » (2 Néphi 25:18-19)

Il est clair que les Juifs spirituellement dotés finiront par accepter Jésus-Christ comme leur Messie. Ce qui est moins clair, c'est le processus. Les prophéties de l'Ancien Testament décrivent un événement majeur parmi les Juifs dans les derniers jours, lorsque le Seigneur dit qu'il rassemblera « toutes les nations pour qu'elles attaquent Jérusalem » (Zacharie 14:2). Au moment où les Juifs risquent l’anéantissement total aux mains de leurs ennemis, leur Messie tant attendu apparaîtra. Cette fois, cependant, il apparaîtra avec puissance et gloire, non pas comme le fils d'un charpentier, et il « paraîtra et il combattra ces nations… Ses pieds se poseront en ce jour sur la montagne des oliviers, qui est vis-à-vis de Jérusalem, du côté de l'orient. » (Zacharie 14:3-4)

Alors les Juifs, selon les paroles du Seigneur, « tourneront les regards vers moi, celui qu'ils ont percé » (Zacharie 12:10) et diront : « D'où viennent ces blessures que tu as aux mains et aux pieds ? » (D&A 45:51 ; voir aussi Zacharie 13:6). À ce moment-là, un grand miracle prévu par de nombreux grands prophètes du passé se produira. Les Juifs qui s'étaient rassemblés dans l'incrédulité et avaient survécu au feu du fondeur (voir Zacharie 13:9) sauront que leur Messie, le Sauveur du monde, se tient devant eux. Ils le sauront, sinon par la majesté écrasante de son être même, du moins par le pouvoir perçant et pénétrant de son propre témoignage, car il déclarera à tous ceux qui l'entendront la nouvelle bouleversante que « ces blessures sont celles que j'ai reçues dans la maison de mes amis. » (D&A 45:52)

Cette déclaration suffira à elle seule à convaincre les honnêtes cœurs, mais pour ceux qui doutent encore, il sera plus précis : « Je suis celui qui a été élevé [sur la croix, ndlr] ». Cette déclaration confondra ceux qui sont aveuglés par les traditions de plusieurs siècles et suscitera un autre témoignage, cette fois-ci qui ne pourra être mal compris, car le Messie déclarera : « Je suis Jésus qui a été crucifié. » L’effet que cette révélation aura sur tous ceux qui l’entendront est presque impossible à comprendre. Pour la plupart, il ne sera que trop clair que le Messie qui vient de les sauver d’une terrible destruction n’est autre que ce même Jésus qui a été crucifié.

Puis, dans une dernière annonce magnifique : « Je suis le Fils de Dieu » (D&A 45:52), les écailles sombres accumulées au fil des siècles, aveuglant des générations entières, seront soudainement balayées. Une nouvelle ère commencera. Ces paroles solennelles qui seront prononcées du haut du mont des Oliviers pénétreront et purgeront les âmes mêmes de tous ceux qui croiront. Ces paroles seront entendues dans tous les coins du pays et se répercuteront à travers les eaux et à travers le monde parmi toutes les tribus, langues et peuples. Mais ceux qui auront le droit de les entendre directement seront son propre peuple, les Juifs.

Avec cette annonce déchirante, le reste des Juifs qui avaient été spécialement préservés par la main du Tout-Puissant pour être témoins de l'événement sera réduit à un chagrin insondable, car « alors, ils pleureront à cause de leurs iniquités ; alors, ils se lamenteront parce qu'ils ont persécuté leur roi » (D&A 45:53). Zacharie a écrit à propos de cet événement : « En ce jour-là, le deuil sera grand à Jérusalem » et dans tout le pays (Zacharie 12:11). « Le Seigneur fera entendre sa voix, et toutes les extrémités de la terre l'entendront ; les nations de la terre se lamenteront, et ceux qui auront ri verront leur folie » (D&A 45:49). Alors le cri retentira : « Élève avec force ta voix, Jérusalem, pour publier la bonne nouvelle ; Élève ta voix, ne crains point ; Disaux villes de Juda : Voici votre Dieu ! » ( Ésaïe 40:9 ; Talmage, Articles de foi, p. 313 de la version anglaise). Alors l’Écriture s’accomplira : « Voici, il vient avec les nuées. Et tout oeil le verra, même ceux qui l'ont percé ; et toutes les tribus de la terre se lamenteront à cause de lui. » (Apocalypse 1:7)

Cette croyance instantanée en Jésus-Christ comme étant le Fils de Dieu, le Messie tant attendu, le Sauveur du monde, deviendra la force unificatrice plutôt que la force de division qu'il avait été jusqu'ici, ramenant dans le giron son peuple élu, et « ils invoqueront mon nom, et je les exaucerai ; Je dirai : C'est mon peuple ! Et ils diront : L'Éternel est notre Dieu ! » (Zacharie 13:9)

Les Écritures révèlent : «  En ce jour-là, une source sera ouverte pour la maison de David et les habitants de Jérusalem, pour le péché et pour l'impureté » (Zacharie 13:1). La fontaine « pour le péché et pour l'impureté » fait évidemment référence à des fonts baptismaux, et tous ceux qui croiront seront baptisés. Et une nation, pour ainsi dire, naîtra en un jour (voir Ésaïe 66:8).

Et en ce jour-là, on dira des justes vivant à Jérusalem : « Bénis sont-ils, car ils ont été lavés dans le sang de l'Agneau ; et ce sont eux qui ont été dispersés et
rassemblés des quatre coins de la terre, et des contrées du nord, et participent à l'accomplissement de l'alliance que Dieu a faite avec leur père, Abraham. » (Éther 13:11)

Ainsi Juda sera rassemblé physiquement et spirituellement. Le rassemblement physique aura lieu à Jérusalem ; le rassemblement spirituel au véritable bercail de Dieu. Et la guerre et la destruction prendront fin.

Zacharie a écrit :


« Beaucoup de nations s'attacheront à l'Éternel en ce jour-là, et deviendront mon peuple. J'habiterai au milieu de toi, et tu sauras que l'Éternel des armées m'a envoyé vers toi.L'Éternel possédera Juda comme sa part dans la terre sainte, et il choisira encore Jérusalem. » (Zacharie 2:11-12)

« Ainsi parle l'Éternel : Je retourne à Sion, et je veux habiter au milieu de Jérusalem. Jérusalem sera appelée ville fidèle, et la montagne de l'Éternel des armées montagne sainte. » (Zacharie 8:3)

« On habitera dans son sein, et il n'y aura plus d'interdit ; Jérusalem sera en sécurité. » (Zacharie 14:11)


3. Jérusalem, les musulmans et l'Église

Jérusalem occupe une place importante d’un point de vue religieux, et il semble que plus une religion en fait une place importante, plus elle devient sacro-sainte dans l’esprit des autres. Bien sûr, il y a toujours de la place pour la coexistence, la coopération, la collaboration, la tolérance et même des arrangements, mais aucun stratagème politique ou religieux imaginable ne rendra jamais Jérusalem moins sacrée pour l’islam. Le statut de Jérusalem en tant que citadelle spirituelle de l’islam n’est pas négociable pour les musulmans.

L’islam ne nie le caractère sacré de Jérusalem à aucune religion, mais il craint qu’une entité politique quelconque puisse revendiquer l’exclusivité de la ville sainte. Un auteur déclare : « L'islam applaudit et félicite tous ceux qui, comme les musulmans, considèrent Jérusalem comme « bénie » en raison de ses associations avec de nombreux prophètes de Dieu, depuis Abraham jusqu'à Jésus, fils de Marie. Le problème de Jérusalem est de lui trouver un régime politique et culturel qui ne violerait les relations de la ville avec aucune des religions qui lui sont associées. » (Islamic Council of Europe, Jerusalem, the Key to World Peace, p. 103)

Aucune ville d’importance n’a jamais existé longtemps dans un vide politique, et Jérusalem ne fait pas exception. En théorie, l’absence d’un souverain politique crée, de par sa nature même, un vide – une invitation ouverte à des processus politiques qui seront bénéfiques ou qui opprimeront. Le problème est que parce que la domination juive ou chrétienne sur Jérusalem est inacceptable pour l’islam, et parce que l’internationalisation est également répréhensible pour l’islam, il ne semble pas exister d’alternative à une Jérusalem islamique, même si d’un point de vue politique elle ne l’est pas pour beaucoup de musulmans.

L’islam est disposé à gouverner Jérusalem de telle manière que le judaïsme et le christianisme puissent trouver leur pleine expression spirituelle. Les adeptes de l'islam évoquent des périodes au cours desquelles le judaïsme et le christianisme ont prospéré sous la domination islamique. Bien sûr, aucune des trois religions n’a un bilan parfait, et l’histoire montre aussi un côté sombre qu’aucune des trois ne souhaite rappeler. À mesure que chaque religion fait valoir ses arguments, elle accepte pour elle-même ce qu’elle refuse aux autres, exacerbant ainsi le problème. Personne n’est prêt à permettre à une religion de jouer un rôle dominant dans ce qui est considéré comme sa ville sainte. Il n’est pas non plus utile qu’un parti quelconque dénigre le rôle que Jérusalem a joué, historiquement, culturellement ou religieusement, dans le passé d’un autre.

La place de Jérusalem dans la théologie islamique ne se limite pas au voyage nocturne de Mahomet (le Miraj) ni à la myriade d'événements, sacrés et profanes, qui ont suivi, y compris le construction du magnifique sanctuaire islamique, ou mosquée, le Dôme du Rocher. Le plus important est peut-être l'importance de Jérusalem lorsque le monde tel que nous le connaissons touche à sa fin. Les associations eschatologiques islamiques avec Jérusalem sont peut-être encore plus importantes que les associations historiques (voir Werblowsky, Jerusalem: Holy City of Three Religions, p. 428). Ainsi, dans une religion où il n’y a pas de séparation de l’Église et de l’État, il y a très peu de place au compromis.

En bref, la pratique de certains qui tentent de montrer le rôle diminué de Jérusalem dans l’islam au fil des siècles est naïve. L'espace sacré ne perd pas son caractère sacré avec le temps ; elle n’est pas non plus diminuée par la démographie, la politique ou même la négligence.

Revivalisme religieux

Le renouveau religieux que connaît l'islam ajoute encore au caractère sacré de Jérusalem dans l'esprit des croyants. Tout comme le judaïsme et le christianisme connaissent leurs propres réveils, avec toutes la dévotion qui en découle pour les lieux et les événements sacrés, tout comme l'islam. Le renouveau religieux est un retour à l'orthodoxie. Elle peut être trouvée ou vérifiée par révélation divine ou en retournant à ses racines ancrées dans le passé. Tout comme le judaïsme a trouvé la rédemption en retournant à Jérusalem après une absence de deux mille ans (les historiens soulignent qu’au fil des siècles, il y a toujours eu un reste juif à Jérusalem, aussi petit soit-il, un fait qui donne du crédit à l’affirmation selon laquelle Jérusalem, à travers les âges, a conservé sa place centrale dans la pensée et la croyance juives), de même l’islam est certain d’avoir une plus grande emprise, spirituellement parlant, sur la Jérusalem du futur que sur la Jérusalem du passé. En d’autres termes, la place de Jérusalem dans l’islam continuera de croître, quelles que soient les exigences politiques.

Le christianisme cherchera aussi sa place au soleil. Jérusalem occupe une place importante dans la théologie chrétienne relative aux derniers jours. Bien que la plupart des chrétiens ne frappent pas pour le moment à la porte de Jérusalem, ils ne se contenteront pas non plus d'être laissés de côté ou mis de côté dans les délibérations sur l'avenir de Jérusalem. L’islam voit un allié dans les nations chrétiennes qui ont pris position contre une Jérusalem gouvernée par les Juifs, mais de nombreux chrétiens, malgré les positions adoptées par leurs gouvernements respectifs, se sont généralement rangés du côté du judaïsme sur la question de Jérusalem. Cette apparente dichotomie est due, en partie, à la croyance partagée par de nombreux chrétiens selon laquelle le rassemblement de Juda à Jérusalem dans les derniers jours est un signe des temps annonçant l’avènement du Messie. En d’autres termes, la position inflexible de l’islam sur Jérusalem pourrait être mise en péril par une coalition judéo-chrétienne. Cela soulève la question : où en sommes-nous en tant que saints des derniers jours ?

Les prophètes des temps modernes à propos de l'Islam

Tout au long du XVIIIe et jusqu’au XIXe siècle, la connaissance occidentale de l’islam était limitée et largement incorrecte. Les érudits occidentaux ont contribué à la confusion en promulguant les mensonges populaires de l’époque, parmi lesquels l’idée selon laquelle Mahomet aurait passé par l’épée tous ceux qui ne voulaient pas se convertir. Mais de nombreux dirigeants de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours ont pris le temps de se renseigner sur l’islam et de partager leurs idées spirituelles avec les membres de l’Église.

En 1855, George A. Smith prononça un discours dans lequel il dressa un tableau remarquablement précis de l’islam de son époque. Il enseignait, entre autres, que Mahomet descendait d'une lignée noble et qu'il était un descendant direct d'Ismaël, fils d'Abraham. Il a souligné qu'« il n'y avait rien dans sa religion [de Mahomet] qui autorise l'iniquité ou la corruption ; il prêchait les préceptes moraux enseignés par le Sauveur ». Ensuite Elder Smith a décrit avec précision la vie et les enseignements fondamentaux de Mahomet et a conclu sa description de Mahomet : « Or, cet homme descend d'Abraham et a sans aucun doute été suscité par Dieu dans le but de fouetter le monde à cause de son idolâtrie. » (Journal of Discourses, volume 3, p. 31-32)

Un autre des premiers dirigeants de l'Église, Parley P. Pratt, a également parlé de l'islam aux membres de l'Église, en commençant par mentionner les « nombreux  préjugés des Européens, Américains et chrétiens, dans leur religion et leur éducation » et en ajoutant : « J'ai examiné l'histoire de [Mohamet]. » Elder Pratt entreprit alors de corriger certains de ces préjugés en soulignant plusieurs cas dans lesquels l'islam semblait plus correct que les formes traditionnelles du christianisme : « L'histoire et la doctrine mahométanes étaient un standard élevé contre l'idolâtrie la plus corrompue et la plus abominable qui ait jamais perverti notre terre que l'on trouvait dans les croyances et le culte des chrétiens, faussement ainsi nommés. » Il poursuivit : « J’ai tendance à penser, dans l’ensemble… qu’ils [les musulmans] ont de meilleures mœurs et institutions que de nombreuses nations chrétiennes ; et dans de nombreuses localités, les normes morales sont élevées. » (Journal of Discourses, volume 3, p. 38, 40-41)

Par la suite, les Autorités générales de l'Église ont continué à parler des relations de l’Église avec l’islam. Le 15 février 1978, la Première Présidence a publié une déclaration réaffirmant la croyance de l'Église selon laquelle nous sommes tous « des enfants spirituels littéraux d'un Père éternel » ayant droit au même amour et aux mêmes bénédictions de sa part « indépendamment de nos croyances religieuses, de notre race ou de notre nationalité ». La déclaration souligne le rôle joué par « de grands chefs religieux tels que Mahomet, Confucius et les réformateurs » : « Les vérités morales leur ont été données par Dieu pour éclairer des nations entières et apporter un niveau plus élevé de compréhension aux individus. »

D’autres dirigeants de l’Église ont commenté notre responsabilité envers les musulmans en général et les Arabes en particulier, alors que notre interprétation des Écritures et nos croyances religieuses pourraient autrement sembler favoriser les Juifs (voir, par exemple, Kimball, Uttermost Parts of the Earth, p. 8).

Le mélange de la religion et de la politique conduit souvent aux émotions humaines les plus profondes et à des attachements intenses et à une dévotion tenace aux lieux et aux symboles. Les différents partis étant peu disposés à concéder ce qu'ils considèrent comme des questions de principe, comment devrions-nous, saints des derniers jours, voir les événements à Jérusalem ? Il semble y avoir une tendance humaine naturelle à prendre parti. Nous semblons croire qu'il y a un bien et un mal dans chaque situation. Mais la partialité peut engendrer des divisions et une fermeture d'esprit, une méfiance et inhiber une atmosphère de respect mutuel et de compréhension nécessaire à la paix. Si nous prenons parti dans un contexte politique, nous compromettons notre capacité à tendre la main aux deux parties.

Howard W. Hunter a longuement parlé de cette question dans un discours intitulé « Tous sont pareils pour Dieu ». Il a déclaré : « L'Église s'intéresse à tous les descendants d'Abraham, et nous devons nous rappeler que l'histoire des Arabes remonte à Abraham à travers son fils Ismaël. » Il a parlé de son souci que les saints des derniers jours ne donnent pas l'impression que l'Église favorise les objectifs des Juifs par rapport à ceux des Arabes : « Les Juifs et les Arabes sont tous enfants de notre Père. Ils sont tous enfants de la promesse, et en tant qu’Église nous ne prenons pas parti. Nous avons de l'amour et de l'intérêt pour chacun. L'objectif de l'Évangile de Jésus-Christ est d'apporter l’amour, l'unité et la fraternité de la nature la plus élevée. »

Le Centre d'Études du Proche-Orient de l'Université Brigham Young à Jérusalem

L’impressionnant Centre d'Études du Proche-Orient de l'Université Brigham Young a été délibérément construite sur un site qui borde psychologiquement, sinon physiquement, la Jérusalem arabe et juive. L'intention de son emplacement était symboliquement de combler le fossé entre deux antagonistes historiques. Les visionnaires pouvaient entrevoir le jour où l’Église et l’Université Brigham Young, agissant de concert, pourraient contribuer à instaurer une paix durable dans cette ville historiquement troublée.

Lors de la construction du Centre, des efforts ont été déployés pour garantir que les équipes de travail et les ingénieurs du chantier soient un mélange d'Arabes et d'Israéliens. Des efforts sont également déployés pour que la faculté représente les communautés juive, musulmane et chrétienne qui l'entourent. Le programme est également équilibré entre l’histoire, la culture et la politique juives et islamiques. Les cours obligatoires comprennent des cours sur l'islam ainsi que sur le judaïsme, et tous les étudiants doivent suivre un cours de langue en hébreu ou en arabe.

En plus des expériences individuelles informelles que vivent les étudiants avec leurs homologues arabes ou palestiniens à Jérusalem, ils effectuent des voyages d'études en Égypte et en Jordanie. Conformément aux propos de frère Hunter, tous les efforts sont déployés pour créer une symétrie et un équilibre dans les cours et les programmes offerts aux étudiants saints des derniers jours qui étudient au Centre. Pour la plupart des étudiants, il s’agit de leur première introduction au monde islamique.

Conclusion

Depuis les débuts de l’Église, les dirigeants ont regardé Mahomet et ses disciples avec amour et compréhension. Ils se sont efforcés de corriger les mensonges et les mythes sur l’islam et ont encouragé les membres de l’Église à éviter de se laisser emporter par les émotions suscitées par les crises au Proche-Orient. Leur message central au fil des années a été marqué par la tolérance envers tous les enfants de Dieu.

Nous pouvons aider à préparer le monde pour un millénaire de paix en enseignant et en vivant les principes de l'Évangile. Nous pouvons également aider à jeter les bases de la paix en connaissant et en respectant les diverses nations, leurs peuples, leur histoire, leur culture, leurs croyances religieuses et leur langue. Nous espérons que les saints des derniers jours contribueront à établir un pont de compréhension entre les musulmans et les juifs et que dans la mesure où nous regardons avec sympathie et compréhension des deux côtés, nous pouvons avoir une influence pour contribuer à l'instauration d'une paix juste, équitable et durable.

Même si la question de l'avenir politique de Jérusalem est incertaine, il est dans l’intérêt des trois grandes religions du monde de rechercher un modus vivendi qui ne compromettra pas les principes religieux mais permettra à la coexistence pacifique de régner jusqu’à ce que l’intercession divine joue un rôle médiateur une fois pour toutes.

(David Galbraith, Kelly Ogden et Andrew Skinner, Jerusalem, the eternal city, 1996, Deseret Book Company, p. 329-370)